Gardien - Angel

Angel
Cela ne signifie pas grand' chose
Cela ne signifie pas rien du tout
La vie que j'ai laissée derrière moi
Est une chambre froide

J'ai traversé la dernière ligne
D'où je ne peux revenir
Où chaque pas dans la foi
Me trahi

Tu m'as accepté
Sans poser de question
Tu as balayé la laideur
Qui m'entoure

Es-tu un ange ?
Suis-je déjà si loin ?

Le sommeil était ensuite évasif, un poisson argenté glissant de mes mains à chaque fois que je l'attrapais presque. Serra était à peine moins agitée ; dormir avec elle n'avait pas été le bonheur serein que je m'étais permis d'imaginer à de rares occasions. Elle se débattait maintenant dans les rêves, plus d'une fois elle m'avait envoyé un coude dans une paroi abdominale qui n'était plus aussi dure qu'elle l'avait été une fois. Oh, je ne devenais pas gras, pas encore, mais la vie avec elle me rendait mou.

Est-ce que cela me touchait ? Non.

Je ne pouvais me souvenir d'un moment de mon vivant où je ne m'entraînais pas pour la guerre. Etait-ce donc cela une vie en temps de paix ? J'aurais pris dans mes bras à n'importe quel instant cette nouvelle quiétude, au-dessus des muscles tendus, constamment noués par la tension et l'appréhension du combat suivant qui guettait à tout instant, prêt à surgir et attaquer avec des griffes aiguisées comme des rasoirs.

Peu importe, le seul moyen d'éviter les dangereux genoux et coudes était de rester suffisamment proche, niché confortablement contre elle et je m'en fichais pas bien mal. Elle se calmait lorsque je l'attirais contre moi, l'enfouissant dans mon cou. Puis elle marmonna un mot à peine intelligible qui gela mon cœur—

« Jecht. »

J'arrêtais de respirer, tué par un nom.

Jusqu'à qu'elle expire encore, endormie, « Auron.. ».

Je respirais à nouveau, enregistrant à peine le léger resserrement de ses bras qui m'entouraient. Ses lèvres étaient des ailes de papillons contre ma gorge.

« T'aime », dit-elle, clairement, sincèrement.

Mais auquel des deux s'adressait-elle ? Quelle était notre relation maintenant ? Pas des amants, mais plus que des amis. Je ne souhaitais rien de plus que de la toucher, mais étais paralysé par la peur de traverser la ligne qui changerait tout.

Ou est-ce que tout avait déjà changé ce soir, malgré moi ?

Elle s'étira contre moi d'une manière qui me rappela exactement ce à quoi j'avais essayé d'éviter de penser durant tout ce temps. Son estomac appuyait directement contre ma peau, sa chemise remontée, les courbes si mystérieuses pour l'homme brûlant soudainement sous mes mains traîtresses, comme en feu.

Je devais sortir d'ici, avant de perdre la raison et de la posséder ici. Je n'aurais pas voulu abuser—

Lâche, crachais-je à moi-même. Au moins admet la vérité à ton propre esprit. Tu es celui qui n'est pas prêt. Tu es terrifié.

Le léger touché de doigts glissant dans mes cheveux m'avait éveillée, bien que d'ici à ce que je fusse complètement éveillée, il était parti, laissant seulement la chaleur de son corps. Non, pas seulement ; un objet quelconque reposait niché au centre de l'oreiller maintenant vide, mais j'étais trop léthargique actuellement pour voir de quoi il s'agissait.

La déception me refroidit un peu et je me mis en boule sous les couvertures, ramenant mes genoux contre mon torse et regardais au travers de la fenêtre, vers les courageux premiers rayons de soleil s'aventurant dans le ciel. Sincèrement, j'étais aussi un peu soulagée. Tidus aurait pu arriver maintenant à n'importe quel instant, sautant sur le lit et me titillant jusqu'à ce que j'accepte de me lever. Ce qui résidait entre Auron et moi était si mal définit pour le moment que je ne voulais pas devoir expliquer ces choses à mon fils.

Je m'assis finalement et ramassais l'objet qu'il avait laissé ainsi que la petite note que je n'avais pas remarquée auparavant. C'était une pièce curieuse, une brillante ficelle de perles et plumes attachées par une corde selon un modèle qui semblait avoir un ordre inconnu.

L'écriture était élégante, bien plus belle que la mienne et pourtant définitivement masculine. La note était tracée d'une main épaisse et gracieuse, légèrement étrangère et certaines voyelles étaient écrites de façon curieuse. Il était écrit :

C'était quelque chose ayant eu une fois une signification, mais je n'appartiens plus à cet ordre. Avec le temps il est devenu un simple et plaisant ornement, une bagatelle inutile composée de verre coloré et de corde. Mais il est cependant une partie de celui que j'étais et je souhaite que tu l'aie.

La signature était illisible, un enchevêtrement de symboles si emmêlés que je ne pus dire s'ils étaient étrangers ou s'ils se recouvraient simplement. J'essayais de l'imprimer dans ma mémoire. Son nom.

Je me rappelais finalement où j'avais vu ces perles auparavant ; accrochées à l'épaule du manteau qu'il portait toujours. J'étais touchée par le cadeau de quelque chose qui devait toujours avoir une certaine importance à ses yeux, comme faisant partie des quelques objets qu'il avait transportés avec lui depuis son monde natal, si loin d'ici.

Je voulais garder le cadeau sur moi d'une certaine manière, mais il apparaissait qu'il n'était pas facile à porter pour quelqu'un sans manteau où il aurait pu être attaché. Je le cachais finalement dans un de mes tiroirs les plus privés, loin de petites mains curieuses, de même que sa note. Après cela, j'avançais endormie en direction de la cuisine afin de préparer du café. D'où j'étais assise, je pus voir Auron au dehors, s'entraînant. C'était inhabituellement tôt pour lui et il mettait plus de véhémence dans les mouvements que d'habitude, frappant le vide furieusement.

Tandis que l'arôme incontournable du café ravivait mon cerveau brumeux, je réalisais que Tidus n'était jamais venu pour me réveiller. En fait, cela faisait plusieurs jours..ou semaines, depuis qu'il l'avait fait ? J'étais attristée de découvrir qu'il devait avoir aboli ce rituel matinal. Puis il entra depuis le salon où il avait été avachi sur le sol en jouant à des jeux vidéos et m'étreignit en me souhaitant le bonjour, demandant où en était le déjeuner.

« Maman, ça suffit ! » s'écria-t-il tandis que je l'avais étreins un peu trop fort, un peu trop longtemps.

La semaine qui suivit fut comme jouer dans un cirque : marcher sur une corde raide et jongler en même temps. Je souhaitais si désespérément le toucher, être avec lui, mais je devais me heurter à une fine ligne – si je poussais trop, demandais trop, il se retirait et me laissait seule face au Gardien.

Je sentais le même désespoir chez lui, le même appel pour l'amour qui avait été si longtemps absent de sa vie. La frustration était si intense que je voulais crier et une fois seule je pleurais de chaudes larmes de colère inutile. Je vis qu'il était paralysé par sa propre culpabilité, craignant de me pousser ainsi que des sentiments inadéquats. Je ne voulais pas abandonner, car quelque chose dans son expression fermée me suppliait de libérer ce qu'il essayait si difficilement de réprimer, de l'extraire à la lumière du jour. Je sentis que nous avions passé un genre de tournant, que notre relation avait été changée pour toujours, mais à la manière dont il arpentait le hall comme un animal en cage, je savais qu'il était mal à l'aise.

J'étais inquiète au début que Tidus ne remarque trop tôt le changement dans notre relation. Je n'étais pas certaine de sa réaction. Je n'avais pas de raison de m'en soucier ; Auron n'était pas le genre à démontrer beaucoup d'affection en publique. Même en sachant combien il aimait Tidus, il acceptait chaque étreinte exubérante avec une expression de souffrance sur son visage qui disait pleinement, « Oh, très bien, s'il le faut.. ». Ainsi n'aurais-je pas du être surprise que les seuls gestes qu'il fit dans ma direction lorsque nous n'étions pas seuls furent le toucher occasionnel de sa main sur la mienne. Soucieux de la colère que Tidus avait envers son père me concernant et valorisant la relation qu'il avait maintenant avec le fils de son ami, il était particulièrement prudent afin de ne donner au garçon aucune raison de penser que quelque chose d'inhabituel se passait entre nous. Je ne pouvais pas dire qu'il avait tort ; je n'étais pas sûre de ce que je devais dire à mon fils. Tout était si nouveau et incertain avec Auron – je voulais le protéger, materniser ses pas incertains et égoïstement, je voulais également le garder pour moi, juste au début. Ainsi je laissais Auron maintenir la distance dont il avait besoin, bien que cela me tua d'être à la fois si proche et si lointaine.

Je le voulais de toutes les manières ; je devenais presque folle avec cela et la nouvelle proximité que nous partagions était insupportable. Il se glissait dans ma chambre chaque soir afin de s'allonger à côté de moi, mais un baiser chaste et délicat était le seul contact physique qu'il eut initié. J'avais peur que d'essayer plus ne le chasse définitivement de la pièce et ainsi je me contentais de ce qui était, après tout, plus que tout ce que j'avais rêvé d'obtenir de lui seulement quelques jours auparavant.

Si Tidus avait remarqué une nouvelle tension entre nous, il n'en donna aucun signe. Il était le même enfant bouillonnant, une boule d'énergie prospérant gaiement dans son équipe de blitzball d'une manière qu'il n'avait jamais faite sous la tutelle de son père. J'avais même tiré Auron à un match, une fois, bien qu'il parla en monosyllabes pour le reste de la journée après que j'eus inconsciemment essayé de tenir sa main dans l'arène publique.

Je passais un nombre incalculable d'heures nourrissant des fantasmes afin de percer au travers de cette barrière, certains risibles, d'autres sérieux. J'avais été tirée brutalement de ma rêverie un après-midi lorsque Tidus rentra plus tôt de l'entraînement avec un œil au beurre noir et un bleu sur le front, son entraîneur le suivant. Le nom de l'homme m'éluda, mais son visage m'était familier ; il avait été un ami de Jecht que j'avais plutôt apprécié.

« Ne t'inquiète pas, Maman », dit le coach placidement, me clignant de l'œil. « Il va bien, il a seulement atterrit du mauvis côté d'un placage. Je voulais le raccompagner à la maison, juste pour être sûr. Tu as de la glace ? », demanda-t-il, se dirigeant vers le frigo sans attendre une réponse.

Taylor ? Troy ? Ty. Je crois que cela était son nom. Il était sombrement beau, de la même manière rebelle que Jecht l'avait été, les cheveux en bataille et tatoué, bien que c'était là que la similarité s'arrêtait. Il avait été un membre de l'équipe de Jecht juste avant que mon mari ne disparaisse, lorsqu'il avait été écarté par une blessure qui n'avait jamais complètement guéri. Ty semblait suffisamment heureux maintenant, entraînant les nouvelles ligues et il s'y prenait admirablement bien avec les jeunes, contrairement à mon mari. Je me demandais tristement si Jecht aurait pu apprendre avec le temps.

Auron était entré silencieusement dans la pièce de son pas trompeusement paresseux et de ses enjambées félines, il s'était dirigé droit sur Tidus. Il avait soulevé le menton du garçon afin de regarder dans ses yeux, penchant la tête du garçon de chaque côté et testant le bleu d'un doigt délicat. Je lui lançais un regard inquisiteur. Il grogna d'une façon qui signifiait que cela n'était pas grave. « Pas l'air infecté », fut tout ce qu'il dit, s'écartant du passage lorsque l'ex-blitzer vint avec de la glace. Son expression restait plutôt sombre malgré les mots rassurants.

Je savais mieux que personne combien sérieusement Auron prenait à cœur son devoir de veiller sur Tidus, ainsi tandis qu'il avait l'air indifférent, j'essayais d'adoucir le besoin maternel de couver mon fils de façon embarrassante. Je pouvais voir qu'il essayait vaillamment d'apparaître comme un homme. Il avait réussi à ne pas pleurer jusque là et cela était quelque chose de nouveau. Finalement, je l'envoyais se laver et se changer. « Et garde la glace sur cet œil ! », lui criais-je, me permettant un peu.

Ty s'assit à la table de ma cuisine avec toute la grâce d'un athlète professionnel, les longs muscles des côtes complètement relâché mais ayant l'air prêt à l'action en un battement de cœur. « Tidus a beaucoup de potentiel, tu sais », me dit-il sérieusement. « Il pourrait suivre les pas de son père, jouer professionnellement. »

Je savais qu'il était un bon joueur, un des meilleurs, mais cela était toujours un peu inattendu. « Tu penses ça, Ty ? », demandais-je, confondue. Auron ne montrait aucune surprise. Ty n'essayait pas de me corriger ainsi supposais-je que j'avais prononcé le nom correct.

Je m'assis à la table, en face de lui. Mon Gardien restait appuyé contre le mur dans mon dos, les bras croisés et depuis cet angle, je ne pouvais plus voir son expression. Comme si j'avais pu le faire, de toute manière.

« Définitivement », affirma Ty.

Je n'étais pas certaine comment réagir face à cela. Ce n'était pas une vie facile, voyager si souvent mais en même temps cela semblait si naturel. Tidus était véritablement gracieux dans l'eau, plus à la maison que n'importe où ailleurs. Je souhaiterais que tu puisses le voir jouer, Jecht.

« Est-ce que tu le lui as dit ? Est-ce là ce qu'il veut ? »

« Non ». Ty secoua la tête d'une façon familière qui me rappelait un autre joueur aux cheveux en bataille. « Laisse-le être un enfant encore un peu, et ne t'inquiètes pas de quelque chose si lointain. Actuellement, cela ne doit être que du plaisir. » Il croisa ses doigts derrière sa tête et s'étira un peu. « J'ai vu trop de gosses perdre le cœur à jouer sous la pression de l'ambition des autres. Cela ne sera pas plus facile pour lui, étant le fils d'un grand joueur dont la carrière s'est arrêtée trop tôt. »

Il ferma sa bouche abruptement et me regarda inquiet, comme s'il avait eu peur d'avoir dit quelque chose de blessant. C'était le même genre d'expression que Jecht avait, un homme qui parlait toujours en premier et s'inquiétait de l'effet de ses mots ensuite.

Je souriais amusée et du souvenir. « Jecht serait fier de lui. Et tu as raison, il ne devrait pas penser à cela maintenant. »

Ty se détendit visiblement tandis que je n'avais pas fondu en larmes. Il se pencha en avant et dit : « Encore une chose : Tidus est un peu petit pour son âge, béni d'un immense talent et plus que son attitude équitable. Je sais qu'il y est arrivé honnêtement », rit-il, « mais tout cela pourrait bien l'avoir conduit à devenir la cible d'un placage excessivement violent aujourd'hui. J'ai déjà parlé à l'autre garçon et à ses parents, mais si Tidus veut poursuivre sa carrière de blitzer, et doit être prêt à gérer les ennuis que son caractère lui amène. »

Je ne pus dire que j'étais heureuse d'entendre cela, mais je ne pouvais le protéger de tout et de tout le monde durant sa vie entière. Après tout, Jecht avait eu son compte de batailles liées au blitz. Je supposais que cela était à prévoir.

Tidus revint en portant des habits différents, bien que je ne fusse pas sûr qu'il eut lavé quoique ce soit. Serra essayait visiblement de ne pas se fixer sur son pauvre visage meurtri.

« He gamin, chouette œil », plaisanta l'homme qu'elle avait appelé Ty. « Devrait être un magnifique pourpre d'ici demain matin. »

Tidus lui sourit puis lui tira la langue en guise de réponse. Je réprimais un geste encore plus insultant. Je l'avais détesté intensément aussi tôt qu'il avait adressé ce sourire indolent dans ma direction, écartant visiblement l'homme balafré de toute compétition pour l'affection de Serra. Je détestais la façon dont il se comportait avec elle, se tenant trop près et sa façon inconsciente de répondre, son léger rougeoiement, le sourire sincère d'être en sa compagnie.

« J'allais juste prépare un souper tardif », dit-elle amicalement tandis qu'il se levait pour partir. « Est-ce que tu en veux ? »

Oh, non. Je n'allais pas m'asseoir avec ce bouffon et souffrir des ses avances si peu subtiles tandis qu'elle lui faisait les yeux doux. Il était tout ce que je détestais à propos de Jecht sans aucune des choses qui m'avaient plues chez lui : une confiance arrogante sans la touche tempérée d'autodérision, bruyant sans même avoir quelque chose d'important à dire, indiscutablement certain de son effet charismatique sur les gens sans l'étincelle d'un intérêt véritable ou de soucis pour les autres qui en fait le font fonctionner, les attirant. Son aura toute entière rayonnait d'une allure chaotique et il était flanqué comme un voyou, torse nu et tatoué avec des boucles d'oreilles dans chaque oreille et cartilages ainsi que d'autres objets non identifiables arrangés dans ses cheveux ébouriffés. Simplement le regarder me donnait la chaire de poule. Je me rendis invisible avant qu'elle ne puisse me piéger avec ses yeux innocents.

Le repas avait été plaisant, mais l'absence d'Auron m'avait perturbée. J'étais irritée par sa disparition. Cela avait été pour lui que j'avais fais le repas au départ, pourquoi était-il parti ?

Elle m'attendait lorsque je rentrais, assise silencieusement dans le salon sombre, nichée au centre du canapé. D'après le regard sur son visage, elle n'était Pas Contente.

« Où étais-tu » Sa voix n'était pas véritablement neutre lorsqu'elle se leva. Elle était contrariée, pourquoi ?

Je frissonnais. « Dehors », fut tout ce que je dis. J'allais lui passer devant, calmement.

« Attends », demanda-t-elle. De l'acier améthyste me figea sur place. « C'est quoi ton problème ? »

Je passais du stade irrité à celui de fâché tandis qu'il m'effleurait calmement et s'apprêtait à partir, alors que je l'avais attendu toute la nuit. Tidus dormait depuis longtemps et Auron, malgré toute sa solitude, n'avait jamais été dehors si tard. Sans compter lorsqu'il avait été sur le toit.

Il sembla remarquer mon ton et montra finalement un peu de sa propre colère. « Je n'ai pas de problème ! » Retrouvant immédiatement sa voix placide, il continua, « Je pensais que tu allais apprécier la chance de te retrouver avec ton ami. »

Je lisais rapidement entre les lignes. Je n'étais pas stupide, mais j'aurais pu me gifler pour ne pas l'avoir compris plus tôt. Ty ressemblait beaucoup à Jecht, sans mentionner qu'il n'était pas balafré et vivant. Ce n'était pas surprenant, la réaction d'Auron. Ma colère s'évapora.

Soupirant, je demandais sincèrement, « Que dois-je faire pour te convaincre que je ne veux que toi ? » Et aussitôt je réalisais la réponse à ma question. Je plantais mes mains dans son torse et appuyais jusqu'à qu'il tombe dans une position assise sur le canapé. Grimpant à califourchon sur lui, je commençais de déboutonner sa chemise.

Il eut l'air scandalisé et essayait d'attraper mes mains. Je l'évitais. « Serra—»

« Non, tu n'es pas autorisé à parler, à moins que ce soit pour dire « Très bien, je te crois Serra. » ». Une lueur étrange vint dans son œil et il devint silencieux tandis que je finissais de le déboutonner et laissais le bout de mes doigts courir sur la peau exposée.

Je commençais ensuite d'ôter le plastron du guerrier, tandis que je mourrais d'envie de glisser mes doigts dans la laine épaisse sans qu'elle ne soit complètement trempée, comme la dernière fois. Il ferma son œil, rejetant sa tête en arrière alors que je massais doucement son crâne puis ensuite les muscles tendus de son cou. Otant les mèches sombres de son front, je déposais une ligne de baisers le long de la cicatrice qui courrait de la racine des cheveux jusqu'à la mâchoire et il frissonna, les muscles se tendant comme pour résister. Ses mains vinrent se poser sur mes épaules, me repoussant, mais je n'allais pas me laisser bouger.

« Chut. Tout va bien », murmurais-je. Ce n'était pas de préliminaires ; c'était ma tentative pour lui dire tout ce que je ressentais sans les mots, qui étaient si faciles à dénigrer pour lui. Il ne pouvait pas douter de la vérité de ce que je ne disais pas à haute voix. Je me dirigeais vers son cou, sentant le pouls battant sous mes lèvres. Mes bras glissèrent autour de son dos afin de soulager les nœuds de tension qui s'y trouvaient.

Me retirant après un long moment, je pris ses joues dans mes mains et il ouvrit son œil prudemment. Presque de leur propre volonté, ses mains glissèrent avec une ferme lenteur depuis mes cuisses afin d'attraper ma taille.

« Est-ce que tu me crois, maintenant ? », demandais-je. « Ou dois-je sortir le grand jeu ? »

« Ca reste à voir, Madame », dit-il avec un sérieux complet. « Mais peut-être est-ce une chose à ne pas faire ici », ajouta-t-il solennellement, bien que les commissures de ses lèvres habituellement sombres et tournées vers le haut ruinaient l'effet.

J'émis un hoquet lorsqu'il sauta soudainement du canapé, me jeta dans les airs et je priais pour ma vie lorsqu'il traversa la pièce en quelques enjambées, s'arrêtant devant ma chambre à coucher.

Son visage était complètement sérieux maintenant, posé sur le seuil, mais sa voix était un long flux de désir et d'appréhension. « Tu es certaine à propos de cela ? »

« Si tu n'ouvres pas cette porte immédiatement et me possèdes sauvagement, je vais te frapper », dis-je. Est-ce que j'ai vraiment utilisé le mot « posséder » ?

Les muscles de son bras bougèrent et se tendirent tandis qu'il me jetait au milieu du lit avec un rire profond, ignorant mon expression outrée d'être ainsi manipulée, tel un sac de patates. Il s'écrasa sur moi et je ressentis un léger tressaillement de peur, étant l'objet d'une telle détermination et ne l'ayant jamais vu montrer ce genre d'agression. Bien sûr que j'aurais du m'y attendre ; il était un guerrier aguerri dans son propre monde, ce n'était seulement ici que le manque de place dans notre société l'avait réduit à du baby-sitting avec des problèmes scolaires. La lueur de prédateur dans son œil était si inattendue. Elle appartenait manifestement là, se fondant aisément avec les nuances familières de son visage, mais je ne l'avais jamais vue.

Et soudainement, il s'arrêta, me regardant avec un léger froncement de sourcils et de consternation, je n'avais aucune idée pourquoi..

Elle avait l'air si adorable, étendue dans l'expectative au milieu d'une mer de pâle laine verte, ses cheveux étalés autour de sa tête, quelques mèches rebelles se perdant en filaments caramel depuis sa poitrine et son épaule pour se noyer ensuite dans la masse. Ses yeux s'étaient foncés en une teinte violette, elle tremblait presque d'anticipation, de même que moi—

Jusqu'à que je baisse les yeux et remarque les deux ombres noirs de saleté laissées par mes mains, salissant les draps et me souvenant la boue collée sur mes bottes et certainement sur le bas de mes pantalons. J'avais passé l'après-midi dans un cagibi vide, vidant ma frustration à travers de vielles épées. J'avais complètement oublié combien j'étais souillé dès que j'avais passé le seuil de sa colère. J'espérais tardivement que le canapé n'en avait pas trop souffert.

« Serra, je suis dégoûtant. Tes draps—»

Mes draps ? « Tu crois vraiment que je me soucie de ça maintenant ? », avais-je pratiquement crié. Mais je pouvais dire d'après son regard que cela le perturbait véritablement, tant il était soigné, peut-être n'était-ce pas seulement la boue sur les draps qui le mettait inconfortable. Il fronçait maintenant des sourcils à la vue de la saleté sous ses ongles.

Bien, j'étais une femme pleine de ressources. Je n'allais pas le laisser s'échapper de ça en se retirant et laissant tomber la tension puis décidant enfin que ce n'était toujours pas le moment..

« Très bien, j'ai une autre idée..viens. »

Je le tirais dans l'immense salle de bain qui semblait maintenant si seule que Jecht était absent. Maintenant c'était seulement la mienne, aussi confortable qu'une vieille chaussette. La baignoire était ma favorite, un immense bassin de marbre que nous aimions tous deux, car je n'avais pas connu de blitzer qui ne devienne pas claustrophobe dans une baignoire où il ne pouvait bouger. Je laissais l'eau couler et me retournais pour débarrasser Auron de ses habits.

Quelque part, bien que j'avais été prêt à tout enlever et lui faire l'amour sans retenue à peine quelques instants auparavant, être déshabillé et mis dans le bain tel un enfant était complètement différent. C'était une forme différente de nudité, une exposition plus vulnérable. Mon expression ne lui échappa pas.

« Ne sois pas stupide, Auron », me réprimanda-t-elle sur un ton moqueur. « Tu ne peux pas y entrer comme ça. Enlève tes habits. » Elle ôta son pull et j'étais soudainement fasciné. « Tu vois ? Tu ne vas pas y aller seul—» Un hoquet la pris par surprise lorsque je tandis la main pour toucher ce qu'elle offrait.

Ses mains m'effleurèrent avec un touché de plume. Il n'hésita pas plus longtemps lorsque je m'attardais sur les ceintures et boutons. J'essayais de ne pas en manquer, mais au moins un avait été libéré dans ma hâte.

Il entra dans l'eau, plongeant jusqu'au milieu du torse et m'offrit une main. « Ma chère ? »

L'eau était plus chaude que le sang, infusant une chaleur aussi profonde que les os dans chaque pouce de ma peau, mais il n'y avait rien dans le feu dans son regard qui trahissait la voix cordiale et détendue.

Elle s'avança paresseusement vers moi pour s'asseoir entre mes genoux, ses cheveux s'étalant gracieusement sur l'eau, les mèches submergées flottant tel un manteau de laine derrière elle, s'agitant à chaque léger mouvement.

Elle attrapa le savon, une barre ovale qui était enrobée dans un ruban et sentait le bois de santal et la cannelle, puis je fermais mon œil lorsqu'elle commença de s'occuper de mes épaules et de mon cou, me relaxant tandis qu'elle travaillait sur les points de tension dont je n'avais pas été conscient jusqu'à ce moment précis. Je m'enfonçais plus profondément et laissais mes bras devenir complètement mous tandis qu'elle commençait sur ces..jambes, pieds..

J'aimais toucher les plans et creux de son torse et estomac, la sensation lisse de la peau humide sous des doigts savonneux ainsi que la façon dont il tressaillait un peu lorsque je caressais un point juste au dessous de ses côtes, ou le petit hoquet lorsque mes doigts descendaient juste encore un peu. Peut-être que cela n'était pas une mauvaise idée après tout. Le lit pouvait attendre. Le son qu'il fit lorsque je le brossais me fit m'interroger sur combien il pouvait encore attendre.

Son œil s'ouvrit brusquement lorsque je bougeais pour m'installer sur lui et je ne pus que rire à son expression déconfite. Il s'appuya sur mon estomac et soudainement, je ne pouvais attendre plus longtemps.

« Ils ne font pas l'amour sous l'eau sur Spira ? » demanda-t-elle, tandis que j'essayais de ne pas penser au nombre de fois qu'elle l'avait fait ainsi.

Puis ses bras de fermèrent autour de moi, nous tirant l'un à l'autre et protester était la dernière chose dans mon esprit.

Finalement, nous nous dirigeâmes vers le lit.

Cette première nuit..je ne m'étais jamais sentie si magnifique ou adorée. Y mettre des mots semble la dévaloriser, ainsi je ne dirais seulement que cela avait été comme s'il avait vénéré mon corps avec le sien, chaque toucher si respectueux, comme si j'offrais un cadeau précieux qui devait être choyé. Là où Jecht avait été un feu tourbillonnant, énergétique et passionné, Auron était le cœur de la terre, enterré sous des kilomètres de cailloux et suffisamment chaud pour fondre la pierre. Son intensité était presque douloureuse. Les comparer ne fut pas quelque chose que je fis. Ils étaient généralement des hommes différents ; naturellement, leur façon de faire l'amour n'était pas la même. Jecht était mon passé, Auron mon présent et j'avais suffisamment d'amour dans mon cœur pour les deux. Cela ne fit aucun sens, mais plus j'aimais l'un, plus j'aimais l'autre.

Elle était si magnifique, délicate. Elle cherchait en moi la protection et la force et le Gardien en moi n'allait jamais mourir ; je voulais plus que tout en ce monde protéger, être utile. Pourtant elle me donna bien plus que ça ; elle n'était pas la fille gâtée d'un prêtre qui demandait à son père un joli jouet avec lequel elle puisse s'amuser et je n'étais plus si joli. Serra aimait un homme brisé puis reconstitué et plus totalement complet ; elle m'aima sachant toute la vérité sur ce que j'étais. Je pense que j'ai commencé à l'aimer au moment où je l'ai vue et chaque respiration prise depuis lors avait renforcé ce dévouement. Cela avait l'effet de ma dernière chance d'être heureux, ce qui m'avait été dénié par une vie dédiée à détruire Sin, une opportunité à quelque chose que je ne pensais jamais connaître. La question de la réalité me semblait non pertinente et triviale. Je l'aimais et elle m'aimait, n'était-ce pas assez réel ?

Pourquoi ne devrais-je pas saisir cette chance ? Pourquoi ne devrais-je pas m'autoriser à l'aimer ? Je ne pouvais oublier Jecht, mais je ne pouvais rien faire pour lui tant que Tidus n'était pas adulte. Pour la première fois depuis des années, même depuis le moment où je m'étais dédié à protéger Braska, ma vie était la mienne.

Je restais un long moment éveillé ensuite, me contentant de l'étreindre, la berçant dans le sommeil. Sa respiration lente et régulière effleurait ma joue, des lèvres rosées et des joues pâles capturaient la lumière claire et bleue de la lune. Le reste de sa personne dormait cachée dans les ombres de ma forme plus large, tandis que j'étais étendu enroulé protectivement autour d'elle.

Je tendis un doigt doucement au travers de la douceur de la lèvre inférieure, désespéré de la toucher mais terrifié à l'idée de la tirer de je ne savais quel rêve plaisant qui déformait cette bouche délicate en un petit sourire satisfait.

Ce sourire gela soudainement mon cœur et je me demandais mal à l'aise auquel des deux elle rêvait : moi ou Jecht.

Elle s'étira et je retins mon souffle, immobilisé par la peur soudaine de ce que je pourrais voir dans ses yeux lorsqu'elle se réveillerait : de la culpabilité ou des regrets quant à nos actions, ou pire, le chagrin de ne pas être dans le cercle de ses bras lorsqu'elle se réveillerait.

Les orbites lilas pâles s'ouvrirent, m'envahissant avec une chaleur choquante à la vue de ce qui résidait dans leur profondeur, un tel amour, profond, sincère et inconditionnel. Puis elle sourit, un véritable, magnifique sourire qui m'était destiné.

Pour moi.

Lorsqu'ils devinrent véritablement des amants, je le su.

Mon souvenir d'être Sin commence avec le sang de Braska à la pointe de ma propre épée, avec une sombre mer de chagrin entre les deux. Oh. Pardonnez-moi pour sauter des étapes – ma mémoire, pour être impardonnablement lucide, n'est pas vraiment linéaire.

Comment je l'ai su, je ne pu le dire. Nos cœurs étaient liés par le sang, le rêve et le temps, ainsi peut-être cela n'avait rien d'extraordinaire. Mais ainsi étais-je, enfermé dans la prison de mon propre corps avec un maniaque, un monstre et les facettes fragmentées de ma propre personnalité et je savais.

La connaissance me rendit fou. Enfin, plus que fou.

Ce n'est pas juste ! Combien de temps avais-je été piégé ici ? Encore combien de temps vais-je y rester ? Et il est là-bas, seulement un peu mort-vivant et baisant ma femme.

Tu lui as pratiquement donné ta permission, idiot.

Que pouvais-je faire d'autre ? Il était là-bas sur ma demande. Je ne pouvais supporter de le voir souffrir d'avantage. Tomber amoureux d'elle était probablement la pire chose qui aurait pu lui arriver.

Qui souffre ? Cela est-il vraiment difficile pour lui ? Comparer à cela ?

Taisez-vous ! Tous !

A ma surprise, tous le firent. Même Yu Yevon arrêta le rire moqueur et maladif. Brièvement.

Mais la paix n'avait jamais duré longtemps.

Dans mon désespoir, je lui rendis visite dans son sommeil, bien que je n'aie jamais voulu le faire, me trouvant là-bas inconsciemment. Puis je voulus seulement l'étreindre, rien de plus, mais elle me sentit, et parla.

Un homme meilleur que moi serait parti et l'aurait épargnée. Mais je n'ai jamais été un homme meilleur et de plus il y avait peu « d'homme » resté en moi. J'essayais de la protéger du pire, mais je crains qu'elle ne sentît l'incohérence et mes pêchés furent matérialisés.

Cela la conduit sur le chemin de la destruction.

Fin du chapitre 17

Note de l'auteur (Sango) : Waow, c'est pas terrible, je sais. Cela fait quoi, plus d'un an que je n'ai pas fait de mise à jour ? Je ne peux pas croire que cela fait si longtemps. La vie réelle ne va pas fort en ce moment, mais j'essaie de terminer mes histoires.

Si vous l'avez manqué, n'oubliez pas de regarder le dessin d'Auron de Mimi, vous pouvez le trouver sur mon profile. Maintenant en couleur. Il y a aussi un lien sur un autre dessin d'Auron à Zanarkand. C'est magnifique.

Paroles de Sarah McLachlan