Chapitre 32
Le Procès
Le procès de Lucius Malefoy, jugé trop subversif par le Magenmagot, fut mené à huis clos, dans le secret le plus total. Dans l'assistance, seuls quelques membres de l'Ordre étaient présents, dont les Weasley et Severus.
Ainsi que Dumbledore, le seul s'étant proposé de présenter ma défense. Le Survivant était également présent, assis à côté de mon fils.
Hermione Granger était assise à la droite du Survivant, mais elle semblait étrangement seule, isolée. Son regard ne me quitta pas de toute la séance.
Je fis mon entrée dans un silence mitigé, puis les chaînes s'enroulèrent autour de mes poignets et le manège commença.
Les chefs d'accusation se succédaient, et je voyais ma vie se dérouler devant mes yeux. Les meurtres que j'avais commis « au nom de l'Ordre » furent relégués dans l'oubli. Sans doutes ne furent-ils tout simplement pas dénoncés, ou bien ne voulait-on pas perdre de temps à juger l'assassinat d'individus de cette catégorie ? Je l'ignore encore.
Aucune présentation du jury, de la Défense ne fut faite. Ils semblaient tous très fatigués.
« - Lucius Gabriel Malefoy, vous aller être jugé ce soir pour les actes suivants : activité subversive visant à renverser l'organisation politique du monde sorcier, évasion, haute trahison de la communauté sorcière internationale, corruption d'employés du Ministère (il y eut un flottement dans l'assistance), enlèvement, usage de l'Imperium, torture... »
Je n'avais jamais vu, ni au Ministère, ni ailleurs le vieil homme barbu et tremblotant qui tenait lieu de chef de la Cour, et qui récitait la liste des accusations qui m'étaient portées d'une voix lasse.
Pour un criminel de mon envergure, est-il besoin de relever que seuls cinq membres du Magenmagot furent présents pour me juger ? Le monde sorcier était encore plongé dans le chaos, Fudge avait été assassiné quelques semaines avant la chute définitive du Lord Noir, et le gouvernement provisoire était formé d'un amusant ensemble d'anciens employés du Ministère et de membres de l'Ordre, si bien qu'il revient au même de dire que la situation était entièrement dans les mains de Dumbledore. Je fus jugé par cinq personnes, pas une de plus. Ainsi va la justice sorcière. Ce fut une grotesque simulation de procès.
Ce pendant la masse impressionnante de mes chefs d'accusation se retrouva presque réduite à néant par la dernière accusation qui me fut assenée :
« - Vous êtes également accusé de complicité de…De meurtre sur la personne de…Du Seigneur des Ténèbres. »
Il y eut quelques chuchotements en raclements de gorge autant au niveau de l'assistance que du jury. Tout le monde se retourna vers Harry Potter, qui s'obstinait à garder une expression neutre.
« - Monsieur Potter, souhaitez-vous témoigner… », commença le vieux sur un ton incertain…
« - Je doute que ce soit utile », trancha le Survivant d'une voix glaciale. « J'ai déjà répondu aux questions des Aurors, doutez-vous de ma parole ? », ajouta-t-il, menaçant.
« - En aucune manière, bien sûr », se hâta-t-il de répondre.
Mais quelle était donc cette comédie ? On aurait plutôt dit un dîner d'affaires qu'un procès.
« - Pouvons-nous en revenir aux faits ? », fit Dumbledore d'une voix basse mais claire.
« - Bien, bien, très bien… »
Je comprenais peu à peu…Dumbledore se servait du pouvoir qu'il avait temporairement pour faire juger à la hâte tous les membres de l'Ordre qui étaient mis en accusation, afin de faire acquitter tous ceux qui, inculpés, avaient pris part à la guerre à ses côtés. Joli cadeau d'adieu, ma foi…
La séance ne dura pas bien longtemps. Questions, réponses. Mensonges, serait plus vrai. Dumbledore m'avait à la hâte expliqué à quelles accusations mentir, ce qu'il me fallait dissimuler. L'accusation qui me fit étrangement le plus de mal fut celle de torture sur miss Hermione Granger. A l'époque de cette première « séance », elle n'était pas encore à moi, et juste après sa délivrance par l'Ordre du Phénix, elle avait bien sûr déposé plainte. Ce fut la seule chose pour laquelle j'éprouvai des remords. Mais j'aurais pu comprendre qu'elle en ait fait de même pour toutes les autres fois.
Les délibérations ne durèrent que quelques minutes. Je crois qu'ils étaient tous pressés de rentrer dormir.
Puis, la sentence.
« - Lucius Gabriel Malefoy, vous êtes théoriquement condamné à recevoir le châtiment suprême, vous deviez donc recevoir le Baiser Mortel. »
Dans l'assistance, quelqu'un soupira.
« - Cependant-le vieil homme barbu dont je ne connaissais toujours pas le nom jeta un regard désagréable à Dumbledore, au vu de l'impossibilité d'appliquer la peine capitale par défaut des créatures dites détraqueurs, et par changement imminent de la loi à ce sujet, et si l'on prend compte de votre engagement manifeste au sein de la Résistance et de votre rôle dans l'élimination de…Vous-savez-Qui… »
Il soupira, avant de me lancer un regard haineux. J'interrogeai Dumbledore du regard, mais celui-ci toujours paisiblement assis sur un banc de bois non loin de moi fixait le président du jury, et avait l'air de beaucoup s'amuser.
« - La peine d'emprisonnement à perpétuité étant une alternative peut-être un peu inappropriée–il jeta à nouveau un regard haineux à Dumbledore- et difficilement réalisable au vue des difficultés de détention que nous rencontrons actuellement, nous vous proposons si vous le souhaitez de quitter définitivement le territoire Britannique. Vous avez la possibilité de choisir l'exil. »
Mon ange…
Je la regardais.
Son regard ne m'avait pas quitté de toute l'audience.
Ses yeux rougis laissaient à présent échapper toutes leurs larmes, sans plus aucune retenue, sans se cacher. Je ne sais si les personnes présentes le remarquèrent.
Qu'est-ce que la mort, qu'est-ce que l'exil, que sont que le malheur et la solitude, quand un ange pleure pour vous ?
Je jetai un bref coup d'œil à Dumbledore. Il me fit signe d'accepter, mais j'avais déjà choisi.
Je me décidai à répondre :
« - Je choisis l'exil. »
Mais ma voix était étrangement basse.
« - Vous serez donc conduit dès ce soir à prendre un portoloin qui vous emmènera vers la nation de votre choix. Avez-vous une dernière déclaration à faire ?
Je m'en étais tiré, rien d'autre ne comptait.
La seule déclaration que je fis se passa silencieusement, elle se fit entre deux regards qui se disaient au-revoir, rien de plus. J'étais sauvé, sauvé de la prison, sauvé de la mort, c'était l'essentiel. Mais j'allais partir. Et ça, je l'avais mérité.
Et je ne pourrais jamais me venger, ça non…Quelque part, le bannissement est pire que la mort.
Je hais cette justice telle qu'elle est rendue.
Je la vis me dire au-revoir, avec ces yeux inoubliables que j'avais souvent vu se perdre dans la volupté que je lui procurais, dans des extases inconnues, et aussi dans la douleur qui avait, à quelques reprises, jailli de ma baguette magique pour aller étreindre sa chair. Maintenant, ces yeux pleuraient pour moi.
« - Aucune déclaration. »
Deux Aurors me raccompagnèrent à ma cellule. Un moment plus tard, Dumbledore vint me trouver.
« - C'était tout ce que j'ai pu négocier, vous devez comprendre qu'une grâce totale n'était pas envisageable… »
« - Je comprends. »
« - Tâchez de reconstruire votre vie, vous avez une deuxième chance, profitez-en. Evitez simplement de torturer les moldus, dans cette vie-là. »
Le bougre avait sourit.
« - Je ferai de mon mieux », lâchai-je. Il y eut un silence. « Je voudrais la voir. »
Il soupira.
« - Ne lui faites pas plus de mal que vous lui en ayez déjà fait. Elle va devoir faire son deuil de vous, Lucius, n'aggravez pas la situation. » Il avait pris un ton autoritaire de mise en garde, et cela eut le don de m'exaspérer.
« - Vous n'avez pas à vous en mêler », rétorquai-je, « c'est à moi qu'elle appartient ! »
« - C'est une erreur de penser que les êtres humains sont des biens, une véritable erreur, Lucius… », dit-il tranquillement.
« - Allez au diable, faites-la venir, c'est tout ce que je vous demande ! »
Il soupira.
J'étais exaspéré, et curieusement au bord des larmes.
Enfin il se leva.
« - Je vais vous l'envoyer. A tout-à-l'heure. »
Un long silence suivit, la solitude, puis on entra. Un froissement d'étoffe, une cape qui murmure de tout son tissu, et un visage qui apparaît derrière les barreaux. La porte qui donnait sur le couloir se referma magiquement derrière elle, mon ange, avec un claquement sec. Puis elle avança jusqu'aux barreaux de la cellule qui s'ouvrirent devant elle.
Elle s'avança vers moi. Debout, raide, je tentais de mémoriser cette image d'elle afin d'en nourrir mon esprit en des temps moins cléments. Je sentais déjà l'érection qui me gagnait, mais je m'efforçai de me maîtriser. C'était la dernière fois qu'elle me voyait avant…Avant longtemps, peut-être même pour toujours…La douleur de cette pensée me vrilla le cœur, et rien que cette idée eut pour effet de rendre mon érection encore plus intense, encore plus douloureuse.
« - Pas la peine d'essayer de vous contenir, monsieur Malefoy, vous ne trompez personne… », dit-elle d'une voix tendre où perçaient les larmes.
Je m'étais déjà jeté sur elle, et mon visage était enfoui avec délice dans son odeur, celle de son cou, de ses cheveux, de tout son corps écrasé contre moi, la tendresse de ses seins et la finesse délicate de sa taille…
« - Tu m'as manqué…Et tu vas me manquer », dit-elle dans un murmure qui se termina en sanglot. « Je voudrais que tu restes… »
C'était les plus belles choses qu'on m'ait jamais dites.
Pas question de le lui avouer, bien sûr, mais c'est un fait.
Ses larmes coulaient dans mon cou, et je réalisai combien dans mes bras elle semblait frêle et petite.
« - Je voudrais rester » fut la seule chose que je parvins à dire, en écho, avant de la serrer encore plus fort.
J'avais du mal à croire que tout allait s'arrêter là, dans cette cellule dégoûtante, dans ce cachot sombre et lugubre, que je n'allais jamais revenir, jamais la revoir. Non, je n'ai jamais vraiment renoncé, pas une seconde, en fait.
« - C'est une chance que tu aies le droit de partir. Tu aurais pu être condamné. », me dit-elle tendrement.
« - Je ne sais pas. » Il y eut un silence. « Je t'ai vue pleurer, pendant le procès. »
« - Je suis désolée… »
« - Non, ça m'a fait plaisir. »
Elle ne répondit pas.
« - Ils ont dû te voir, ils vont avoir des soupçons, tu ne crois pas ? »
« - Je voudrais qu'ils en aient, des soupçons, je voudrais qu'ils sachent tout. » Elle me foudroya du regard. « Tout. Et même ce qu'ils ne sauront jamais », ajouta-t-elle à voix basse. « Si je n'ai rien dit jusqu'à maintenant, c'était pour te protéger. »
« - Me protéger… »
Elle passa ses mains entre nous, et détacha le premier bouton de ma chemise, la toile grossière de l'uniforme des prisonniers, et en approcha son visage. Je sentis la fraîcheur de ses lèvres et de la pointe de son nez contre ma peau, ce contact devenir de plus en plus brûlant, la caresse de son souffle à cet endroit trop sensible à la base du cou.
Elle passa une main dans mon dos.
« - Tes cheveux sont emmêlés… »
Elle ajouta.
« - J'aime ton odeur… »
« - Elle n'est pas exemplaire, ces temps-ci », précisai-je.
« - Non…tu sens toujours très bon… », soupira t-elle.
« - Mon ange… »
Je ne compris pas immédiatement ce qu'elle était entrain de faire, dans la pénombre, puis je sentis qu'elle avait commencé à dégrafer l'attache de sa cape, mais avant que j'aie pu dire quoi que ce soit, elle parla :
« - Je finis mes études dans moins de quatre mois, je te rejoindrai, où que tu sois… »
« - C'est hors de question », dis-je soudain.
Elle se recula promptement, en proie au choc.
« - Pourquoi dis-tu cela ! »
« - Je n'ai rien à t'offrir qu'une vie d'errance, j'ai perdu ma fortune et ma place dans le monde sorcier, en tout cas dans ce pays, et ce n'est pas ce que je veux t'offrir. »
« - Je prendrai ce que tu me donneras », dit-elle en s'avançant vers moi, prenant une de mes mains dans la sienne.
Ses lèvres chaudes entrèrent en contact avec l'extrémité glacée de mes doigts.
« - Je n'ai rien à t'offrir. »
« - Ca m'est égal. Et le monde est vaste, ce pays n'est pas le seul où l'on puisse être heureux. »
« - Le monde n'existe pas, mon ange. Je n'ai rien qui m'attende, nulle part. Tu mérites mieux qu'une vie misérable. »
« - Tais-toi. »
Elle avait passé sa main entre nous deux et avait pleinement saisi ce qui se trouvait à mon entrejambe.
« - Il est temps que tu m'obéisse à ton tour, n'est-ce pas? »
Je souris. Qu'allait-elle donc…
« - Nous n'allons plus nous revoir de quelques temps », dit-elle d'une voix qu'elle voulait ferme, « et nous n'avons plus de temps à perdre. »
Elle ouvrit brutalement ma chemise, et j'entendis un bruit de tissu déchiré. J'étais curieux. Sa bouche vorace se jeta sur mon cou et j'étais certain que ma peau porterait le lendemain de jolies marques violacées, et même quelques coupures…Mais demain…C'était incroyablement loin.
J'avançai mes mains pour la débarrasser de ses propres vêtements quand elle m'arrêta.
« - Nous n'avons pas le temps. Je n'ai pu négocier qu'une vingtaine de minutes… », souffla t-elle avant de me lancer un regard infernal.
« - Très bien… »
Je la plaquai alors contre un de ces murs dégoûtants et remontai à la hâte la robe qu'elle portait, ma main rampant fébrilement le long de sa cuisse qu'elle releva tout contre ma hanche, avant d'enrouler ses jambes autour de moi, avant que je ne la soulève dans le même élan.
Je passai une main sous ses vêtements et caressai un instant la peau douce de son dos, ses seins emprisonnés dans leur tissu maudit, et elle me chuchota à l'oreille de me presser, qu'elle ne voulait pas attendre…Qu'elle me voulait tout de suite…
Ma bouche se jeta sur la sienne, et alors que je mordais impitoyablement ses lèvres, j'écrasai son bassin contre la paroi de pierre et la pénétrai sans cérémonie. C'était du gâchis de faire ainsi les choses, mais elle l'avait voulu, et nous n'avions pas le loisir de nous attarder. Nous allions être séparés, Merlin seul savait pour combien de temps, et c'était la dernière fois peut-être que j'aurais l'extase de goûter à sa chair.
Elle laissa échapper un cri, à la fois de douleur et de surprise, eus-je l'impression, et je recommençai le même mouvement jusqu'à ce qu'elle en gémisse de plaisir, puis pousse un cri que je retins d'un baiser, priant pour ne pas qu'on nous entende au-delà des voûtes de cette cellule, et de la porte cloutée qui laissait entrer les visiteurs.
Son corps s'agita avec le mien, son visage en sueur contrastant magnifiquement avec le mur de pierres foncées contre lequel était appuyée sa tête, ses mains se crispèrent sur mes épaules encore à moitié vêtues de mon habit de détenu, et quand elle se mit à onduler furieusement, respirant de plus en plus fort, ses ongles se plantèrent purement et simplement dans ma peau avec un pincement délicieux.
Mes allées-et-venues se firent plus intenses, plus profondes. L'extase ne se fit pas attendre, et je jouis alors dans son ventre brûlant en un des orgasmes les plus violents que j'avais connus jusqu'alors, mordant à pleines dents dans la chair divine de ce cou qui m'était offert, et elle poussa à nouveau un cri que je retins d'une main sur sa bouche…la sensation d'interdit étant décuplée par les circonstances, et cet interdit décuplant à son tour le plaisir que je ressentais. J'étais dans les cachots du Ministère, entrain de faire l'amour (ou bien était-ce de la fornication brute ?) à une fille qui avait l'âge de mon fils et encore étudiante à Poudlard. Une Gryffondor, Sang-de-Bourbe, et qui avait sur moi un pouvoir démoniaque. Je me démenais dans un état de péché intégral, encore une fois.
Finalement, j'étais tout-à-fait en accord avec cette bonne vieille nature ancestrale de Serpentard.
