Chapitre 2 : la stagiaire
Bouche bée, Trunk observa la jeune fille. Elle agitait ses bras dans les airs comme une idiote. Et à vrai dire, il ne comprenait même pas l'utilité de ses gestes. Il aurait peut-être fallu ramasser les feuilles dispersées sur le sol plutôt que de tenter vainement de les rattraper au vol. Elle était blonde ce qui expliquait sûrement la raison pour laquelle elle agissait aussi stupidement.
Il examina plus en détail ce phénomène. Un crayon maintenait maladroitement ses cheveux en place (oui, un crayon de papier). Autant dire que sa coiffure ne conviendrait pas à l'ancienne nounou de Bra, une femme sévère et au chignon toujours tiré jusqu'à l'extrême. Il n'avait jamais apprécié cette bonne femme et elle non plus d'ailleurs. Elle le rendait toujours responsable du comportement insolent et impoli de Bra. En vérité, c'est parce qu'elle ne tenait pas à accuser directement Végéta. Il l'aurait expédiée direct dans une autre galaxie.
Bref, il ne comptait pas les mèches rebelles qui se dégageaient de sa coiffure et tombaient le long de sa nuque. Son visage révélait à peine les traces du maquillage et, à bien regarder, pas du tout si on ne comptait pas le gloss qui illuminait ses lèvres. Elle portait un tailleur sombre et une chemise blanche. Un détail le fit sourire. La demoiselle se tenait maladroitement sur des talons. Sûrement, une adepte des baskets.
Voilà la description de cette étrange créature qui s'était enfin décidée à s'agenouiller pour ramasser ses feuilles. Elle soupirait tout en pestant contre sa maladresse. Trunk voulut lui faire remarquer que seul le coup de vent était à mettre en cause, mais il se retient. Après tout, il ne voyait pas pourquoi il jouerait les gentlemen. Néanmoins, il se mit à genoux pour l'aider. Il le fallait bien pour qu'elle reparte de son bureau et qu'il puisse s'enfuir de là.
Dès qu'il tendit la main pour saisir une feuille, elle lui tapa le dos de la main.
Elle leva alors ses yeux bleu clair et vit le regard hagard de Trunk. Elle comprit alors qu'elle venait de frapper son patron. Quelle idiote !
- Je... Je suis... Je suis désolée, baragouina-t-elle. Oh, monsieur, je suis confuse ! Je ne pensais pas me trouver dans votre bureau. Il se trouve que je me dirigeais vers le celle du DRH et j'ai dû me tromper. Il faut dire que c'est tellement grand et tout se ressemble. Vous auriez dû décorer différemment les différends étages pour éviter ce genre d'inconvénient. Et puis, si j'avais trouvé la secrétaire derrière son bureau, tout cela ne serait pas arrivé. Sûrement à cause de sa pause café. Au fait, je vous ai dit que je m'excusais ? Parce que...
- J'ai entendu ! dit-il pour couper court à son monologue.
Elle me fatigue déjà celle-là. C'est un vrai moulin à parole. Elle est pire que Chichi et ma mère, réunies. Mon Dieu, faîte qu'elle s'en aille au plus vite.
- C'est mon premier jour et il a fallu que je fasse une énorme bourde. C'est tout moi, ça !
- Vous savez quoi, je vous propose de retourner à votre poste. Je demanderai à ma secrétaire de ramasser tout ça et...
- C'est hors de question ! le coupa-t-elle horrifiée par la proposition. Le DRH me tuerait. J'ai pris beaucoup trop de retard en une seule journée de stage, et…
- Vous êtes stagiaire ?
- Je ne vous l'avais pas dit ? Alors c'est que je ne me suis pas présentée à vous. C'est une faute que je dois immédiatement réparer.
Elle se leva et lui tendit la main, en souriant. Etrangement, ce sourire lui fit une étrange sensation. Il secoua la tête pour l'oublier.
- Je m'appelle Lynn Scot, Lynnie pour les intimes. J'ai dix-huit ans. Et je profite de mes vacances pour effectuer un stage obligatoire pour mes études. Je suis du signe des Gémeaux... (Feylie : Devinez quoi, je suis du signe des gémeaux. Trunk : tout le monde s'en fout. Feylie : Gomen ne pour cette interruption ;)
Voilà pourquoi elle parle trop.
- ... Et donc je vous remercie de m'avoir accueillie au sein de cette prestigieuse compagnie. Je tenterai au cours de ces deux mois...
- Deux mois ?! cria-t-il.
- Cela vous pose-t-il un problème ? Pourtant le DRH m'avait...
- Non, ce n'est pas ça. Seulement...
Seulement, j'imagine déjà ces deux mois avec elle dans mes bureaux. Elle va rendre mes salariés complètement dingues. Qu'est-ce qu'il lui a pris à Toryama de la prendre dans la compagnie ? Il a expédié son entretien en trois secondes ou quoi ?
- ... Vous êtes donc d'accord ?
- Euh, oui.
- Merci ! Merci ! Vraiment, je vous remercie !
Mais pourquoi elle me remercie. Qu'est-ce que je lui ai dit ? Et puis, zut ! Pourquoi je me prends la tête avec ça. Je suis le patron, non ? J'ai qu'à la virer de mon bureau et c'est tout.
Il n'eut pas à jeter la jeune fille. Avec les quelques feuilles qu'elle avait entre les mains, elle sortit en coup de vent sans un au revoir.
Comme un idiot, Trunk demeura pantois devant le départ de cet étrange ouragan. Ce fut la sonnerie de son portable qui le réveilla de sa torpeur. Il le sortit de sa poche et répondit :
" Allô ?
- C'est Songoten.
- Qu'est ce que tu veux ?
- T'as l'air vachement heureux de m'entendre. Je te dérange ?
- Non. Je suis seulement un peu secoué.
- Bon, tu m'expliqueras tout ça ce soir. Tu viens toujours, hein ?
- J'sais pas.
- Allez ! le pria-t-il. Sérieux, à trente piges, tu squatteras déjà les hospices pour vieux. Bouge-toi, un peu, Trunk.
- D'accord, concéda-t-il. On dit vingt-trois heures.
- Génial, mon frère !"
Il raccrocha.
Après tout ça, j'ai plus envie de bouger d'ici, moi. Je suis démoralisé sans savoir vraiment pourquoi. C'est Songoten qui a raison. Je vais certainement vieillir plus vite que les autres jeunes de mon âge si ça continue.
L'après-midi passa lentement sans autre accroche. Lorsque enfin, il put quitter sa casquette de PDG, il était presque vingt heures. Il avait remis au lendemain l'examen de certains dossiers.
Il rejoignit sa voiture de fonction. Son chauffeur, qui répondait au nom d'Harris, lui ouvrit la portière arrière. Il le remercia puis lança négligemment sa sacoche sur la banquette avant de s'y asseoir. Et pendant tout le trajet, qui le conduisait jusqu'à chez lui, il garda la bouche obstinément close alors que de coutume, il adorait conversait avec son chauffeur.
La voiture s'arrêta. Il n'attendit pas le chauffeur pour ouvrir la portière et sortir. Il lança un " à demain " puis s'engagea vers l'allée qui menait vers la maison. Il s'apprêtait à frapper lorsque la porte s'ouvrit sur une femme aux cheveux blonds et aux larges sourires. Dans sa main, droite, elle tenait un plateau chargé de petits gâteaux.
- Oh, mon chéri ! Tu as passé une bonne journée ?
- Oui, grand-mère.
- Veux-tu que je te prépare un thé ou un café pour accompagner mes gâteaux ?
- Non, dit-il en entrant. Je vais attendre le dîner.
- Ca tombe bien, il est bientôt prêt, déclara Bulma en passant dans le couloir. Tu as le temps de te changer.
Trunk marcha en direction de sa chambre. La maison était tellement grande qu'un inconnu se serait perdu, et même les habitués s'égaraient quelques fois. Il dormait dans une aile éloignée des appartements de ses parents et de sa soeur. Par contre, lorsque ses grands-parents venaient leur rendre visite, comme aujourd'hui, il n'était pas rare que ces derniers s'installent non loin de sa chambre.
Il se défit de ses vêtements et passa dans la salle de bain. La lassitude morale était plus difficile à évacuer que la fatigue physique. Au bout de dix minutes sous la douche, il y mit un terme. Une serviette autour de la taille, il sortit de la salle de bain. Il fouilla rapidement dans son immense dressing et sortit des vêtements. Ensuite, il quitta sa chambre et se rendit vers la salle à manger.
Autour de la table, ses grands-parents étaient déjà installés. Mais nulle trace de son père et de Bra. Il s'assit en face de sa mère.
- Tu n'as pas l'air dans ton assiette, mon chéri, dit-elle en lui soulevant le menton.
- C'est parce qu'il manque d'exercice, rétorqua une voix masculine.
- Végéta, s'il te plait.
- C'est la vérité, dit-il en s'installant. Ça lui permettrait de canaliser son énergie.
- Papa a raison, concéda Trunk.
- Quoi ? s'étonnèrent les deux parents.
Quand soudain un ouragan traversa la salle à manger.
- Maman ! Regarde ce que papa m'a acheté !
- Attends, Bra, lui signifia Bulma. Nous parlions avec ton frère.
- Mais, maman ! T'imagines pas à quel point c'est important pour moi !
- Entendu, soupira-t-elle. Dis-nous ce que ton père t'a acheté.
- Tu te souviens des bottes roses dont je te parlais hier. Figure-toi que grâce à papa, j'ai pu les avoir avant mes copines ! Tadaaaah ! dit-elle en lui mettant les dites bottes devant les yeux.
- Je croyais qu'elles étaient en rupture de stock et qu'ils n'auraient les nouvelles commandes que dans une semaine ?
- Oui, et bien papa m'a accompagné jusqu'à l'autre bout de la planète pour dénicher une de ses fameuses paires, fanfaronne-t-elle en mettant son bras sous celui de son père. Je suis si heureuse !
- Un rien te met dans tous tes états, ironisa Trunk. Et puis, quelle idée de mettre des bottes en plein été ? Les stars vous font mettre n'importe quoi. Bientôt, tu sortiras en combinaison pour aller sur la plage.
- Ca va toi, c'est pas parce que t'es de mauvaise humeur que tu dois gâcher le bonheur des autres, répliqua Bra.
Elle entoura les épaules de son père et posa un baiser sur sa joue. Gêné, Végéta rougit légèrement. Bulma éclata de rire et l'hilarité gagna toute la famille, sauf Trunk.
C'est vraiment chiant les ados. Bra se ramène et voilà que le monde doit tourner obligatoirement autour d'elle. Et papa qui joue le jeu en cautionnement ses caprices. J'aurais été son père, je lui aurais foutu une taloche à cette gamine. Et ses bottes, elle les aurait rêvé durant un bon moment, juste le temps que la mode passe. Et pendant ce temps, on m'oublie. Mon problème était vachement plus important que son histoire de botte, non ? J'en ai marre ! Y'en a toujours que pour elle. Attends, c'est de la jalousie, là. Je suis plus un môme, moi. Rhaaaah ! Je suis H.S.
Il expédia le dîner en cinq minutes. Son appétit n'était pas au rendez-vous et les conversations autour de la table se finissaient fatalement sur Bra. Il se leva sous l'oeil perplexe de Bulma, puis quitta la salle à manger.
Il était un peu tôt mais il décida tout de même de se rendre chez Songoten. Il pourrait siroter un verre avant d'aller en boîte et, du même coup, lui raconter sa journée.
- Tu ne l'as pas trouvé bizarre ?
- Pourquoi s'en faire ? C'est un grand garçon après tout. Je suis content qu'il ait compris la nécessité de s'entraîner. Ca prouve qu'il mûrit.
- Je ne vois pas le rapport, rétorqua Bulma.
- Moi, si. Je vais dans la salle d'entraînement. Que personne ne me dérange.
- Pas même Bra ? lança-t-elle, espiègle.
Végéta ne répondit pas et marcha les mains dans les poches dans le couloir. C'était fou de voir à quel point Végéta s'était transformé en vrai papa poule avec sa fille. Hélas, elle grandissait et bientôt sa petite fille trouverait d'autres bras pour s'y blottir. Elle n'osait même pas imaginer de quelle manière, Végéta accueillerait le petit ami de Bra. Le pauvre ! Elle le plaignait déjà.
- Il n'y a qu'à toi, que ça arrive ce genre de truc !
Devant la mine moqueuse de Songoten, Trunk se renfrogna. Il venait de lui raconter l'épisode avec la stagiaire et son ami ne trouvait rien de mieux que de plaisanter dessus. Il fixa son regard sur son coca pour voir le dernier glaçon se dissoudre.
- Logiquement, t'auras pas trop à la croiser, vu que c'est une simple stagiaire. Tu restes dans ton bureau avec tes paperasses et le tour est joué.
- Je sais, mais c'est le moral de mes salariés qui me préoccupe. Un climat trop stressant peut nuire à leur productivité. Et cette fille est vraiment une source de stress dès qu'elle ouvre la bouche. J'en ai encore des migraines.
Pour appuyer ses dires, Trunk se massa les tempes.
- Elle était jolie, au moins ? reprit Songoten, toujours aussi intéressé.
- J'en sais rien !
- Oh, le mytho ! Tu vas me dire qu'elle est restée dix bonnes minutes, voir plus, dans ton bureau, et que toi, tu ne l'as même pas regardée ?
- J'avais d'autres choses en tête.
En fait, elle est très jolie. Mais ça il n'a pas besoin de le savoir. Il serait capable de venir voir le spécimen. Et j'ai vraiment pas besoin qu'il la drague. Ce serait l'enfer s'ils sortaient ensemble. Lynn ne me lâcherait plus aussi bien au travail qu'en privé. Ah, non pas question !
- Je crois qu'elle porte des lunettes. Elle a un appareil. Et ses cheveux sont pleins de pellicules. Je t'ai dit qu'elle avait aussi un défaut de prononciation ?
- C'est une blague ? fit Songoten avec un air suspicieux.
- Non. Pourquoi ?
- J'ai l'impression que t'essaies de m'en dégoûter.
- Pourquoi je ferai ça ? J'la connais pas à ce que je sache. Et puis, j'ai pas de vue sur elle. Remarque si tu veux un rendez-vous, je lui demanderai pour toi.
- Ah, non ! Je gère très bien ma vie sentimentale.
Lynn se débarrassa de ses talons dans les vestibules et jeta négligemment sa veste dans le salon. Tout en ôtant le crayon de se cheveux et la perruque blonde - ses cheveux bruns retombèrent en cascade derrière son dos, tandis que d'autre encadraient son visage -, elle s'assit sur son canapé blanc, en posant ses pieds sur la table basse en verre.
Son loft ressemblait à un paquet de bonbons, décoré dans un style art déco, et rempli de bougies parfumées aux senteurs de fleurs et de babioles Hello Kitty. Sa chambre ne manquait pas non plus de gaieté entre ses peluches, parsemant sa commode et son lit. Bien que son corps et son esprit ait mûrit un peu trop vite, au plus profond de son âme, elle restait la petite fille qui avait dû dire, trop tôt, « au revoir » à son enfance.
Elle s'allongea et ferma les yeux. Dure journée. Elle détestait les premiers jours de ses missions. Il fallait toujours se montrer attentive et vigilante aux moindres détails concernant son identité et son caractère. Jouer une centaine de personnages l'amusait mais cela devenait éreintant, à la longue, pour le cerveau. Une vraie gymnastique ! Et il fallait prier pour ne pas rencontrer une ancienne connaissance qui aurait vendu la mèche trop tôt.
Pour un premier jour, elle n'avait commis aucune faute. Le DRH dans sa poche, la secrétaire bientôt viré, les lieux bien en mémoire. Désormais, son principal objectif était le patron. Elle ne comprenait pas pourquoi il résistait aussi bien à son charme. D'accord, ce n'était que le premier jour, mais elle sentait que la première approche n'avait pas été aussi bien réussie qu'elle se l'imaginait. Pourtant, d'après ses sources, Trunk ne fréquentait que des blondes assez futiles et peu futées. Il aurait logiquement dû tomber en pâmoison devant elle. Qu'est-ce qui n'avait pas marché ? Peut-être le manque de maquillage. Elle rechignait toujours à en mettre des tonnes par crainte de ressembler à un clown. Si ce n'était que cela, demain elle mettrait un bon coup de rouge à lèvre et tout l'attirail nécessaire.
Le téléphone sonna alors. Elle attendit qu'il sonne trois fois avant de tendre la main vers la table près du canapé et de répondre sobrement : " Wildcat est dans le chenil. Les petits sont apprivoisés. Le père reste réticent mais pas pour longtemps. Phase deux amorcé."
Puis, elle raccrocha.
chat sauvage
