Chapitre 2 : une trace de normalité

« De te fabula » Harry trébucha sur les mots qui ne lui étaient pas familiers. Il essaya de les prononcer correctement, comme Severus l'avait fait. Il espéra que la porte enchantée comprendrait qu'il connaissait vraiment le mot de passe, même s'il ne parvenait pas à le prononcer correctement.

La porte demeura fermée. Aussi stupide que cela ait pu paraître, Harry ne put s'empêcher d'avoir l'impression que la porte lui jetait des regards noirs et le regardait d'un air menaçant, « Tu n'es même pas capable de prononcer du simple latin. » Il imaginait très bien Severus lui dire cela de sa voix chargée de sarcasme. « Quel grand sauveur, tues. »

« Allons, » Marmonna Harry dans sa barbe, impatient. Il était si désireux de découvrir pourquoi Severus voulait le voir qu'il ne se sentit pas gêné de parler à une porte, « Tu sais que je connais le mot de passe. »

Harry et la porte continuèrent à se faire face.

Je ne peux même pas passer cette foutue porte. Peut-il y avoir quelque chose dans ma vie de cinglé qui soit à peu près normal ? Pensa-t-il avec contrariété. Il résista au désir, de plus en plus fort, de faire sauter la porte de ses gonds. « Désolé Severus, ta porte était une connasse…Ah, non, effectivement, je ne me souvenais pas correctement du mot de passe. Mais elle a quand même était une foutue connasse sur cette affaire. Oh oui. Ca irait certainement très bien.

« S'il te plaît, porte ? » Plaida Harry en jetant sa dignité au vent.

Si la porte avait pu soupirer de méfiance, Harry savait qu'elle l'aurait fait. Elle s'ouvrit lentement en grinçant et exhala pratiquement avec circonspection et résignation.

« Merci. » En passant devant la porte, il leva les mains pour lui montrer qu'elles étaient vides. « Il m'a vraiment demandé de venir. »

La porte se referma pratiquement sur ses talons au moment où il franchit le seuil. Elle était manifestement peu convaincue par ses platitudes. L'intérieur des quartiers de Severus était rempli d'ombres. La seule lumière venait des flammes qui luisaient de l'autre côté de la pièce. Alors qu'il s'avançait doucement vers le feu, il remarqua que l'un des fauteuil près de la cheminée était occupé et répondait à la question de savoir si Severus était ou non éveillé.

« Severus ? » Harry demanda doucement en s'approchant de la chaise.

Il ne répondit pas.

L'inquiétude qui s'était logée dans le creux de son estomac depuis qu'il avait parlé un peu plus tôt à Severus se transforma en un véritable malaise. Harry contourna la chaise et ne s'arrêta que lorsqu'il atteignit l'autre et s'assit. De sa position, Harry pouvait voir que Severus tenait un verre dans sa main qui reposait légèrement sur sa jambe. La lumière de la cheminée révéla que le liquide n'avait pas de couleur, et Harry sut intuitivement que ce n'était pas de l'eau qui remplissait presque un tiers du verre. C'était mauvais signe, Harry le savait, quand Severus décidait de boire de la vodka.

« Est-ce que tout va bien ? » Harry se laissa lentement couler dans sa chaise. Il était, irrationnellement effrayé que Severus ne se ferme s'il faisait un mouvement vif. Même si ce n'était pas évident, Harry voyait que le corps de Severus se tenait droit plus par tension que par un choix conscient. L'autre homme ne répondit pas à la question d'Harry.

L'image du visage perplexe de Drago lui traversa l'esprit alors qu'il regardait Severus avec attention. Maudis sois-tu Drago, jura Harry intérieurement. Je sais que c'est de ta faute ! Que lui as-tu fait ?

« Que t'a fait Malfoy ? » Murmura Harry, plus pour lui que dans l'espoir de recevoir une réponse de la part de Severus.

« Le fils ne m'a rien fait. » Severus finit par répondre, ses yeux ne s'écartèrent jamais du feu. « Il m'a simplement rappelé de vieilles histoires auxquelles il vaut mieux ne pas toucher. »

Lucius, encore, réalisa Harry. Il souhaitait presque le savoir toujours vivant pour pouvoir tuer ce bâtard lui-même. « Qu'est-ce que c'est ? » Demanda-t-il gentiment. « Pourquoi te hante-t-il encore ? »

Severus le regarda finalement. Même dans l'obscurité, Harry vit l'indécision dans ses yeux. Après ce qui lui parut une heure, il inclina la tête, « Tu as le droit de savoir. »

Harry cligna des yeux et se demanda s'il avait bien entendu. J'ai le droit de savoir ? Severus n'avait jamais auparavant déclaré que Harry avait le droit de savoir quoi que ce soit, sauf le répertoire des choses qu'il aurait 'dû' savoir.

« Que sais-tu de mon passé avec Lucius ? »

Il y avait quelque chose de troublant dans le fait qu'il pose une question aussi innocente que celle-ci. Harry haussa les épaules, mal à l'aise. « Juste ce que tu m'as dit, » il s'arrêta un instant puis admit, « Et le peu que j'ai été capable de deviner. »

« Dis-moi. » Etait-ce son imagination ou y avait-il une trace de soulagement dans la voix de Severus en entendant sa réponse ? Il s'attendait à ce que je réponde quoi ?

Il fallut un moment à Harry pour organiser ses pensées, « Je sais qu'il était ton meilleur ami quand tu étais à l'école. Et je sais que tu -» Harry s'arrêta. Il savait à quel point Severus était susceptible avec tout ce qui avait attrait à l'amour et tâtonna pour remplacer le mot. « - te souciais énormément de lui. Et je sais qu'il t'a trahi. C'est ce que tu m'as dit. Mais je peux lire entre les lignes, et malgré toutes les autres raisons que tu avais de le faire, je sais que c'est à cause de Lucius que tu as rejoint Voldemort. »

Severus le regardait fixement, d'un air impénétrable et but une longue gorgée de la boisson qui était dans son verre. Harry vit qu'il était vide quand Severus reposa sa main sur son genou. De longues minutes s'écoulèrent. Ce ne fut que lorsque Harry commença sérieusement à douter qu'il allait répondre que l'autre homme soupira et fit disparaître son verre d'un geste de la main. Alors, et seulement alors, Severus commença à parler.

« Au début de ma vie, mes parents ne supportaient ma présence. Soit ils n'avaient jamais vraiment voulu avoir d'enfant, soit il y avait quelque chose en moi qui les dégoûtait au-delà de toute tolérance. Je ne sais pas. » Severus avait commencé par regarder attentivement Harry mais, alors qu'il continuait, ses yeux le traversèrent et regardèrent une chose que lui seul pouvait voir.

« Aussi longtemps que je puisse me le rappeler, mon monde commençait et se terminait dans les recoins de mon esprit. Mes compagnons d'enfance, mes professeurs, mes amis et mes parents étaient des livres. N'importe quels livres, ça n'avait pas d'importance. Si c'était écrit, je le lisais. » Les lèvres de Severus se relevèrent et il continua avec un humour noir et sarcastique, « En fait, à un certain moment, j'ai dû ramasser une chose faite pour les moldus, un magasine, je ne parviens pas à me rappeler son nom. Je n'ai aucune idée d'où il pouvait provenir. Si mes parents l'avaient vu, ils l'auraient certainement jeté avant qu'il ne puisse les souiller. Qu'importe d'où il venait, j'ai appris l'art utile et joyeux de tricoter un couvre théière. Bien sûr cette gâterie s'accompagna fort bien de mes connaissances des histoires à l'eau de rose qui se terminaient mal, du jardinage pour sorciers maladroits habitants en ville et de la manière dont je pouvais jouer de la cornemuse. Oui, effectivement, j'étais un véritable puits de connaissances inutiles et de facultés sans valeur. Et cela, Monsieur Potter, fut ma glorieuse vie avant Poudlard. »

Harry aurait souri à l'image de Severus tricotant des couvres théières si ces mots n'avaient pas été prononcés d'une voix moqueuse et amère, à la limite du cynisme. Tu étais aussi seul que je l'étais en grandissant.

« Quand je suis monté dans le Poudlard Express, j'étais énervé d'avoir encore cet espoir mince et futile que cette année serait différente des autres et cet espoir refusait de céder à la réalité. Je suis entré dans un compartiment occupé par un groupe d'étudiants plus âgés. Ca ne devrait pas être une surprise pour toi de savoir que l'attitude des étudiants entre eux n'a pas changé depuis l'époque où j'étais enfant. Et j'étais la cible parfaite pour la dérision et la moquerie : un enfant maigre, pale, décharné, aux cheveux longs et plats, un gros nez et un chat broussailleux que mes parents m'avaient acheté avec réticence quand ils s'étaient procurés mes affaires pour l'école. La raillerie venait de commencer quand l'un des garçons qui regardait par la fenêtre jeta un coup d'œil pour savoir ce qui avait provoqué tout ce vacarme. Je me souviens encore de la froideur de ses yeux quand il m'a dévisagé. Juste au moment où j'étais certain qu'il allait se joindre aux autres, il leur dit de se taire. Il a ensuite repris sa contemplation en se tournant vers la fenêtre. Les autres vociférèrent en lui demandant pourquoi il avait interrompu leur amusement, j'en ai profité pour sortir discrètement. » Sa voix était froide et détachée, mais Harry décela un brin de moquerie qu'il refusait d'abandonner.

« Lors de cette première semaine, j'ai appris que mes parents ne me méprisaient pas parce qu'ils ne voulaient pas d'enfants, non, il y avait quelque chose en moins qui attirait ce sentiment. Comme tu le sais, j'ai été envoyé à Serpentard. Ce simple fait a immédiatement servi à jeter un voile sur moi et les autres maisons ne voulaient rien avoir à faire avec moi, à part me ridiculiser et me dédaigner.

Mes compagnons de maisons étaient aussi désagréables et cruels que ma famille. Au milieu de leur propre agenda, les Serpentard avaient prévu complots et projets contre moi. Ils s'étaient unis dans un but commun : rendre ma vie aussi misérable que possible.

« Ils me tourmentaient pratiquement sans arrêt, mais ce n'est que lorsqu'ils commencèrent à faire de même à mon chat que je me suis battu. Et cela, bien sûr, m'a appris mon penchant pour la magie noire. » Severus s'arrêta, détourna son regard de Harry, le dirigeant vers le feu, puis regarda à nouveau le jeune homme, « Je pourrais continuer, détailler toutes les nuances de toutes les choses qui me sont arrivées. Mais ce serait fastidieux et ça ne mérite pas une telle attention.

« Je revis Lucius, j'avais découvert que c'était le nom du garçon aux yeux froids du train, en passant, mais il ne m'avait pas reparlé et ne semblait pas avoir remarqué ma présence. Je suis resté à l'école pendant les vacances de Noël. Je n'avais aucun désir de rentrer à la maison et j'étais, en mon for intérieur, un peu reconnaissant, oui, imaginez ça Monsieur Potter, d'avoir l'opportunité d'avoir le château pour moi tout seul. Je n'avais pas besoin de rôder dans les corridors et de me cacher dans les coins. Je pouvais explorer et aller librement dans la bibliothèque, sans m'inquiéter de qui j'allais rencontrer en y allant. Ma plus grande peur était d'être renvoyé pour m'être attiré des ennuis : je ne souhaitais pas retourner à la maison.

« J'étais à la bibliothèque depuis un certain temps, absorbé dans le dernier livre que j'étais en train de lire et je n'avais pas réalisé qu'on s'était assis à côté de moi. A ma surprise, c'était Lucius. Je ne savais pas qu'il était resté pour les vacances, et je ne pouvais pas imaginer pourquoi un Sixième Année voulait avoir à faire à un Première Année, » Ses lèvres s'étirèrent dans une tentative presque involontaire de sourire ironique. « Il avait les mêmes intérêts que moi : les livres.

« Nous avons passé quelques heures ce jour-là, à parler de ce que nous avions lu, à discuter des points les plus subtiles des intrigues, de la manière dont les personnages étaient peints et de philosophie. Des années plus tard, il m'a raconté à quel point il avait été étonné de tomber sur un Premier Année aussi mature et intelligent, plus intéressé par l'obscure philosophie que par les plaisanteries et le Quidditch » Severus regarda Harry d'un air absent.

« Il n'y a rien de mal à jouer au Quidditch ! » Se défendit Harry avec un profond soupir. « De plus, Hermione a toujours été suffisamment passionnée par les livres pour tous les Gryffondors. »

Severus le regarda à peine puis poursuivit comme si Harry n'avait pas fait de commentaire. « Nous continuions à nous voir à la bibliothèque, pendant les vacances pour discuter de ce que nous avions lu. Mais une fois les autres élèves revenus nous ne nous voyions que très peu. Il n'était pas mon ami, mais pour la première fois, j'avais rencontré une personne qui ne paraissait pas dégoûtée par ma présence. Ce n'est que plus tard, au printemps que nous nous revîmes à nouveau, cette fois dans des circonstances moins plaisantes.

« Un groupe de Serpentards plus âgés que moi m'avait coincé et j'étais planté là, j'hésitais à leur lancer un sort, de peur de me faire punir, lorsque Lucius est apparu et leur dit de partir. Après cet incident nous avons discuté et j'ai appris à le connaître un peu mieux. Et cet été là, il a été jusqu'à m'écrire une lettre. Il me demandait quels étaient les derniers livres que j'avais lus et voulait que je lui en recommande certains.

« Mes parents furent choqués que j'ai pu obtenir les douteuses amitiés d'un Malfoy, et transportés de joie d'avoir un contact avec cette famille. Ils se sont débrouillés assez rapidement pour devenir amis avec les parents de Lucius. En ces temps-là, les Malfoy n'inspiraient pas la peur Tout le monde voulait être reconnu par cette famille hautement appréciée. Ils étaient le modèle de la richesse, du pouvoir et du prestige. J'ai commencé à voir davantage Lucius et ses parents quand mes parents commencèrent à frayer avec eux et bientôt notre presque amitié se développa, effectivement, en amitié, aussi étrange que cela puisse paraître. »

« Je n'aurais jamais cru que Lucius était le genre de personne à s'intéresser à quelqu'un dont il ne pouvait rien obtenir. » Harry réfléchit et essaya d'imaginer Lucius enfant, discutant passionnément philosophie, son visage épargné par le sourire méprisant et supérieur qu'il portait une fois adulte.

Une brève et sombre émotion traversa le visage de Severus, « Si Drago souhaitait discuter d'un faux raisonnement de philosophie, avec qui pourra-t-il parler ? »

L'introduction Amicale aux Mathématiques Logiques lui apparut et Harry grimaça. « Certainement ni avec Crabbe, ni avec Goyle. » Ni avec moi, ajouta-t-il silencieusement, en se souvenant de la longue liste de mauvaises notes qu'il avait eues dans cette matière.

« A ton avis, qui était à Poudlard quand j'étais jeune, Monsieur Potter ? » Lui demanda Severus légèrement. « Il y avait aussi Crabbe et Goyle à mon époque. »

L'histoire se répète d'elle-même, n'est-ce pas ? Dans quelques années, il y aurait une liste de noms familiers sur le registre des élèves qui entreraient à Poudlard, des noms qui auraient déjà été vus de nombreuses fois. Il y aurait des Weasley, pris de folie furieuse et jouant des tours. Il y aurait des Longdubas, peut-être se débattant avec leurs cours, peut-être réussissant sans difficulté. Mais il n'y aurait plus de Malfoy dans les couloirs. Et il n'y aurait pas de Potter, s'attirant des ennuis, volant autour du terrain de Quidditch et sauvant la journée. Mais une autre personne prendra ma place, pensa Harry, en sentant la légère douleur douce-amer du regret à la perte de ceux qui auraient pu marcher dans les couloirs, entendre les échos des rires qui ne retentiraient jamais. Il y aura d'autre héros de Quidditch, d'autres rivaux à vaincre lors des duels de minuit. Il y en aura d'autres. Et peut-être que ce n'est pas un mal qu'une autre paire de Potter et de Malfoy éclipse les réussites d'autres.

« Les années de maintenant, la tristesse et la douleur des temps dans lesquels nous vivons seront un souvenir lointain, une légende racontée par des parents à leurs enfants, qui les murmureront les uns aux autres dans leur dortoir, inventant des moyens pour avoir des aventures semblables aux leurs. » Murmura Severus doucement, comme s'il pouvait lire les pensées de Harry. « S'ils ont de la chance, ils auront la satisfaction des aventures et ne connaîtront jamais le prix que nous avons payé pour vivre les nôtres à notre époque. S'ils ont de la chance, leur innocence demeurera pendant encore des années, alors qu'il n'en a pas été ainsi pour nous. »

Harry regarda silencieusement Severus ; le poids des ans supprima les bruits que l'un ou l'autre aurait pu faire. Erreurs, regrets, chemins jamais empruntés, et ceux qui ont été suivis, s'étira entre eux, les liant tous les deux par une compréhension partagée.

« Les années passèrent. » Dit finalement Severus doucement. « Lucius a eu son diplôme, et même si nous ne nous voyions plus beaucoup, notre amitié continua à grandir. Nous nous écrivions constamment, nous nous voyions pendant les vacances, et nous nous rencontrions à Pré au Lard pendant les week-ends organisés. Nous sommes devenus les meilleurs amis, et nous racontions à l'autre les choses que nous ne pouvions dire à personne d'autre. C'est par lui que j'ai appris l'existence de Voldemort. J'étais la première personne en dehors du cercle de mangemort à voir la marque noire fraîchement imprimée sur son bras. Et je fus la seule personne à savoir à quel point il méprisait le mariage arrangé que sa famille avait préparé pour lui avec Narcissa. »

Severus s'arrêta une nouvelle fois, et à sa surprise, Harry vit un muscle trembler le long de la mâchoire de Severus. Comme si Severus se battait avec quelque chose, et quand il parla à nouveau, Harry comprit pourquoi. « En grandissant, j'ai regardé les autres commencer leur incursion hésitante dans la folie des relations intimes. Dès mon enfance, je détestais être touché, et j'aurais dévié de mon chemin pour éviter d'entrer en contact avec d'autres personnes. Voir les autres s'engager dans des histoires d'amour hésitantes me rendait perplexe. Je ne parvenais pas à comprendre comment ils pouvaient se rendre vulnérable vis à vis de personnes qui étaient presque pour eux des étrangers et qui n'avaient aucune raison valable de ne pas exploiter cette vulnérabilité. Le fait même d'essayer ce qu'ils faisaient me révoltait. Il n'y avait personne en qui je faisais suffisamment confiance pour lui permettre d'être aussi proche de moi. Personne sauf Lucius. »

La compréhension se dressa comme un brillant levé de soleil chassant les ombres de la confusion de l'esprit d'Harry. Qui de mieux pour tomber amoureux, quand la seule personne en qui ayez faites confiance, à part vous-même, est votre meilleur ami ?

« J'avais dix sept ans et j'allais retourner à Poudlard pour ma dernière année. Nous avions passé la dernière semaine de vacances ensemble. Je me souviens m'être plaint de devoir retourner dans ce désordre et de devoir assister aux rendez-vous désastreux auxquels ils jouaient entre les cours. Ca avait commencé une conversation entre nous, sur les relations, la confiance, et nos pensées sur tout ça. Et ça c'est terminé quand il m'a embrassé. » La voix de Severus redevint glaciale et distante. « Nous sommes devenus amants alors. Et j'ai eu la marque noire brûlée dans ma chair, comme cadeau pour avoir obtenu mon diplôme

« Comprends-moi bien. J'ai désiré le pouvoir presque autant que Lucius. Et pendant un temps, les objectifs des mangemorts m'attiraient dans leur propre droit. Pour être parfaitement honnête, je ne sais pas si je serais allé aussi loin, si ça n'avait été pour lui. » Severus inclina la tête vers Harry en parlant. Il reconnaissait par-là, silencieusement, que Harry avait bien deviné la raison pour laquelle il était devenu un mangemort.

« Lucius était déjà l'un des préférés de Voldemort. Ensemble nous faisions une excellente équipe, nos talents empiétaient et couvraient certaines zones que d'autres que nous n'auraient pas réussi. Nous étions puissants ; nous étions invincibles. Nous ne craignions qu'une seule personne, Voldemort. Pris dans le tourbillon de pouvoir et d'amour. » Il renifla le mot. « J'aurais fait n'importe quoi, et en fait, j'ai fait beaucoup de choses que je regrette maintenant que la folie de ma jeunesse s'est détériorée.

« C'était une mission qui paraissait insignifiante. Même maintenant, je n'en vois pas l'importance. Encore que quelque part, malgré le fait qu'elle semblait facile, Lucius et moi avons échoué. Aujourd'hui encore, je ne comprends pas comment nous avons pu échouer, » Il prit une profonde inspiration.

C'est ici, pensa Harry en le regardant très attentivement.

« Nous sommes retournés voir Voldemort tout en sachant que nous serions punis. Nous étions fatigués, sales et effrayés. C'était de notre faute si la mission avait échoué, de cela nous étions certains. L'échec n'était pas une option avec Voldemort ; il n'écoutait pas les excuses. Nous craignions la douleur, mais pas la mort. Voldemort n'aurait pas tué ses deux plus puissants mangemorts, pas pour quelque chose d'aussi commun que de ne pas réussir une mission sans importance.

« Lucius n'a pas laissé le temps à Voldemort de parler, quand nous nous sommes présentés devant lui. Sans me jeter un regard, il a débité l'histoire de mon échec. D'après lui, j'avais seul saboté la mission. J'étais si stupéfié que parler était au-delà de mes capacités. Je voulais nier la réalité de la trahison de Lucius. Mais je ne le pouvais pas. Et Voldemort n'a pas attendu d'entendre ma version.

« Ce fut la pire punition que j'ai expérimentée entre ses mains. Il m'a laissé brisé et presque mort, inconscient et allongé dans une marre de sang. Je t'ai dit cela, non ? »

Harry hocha la tête sans rien dire. Il se souvenait clairement de la conversation qu'ils avaient eue quand Severus lui avait appris l'histoire. Cette fois, c'était comme s'il entendait une histoire différente. Cette fois, il comprenait la profondeur des cicatrices que Lucius avait infligées à Severus.

« Pensais-tu vraiment que tu comptais tant pour moi ? Que j'aurais risqué de perdre ma place en tant que préféré de Voldemort, Severus ? » Railla-t-il alors que je me battais pour rester conscient. « Tu as toujours été un tel fou, si rapide à croire en quelques rêves éphémères, quand en réalité je t'ai utilisé toi et ton pouvoir pour obtenir les faveurs de Voldemort. Ne le savais-tu pas Severus ? Je sacrifierai n'importe quoi pour m'assurer d'avoir ce que je désire. Rien d'autre ne m'importe autant. Et certainement pas toi.

« Mes illusions se sont brisées ce jour-là. » Dit Severus doucement, ses yeux rencontrant directement ceux de Harry. « Cela, » Il désigna vaguement l'espace qui les séparait, « a été extrêmement difficile pour moi. « Et je ne peux pas en toute honnêteté dire que ce sera un jour plus facile. »

Et maintenant je comprends enfin. Je sais pourquoi tu te caches derrière tes murs, pourquoi tu te recules quand on te touche, même innocemment. Mais pourquoi, Severus ? Pourquoi ai-je le droit de savoir cela maintenant, alors que tu ne me l'avais jamais dit avant ? Je ne suis pas un complet abruti ; je peux voir dans tes yeux que tu n'avais absolument pas envie de m'en parler.

« Il n'y a jamais rien de facile. » Répondit Harry avec suffisamment de sincérité. « Les circonstances de nos vies ont rendues 'faciles' certaines chose des contes de fées. Pourtant rien dans notre monde n'est simple ou facile. Je ne peux même pas franchir le pas d'une porte sans me battre avec celle-ci. » Ajouta-t-il avec un sourire triste et poursuivit plus sérieusement, « Je ne me suis jamais attendu à de la facilité et de la simplicité, Severus. Et à la fin, certaines choses sont plus importantes, de toute façon. »

Les yeux de Severus exprimèrent presque de la vulnérabilité alors qu'il restait assis en silence. Harry ressassa tout ce que Severus lui avait dit cette nuit-là et ajouta les nouvelles informations qu'il avait apprises ces trois dernières années. Peu importe ce que Drago a dit pour le faire s'ouvrir ainsi, j'ai besoin de le remercier. Pensa Harry. La colère initiale et protectrice qu'il avait ressentie s'était transformée en une sorte de reconnaissance perplexe.

« Il m'a conseillé de mettre de côté ma peur suffisamment longtemps pour saisir ma chance. » Murmura Severus à peine plus fort qu'un chuchotement, en surprenant Harry qui le regarda avec surprise.

Comment se fait-il que tu saches toujours ce à quoi je pense ? Harry le dévisagea alors que ses mots faisaient leur chemin vers sa compréhension. Peur ? Peur de quoi ?

Severus tendit son bras droit dans l'espace qui les séparait. Il tenait quelque chose serré dans sa main. Lentement ses doigts s'ouvrirent et révélèrent quelque chose qui scintillait comme de l'or dans le flamboiement des flammes. Curieux, Harry se pencha pour regarder d'un peu plus près.

C'était un griffon, incrusté d'exquis détails dorés. Les yeux de rubis scintillaient et lui donnaient l'air vivant, presque gelé dans son action de tourner en cercle.

« J'ai peur que ce soit la seule parcelle de normalité que je puisse te donner. » L'informa doucement Severus.

« Une fois de plus, je me trouve à regarder à travers la fenêtre de la normalité, à voir ce que je n'aurai jamais, reposer au-delà de ma portée. » Les paroles que Harry avait prononcées un peu plus tôt dans la journée lui revinrent alors que son regard passa du griffon au visage de Severus. Il savait que ça devait être évident, mais il n'était pas totalement certain de la signification de ce que Severus lui offrait.

« Tu n'as pas besoin de bagues, ni de paroles, ni de cérémonie pour aimer quelqu'un. » Alors que les mots voltigèrent à travers ses souvenirs, Harry vit le griffon pour ce qu'il était : ce n'était pas une figurine tournant en cercle, mais une bague sculptée avec talent et qui ressemblait à peine à cela.

Harry écarquilla les yeux et il les leva à nouveau vers le visage de Severus. Le dernier morceau du puzzle se mit en place. « Il m'a conseillé de laisser ma peur de côté suffisamment longtemps pour saisir ma chance. » Peur, peur que tout recommence à nouveau. De faire confiance à un autre, d'aimer un autre, de se lier à un autre pour le voir à nouveau lui tourner le dos. Ce n'était pas simplement une bague que Severus tenait devant lui. Ce n'était le symbole d'une sorte de moquerie de la cérémonie de Ron et Hermione. Il n'offrait pas du tout une bague à Harry. Il s'offre à moi de lui-même.

D'une main qui commençait à trembler sans raison perceptible, il prit la bague de la main de Severus. A l'instant où sa main le toucha, le griffon s'anima et surprit tant Harry qu'il le lâcha presque. Magique. Bien sûr que c'est magique. Personne ne peut tailler quelque chose comme ça sans l'aide de la magie.

La petite créature secoua ses ailes, se défit de la main d'Harry et vola vers son autre main. Il circula autour de son majeur avant de d'envelopper la base du doigt et de redevenir inanimé. Curieux, Harry leva la main et regarda la bague. Elle était plus large maintenant et avait pris la forme de son doigt.

« C'est comme si elle avait été faite pour moi. » Murmura Harry sans réaliser qu'il avait parlé à voix haute.

« C'est le but, Monsieur Potter. » Remarqua Severus d'un ton sec. Le familier sarcasme pince sans rire qui colorait la voix de Severus à chaque fois qu'il parlait à Harry était une fois de plus bien en place.

Harry rougit, il ne voulait pas ruiner l'ambiance avec l'un de ses habituels commentaires idiots. « Je n'ai rien pour toi, » Dit-il à Severus d'un air désolé.

Severus leva les yeux au ciel, « Je suis sûr que d'ici quelques jours, tu auras trouvé quelque chose d'approprié, énorme, tape à l'œil et sans goût que tu t'attendras à me voir porter dans toute sa gloire dorée. »

« Allons ! Je n'ai pas des goûts si horribles, » Protesta Harry plaisamment.

« Qui a eu l'idée de porter ces pantalons ? » L'interrogea Severus en haussant un sourcil incrédule. « Qui voulait prendre quelques 'nouveaux et jolis bijoux' pour mes multiples piercings ? »

« Euh, eh bien…je -»

«Vos goûts sont horribles, Monsieur Potter. Admets-le. »

Harry rencontra ses yeux sérieusement. « Je ne sais pas, Severus. Je ne pense pas que mes goûts soient si mauvais. »

Severus plissa légèrement les yeux.

« Aie foi en moi, Severus. »

Les sourcils se haussèrent à nouveau. « Je pensais qu'il était évident que c'était déjà le cas. »


Il ne s'était pas encore assis mais pouvait déjà sentir les yeux de Drago sur lui. Quelque fois, je ne parviens pas à savoir si tu es aussi perspicace que tu le parais ou si tu es simplement un fouineur. Harry attendit de s'asseoir avant de le regarder.

Drago ne dit rien, son regard passa ostensiblement de sa main à son visage. Le message dans les yeux de Drago était clair : Il était sacrément temps.

« J'ai le sentiment que je te dois des remerciements, » Dit Harry calmement, en prenant une gorgée de thé qui était apparu à côté de son assiette. A côté de Drago, Severus mangeait son petit déjeuner. Il ignorait toutes les personnes présentes et apparemment le monde entier. Plus les choses changent…

Drago haussa les épaules avec naturel. « Regarder Granger et Weasley faire traîner cela était suffisant. Vous sembliez tous les deux préparé à agoniser pendant le reste de l'éternité. »

« Que fais-tu cet après-midi ? »

« Je me lave les cheveux ? »

« Drago… »

« Pourquoi ? Quelle idiotie sans cervelle as-tu prévu aujourd'hui ? »

Harry jeta un coup d'œil vers Severus, pour être sûr qu'il n'avait pas changé d'avis et était toujours d'accord pour qu'ils soient reconnus par le reste du monde. « Viendrais-tu au Chemin de Traverse ? » Murmura-t-il.

Drago le dévisagea, « Tu veux que je vienne faire les magasins avec toi ? »

« C'est l'idée générale, oui. »

« Une raison particulière ? »

« Je voudrais juste avoir ton opinion sur certaines choses. »

« Je pensais que je ne faisais pas partie de la police de la mode. »

« Tu fais exprès d'être un connard. »

« Pourquoi, imagine donc ! » S'exclama Drago avec étonnement. « Bon sang ! Je crois que tu as raison ! »

« Drago… » Gronda Harry en serrant les dents.

« Oui, oui, je viendrai avec toi chercher un bijou, puisque apparemment tu ne penses pas pouvoir le faire toi-même. » Drago leva les yeux au ciel. « Et arrête de me regarder la bouche grande ouverte comme si tu étais un poisson à la mâchoire molle, Potter. J'ai des yeux et un cerveau. Cette charmante petite combinaison me permet de rassembler toutes sortes de choses ensemble. Peut-être te trouverons-nous aussi un beau cerveau, pendant que nous y sommes, hmm ? »

« Tu es un connard, Malfoy. »

« Tu ne m'aimerais pas autrement, Potter. »


Le bruit de cris assourdis dans le couloir atteignit les oreilles de Severus. Il leva les yeux du livre qu'il était en train de lire et regarda la porte de ses quartiers avec une curiosité perplexe. Peu importe les réserves qu'il avait eues en donnant à Harry le mot de passe pour entrer dans ses quartiers (il suspectait que le jeune homme profiterait indubitablement du geste), elles disparurent à la perspective des heures de plaisir que l'abus d'un tel privilège lui apporterait. Un sourire se dessina sur ses lèvres : il écoutait la dispute unilatérale qui se déroulait au-dehors et se l'autorisa, par indulgence, parce qu'il savait que personne n'était présent pour en être témoin.

Un peu plus fort et le château tout entier se pressera par ici, le croyant au milieu d'une bataille contre un horrible monstre, pensa Severus. Les minutes s'écoulaient et la porte ne montrait aucun signe de vouloir s'ouvrir. Finalement, au moment où il commençait à réfléchir à la possibilité d'ouvrir lui-même la porte avant de voir un rassemblement de badauds devant chez lui, elle s'ouvrit avec réticence.

Harry entra d'un pas lourd dans la pièce. Alors qu'il passait devant la porte, Severus l'entendit marmonner, « Ferme-toi sur mes talons, espèce de misérable chose, et tu serviras de combustible pour la cheminée, je me fou de ce que Severus dira. »

Il fut attentif à replacer sa froide indifférence avant qu'Harry ne le voie assis-là à sourire. Il s'éclaircit sa gorge, « Des problèmes, Monsieur Potter ? » Il dut cacher le sourire qui revenait quand il vit Harry sursauter.

« Je ne savais pas que tu étais là, » Répondit Harry d'un air penaud en avançant, inconscient que la porte essayait de le balayer quand elle se ferma. Elle n'avait apparemment pas tenu compte de la menace d'être transformé en feu de bois.

« Si tu ne t'attendais pas à ce que je sois là, pourquoi es-tu entré ? » Severus l'observa attentivement, « J'espère que tu ne voulais pas me surprendre à mon retour avec des bougies odorantes et de la musique bébête. »

Harry cligna des yeux et s'arrêta devant la chaise de Severus. Il le regarda en essayant sans succès de paraître innocent. « Euh…non. »

Severus haussa un sourcil, d'une part parce qu'il savait qu'Harry lui mentait et d'autre part parce qu'il savait à quel point cette expression particulière énervait le Gryffondor, incapable de la reproduire.

« Je t'ai trouvé quelque chose. » Harry mit sa main dans sa poche et retira un petit sac en velours.

Severus l'évalua d'un regard. Au moins ce n'est rien de trop gros, pensa-t-il avec quelque chose qui se rapprochait du soulagement. Ce fut de courte durée. A moins que le sac ne soit enchanté. Et connaissant Harry, même si c'était aussi petit que ça le paraissait, il avait pu compenser la taille en choisissant quelque chose de hideux pour lui : il le porterait de toute façon. Je ferai juste en sorte que ce soit bien caché.

La nervosité était flagrante sur le visage de Harry quand il tendit la main à Severus avec une grande appréhension. Cette nervosité ne pouvait vouloir dire qu'une seule chose : c'était si terriblement impie que même Harry le savait. Harry lui sourit d'un sourire tremblant, presque maladif, retourna le sac et versa le contenu dans la main de Severus. Il se prépara et regarda.

Il s'agissait d'un serpent sculpté de façon complexe, qui s'enroulait autour de lui-même des myriades de fois, les yeux fermés.

Severus attendit, incertain de ce qu'il était supposé faire exactement. Ce n'était pas une bague : c'était trop incrusté n'importe comment pour être de forme circulaire. Ce n'était pas un pendentif non plus, ni une broche ; il n'y avait ni boucle pour mettre une chaîne ni d'aiguille ou de fermoir. Et ce n'était pas une boucle d'oreille, non plus. Peut-être la faute vient-elle de ma connaissance limitée en ce qui concerne les bijoux, pensa Severus en se demandant si ça avait été fabriqué dans le monde moldu.

« J'ai passé la journée à rechercher la boutique dans laquelle tu as acheté la bague. » Lui dit Harry.

Severus le regarda.

« Drago m'a aidé. » Admit Harry avec un triste sourire.

« Je vois. » Il savait que ce serait difficile de demander à Harry ce que, par l'enfer, ça pouvait bien être et pour la première fois de sa vie, Severus hésitait à blesser les sentiments de Harry.

« Je l'ai un peu modifié. » Continua-t-il en faisant un geste vers le serpent.

Severus dut se mordre la langue pour éviter le commentaire sournois : un talent magique inadéquat a ruiné un sort parfaitement bon. Il se résigna à ne pas détourner le regard des yeux verts de Harry et à attendre le reste de l'explication.

« Est-ce que tu me fais confiance ? »

La calme et la ferveur avec laquelle il posa la question le surprirent. Son regard se déplaça et il regarda la bague au doigt d'Harry. La réponse était là, attirant des rayons de lumières et les recrachant en petits jaillissements de feu. Il regarda à nouveau Harry, « oui. »

Harry sourit puis, avec un sourire presque timide qui rendit Severus inexplicablement nerveux. 'Puis-je te faire confiance' était une expression qu'on ne prononçait jamais à la légère. Le désir d'hésiter et de se retrancher au fond de la chaise lui passa par la tête, quand Harry se pencha en avant et toucha le col de sa chemise. Il resta immobile ; il savait que s'il bougeait, il nierait la vérité de sa réponse. Ca devint plus difficile de demeurer immobile quand les doigts d'Harry manièrent maladroitement les petits boutons qui fermaient son col.

Bon sang, que fais-tu ? Peu importait ce qu'il s'était attendu en répondant à sa question, il ne pensait pas que Harry commencerait à défaire sa chemise. Tu lui as dit que tu lui faisais confiance, l'admonesta une petite voix au fond de son esprit. C'est la chance de le prouver. Fais-lui suffisamment confiance pour faire ce qu'il veut faire. Fais-lui suffisamment confiance pour savoir jusqu'où te pousser.

Il lui fallut tout son sang froid pour rester assis là, feignant d'être calme alors que Harry déboutonnait sa chemise. Incapable de faire autre chose, Severus verrouilla ses yeux dans ceux d'Harry. Alors que leurs yeux se rencontrèrent, Severus sentit les doigts d'Harry tressaillir et glisser d'un bouton pour frôler la peau nue de sa gorge.

Je te fais confiance, lui dit Severus silencieusement.

Harry dut comprendre le message de ses yeux. Après une pause hésitante, ses doigts s'immobilisèrent et recommencèrent leur tache. La chemise était à moitié déboutonnée quand les mains d'Harry s'arrêtèrent finalement. « Lève ta main. » Lui demanda-t-il calmement.

Complètement perplexe, mais toujours disposé à lui faire confiance, un peu plus, Severus leva la main qui tenait le serpent.

Harry le regarda et alors que Severus regardait le serpent, une étincelle jaillit profondément de ses yeux. C'était une étincelle brûlante, étincelante qui devint quelque chose d'étranger et qui n'avait pas les pieds sur terre. Ensuite, il parla mais les mots étaient un inintelligible sifflement.

Severus regarda le serpent, regarda ses paupières se soulever pour révéler des yeux émeraude brillant. Le serpent se déroula, leva la tête et regarda intensément le visage de Severus. Après un instant, le serpent commença à s'allonger et à bouger, glissa le long de sa main et enveloppa son bras. Severus regarda les yeux d'Harry suivre le serpent qui montait le long de son bas et glissa sur ses épaules. Il glissa le long de sa gorge et même s'il savait qu'il n'était pas vraiment vivant, Severus sentit les picotements du malaise alors que sa tête se creusait un trou dans son col ouvert. Il s'enroula le long de son cou comme s'il faisait en sorte d'être confortable puis glissa sa tête à quelques centimètres de sa poitrine, s'enroula autour de sa queue et s'immobilisa, ses yeux verts ouverts et étincelants.

« J'ai pensé que ce serait mieux qu'une bague. » Lui dit Harry en haussant les épaules d'un air incertain comme s'il était inquiet que Severus se mette à lui crier après. « Tu sais, puisque tu passes ton temps à faire des potions. »

Le fait qu'Harry ait utilisé le fourchlangue le travaillait. Un soupçon se forma, « J'ai besoin de parler fourchlangue pour l'enlever. »

Harry acquiesça. « Tu peux lui dire de se transformer en autre chose si tu es fatigué du collier : une bague, un bracelet, même une ceinture, » Il rencontra le regard de Severus. « Mais non, il ne s'enlèvera que si tu prononces les mots en fourchlangue. »

« Pourquoi ? » Severus s'arrêta et repensa au regard de Harry quand il avait parlé à la chose. Ses yeux se plissèrent avec perspicacité. « Que lui as-tu dit ? »

Un sourire mystérieux et fantôme passa sur les lèvres d'Harry. « Ne veux-tu pas te lever et te regarder dans un miroir ? Voir de quoi il a l'air sur toi ? »

« Tu ne vas pas me répondre. » Severus ne s'embêta pas à enlever l'énervement de sa voix.

« Je le ferai. » Lui promit Harry en souriant. « Mais pas ce soir. »

Severus leva les yeux au ciel. « Vous devenez mélodramatique, Monsieur Potter. »

« Allez lève ton paresseux derrière et va jeter un œil. »

« Impertinent gamin. » Marmonna Severus. Il se leva quand il apparut qu'Harry était prêt à le tirer.

Se sentant bizarrement énervé, Severus se dirigea avec raideur dans sa chambre, alluma quelques bougies d'un geste de la main et s'arrêta devant le miroir. J'ose dire que ça a l'air presque…approprié, pensa-t-il avec un sourire réticent. Pas du tout tape-à l'œil. Malfoy a dû le choisir pour lui.

« Et avant que tu ne fasses une remarque sournoise, Drago n'a rien à voir avec cela. » Dit Harry derrière lui.

Severus croisa son regard dans le miroir. Toujours aussi lentement, il haussa un sourcil.

« Je suis sérieux. Je l'ai choisi. Il a simplement vérifié que tu aimerais. » Lui assura Harry en venant se placer à côté de lui et regarda dans le miroir. « Ca te va bien. »

« De quoi ai-je l'air ? »

Harry lui sourit malicieusement en le regardant dans le miroir. « Tu ressembles à un pirate. » Il fit un geste en direction du reflet de Severus. « De longs cheveux, une chemise ouverte, un bijou. Tout ce dont tu as besoin est de boucles pendantes et d'un pantalon en cuir. Hé, je sais ! Où les as-tu mises ? » Commença Harry en se dirigeant vers l'armoire de Severus.

« Non, Monsieur Potter. »

« Mais -»

« Non. »