Disclaimer : 'Harry Potter' appartient à Madame JKR. Seules Anna et l'histoire sont de moi.
Rating : Général pour le moment (ça risque de changer par la suite, j'ai pas encore décidé)
3 DESTINS, 3 CICATRICES
Chapitre 1 : à bord du Poudlard Express
En ce premier jour de septembre, pluvieux et venteux comme il se doit, le désormais très célèbre Harry Potter, accompagnés de ses deux non moins fameux fidèles compères Ron Weasley et Hermione Granger, prenait place, pour la sixième année consécutive, à bord du Poudlard Express.
Penchés à la fenêtre ouverte du compartiment dans lequel ils venaient d'entasser leurs nombreux et encombrants bagages, les trois amis regardaient Molly Weasley leur faire ses adieux. Sans qu'aucun d'entre eux ne l'exprime à haute voix, ils ressentaient un même pincement au cœur à voir la petite silhouette de la mère de Ron lutter seule contre le vent. Cette année, elle seule les avait accompagnés sur le quai 9 3/4.
En effet, l'heure n'était plus aux futilités depuis que le Ministère de la magie avait enfin reconnu le retour de Lord Voldemort parmi le monde vivant des sorciers. Et comme pour confirmer cette toute nouvelle acceptation de la part de personnes qui s'étaient voilées la face pendant si longtemps, ces derniers mois les attaques de mangemorts se faisaient sans cesse plus nombreuses. Le monde des sorciers était bel et bien à nouveau en guerre et jamais les membres de l'Ordre du Phénix n'avaient eu autant de travail.
- Ron, est ce que tu peux m'aider à monter la cage de Pattenrond avec les autres bagages ? Je pense qu'il n'en aura pas besoin pendant le voyage… Le pauvre, il est tout mouillé, il va se sécher en marchant dans le compartiment…
- Pourquoi moi ? Pourquoi tu ne demandes pas à Harry de t'aider ? geignit Ron.
Harry sourit : son ami lui avait beaucoup manqué durant l'été. Ainsi que ses gémissements et ses interminables chamailleries avec Hermione, d'ailleurs. Même si celle-ci ne comprenait visiblement pas ce qui dérangeait tellement Ron dans ce qu'elle venait de lui demander, Harry, lui, le savait. Il avait remarqué que depuis quelque temps, Ron était devenu très sensible à toutes les allusions concernant sa taille. Et pour cause, le jeune rouquin avait maintenant une bonne tête de plus que Harry et presque deux têtes de plus qu'Hermione ! Pour quelqu'un qui attirait déjà largement les regards par en raison de la couleurs de ses cheveux, cette grandeur représentait un nouvel handicap. Hermione aussi avait… euh, comment dire, … mûri… en l'espace de deux mois. Harry sentit ses joues le chauffer alors qu'il se figurait les toutes nouvelles courbes de la jeune fille. Discrètes, mais néanmoins bien visibles… Quant à lui, il estimait qu'il n'avait pas beaucoup changé pendant cet été. Du moins physiquement…
- Regardez, voilà Neville qui arrive avec sa grand-mère ! Tiens, c'est bizarre, elles sont DEUX !
Harry fut tiré de ses réflexions centrimétriques et morphologiques par le cri perçant de Ron. Hermione et lui se tenaient à nouveau à la fenêtre du compartiment, et c'était à présent à un jeune garçon joufflu qu'ils faisaient de grands signes de la main. Apparemment, le problème de la cage de Pattenrond s'était réglé sans trop de cris, coups et autres morsures de la part des deux protagonistes. Tant mieux, pensa Harry.
A son tour, il regarda par la fenêtre, dans la direction indiquée par Ron. En effet, à coté de Neville et de sa redoutable grand-mère se tenait une autre dame d'un certain âge à l'aspect plutôt revêche. Mais le plus curieux c'était qu'elle ressemble tant à madame Londubas. Elles semblaient se fournir dans la même boutique de prêt-à-porter. La dame portait une très vaste cape de sorcier en fourrure violette qui volait démesurément au vent. Malgré tout, les plis de la cape ne dissimulaient pas complètement le large cabas turquoise qu'elle tenait à bout de bras. Enfin, son chapeau, assorti, était orné d'un formidable plumage de la même teinte, qui faisait ressortir des cheveux aussi roses que ceux de Tonks. Les deux femmes se tenaient familièrement par la main. 'Peut-être qu'elles sont sœurs' pensa Harry.
- Hé ! On dirait que Neville a une petite amie ! s'exclamait à nouveau la voix toute excitée de Ron.
Harry aussi venait de remarquer la jeune fille qui accompagnait les deux dames et qui parlait avec Neville. Elle portait déjà l'uniforme du collège au grand complet : chemise blanche, jupe grise plissée, longs bas blancs, la cape de sorcier sous le bras. Normalement, les élèves de Poudlard attendaient d'être dans le train pour se changer… Mais ce qui semblait le plus étrange à Harry, le plus incongru, c'étaient ses chaussures, des petites bottes de motard : cuir noir, bouts ronds et boucles en métal sur les côtés, qui lui arrivaient à mi-jambes. Le même genre de bottes que Sirius arborait sur les photos que Harry avait vu de lui jeune. À la pensée de son parrain, le cœur du jeune garçon se serra. Il lui était encore si douloureux de penser à Sirius…
- Mais enfin, Ron, ce n'est pas parce qu'ils sont ensembles qu'ils sortent ensemble ! Leurs grands-mères doivent être amies, c'est tout !, le sermonna Hermione.
- Pourquoi, tu es jalouse ? Parce que Neville a le bon goût d'en préférer une autre que toi ? Tu crois qu'on a oublié que c'est à toi qu'il avait demandé de l'accompagner au bal en quatrième année…, récita Ron, amer, sans même adresser un regard à Hermione dont la fureur grandissait à chaque phrase.
- MAIS BON SANG RON ! QU'EST-CE QUE TU RACONTES ???
Ron sursauta devant le hurlement de colère de Hermione, l'air totalement ahuri. Il regarda celle-ci, puis Harry et rougit comme jamais il n'avait rougit auparavant. Manifestement, il n'avait pas été conscient de s'exprimer tout haut.
- RON, TU PEUX M'EXPLIQUER POURQUOI TU DIS ça ???
Le pauvre garçon avala difficilement sa salive. Puis, comprenant que retarder son explication aggraverait son cas et la colère d'Hermione, il balbutia :
- 'scuse moi, 'mione, je voulais pas dire ça, je… je… ce matin je crois que je me sens pas dans mon assiette…
Ron avait l'air tellement contrit et gêné que même Hermione parut avoir pitié de lui.
- Ok, mais ne t'avise pas à recommencer, sinon…, menaça-t-elle, mi-fugue mi-raisin.
Ron osa un timide sourire de soulagement.
- En tout cas, reconnaît qu'elle a l'air sacrement jolie cette fille… Ron avait choisi la voix de la conciliation.
Tous les trois se penchèrent à nouveau par la fenêtre. La jeune fille, qui faisait maintenant ses adieux à la dame qui l'accompagnait, semblait effectivement plutôt jolie. Grande, mince, souple malgré un port de tête très droit 'altier' pensa Harry.
- Oui, c'est vrai, concéda Hermione, visiblement peu désireuse de recommencer déjà la dispute. Mais nous ne l'avons vu que de dos… Et puis ces cheveux qu'elle a…
Harry réalisa qu'Hermione venait de mettre le doigt sur ce qui le chagrinait : les longs cheveux de la jaune fille, tout raides, étaient blonds. Très blonds, presque blancs en fait. Ils lui rappelaient désagréablement quelqu'un d'autre…
- Malfoy ! s'écria Harry.
- Oui, répondait déjà Hermione, alors que Ron se tournait précipitamment vers la porte, sa baguette à la main. Oui, moi aussi ses cheveux me font penser à Malfoy.
- Oh…, Ron rangeait sa baguette, l'air de rien. Beurk ! C'est vrai que…
La phrase de Ron resta en suspens. Une tornade rousse venait d'entrer en trombe dans leur compartiment.
- Salut tout le monde ! Comment ça va ? demanda Ginny Weasley à la cantonade.
- Qu'est ce que tu fais là ? Tu n'es plus avec Dean et ses amis ? grogna Ron en direction de sa sœur, mécontent d'avoir été interrompu de la sorte.
Un sourcil en l'air en signe d'incompréhension, Ginny se tourna vers Harry et Hermione. Celle-ci lui expliqua charitablement :
- Ne t'inquiète pas Ginny, Ron est juste un peu vexé que Luna Lovegood ne soit pas encore venue le saluer, alors il compense avec les histoires sentimentales des autres !
Tous pouffèrent de rire à la remarque d'Hermione, sauf Ron qui affecta un air offensé, qui eut pour résultat de redoubler les rires de ses amis. C'est à peine s'ils eurent conscience que le Poudlard Express quittait le quai 9 ¾, en direction de leur école. Après quelques minutes, quand Ginny eut enfin retrouvée son souffle, elle dit :
- Pour ton information Ron, à moi non plus Luna n'est pas encore venue dire bonjour. D'ailleurs, je ne l'ai pas encore vue aujourd'hui. Deuxièmement, Dean et moi c'est fini depuis le début des vacances…
- Ah oui ? Alors à qui tu écrivais tous ces romans cet été ? Et pourquoi tu te précipitais sur tous les hiboux qui arrivaient au Terrier ? Et pourquoi, quand tu avais une lettre, tu te cachais pendant des heures pour la lire ?
- Ces lettres… elles… elles ne venaient pas de Dean…, c'était maintenant au tour de Ginny d'être écarlate. Et puis d'abord, ça ne te regarde pas Ron ! Ça ne VOUS regarde pas ! dit-elle furieuse, en regardant Ron, Hermione puis enfin Harry, à la vue duquel elle parut plus gênée encore.
- Et si tu nous disais plutôt pourquoi tu es arrivée en courant, demanda celui-ci espérant que sa tentative de diversion n'était pas trop flagrante. Ginny n'était pas la seule à être embarrassée par la tournure que prenait la conversation.
La pauvre jeune fille esquissa un petit sourire de gratitude dans sa direction.
- Oui, tu as raison, Harry ! J'oubliais ! Ron, Hermione, tous les préfets sont appelés pour une réunion, dans le compartiment des préfets, dès le départ du train.
- Si tôt, tu es sûre ? Je me demande bien pourquoi…
Déjà Hermione avait sauté sur ses deux pieds. Tenant Ron par la manche de son pull, elle le traînait vivement vers la porte.
- Mais euh… Hermionnnnneeeeuuuu… Tu me fais mal !
Ron et Hermione partis pour rejoindre le compartiment des préfets, il ne restait plus que Ginny et Harry dans le compartiment. Immédiatement, la jeune fille se lança dans une grande conversation – un grand monologue en fait -, car au bout de quelques minutes à peine, Harry cessa d'écouter.
Non pas qu'il n'aimait pas discuter avec elle, mais pour l'instant, il souhaitait uniquement pouvoir l'observer en paix. Ginny aussi avait changé pendant les vacances. À présent, elle ne tressait plus ses longs cheveux roux. Au contraire, elle les laissait tomber librement sur ses épaules. De cette manière, ils encadraient avantageusement son petit visage en forme de cœur. Harry pensa qu'il aimait bien cette nouvelle coiffure. Il avait également constaté qu'Hermione n'était pas la seule à avoir développée des formes harmonieuses ces derniers mois. À cette pensée, à nouveau, les joues de Harry se teintèrent d'un délicat rouge vermeil. Ginny continuait de parler : visiblement elle n'avait rien remarqué d'anormal dans l'attitude de Harry. Celui-ci était perplexe. Pourquoi, tout d'un coup, attachait-il de l'importance à ce genre de détails ? Dans tous les cas, Ginny ne pouvait décidément plus être considérée comme une petite fille.
Le cœur de Harry se serra. Pendant l'été, il avait passé beaucoup de temps à réfléchir sur cette terrible nuit où son parrain avait trouvé la mort. Plus que toute autre chose, il regrettait d'avoir entraîné ses amis : Ron, Hermione, Neville, Luna et surtout la plus petite, Ginny, dans ce piège. Il se rendait compte maintenant combien ils avaient frôlé la catastrophe : si les membres de l'Ordre du Phénix n'étaient pas arrivés à temps… Seule la chance les avait sauvés. Harry ne se souciait pas de mourir. Mais, jamais il n'aurait pu supporter qu'il arrive quelque chose à l'un de ses amis.
D'ailleurs, bien qu'elle ait été aussi chaleureuse à son égard que d'habitude, Harry savait bien que s'il n'avait pas été invité au Terrier cet été, c'était parce que madame Weasley ne le pardonnait pas d'avoir mis en danger la vie de ses deux enfants. Probablement pensait-elle que le mieux pour sa famille était de se tenir un peu à distance de Harry : il était décidément trop dangereux de le fréquenter. Harry comprenait parfaitement cette décision, et même s'il n'en avait rien dit à Ron, il avait été soulagé de ne pas passer ses vacances dans sa famille. Il se sentait trop coupable envers eux.
Il lui était pénible de constater combien cette nuit fatale avait marqué Ginny : il y avait maintenant dans son regard quelque chose de résolument farouche, qui faisait parti de sa personne.
Et en ce moment même, ce regard était très précisément rivé au sein. Harry écouta à nouveau, mais Ginny ne parlait plus avec animation : elle s'était tue et le fixait avec mécontentement.
- Harry, ça fait une demi-heure que je te parle et que tu ne m'écoutes pas ! Tu n'as qu'à me le dire si je t'ennuie, j'ai d'autres amis à aller voir, tu sais !
- Excuse moi, Ginny, j'étais dans la lune. De quoi me parlais-tu ?
- De Fred et de Georges. De leur boutique dans le chemin de traverse…, des trucs comme ça, sans importance…
- Vraiment ! Vous êtes allés voir leur boutique ? Ils m'ont envoyés pleins d'échantillons pour mon anniversaire ! Comment est-ce ?
Harry ne feignait plus son intérêt – il adorait les jumeaux et avait hâte de pouvoir enfin visiter leur boutique -, mais maintenant Ginny boudait :
- Tu n'auras qu'à demander à Ron, je n'ai pas envie de répéter ce que je viens de dire. Tu n'avais qu'à écouter, na !
Et elle lui tira la langue. Contre toute attente, et malgré la puérilité d'un tel geste, Harry éclata de rire. Ce n'était pas un petit rire forcé ou poli. Non. C'était l'un de ces rires profonds qui remuaient intimement chaque parcelle du corps. L'estomac de Harry lui faisait mal et ses yeux pleuraient. Dans une tentative pour se contrôler, il retira ses lunettes afin d'en essuyer la buée qui s'était formée sur les verres. Alors Harry ne vit pas l'expression de la jeune fille qui se tenait face à lui. Si ça avait été le cas, il aurait peut-être aperçu tout ce que son visage exprimait de désir, de compassion et de compréhension mêlés.
Quand, enfin calmé, Harry remit ses lunettes en position sur son nez, Ginny avait reprit une mine déconfite, de circonstance.
- écoute, Ginny, je suis désolé. Vraiment. Je ne voulais pas te faire de peine… Et pour toute à l'heure aussi, je suis désolé. Je… J'aurais du parler à Ron de ces lettres… Ce n'est pas à toi d'être embarrassée.
- Laisse tomber, va…
Un léger – toc, toc – se fit entendre derrière la porte du compartiment, mettant heureusement fin au silence pesant qui c'était installé entre les deux jeunes gens. Quelques secondes plus tard, Neville entrait. Et il n'était pas seul : Neville était accompagné de son amie blonde… qu'il tenait par la main !
- Bonjour Ginny, bonjour Harry !, disait-il déjà avec son bon sourire jovial.
Cependant, l'attention de Harry était déjà retenue par autre chose. Enfin, il pouvait voir la fameuse amie de Neville, de face et de près. Et il ne s'attendait pas du tout à ce qu'il voyait. Ce n'était qu'elle fut vraiment laide. Mais c'était assurément la plus étrange élève de Poudlard qu'il lui eut jamais été donné de rencontrer. Et à en juger par la tête stupéfaite de Ginny, il n'était pas le seul à penser cela.
De toute évidence, la jeune fille qui se tenait timidement dans l'embrasure de la porte n'aurait pu être qualifiée de jolie.
En une fraction de seconde, Harry constata ce qui rendait son visage si particulier – parce qu'il s'agissait bien de son visage, le reste de sa personne semblait tout ce qu'il y a de plus … normal.
Harry se détesta de penser de cette manière, cela lui faisait l'impression d'être cruel, mais le seul mot qui lui venait spontanément à l'esprit en regardant la jeune fille était bien 'anormalité'.
Il y avait d'abord ses yeux : écarquillés tout en grand comme face à un danger, d'un bleu pâle, presque transparent. On y distinguait à peine la minuscule et délicate pupille noire, noyée par le disque de ses iris, démesurément dilaté. Normalement il eut été impossible de voir avec de tels yeux. À côté, même l'œil magique de Maugrey Fol Œil paraissait quasiment ordinaire ! Mais le pire était la cicatrice en arc de cercle, blafarde, qui partait du sourcil gauche pour se continuer jusqu'au milieu de la joue de la jeune fille. Et Harry fut stupéfait de constater que cette cicatrice traversait également son ŒIL gauche : un mince filet rouge sang tranchait sur le pâle azur de l'iris. Un frisson parcouru l'échine du jeune homme : probablement que cette balafre était la cause de l'état bizarre de ses yeux - du moins pour l'œil gauche - … Qu'avait-il donc pu lui arriver que même les médicomages n'avaient pas été en mesure de la soigner ?
Harry remarqua également combien la jeune fille était blanche : était-elle encore malade ? Ou bien était-ce la conséquence d'un enfermement prolongé ? Pourtant, la cicatrice était ancienne, il en était sûr – lui même s'y connaissait plutôt bien en cicatrices - .
Enfin, le regard du jeune garçon embrassa la bouche de la jeune fille. Elle apparaissait toute petite par rapport aux grands yeux. Et finalement c'était peut-être ce qui choquait le plus dans son apparence : le décalage entre ses yeux immenses et sa petite bouche en cœur, dont la lèvre supérieure n'était que très légèrement déformée à gauche – à la limite, pensa Harry, on pouvait très facilement faire abstraction de cette déformation -.
- Bonjour Neville, dit Ginny apparemment remise de sa surprise bien avant Harry qui continuait encore à dévisager la nouvelle vas-tu ? Est-ce que tu es venu nous présenter ton amie ?
- Oui ! Harry, Ginny, je vous présente Anna Jones. Nous sommes des amis d'enfance : ma grand-mère et la grand-tante de Anna sont très liées… euh… oui, elles sont liées… Bref, Anna est nouvelle cette année et comme elle ne connaît personne…
Le bavardage de Neville fut interrompu par Ginny qui s'avançait déjà vers Anna, laquelle se tenait toujours sur le pas de la porte :
- Salut Anna, moi c'est Ginny Weasley, et je suis ravie de faire ta connaissance.
Alors que ladite Anna n'esquissait toujours aucun mouvement pour entrer – ou pour sortir -, Ginny mis sa main dans la sienne, en guise de salut. Puis, son bras sous le sien, la rouquine conduisit familièrement la blonde jusqu'aux banquettes. 'Décidément, il n'y a pas que son apparence qui est étrange : son comportement l'est également ! Soit elle est particulièrement timide (pourtant, Harry jugea qu'elle devait bien avoir entre 15 et 16 ans – elle aussi avait ces fameuses formes bien placées-), soit elle est un peu idiote'. Mais déjà Anna répondait à Ginny :
- Je suis très heureuse de faire ta connaissance Ginny. Et toi aussi Harry Potter.
Elle n'était pas du tout demeurée comme il l'avait pensé d'abord. Harry eut même le sentiment désagréable qu'Anna insistait exprès sur son nom de famille. 'Par Merlin, elle se moque de moi !'
- Neville m'a beaucoup parlé de vous deux et bien sur de Ron et d'Hermione Granger…, sa voix était douce, plutôt agréable.
- Euh, et bien bonjour Anna… moi aussi je suis heureux de faire ta connaissance…, balbutia-t-il un peu gêné.
Il s'approcha doucement de la jeune fille. Il ne savait pas quoi faire : elle ne tendait pas la main, mais elle ne semblait pas non plus vouloir qu'il l'embrasse. En fait, elle ne le regardait même pas ! Harry ne voulait surtout pas la froisser dès leur première rencontre. Il ne voulait pas qu'elle pense que son apparence physique le repoussait. Ce n'était pas le cas, de toute façon. En plus, c'était une amie de Neville et elle avait l'air plutôt sympathique. 'Mouais… sauf qu'elle se fiche de moi'.
Pour toutes ces raisons Harry se tenait seul, debout au milieu du compartiment, et maintenant c'était lui qui avait clairement l'air d'un idiot. Il tourna des yeux désespérés vers Ginny, mais ce fut finalement Anna qui le tira de son embarras :
- Harry, je suis aveugle, je ne peux pas te voir. Et comme tu ne dis rien, ni ne bouge, je ne sais même pas où tu te trouves exactement … Mais si tu viens à moi alors je serais ravie de te serrer la main…, lui dit-elle avec un petit sourire.
Harry était mortifié : il comprenait enfin ! Pourtant, il se souvenait bien avoir pensé : 'avec des yeux comme les siens, personne de normal ne pourrait voir' ! Ce n'était que maintenant qu'il remarquait que l'impression bizarre qui émanait des yeux de la jeune fille ne venait pas tant de leur apparence mais du fait qu'ils étaient absolument fixes. Pire, elle ne clignait même pas des paupières. Et c'était précisément cette fixité qui choquait le plus. C'était vraiment dérangeant. Un peu comme si la jeune fille pouvait voir des choses sur soi que les autres ne pouvaient pas voir…
Il alla serrer la main de la jeune fille qui lui adressa un sourire chaleureux et retourna s'asseoir près de Ginny. Il savait qu'il était écarlate. 'Heureusement qu'Anna ne peut pas me voir !' pensa-t-il. 'Argh ! Idiot ! N'importe quoi !' Et sa rougeur redoubla d'intensité.
Par chance, Ginny, Anna et Neville avaient déjà entamé une conversation. Anna expliqua à Harry et à Ginny pourquoi, à cause de sa cécité, sa grand-tante avait refusé qu'elle entre à Poudlard à 11 ans, bien qu'elle ait reçu sa lettre comme les autres.
- Et pour être honnête, je ne suis pas sûre que j'aurais eu le courage d'y aller !
À la place, la jeune fille avait eut des précepteurs à domicile. Mais cette année, elle comptait bien obtenir ses BUSEs. À force de persuasion (et également avec la promesse faite par Albus Dumbledore de veiller personnellement sur sa petite-fille) la vielle dame avait cédé. Ainsi, Anna allait entrer directement en cinquième année, ce qui réjouissait beaucoup Ginny.
Puis, quand il devint visible qu'Anna se sentait gênée de parler d'elle, la conversation dévia naturellement sur le collège de Poudlard. Bien qu'Anna sache déjà beaucoup de choses grâce aux récits de Neville et qu'elle ait lu La Grande Histoire de Poudlard (– Harry pensa à Hermione : celle-ci allait se sentir moins seule !-), elle avait encore pleins de questions à poser aux 'anciens'. De leur côté ils avaient en réserve quantité d'anecdotes amusantes sur tous les professeurs, leurs cours… Ce fut évidemment le professeur de potions qui en fit le plus les frais :
- Le professeur Rogue tu vas le repérer de loin, disait Ginny, c'est celui qui SENT le plus mauvais !
- Oui, et tu vas l'ENTENDRE aussi : il renifle toujours de grands coups, comme ça… GNARF, GNARF…
Et Neville de se lancer dans une admirable imitation du professeur Rogue, produisant de petits bruits très désagréables avec son nez et avec sa bouche.
Ils passèrent tous les quatre un très bon moment, très agréable, rigolant la plupart du temps comme des bossus, et la différence d'Anna, sa cécité, furent rapidement oubliés par les amis. 'En fait, elle est vraiment très sympathique', pensa Harry. Ils ne remarquèrent même pas qu'Hermione et Ron étaient partis depuis maintenant longtemps, mais alors vraiment très longtemps… Ce ne fut que l'intrusion impromptue de trois garçons vêtus de vert qui stoppèrent leurs rires.
- Potter…
Draco Malfoy, accompagné de ses deux fidèles toutous, Crabbe et Goyle, venait d'entrer dans le compartiment.
- Casse toi Malfoy ! T'as rien à foutre ici !, lui répondit Harry, agacé.
En même temps que lui, Neville et Ginny avaient sauté sur leurs pieds et brandissaient maintenant leurs baguettes magiques face aux intrus, prêts à lancer un sort.
- Tout doux, les enfants, vous allez vous faire mal. Je ne suis pas venu chercher la bagarre. Je suis juste passé faire une visite … de courtoisie à mon meilleur ennemi, ricana-t-il.
- Dit moi Malfoy, pourquoi t'es pas à la réunion des préfets ? Ils t'ont virés ou alors ils ont oublié de te prévenir ?, ironisa Ginny.
- Rêve pas tête de fouine ! Nan, la réunion est terminée depuis plus d'une heure. Tiens, mais c'est vrai ça, où sont la sang-de-bourbe et la fouine ? Même eux ils te trouvent plus assez bien pour eux, Potter ?
À ces mots, Harry et Ginny échangèrent un regard interrogatif : pourquoi Ron et Hermione mettaient-ils tellement de temps à arriver ? Heureusement, le jeune Malfoy ne surpris pas cet échange silencieux. Il venait de remarquer Anna qui était restée assise, en retrait, depuis le début de l'altercation.
- Oh, mais je vois que tu t'ai trouvé une petite amie balafrée comme toi pendant les vacances, à la place, Potter !
Draco, Crabbe et Goyle éclatèrent de rire.
- Et toi Malfoy, les vacances n'ont pas été trop dures au manoir ? Avec ton père à Azkaban, ta mère a du avoir beaucoup de travail : cirer les bottes de votre 'maître' (Harry pris le ton le plus méprisant qu'il put) pour deux, ça doit être fatiguant ? À moins que petit Draco aidait sa gentille maman ?.
Harry était furieux que Draco s'en soit pris à Anna qu'il ne connaissait même pas. Et qui était aveugle. 'Pourquoi, ça fait une différence ?' demanda la petite voix dans sa tête. 'Je suis sûre qu'elle n'a pas besoin de ta pitié'.
- Potter, sale fils de p… ! Tu vas payer pour ce que tu as fait à ma famille. Mais, je te l'ai déjà dit, je ne suis pas venu pour me battre, pas tout de suite. Allons…, n'oublie pas les bonnes manières. Dis moi qui est ta nouvelle amie ?
Draco s'avança vers Anna. Il la contempla avec un air méchant, son regard vicieux s'arrêtant sur chacune des difformités du visage de la jeune fille. Agitant la main devant son visage, il dit :
- Et en plus d'être laide, elle est demeurée ! Potter, tu m'avais habitué à mieux…
Anna (qui s'était levée sous le coup de l'injure de Draco à son égard), intercepta brusquement la main du jeune homme :
- Toi qui es si poli et intelligent, pourquoi ne me demandes-tu pas si je suis aveugle, plutôt que de balancer ta main devant moi comme l'idiot du village ?
Et elle laissa retomber le poignet de Draco qu'elle tenait toujours, comme si c'était la chose la plus dégoûtante du monde.
- Pour ton information et celle de tes deux amis, mon nom est Anna Jones et je suis nouvelle cette année. Et surtout, je ne suis la petite amie de personne !
Un ange passe.
Puis un autre.
Enfin toute une colonie de créatures célestes…
Enfin, remis de leur surprise, Harry, Neville et Ginny ne purent se retenir de rire devant la tête ébahie que faisait Draco. 'Mouché par une aveugle, le petit Dragounichet !'. Celui-ci, s'écartant d'Anna :
- Rigole bien maintenant Potter, profite-en. Parce que cette année tout va changer. Et crois moi, tu vas bientôt pleurer !
Le silence retomba à nouveau dans le compartiment. Les paroles de Draco étaient lourdes de menaces et bizarrement, Harry sentait qu'elles n'étaient à prendre à la légère.
- Quant à toi, dit-il d'un air méchant à Anna, nous nous reparlerons tous les deux. Et ta différence (il cracha presque le mot), ta différence ne sera pas un souci pour moi…
Sur ces mots, il siffla ses deux molosses et passa la porte.
Les quatre jeunes gens restés debout dans le compartiment n'avaient plus du tout envie de rire. Harry, Ginny et Neville se regardaient, incapables de rompre le silence pesant qui s'était installé.
Harry sentit son corps être parcouru d'un grand frisson. L'intervention de Draco lui avait fait l'effet d'une douche froide. Tout à sa joie de revoir ses amis, il en avait oublié l'essentiel : le monde des sorciers était en guerre, ses amis les plus chers risquaient chaque jour leur vie en travaillant pour l'Ordre du Phoenix et son parrain avait déjà payé le prix fort. Comment pouvait-il rire, insouciant, alors qu'il savait qu'une semaine à peine auparavant l'Académie des Aurors avait été détruite ? Victime d'un attentat, qui avait fait plus de 30 morts ! C'était aussi l'impossibilité pour le Ministère de former de nouvelles recrues afin de lutter contre Voldemort et ses mangemorts.
Harry se remémora également cette attaque d'une gare moldue. Des mangemorts y avaient semé la terreur, en pleine journée, à l'heure de pointe. Résultat : 300 morts moldus, hommes, femmes et enfants.
Voldemort s'en prenait à des innocents qui ne savaient même pas qu'un monde sorcier existait, parallèle au leur, dans le seul but d'affoler la population sorcière.
Enfin, Harry savait qu'il serait bientôt amené à donner la mort – ou à mourir – pour que cette guerre cesse un jour…
Malfoy avait raison finalement : les choses avaient changé depuis l'année dernière et surtout, Harry avait effectivement bien des motifs pour pleurer !
Ce fut l'arrivée de Ron et Hermione qui mis fin à cette atmosphère délétère.
Harry, tiré de ses pensées, se tourna vivement vers les deux nouveaux entrants. Et jamais il les avait vus à ce point ébahi ! Ron (dont la bouche était élégamment ouverte) et Hermione (laquelle était aussi en passe d'avaler des mouches) regardaient alternativement Harry, Ginny et Neville et leurs visages tristounes et au fond du compartiment, Anna, qu'ils voyaient pour la première fois.
- Ben ça alors, qu'est-ce qui vous arrive tous ?, parvint enfin à articuler Ron.
Reprenant la première ses esprits, Ginny entrepris de raconter à ses deux amis tout ce qui c'était passé depuis leur départ : la rencontre avec Anna, leurs présentations mutuelles, l'arrivée de Draco…
Après tous ces événements, personne ne pensa à questionner Ron et Hermione sur leur retard. Et heureusement, car ils auraient été bien en peine de répondre !
Enfin, le train perdit de sa vitesse. Puis les freins crissèrent : ils étaient arrivés à Poudlard…
