Disclaimer : le personnage de Hurle et son château magique appartiennent à la talentueuse et merveilleuse Diana Wynne Jones.

Merci beaucoup à ma chère docteur Gribouille pour ses chalaeureuses reviews ! Je suis vraiment heureuse de savoir que cette fic te plaît... Je l'ai écrite ausi vite et avec autant de plaisir que "De Notre Sang". Il y aura 6 chapitres en tout (c'est court, je sais...) Mais 6 pages de rêves, c'est déjà pas mal, non ?

Bonne lecture !

Au-delà de nos rêves

Rêve numéro 4 : construire

Le lendemain, Marina se réveilla en retard de sa nuit trop courte. Etonnamment, elle avait dormi d'un sommeil sans rêves. Cela ne lui était pas arrivé depuis sa plus tendre enfance.

Lorsqu'elle arriva au collège, les élèves étaient installés dans la salle de classe et chahutaient. Elle n'eut même pas le temps de passer à la salle des profs pour dire bonjour à Hubert. Chaque fois qu'elle pensait à lui, ou à Hurle, l'étrange sentiment qu'elle avait ressenti en quittant le château et son monde magique, lui étreignait le cœur et elle se sentait comme dans du coton. Elle commençait à se demander si elle ne couvait pas quelque chose…


A la pause déjeuner, elle ne trouva pas trace d'Hubert.

Le soir venu, elle demanda de ses nouvelles à ses collègues, mais aucun ne l'avait aperçu depuis la veille.

Affolée, elle alla en toute hâte au bureau du personnel demander son adresse, sous prétexte de lui apporter une copie qu'un élève avait oublié de lui rendre.


"Famille Berlu" lut Marina sur la boîte aux lettres de l'adresse qu'on lui avait indiquée.

Elle hésita et finit par sonner. Une jeune femme aux cheveux noirs et aux yeux noisette vint ouvrir après quelques instants. Elle était joli mais avait l'air sévère. Elle ne ressemblait que vaguement à Hubert. Ce devait être sa sœur, Mégane.

Derrière la porte, on entendait des cris et des rires d'enfants.

"Excusez-moi… dit Marina. Je suis une collègue d'Hubert… J'étais venue lui rapporter ceci et prendre de ses nouvelles…"

"Prendre de ses nouvelles ? répéta la jeune femme en fronçant les sourcils. Qu'est-ce que vous voulez dire ?"

Marina hésita. Hubert avait peut-être fait l'école buissonnière sans en parler à sa soeur… De tout évidence, il n'était en tous cas pas chez lui. Elle se confondit en excuses et finit par repartir avec la fausse copie dont elle s'était munie comme prétexte.


Il n'y avait qu'un seul autre endroit où elle pouvait trouver Hubert. Elle courut jusqu'à la halle désaffectée.

A l'intérieur, la porte n'avait pas bougé. Marina fut rassuré de voir qu'elle n'avait pas tout inventé. Elle hésita avant d'ouvrir la porte. Elle craignait que le néant de l'autre côté eut disparu…

Après un temps d'appréhension, elle finit par approcher sa main du bouton de cuivre. A cet instant, la porte s'ouvrit brusquement et Hubert en sortit. Marina recula précipitamment en hurlant.

Hubert éclata de rire.

"J'allais justement venir vous chercher !"

Il avait l'odeur fleuri de Hurle. Son sourire aussi, pensa Marina.

Derrière lui, le noir était toujours aussi complet.

"Pourquoi n'êtes-vous pas venu aujourd'hui ? demanda Marina, se remettant tout juste de sa frayeur."

Hubert haussa les épaules, de la même façon que Hurle la veille.

"J'avais des choses plus importantes à faire. Venez voir ! La librairie est prête !"

Marina sourit. Des choses plus importantes…


Lorsqu'elle entra, Ellia fut accueillie par un délicieux parfum de muguet et par un tonitruant "Salut Ellia !" de la part de Calcifer.

En refermant la porte, il lui vint une idée.

"Que se passerait-il si quelqu'un trouvait la porte là bas, et l'ouvrait ? demanda-t-elle à Hurle."

"Rien, répondit-il. Il faut avoir envie de rêver pour trouver le château. C'est devenu de plus en plus rare aujourd'hui…"

Ses yeux se voilèrent une fraction de seconde. Peut-être avait-il lui aussi perdu l'envie de rêver pendant quelques semaines, après que son monde se fut écroulé dans ce même château. Mais Ellia était bien décidé à construire un nouveau rêve.


Ellia devint plus présente dans la vie de Marina. Chaque soir, elle partait retrouver Hurle derrière la porte mystérieuse de la halle abandonnée.

Lorsqu'elle rentrait chez elle, il était souvent plus d'une heure du matin. Mais cela n'avait aucune importance.

Elle ne se souciait pas de ne dormir que quelques heures par nuit. A présent, elle ne rêvait plus. Ses escapades auprès de Hurle suffisaient à alimenter son désir d'évasion.

Elle se fichait d'arriver en retard en cours de plus en plus souvent, à la plus grande joie de ses élèves.

Peu lui importait d'oublier de téléphoner à sa famille, le soir, de temps à autre. Son monde, dorénavant, était celui du château magique de Hurle.

Il en allait de même pour Hubert. Il lui arriva même plusieurs fois de ne pas se présenter au collège pendant plusieurs jours de suite, sans explication à donner au directeur, qui se montrait de plus en plus soucieux à son sujet. Ces jours-là, Marina, demandait à partir plus tôt sous prétexte de prendre de ses nouvelles. Pauvre Hubert, il devait être en train de retomber malade, jasait nombre de leurs collègues.

Mais Marina savait pertinemment que ses absences ne démontraient qu'une seule chose : la librairie était victime de son succès. Les clients y affluaient en masse et en repartaient les bras chargés de livres hétéroclites.

Ellia et Hurle étaient aux anges. Les malheurs d'autrefois semblaient oubliés. Marina et Hubert s'effaçaient.

Mais l'étrange et intense sentiment que Marina avait ressenti en ressortant du château enchanté pour la première fois semblait lui aussi s'estomper…


Un jour où les ventes avaient particulièrement battu leur plein à la librairie, Ellia et Hurle s'endormirent sur le canapé de la pièce à vivre du château, sous les yeux satisfaits de Calcifer. Il était déjà tard à cet instant et la raison sage de Marina tardait à se manifester.

Pourtant, lorsque celle-ci ouvrit les yeux, le décor familier du château avait disparu et laissé place à une chambre en désordre qu'elle ne pensait pas avoir vu jusqu'alors.

A ses côtés, Hubert dormait paisiblement. Le sofa sur lequel ils étaient assis ressemblait en tous points à celui du château.

Ils étaient revenus dans leur monde. Mais Marina ne se souvenait absolument pas d'avoir poussé la porte de bois vert foncé…

Le jour commençait à poindre à travers les rideaux. Marina comprit qu'elle était dans la chambre d'Hubert, et bien que cette idée lui semblât assez saugrenue, elle la chassa bien vite de son esprit et ne pensa plus qu'à regagner son propre appartement. Mégane n'apprécierait sans doute pas de trouver une jeune femme dans la chambre de son frère…


Hubert et Marina ne reparlèrent pas de cette étrange situation. Ils s'étaient endormis dans un monde et s'étaient réveillés dans un autre, toujours enlacés.

C'était surtout cette idée qui les mettait mal à l'aise. Lorsque la conversation revenait par hasard sur ce sujet, Hubert rougissait et Marina baissait les yeux, sentant son cœur faire d'étranges sauts dans sa poitrine. C'était une sensation familière à celle qu'elle avait éprouvé en revenant pour la première fois de l'esprit d'Ellia.

Bien entendu, elle n'avait pas encore associé ces battements de cœur à la présence d'Hubert…


" Vous comprenez, Marina… dit le directeur avec une mine gênée. Si vous continuez à vous absentez aussi souvent, je me verrais dans l'obligation d'en référer au recteur… Et cela m'ennuierait beaucoup…"

Marina avait été convoquée chez le directeur. Cela ressemblait à une audience disciplinaire, comme lorsqu'elle avait bouché les toilettes des garçons de son collège avec des ballons de foot…

Pour la première fois depuis des semaines, Ellia s'était effacée de son esprit. Marina se retrouvait seule, face à son supérieur, sans aucun rêve pour la soutenir.

Elle pensait à Hubert. Risquait-il lui aussi d'être reçu par le directeur ? Il n'avait rien fait, c'était elle qui l'avait entraîné à retourner là bas…

"Je vous promets que je ne le ferais plus, répondit-elle. J'ai eu quelques soucis personnels, mais tout est réglé à présent…"

Elle ne pourrait plus retourner chez Hurle. Non, Ellia devait disparaître de cette vie si elle voulait que Marina continue à exister…