Un an passa. Je n'eus jamais de nouvelles d'Auron, et je n'en cherchais pas. Je sentais bien que j'avais fait une bêtise, j'étais trop jeune. Quand j'étais rentrée ce matin-là, Frangin m'avait regardée sévèrement, mais n'avait rien dit. Nous n'en avions jamais reparlé. Pendant cette année, les conditions de vie devirent de plus en plus difficiles pour les Al-bedhs. Nous étions reniés, traités d'hérétiques par les Yevonistes. Même si je ne comprenais pas toutes les tensions politiques, je sentais que quelque chose d'irréversible se préparait. De plus, Sin était revenu pour nous punir. De nombreux pèlerinages pour le vaincre avaient été entrepris, en particulier celui de ma cousine Yuna. Je ne l'avais jamais vue, mais je la connaissais par l'intermédiaire de mon père qui avait toujours gardé un œil sur la fille de sa défunte sœur. C'est pour ça que je ne fus pas étonnée quand il m'appela un matin avec les jeunes Al-bedhs pour nous faire part de ses craintes au sujet de sa nièce.
- Camarades, l'heure est grave. Comme vous le savez, Sin est de retour, détruisant villes et vies. De nombreux invokeurs ont entrepris le long pèlerinage de la victoire sur Sin. Vous êtes bien entendu au courant du départ de ma nièce, Yuna, de Besaid. Cette petite, prometteuse, est déjà passée par le temple de Djose. Or, je ne veux en aucun cas qu'elle parvienne à la fin de son pèlerinage, car vous savez tous ce que cela signifierait pour elle…
- Bien sûr chef, murmura Poto. Nous ne pouvons laisser passer ça. Il faut la sauver, comme nous avons sauvé les autres invokeurs.
- Oui, et c'est pour ça que je vous ai réuni ici. La petite est têtue, comme sa mère, elle ne nous suivra pas facilement. C'est pour ça qu'il faut utiliser la manière forte. Poto et son équipe, vous allez mettre au point une machine sous-marine, possédant une capsule pour l'enfermer et lui permettre de respirer, ainsi que des fonctions défensives. Vous pouvez me faire ça?
- Bien sûr! D'ici deux jours elle devrait être au point, si nous utilisons la vieille pelleteuse.
- Voilà enfin une idée pour se débarrasser de cette vieillerie. Mais maintenant, il faut décider qui mènera à bien cette mission.
Les respirations se suspendirent.
- Et j'ai pensé à toi, Rikku…
- Moi? Pourquoi moi?
- Parce que je te fais assez confiance pour me ramener ma nièce saine et sauve. A présent, si la mission devait mal se passer, ce serait plus facile pour toi de lui expliquer et de devenir son gardien, ce qui serait encore le meilleur moyen de veiller sur elle.
- Mais, crois-tu que j'en sois capable?
- Tu es ma fille, et tu es surtout la fille de la femme que j'ai aimé, qui fut la femme la plus admirable de toutes les dynasties Al-bedhs… Allez, ne discute pas, j'ai besoin de toi sur cette mission, je sais que tu t'en sortiras très bien.
Mon père clapa des mains pour annoncer la fin de la réunion. Je rentrai dans ma chambre et allais préparer mes affaires. Même si j'étais très excitée à l'idée de réaliser ma première mission, j'avais peur d'échouer, je me sentais tellement inexpérimentée! Je sortis ma combinaison de plongée et mes bouteilles à oxygène. J'entendis frapper:
- Oui?
- C'est Frangin.
- Entre.
- Tu prépares déjà tes affaires?
- Oui, je dois être prête pour ma première mission!
- Mais tu pars après-demain! Tu ne préfères pas aller combattre les monstres du désert avec Poto et Nyaka?
- Oui, c'est une très bonne idée!
Nous combattîmes toute la journée, pour parfaire notre technique d'attaque. Quand je rentrais le soir j'étais crevée et m'endormis comme une souche pour me réveiller le lendemain à midi.
- Ce n'est pas très sérieuxça! Ria Nyaka en me voyant ouvrir péniblement les yeux.
- Qu'est-ce que tu fais là? Demandais-je d'une voix encore ensommeillée.
- Je t'apporte le petit déjeuner.
- Comme c'est gentil!
- Et puis ça fait longtemps qu'on n'a pas parlé les deux, non?
- C'est vrai… Ça fait…
- Un an.
- Juste.
- Je voulais savoir comment tu allais, si cette première expérience avait été fructueuse… Enfin, si ça ne te dérange pas d'en parler!
- Pas du tout. En fait, je pense que j'étais trop jeune, parce qu'après je suis sorti avec des types à qui il a fallut tout expliquer. Mais je n'ai jamais dit qui avait été le premier.
- Pourquoi?
- Je sens que ça doit rester pour moi. Je ne sais pas pourquoi, mais je ne veux pas en parler avec d'autres hommes. Pourtant j'ai eu une première fois extraordinaire…
- Ah oui?
- Il a été parfait, vraiment parfait. On n'avait l'impression qu'il revivait. Disons que la sensation d'avoir un tel effet sur un homme adoucit l'acte.
- C'est vrai, tu as raison… Bon, sinon ça va maintenant?
- Oui ça va bien. Je sors d'une relation un peu difficile, avec Gippel. Tu le connais, n'est-ce pas?
- Très bien.
Ça s'est plutôt mal terminé avec lui. Il était trop je-m'en-foutiste, trop cool. Moi j'avais besoin d'attention, qu'il s'occupe de moi. Mais il ne pensait qu'à déconner. Alors je suis partie, et c'est quand je suis partie qu'il s'est rendu compte à quel point il m'aimait. Enfin, c'est ce qu'il a dit. Maintenant j'ai trop peur de le croire.
- Parce que tu l'aimes?
- C'est celui que j'ai le plus aimé, mais je ne sais pas, quelque chose m'empêche de lui donner ce verbe.
- C'est que tu ne l'aimes pas, tout simplement. Tu as le temps avant de rencontrer l'amour.
- En effet, ce n'est pas pressant.
- Et oui… Bon, je vais te laisser préparer tes affaires. Puis Poto aimerait bien que tu ailles essayer la machine.
La machine marchait très bien, pourtant Poto réussi à me garder deux heures pour tout m'expliquer, pendant qu'il plongeait le regard dans mon décolleté. Il n'avait rien perdu de sa finesse légendaire celui-là… Quand je pus enfin m'échapper, j'allai voir mon père pour lui dire au-revoir avant d'aller manger et me coucher.
Le lendemain, le soleil n'était pas encore levé quand je partis. Il fallait être avant midi dans le fleuve du Sélénos, heure du trajet du Schoopuf. En plus cette machine faisait un bruit affreux, Poto n'était pas si doué que ça… Finalement je plongeais avec mon gros attirail dans le fleuve, et le conduisis au milieu du fleuve, mais me cognai contre le Schoopuf. Mince! Il fallait faire vite à présent. Je sortis de la capsule et grimpais sur le dos du Schoopuf et sautait dans la cabine. Un manteau rouge tenta de me barrer le chemin, mais je l'esquivais et attrapais Yuna avant de retomber dans l'eau. Je la prenais dans la capsule.
- Mais que se passe-t-il? Criait-elle.
- Rien de bien grave, Yunie, tu me remercieras plus tard…
- Mais je veux sortir!
BOUM!
- On dirait que tes gardiens sont plus tenaces que prévu…
Par le hublots, je vis un joueur de blitzball arriver pour me jeter sa balle dessus. Et, fais attention à la machine! Je répondis par un coup droit du bras de la machine. Mais un jeune homme s'attaqua à mon bras et le mit hors d'état de marche. Ce jeune garçon… je l'avais déjà vu quelque part. Oui, c'était Tidus, le fou qui prétendait venir de Zanarkand et que j'avais sauvé quelques semaines plus tôt. Ben il avait de drôles de manières de me remercier! Même si ça me faisait de la peine de lui faire du mal, il fallait que je ramène Yuna. Malheureusement le combat tourna très mal quand mon deuxième bras fut hors d'état de marche. Sans défenses ni attaques, il ne restait plus que la fuite, mais Yuna se jeta sur moi, m'empêchant la moindre manœuvre. La machine explosa, et je fus expulsée sur le rivage. Je pus juste voir Yuna remonter dans la cabine dans les bras de Tidus avant de sentir mes paupières se fermer…
