Ndlt : quelques réponses aux reviews anglophones avant ce chapitre tant attendu!
Tanya : Les cauchemars de Ginny sont plus qu'un simple souvenir des expériences vécues avec le journal, mais ils n'ont aucune connexion avec les rêves actuels de Harry. Tu verras ce que j'ai en tête pour le Professeur Rogue. À vrai dire, je me sens à la fois impatiente de commencer à écrire sur lui et étrangement anxieuse. Sinon, tu en sauras un peu plus sur ce que sont les rêves d'Harry, d'autant plus que les choses progresseront. Et j'espère que les chapitres qui vont en s'allongeant rendront l'attente moins difficile!
Kaydee : (...) Oui, ils finiront par découvrir la vérité à propos de Sirius et Remus, mais ils doivent d'abord comprendre ce que signifie être un véritable Maître des Farces et Entourloupes! 8-)
NdlT : que puis-je dire sinon : savourez bien ce loooong chapitre et on se retrouve au bas de la page!
Chapitre Treize : Options Alternatives
Sirius sursauta lorsque, sans prévenir, quelqu'un posa une main amaigrie sur son épaule. Il ouvrit ses yeux avec difficulté, regarda aux alentours pour y découvrir Remus derrière lui, une tasse de thé à la main. Il ne s'était pas rendu compte qu'il s'était assoupi, et instinctivement, il se retourna pour vérifier qu'Harry allait bien. Son filleul dormait encore, tourné sur le côté, le visage enfoui dans un coussin comme pour empêcher la lumière du jour de l'atteindre. La matinée était déjà bien avancée, et un soleil resplendissant trouvait peu à peu son chemin dans le salon.
"J'aurais vraiment aimé que tu me laisses au moins te faire un lit avec quelques couvertures. Voir ta tête dodeliner, puis tomber de côté quand tu t'endors, puis sursauter, puis glisser encore me donne le tournis," déclara Remus, offrant la tasse à Sirius qui l'accepta de bon coeur. À vrai dire, Sirius préférait demeurer dans le salon, à terre, que dans n'importe quel lit loin de son filleul. Peut-être était-ce le temps passé en tant que 'Sniffle', à Azkaban ou plus tard, après s'en être enfui. Rester assis n'était pas plus difficile que cela, pourtant, nombre de gens haïssaient cette simple pensée. Il but avidement une gorgée de thé et la savoura longuement, comme si sa chaleur permettait de chasser la peur glacée qui semblait s'être infiltrée en lui depuis ce matin. Remus avait laissé le breuvage bien trop infuser, ce qui fournit à Sirius un surplus de caféine aussi nécessaire qu'apprécié.
"Mmmmf," grommela-t-il, agitant distraitement les orteils de son pied gauche pour relancer la circulation dans sa jambe engourdie - il dut concéder silencieusement à Remus que la position assise n'était peut-être pas si confortable, mais il n'était pas prêt de l'avouer de vive voix. Il but encore, finit le thé en quelques gorgées et reposa la tasse avec un minimum de délicatesse sur la table à café. "Ooooh, j'ai l'impression d'être un Souafle qu'on aurait balancé à travers les buts un bon millier de fois," reprit-il doucement d'une voix fatiguée.
Harry s'agita un moment, gémit même sourdement et posa une main sur son front : ses doigts étaient rigides, et un faible sifflement de douleur s'échappa de ses lèvres avant qu'il ne fourre sa tête une nouvelle fois dans le dossier du canapé. Son coude masquait son visage, ses épaules étaient tendues ; Sirius tendit le bras et massa doucement les muscles crispés. Après un moment, le dos de son filleul sembla se détendre et sa respiration se calmer comme Harry replongeait dans le sommeil. L'expression de Remus s'était assombrie à cette scène, et il regardait intensément Sirius.
"Je crois que sa cicatrice lui fait mal constamment maintenant," signifia Sirius à voix basse. Remus acquiesça, et il s'assit sur une chaise en face de son ami, l'air fatigué.
"Moi aussi."
"Je ne sais pas quoi faire," reprit Sirius. Remus parut comme médusé un instant par la spontanéité de ces propos, puis il cilla plusieurs fois tout en considérant sa réponse :
"Tu le fais déjà."
"Ce n'est pas assez," répliqua Sirius ; ses yeux étaient encore posés sur Harry, mais maintenant, il passait sa main dans ses propres longs cheveux, d'un geste agité que Remus ne reconnaissait que trop bien comme un de frustration.
"Non, ça ne l'est pas. Mais c'est le mieux que nous puissions faire pour le moment," lui répondit Remus, puis il se pencha, son regard insondable se fixant d'abord sur Harry avant de glisser vers Sirius.
"Et je déteste ne pas pouvoir en faire plus," coupa Sirius d'une voix si désespérée qu'il en frémit lui-même. Avant qu'il n'en prenne conscience, Remus était déjà debout, devant lui, et lui tendait la main comme une invitation ; son visage, néanmoins, était implacable.
"Viens, demandons à Ron et Hermione de rester ici pendant un moment. Tu as besoin d'air frais," commanda-t-il. Sirius se retourna encore une fois vers Harry avant d'accepter l'aide de Remus et de se tenir précairement debout. Il s'étira un long moment, cambrant son dos puis se baissant jusqu'à toucher ses pieds, dans l'espoir de redonner un peu de jeunesse à ses articulations. Après un dernier regard pour s'assurer qu'Harry dormait encore, Sirius se détourna et suivit Remus hors du salon, sans prendre conscience de deux yeux vert émeraude qui observaient silencieusement le départ des deux hommes avant de se refermer, leurs expressions sibyllines et indéchiffrables.
Harry quitta doucement sa torpeur et se dirigea vers un merveilleux univers de chaleur, tandis qu'une apaisante et douce vague de sérénité semblait le submerger. Ses muscles se décrispaient à son contact et ses terminaisons nerveuses cessaient de l'élancer douloureusement. Harry soupira, chevauchant ces exquises sensations qui le ramenèrent presque aux confins du pays de Morphée, avant de réaliser, brutalement, que sa cicatrice ne lui faisait plus mal.
Des doigts fins et efflanqués, dotés d'ongles pointus et émettant une surprenante chaleur, serraient son épaule ; en un instant, Harry était presque tombé de frayeur du canapé. Les couvertures furent projetées en l'air, tout comme ses membres, alors qu'il essayait de s'éveiller complètement au plus vite, mais les piaillements excités et les voix inquiètes qui fusèrent simultanément retinrent son attention.
"Doucement, Harry, ça va! C'est juste Fumseck," disait Hermione d'une voix sécurisante. Harry attrapa ses lunettes de ses mains tremblantes et les mit sur son nez pour découvrir le magnifique phénix voleter au-dessus de lui, ses petits yeux dorés inquiets et agités. Harry mit une main sur son coeur et prit le temps de quelques grandes inspirations, tout en observant la pièce : le professeur Dumbledore était assis en face de lui, une tasse de thé à la main ; le contenu avait d'ailleurs l'air d'avoir été projeté sur sa barbe. Mr et Mrs Weasley étaient également présents, tout comme Ron et Hermione. Ils s'étaient tous précipités vers lui pour le calmer et l'aider à se repositionner sur le siège, ce qui le fit rougir inconfortablement.
"Hé, mince Harry, t'as failli me provoquer une attaque cardiaque!" s'exclama Ron avec un rire forcé.
"Je m'en suis presque fait une moi-même," plaisanta Harry. Il offrit un petit regard désolé en direction de Fumseck, qui émit quelques autres notes indignées avant de se revenir se poser sur son épaule. Harry réprima un frisson au contact des serres qui lui rappelèrent une fois de plus le cimetière et les yeux inhabités de Cédric ; il déglutit difficilement, tentant de chasser ces souvenirs indésirables, et ferma les yeux un instant. Fumseck sembla sentir sa peur et logea sa majestueuse tête contre le cou d'Harry, pépiant au creux de son oreille ce qui ressemblait à un ronronnement volatile. Les images se dissolurent immédiatement, tandis que cette sensation de tranquillité se glissait une fois de plus en lui. Distraitement, il leva une main tremblante pour la passer dans ses cheveux ébouriffés, mais il se rendit compte que sa tête était mouillée sur tout le côté droit. Il croisa les yeux de Dumbledore.
"Les larmes... de Fumseck?" demanda-t-il, hésitant. Dumbledore acquiesça radieusement.
"Il a insisté pour venir le jour de ton anniversaire, je pense qu'il souhaitait t'offrir un cadeau, lui aussi."
Harry resta immobile un instant, parcourant mentalement chaque partie de son corps pour juger de sa condition physique. Il tendit ses mains devant lui : elles tremblaient encore, mais pas autant qu'auparavant. Il aurait pu facilement écrire avec une plume, et son estomac, qui semblait s'être noué douloureusement depuis un mois, était relâché et... émit un gargouillis. Harry ne put que hausser les sourcils à ce bruit qu'il considérait comme appartenant au passé.
"Comment te sens-tu, Harry?" demanda un attentif Arthur Weasley. Les yeux de Ron et d'Hermione étaient écarquillés et passaient sans cesse de Fumseck à Harry.
"Je me sens... beaucoup mieux. Comme si je pouvais marcher un peu et faire autre chose que juste rester assis," répondit Harry, puis il sourcilla. "Quelle heure est-il? Je pensais que vous ne reviendriez pas avant ce soir, Mr Weasley." Ce dernier sourit.
"J'ai quitté le travail plus tôt. Pour tout t'avouer, Percy s'occupe de beaucoup de choses au Ministère en ce moment, et je l'ai devancé : il sera là plus tard... Ne t'inquiète pas, Harry," continua Mr Weasley, levant une main pour l'empêcher de s'inquiéter à propos de son parrain, "J'ai déjà prévenu Sirius de l'heure à laquelle il arrivera."
"Où est-il?" demanda curieusement Harry : Sirius ne l'avait pas quitté depuis des jours maintenant.
"Remus a réussi à le faire sortir un peu. Il a juste eu à annoncer que Sirius commençait à devenir aussi blafard que Rogue, et ton parrain était déjà sorti en courant!" expliqua Ron avec un air malicieux. Harry lui répondit par un petit sourire.
"Alors, raconte-nous exactement à quel point tu te sens mieux!" demanda Hermione, toujours à l'affût d'une réponse plus détaillée.
"Je ne pense pas que je pourrais jouer au Quidditch, mais je me risquerais bien à voler," répondit Harry avec envie. L'idée de filer de nouveau sur son balai faisait presque bondir son coeur de joie... Jamais de tout son été n'avait-il pensé qu'il aurait pu voler encore une fois... 'Arrête ça. Tu vas mieux, point barre,' se corrigea-t-il fermement avant que ces sombres pensées ne l'entraînent.
"Parfait! Dans ce cas, on est sûr que tu vas mieux!" s'exclama joyeusement Ron, ce qui fit sourire Harry : ses amis savaient à quel point le vol était important pour lui.
"C'est surprenant. J'avais, bien sûr, déjà lu des articles sur les pouvoirs de guérison des larmes de phénix, mais c'est tellement différent de voir soi-même leurs propriétés. Tu as l'air beaucoup mieux, Harry, tu n'es plus aussi pâle, et même tes yeux semblent briller un peu plus," dénota Hermione, sans s'arrêter une fois pour reprendre son souffle, avant que Dumbledore ne lève une main pour interrompre le dialogue entre les trois amis.
"Malheureusement, le don de Fumseck n'est pas une solution. Les larmes de phénix ne peuvent te protéger des rêves à venir, Harry, et comme tu peux le voir par les tremblements résiduels de tes mains, tu n'es pas complètement guéri. Cependant, cela nous laisse du temps supplémentaire afin de trouver une solution adéquate et durable."
"Mais pourquoi votre oiseau ne pourrait-il pas venir pleurer la prochaine fois qu'Harry ira mal?" demanda Ron, les sourcils froncés. Ce fut Hermione qui lui répondit en secouant la tête :
"Pour que les larmes d'un phénix contiennent ces pouvoirs de guérison, elles doivent être librement versées, Ron."
"Et bien que Fumseck soit très attaché à Mr Potter ici présent, il va et vient à sa guise. Il disparaît parfois des mois durant l'hiver, je pense qu'il se dirige alors vers le sud, mais personne ne connaît sa destination avec précision. Les phénix sont des animaux assez solitaires," expliqua Dumbledore, mais Ron continua à sourciller de frustration.
"Et il ne pourrait pas rester dans le coin?"
Harry nota que Fumseck semblait regarder Ron d'un oeil circonspect, comme si, à tout moment, le rouquin pouvait sauter sur lui et le chasser, un filet à papillons à la main.
"Je ne songerai jamais, ne serait-ce qu'une seconde, à restreindre la liberté de Fumseck, Mr Weasley," le raisonna Dumbledore d'un ton sérieux. "Il me fait un grand honneur en me gratifiant de sa présence. De plus, les larmes de phénix perdent de leur efficacité à certains moments de leurs Cycles de Cendres."
Ron hocha la tête, sans paraître satisfait pour autant de cette réponse. Harry décida de lui procurer un nouveau sujet de conversation en choisissant ce moment pour tester ses nouvelles forces : il se mit debout, les bras tendus devant lui comme s'il s'attendait à tomber, mais il ne ressentit qu'un léger étourdissement qui se dissipa vite. Ron et Hermione se tinrent près de lui, souriant devant le regain de santé de leur ami, et Fumseck piailla une seule fois avant de voleter depuis l'épaule d'Harry jusqu'à celle de Dumbledore.
"Merci Fumseck," remercia sincèrement Harry, et il regarda pendant un instant les adultes présents : il savait que les pouvoirs magiques des larmes ne dureraient pas indéfiniment. Déjà, il pouvait ressentir un picotement d'énergie le long de sa cicatrice, et il décida rapidement de profiter agréablement de ces réserves d'énergie, tant qu'elles dureraient.
"Si ça ne vous dérange pas, j'aimerais aller dehors et peut-être monter un peu sur mon balai," annonça-t-il.
"Sois prudent, Harry," commença Mrs Weasley d'une voix inquiète. "Ne vole pas trop haut, ne va pas trop vite et surtout ne t'épuise pas." Harry acquiesça la tête d'un geste rassurant, mais elle continua néanmoins. "Peut-être que les jumeaux pourraient vous accompagner, au cas où. Est-ce que ce Sort de Renverse-Toit est encore actif?" Harry haussa les épaules tandis que Ron et Hermione secouaient la tête.
"Je ne pense pas," lui répondit Ron, mais il fut interrompu par un immense fracas qui secoua le plafond au-dessus d'eux. Ils entendirent nettement quelques jurons, mais les voix des jumeaux étaient trop basses pour en distinguer clairement les subtilités. 'C'est pas plus mal d'ailleurs,' pensa Harry en voyant Mrs Weasley froncer les sourcils de désapprobation.
"Le sort n'est plus actif maintenant," les informa Hermione d'une voix neutre, bien que son visage montrât quelques discrets signes d'amusement.
"Pourquoi n'irais-tu pas les chercher, Ron, ainsi que Ginny si elle veut se joindre à vous?" ordonna - plus que demanda - Mrs Weasley, après avoir jeté un regard à Dumbledore qui répondit discrètement par la positive. Harry sourcilla, s'il ne se trompait pas - et à les voir, il ne le pensait pas - tous les adultes essayaient d'avoir la maison vide pour parler tranquillement. Il soupira : de toute façon, il y avait fort à parier que le sujet de conversation ne soit pas plaisant.
Toutefois, alors qu'ils quittaient la pièce, il vit Hermione se diriger vers Mr Weasley et lui souffler quelques mots au creux de l'oreille. Ce dernier parut sérieux et acquiesça gravement, et Hermione lui sourit avec gratitude et les rejoignit près de la porte d'entrée. Harry attrapait son balai alors que Mrs Weasley leur demandait de renvoyer Remus et Sirius à l'intérieur s'ils les croisaient.
"Bien sûr," lui répondit Hermione. Harry jeta un dernier regard en direction des adultes restant dans le salon, et réprima son propre désir d'écouter ce qui se dirait. Mais en repensant à la discussion de Sirius et Remus qu'il avait surprise plus tôt, il se convainquit qu'il valait parfois mieux ne pas savoir certaines choses.
"Je crois que c'est le temps pour vous de prendre précisément connaissance des actions de Voldemort depuis le début de l'été. Ceci est le journal de rêves d'Harry," commença solennellement Dumbledore, avant de tendre à Sirius le cahier. Ce dernier l'accepta prudemment, sentant tous les regards posés sur lui, et dut supprimer la culpabilité qu'il ressentait à lire quelque chose d'aussi personnel. En fait, ce sentiment était probablement plus lié à son désir de lire ces notes. Après tout, il se désespérait à essayer d'aider Harry lorsque ce dernier se réveillait de ses cauchemars en hurlant, mais son filleul détestait en parler.
"Y'a-t-il une page particulière que vous voulez que je lise?" demanda-t-il à Dumbledore, qui secoua la tête, ses yeux et son visage solennels.
"Peu importe la page," répondit-il gravement. Sirius ouvrit donc le journal, laissant les pages glisser au hasard. La première chose qu'il nota fut combien, au cours des dernières semaines, l'écriture d'Harry s'était détériorée, puis il commença à lire...
Treize juillet
Je suis dans la chambre de quelqu'un. En fait, il y a deux personnes : un couple. Ils sont vraiment jeunes. Voldemort est déjà dans la pièce quand mon rêve commence. Il s'est emparé de la baguette de l'homme et s'en sert pour le menacer. Elle est terrifiée. Elle n'arrête pas de demander à l'homme... Ted, son nom est Ted. Elle n'arrête pas de lui demander ce qui se passe. Je ne crois pas qu'elle sache même qui sont les Mangemorts ou qui est Voldemort, donc je pense qu'elle est une Moldue.
Voldemort répète à Ted combien il a eu tort de se marier à une Moldue. Elle essaye de plonger pour atteindre le téléphone et appeler la police, mais Voldemort la paralyse avec le sortilège d'Imperium. Il... euh... il... Monsieur le Directeur... Voldemort lui fait faire des choses avec les Mangemorts puis avec lui. Elle pleure pendant ce temps. Deux des Mangemorts maintiennent l'homme. Voldemort dit qu'il aime entendre ses cris. Son nom est Maggie. Ils sont... sont brutaux avec elle, monsieur. Je préfèrerais ne pas en avoir à plus à dire que ça. Je sais que ce journal est supposé aider et tout, mais... bon... je ne vois pas comment le fait de raconter ce rêve en détail aidera qui que ce soit. Quand il a fini avec elle, il la frappe par le sortilège Doloris. Il la maintient sous le sort pendant un long temps, et je sais qu'il veut la tuer avec. Puis je me réveille.
'Non oh non, oh non, oh non, non, pas Harry, pas ça, oh non...' Sirius réalisa que ces mêmes pensées tournoyaient encore et encore dans son esprit. Il reposa le journal et regarda Dumbledore, dont l'expression solennelle, voire triste, ne variait pas. Sirius observa Remus se pencher et se saisir du journal, puis nota la dilatation de ses pupilles dès qu'il eut ouvert les notes au hasard et commencé à les lire.
Sirius se sentait comme sale, révulsé. Il était horrifié qu'Harry ait dû expérimenter tout cela, en parler, y assister. Comment diable pourrait-il aider Harry à traverser cette épreuve? Que pouvait-on dire pour rassurer un adolescent qui, presque chaque nuit, entrevoyait des assassinats sadiques de personnes innocentes? En soi-même, c'était déjà impressionnant qu'Harry ait gardé de l'appétit. Que Merlin lui vienne en aide.
"Combien de temps?" demanda-t-il d'une voix rauque et tremblante.
"Deux semaines après la fin du Tournoi des Trois Sorciers, Harry a eu son premier rêve," lui répondit gravement Dumbledore.
"Y'a-t-il vraiment quelque chose d'important que nous ayons appris par ces rêves? Une information fondamentale que nous n'aurions pu obtenir par aucun autre moyen?" demanda Remus en donnant le journal à Arthur Weasley comme s'il lui brûlait les mains. "Car je ne vois pas pourquoi nous laissons rêver Harry, si ce sont les sortes de choses auxquelles il doit assister." Sirius hocha la tête, entièrement du même avis.
"Je suis d'accord. Il est possible que ces rêves nous fournissent de précieux renseignements un jour, mais actuellement, ils font plus de mal que de bien," accorda Dumbledore. "Malheureusement, l'esprit humain a besoin de rêver, et même si Severus élaborait dès demain une nouvelle potion de Sommeil sans Rêves, sans accoutumance ni effets secondaires, Harry ne pourrait la prendre longtemps. Lorsque la potion de Sommeil sans Rêves a été inventée, il y a de cela plusieurs siècles, les conclusions par rapport à son usage étaient formelles à ce sujet. Elles notaient qu'en plus de tous les problèmes connus de cette potion, même les sujets avec des métabolismes exceptionnels qui n'avaient d'abord ressenti aucun effet secondaire n'avaient pu boire le breuvage plus de trois ou quatre semaines avant que leur esprit ne s'en trouve détérioré. En deux mois, la plupart étaient devenus fous."
Le visage d'Arthur Weasley était horriblement pâle, et lorsqu'il tendit le journal à sa femme, Sirius distingua une certaine résistance dans ses gestes : il ne voulait pas que Molly voie ces notes. Sirius ne pouvait pas l'en blâmer, il souhaitait lui-même ne pas les avoir lues. Il croisa le regard de Remus un moment. La situation était désastreuse. Bien pire que tout ce qu'il craignait... et Sirius bénéficiait d'une imagination fertile. Il savait qu'Harry assistait à des tortures, et peut-être des meurtres, mais jamais n'avait-il réalisé la profusion de supplices dont Voldemort disposait. Il aurait dû. Après tout, ce monstre avait tenté de tuer un nourrisson d'à peine un an.
"Alors, comment se fait-il que je n'aie rien entendu de tout cela?" fit remarquer Arthur à l'intention de Dumbledore. "Je sais bien que la liste des Personnes Disparues que le Ministère garde à jour a triplé durant le dernier mois, mais je n'ai rien vu à propos des meurtres. Comment Fudge peut-il garder de telles informations confidentielles?"
"Fudge est terrifié à l'idée de perdre sa position. Il s'est entouré de personnes qu'il sait être loyales, et même les Aurors à son service sont sélectionnés en fonction de leurs opinions. Et pendant que tout le Ministère s'emploie à régler des questions d'ordre mineur, l'équipe de Fudge en profite pour masquer l'évidence du retour de Voldemort."
"Mais les corps? Les maisons? La Marque des Ténèbres?" interrogea Sirius.
"La Marque des Ténèbres s'efface en moins de vingt-quatre heures. Avec quelques Sorts d'Amnésie sur les voisins, personne ne remarque rien. Même les signatures magiques des Sorts Impardonnables s'estompent. Tout ce qu'ils ont à faire est d'empêcher les gens de s'approcher du lieu des meurtres pendant un mois ou deux, et presque toutes les preuves auront disparu d'ici-là. Quant aux corps... je ne sais pas la façon dont ils en disposent. Mais nous devrons le découvrir. Maintenant, tout ce dont nous avons besoin est la preuve que Fudge trompe la communauté entière des sorciers, et son mandat sera révoqué."
Arthur Weasley acquiesça, les traits figés, et passa son bras autour de sa femme lorsqu'elle commença à sangloter. Le journal glissa de ses mains et tomba à terre, puis Arthur continua : "Il ne pourra pas tout masquer indéfiniment, c'est certain. Il y a tellement de personnes qui cherchent inlassablement leurs proches disparus que la moindre erreur lui sera fatale." Dumbledore acquiesça.
"Et c'est pourquoi je pense qu'il s'emploie déjà à mettre en place des éléments propres à distraire l'attention de la presse et du public." Sirius sentit un frisson le parcourir aux mots du Directeur.
"Harry."
"Oui, Sirius. Harry. Je crois que c'est la raison pour laquelle Fudge insiste tant pour qu'un procès ait lieu à propos de la mort de Mr Diggory. Cela occuperait certainement La Gazette du Sorcier pendant un moment."
"Le Survivant au Tribunal, accusé de Tricherie au Tournoi des Trois Sorciers et de Meurtre sur un camarade d'école, page une. La liste des Sorciers et Sorcières Disparus triple en un mois, page sept," commenta Arthur d'une voix dégoûtée. "C'est très courageux de la part de Fudge de sacrifier l'innocence d'un adolescent pour conserver son métier." Sirius réalisait à quel point cette politique pesait lourdement sur les épaules d'Arthur : il suspectait que même si Arthur adorait son métier, il aurait démissionné depuis longtemps en protestation, si sa position et les informations qu'il recueillait n'étaient pas aussi indispensables à Dumbledore.
"Mais nous avons encore du temps avant que cela n'arrive, n'est-ce pas?" intervint calmement Remus. Dumbledore glissa ses doigts sous ses lunettes et pressa longuement l'arcade de son nez avant de répondre :
"Oui, je pense que nous avons encore du temps."
"Dans ce cas, notre priorité doit être de faire cesser ces rêves," s'exclama Molly. Ses yeux étaient encore bouffis et rouges, mais sa voix était ferme et claire.
"Monsieur le Directeur?" Une voix timide s'éleva depuis la porte d'entrée. Sirius, anxieux, se retourna abruptement tandis que Remus se levait puis, après un moment d'indécision, se rasseyait. Hermione se tenait sur le pas-de-porte, et sembla apeurée lorsqu'elle nota les larmes qui ruisselaient sur le visage de Molly. Sirius priait pour qu'elle n'ait pas trop entendu de leur conversation.
"Oui, Miss Granger?" demanda gentiment Dumbledore.
"J'ai eu une idée dont je voulais vous parler, mais tout d'abord, j'ai quelques questions. Je voulais les poser sans qu'Harry soit là," commença-t-elle, se recroquevillant presque sur elle-même devant l'intensité des regards qui fusaient vers elle.
"Continuez, je vous en prie," dit Dumbledore pour la rassurer.
"Et bien, quand ces attaques ont-elles lieu? Le jour et la nuit, ou alors seulement la nuit?" débita Hermione à toute vitesse, et Sirius se figea de surprise. Bien vu. "Je veux dire... j'ai remarqué qu'Harry se reposait bien pendant la journée, enfin il a encore des cauchemars, mais comme il ne les reporte pas dans son journal, je pense que ce sont des cauchemars normaux, et pas... pas ceux avec Vous-Savez-Qui." Dumbledore commençait à sourire.
"Sorti tout droit de la bouche des enfants..." murmura Remus dans un souffle. Sirius hocha la tête avec enthousiasme.
"Vous avez raison, Miss Granger," répondit Dumbledore avec un doux sourire. "Pour l'instant, Voldemort préfère encore agir dans l'ombre. Si Harry ne dormait que le jour et restait éveillé la nuit... C'est une idée pour le moins intéressante. Je pense qu'il nous faudra l'appliquer dès la prochaine nuit sans potion de Sommeil sans Rêves. Merci beaucoup, Miss Granger," la remercia-t-il, signifiant la fin de la conversation. Hermione sourit largement avant de déguerpir hors de la pièce.
"Mais les attaques des Mangemorts avaient auparavant lieu tout le temps, pas seulement la nuit," objecta Arthur, se référant à l'époque précédant la mort de Lily et James. Remus et Sirius acquiescèrent.
"ll est vrai que Voldemort n'aura pas encore longtemps besoin de se cacher, du fait de l'amplification de son pouvoir. Il devient de plus en plus fort chaque jour, et bientôt sera suffisamment hardi pour ne plus craindre la lumière du jour," admit Dumbledore.
"Et nous ne faisons que lui faciliter la tache," ajouta Sirius d'un ton désabusé.
"Surtout quand Fudge se préoccupe de tout nettoyer derrière lui," renchérit aigrement Arthur. "Quand le public le saura..."
"C'est pourquoi nous devons impérativement trouver les corps," les coupa Dumbledore d'une voix ferme.
"Pourtant, certains doivent déjà les rechercher, je me trompe?" demanda Remus. Dumbledore hocha la tête mais continua :
"J'ai confié cette mission à plusieurs personnes déjà, mais j'ai aussi besoin de votre aide. Arthur, sois attentif à toute dépense d'argent qui te paraîtrait exagérée ou suspicieuse. Ou des mentions de lieux que tu ne connais pas. Quoique ce soit d'étrange. Je n'exclus pas la possibilité que tu trouves quelque chose, d'autant plus que Fudge n'excelle que dans un seul domaine, celui de la bureaucratie." Arthur opina du bonnet, et Sirius pouvait voir qu'il était heureux d'aider. "Néanmoins, garde-toi bien d'être découvert, Arthur. J'ai besoin de toi, ne risque donc rien qui pourrait mettre en danger ta position au Ministère." Arthur acquiesça de nouveau aux paroles de Dumbledore et Sirius nota qu'il serrait fort la main de Molly.
"Nous avons encore un peu de temps dans ce cas. Du temps dont Harry a désespérément besoin," rajouta Remus en souriant en direction de Sirius d'une manière qui se voulait rassurante ; Sirius apprécia ce geste, bien qu'il dût réprimer à chaque seconde l'idée jouissive de bondir de sa chaise, de traquer Fudge et de le tuer pendant qu'il mangerait son repas. Il essaya de se concentrer et prit la parole :
"Donc Harry reste encore pendant trois jours au calme avec la potion, puis on change ses heures de sommeil, c'est bien ça?" Il avait un goût amer dans la bouche à l'idée de ne pouvoir faire que si peu.
"J'ai également demandé à Severus de venir observer Harry pendant les quelques jours où il n'aura pas de potion," annonça Dumbledore, et Sirius se doutait que sous sa forme d'animagus, son échine se serait déjà dressée au seul nom de l'ancien Mangemort.
"Et en quoi Rogue pourrait aider Harry?" cracha-t-il presque, malgré l'avertissement silencieux que lui envoya Remus. 'Du respect pour tes collègues, mais bien sûr,' pensa-t-il superbement en direction de Remus, le poussant - encore une fois - à changer son opinion sur l'homme.
"Je pense que tu seras surpris de la quantité de versants pour lesquels Severus peut nous aider," répliqua Dumbledore avec certitude : Sirius dut retenir un reniflement dédaigneux.
À Suivre...
À venir : Les cadeaux ;) je n'en dis pas plus, si ce n'est le titre du chapitre : Chapitre Quatorze : Cadeaux et Introspection
Ceci était le 13ème chapitre, alias C-3 avant l'arrivée de Rogue, yep!
Et je suis contente d'avoir fini ce chapitre, bien qu'un peu mécontente de l'ensemble - j'ai vraiment galéré pour arriver à le traduire en un français globalement correct... Enfin... Le prochain sera plus long encore, applaudissez mesdames, mesdemoiselles et messieurs! (si messieurs il y a?)
Autrement, je suis aux anges avec mes 98 reviews, merci encore et encore!
Linaewen Ilca : eh oui, ton 'pot-pourri' était si vrai que je l'ai employé pour le résumé! Mais je ne suis toujours pas contente de mes résumés (pour les deux histoires), et comme je sais que c'est surtout le résumé qui attire les gens sur de nouvelles fics... si quelqu'un a une idée d'ailleurs, je suis preneuse! Bref, je reviens à ton gentil résumé. J'aime bien parce que tes reviews montrent souvent ce que je ressens par rapport à la fic sans l'exprimer aussi bien que toi! Alors, dans ce chapitre, y'a eu du Sirius, encore du Sirius, du Remus et de l'Hermione toute fraîche, qu'en penses-tu! Aussi Dumbledore d'ailleurs, et ce n'est probablement pas la dernière fois... De toute façon, tant qu'il y a du Sirius ;) miam! Allez je te laisse, bisouxx.
Satya : hum, alors ton verdict, ce chapitre 13 était-il un doux rêve! Tu me diras! Quant à moi, je suis surprise et heureuse d'en être arrivée jusque-là, mais je remercie encore ce carburant fantastique de reviews!
Ilys : ben ouais, figure-toi que ça manque de répondre à des 'fight Siri' et 'vive les Remuchonets d'amour' lol. Non non, pour les cauchemars de Ginny, tu n'as rien loupé (si ce n'est un minuscule passage au chapitre neuf qui laisse entendre un peu plus!), j'ai la flemme de regarder voir si ça sera plus expliqué dans les prochains chapitres, donc je peux déjà t'affirmer que c'est des rêves résiduels de la confrontation avec Jedusor, mais il n'y a pas de Voldemort là-dessous. Et quand tu es en proie à des cauchemars, entendre quelqu'un d'autre crier au meurtre ne doit pas forcément aider j'imagine! Hey, n'arrête pas le nutella, je t'offrirai une belle boîte pour Noël pour te remercier de ces si gentils reviews post-consommation de nutella!
Le Saut de l'Ange : ce chapitre était plus long, et malheureusement pour moi - heureusement pour les lecteurs ? - ça ne va pas aller en s'arrangeant! j'espère que tu resteras quand même dans le coin!
Cicin : 8)
Natalia : Merci de tes reviews! Je viens de voir que tu répondais au chapitre 5 quand tu parlais de sadisme (je ne comprenais plus juste avant!) et oui, y'a peut-être un peu de ça dans la revanche de Sirius! Mais bon, c'est plus marrant à lire et à traduire aussi. Tout cas continue à laisser des petits mots de temps à autre si tu aimes la fic, c'est sympa!
Thealie : contente que tu aies aimé le chapitre! j'espère que tu auras aussi apprécié celui-là malgré le nombre de prises de tête qu'il m'aura données!
Florilège : Arg, c'est quoi cette histoire de fer à repasser, tu me fais froid dans le dos! C'est vrai que l'histoire avance lentement, mais comme tu dis j'y suis strictement pour rien moi! (si ce n'est pour le choix de la fic, j'admets...). On aura un petit entraperçu de Poudlard le chapitre prochain, mais rassure-toi, on est encore qu'à la moitié de l'été!
Onarluca : paix à ton ordi... ou alors dois-je envoyer tous mes voeux de meilleurs rétablissements! Je rigole, en attendant, grand merci d'avoir songé à me laisser un review, même avec retard, ils sont tout aussi bons - croquants sous la dent, miam! Bizz
