Quelques heures plus tard, la commandante se réveilla à nouveau, seule. Elle souffla de déception puis tendit la main vers sa table de nuit pour récupérer son téléphone. Malicieuse, elle ouvrit la conversation avec son compagnon et tapota quelques mots sur son clavier. Satisfaite, elle le verrouilla dans l'attente de sa réponse. Pourtant cette dernière se fit attendre… Longtemps… Candice finit par se résigner et sortit du lit pour rejoindre la cuisine où Antoine faisait chauffer un biberon. Elle s'approcha doucement et encercla sa taille en souriant.
« T'as pas reçu mon message ? demanda-t-elle tout bas.
- Euh… Lequel ?
- Huuum… chuchota-t-elle à son oreille. Je te demandais un petit câlin…
- Ah bah non je l'ai pas vu… répondit-il froidement.
- Dommage…
Antoine ne répondit rien et la sentit le lâcher. Il la vit se placer contre le comptoir à ses côtés.
Tu sais que la petite à une mère quand même… plaisanta-t-elle en le voyant remuer le biberon.
Antoine lâcha un faux sourire avant de lui faire face.
- Ah ! Tu trouves que ton « mec » s'occupe un peu trop de la fille de ta fille peut-être ? Oui c'est vrai… Après tout c'est pas ma petite-fille… lâcha-t-il amer.
Surprise, Candice écarquilla les yeux.
- Ok… répliqua-t-elle en souriant. Tu sais que c'est pas beau d'écouter aux portes mon amour… continua-t-elle en s'approchant. Et encore moins de faire semblant de dormir…
- J'sais pas… J'me réveille en pleine nuit, t'es plus là… et je t'entends rire avec ton ex-mari…
- J'avais fait un cauchemar… J'étais pas bien. Je suis sortie, il dormait pas non plus. On a discuté et voilà…
- Et pourquoi tu me l'as pas dit ?
- Mais tu dormais Antoine ! J'allais pas te réveiller… Puis c'est pour ça que je voulais un câlin ce matin… lâcha-t-elle d'une moue boudeuse en le prenant par la taille avant de coller sa tête sur sa poitrine.
Antoine souffla doucement et l'enserra à son tour.
- Et c'était quoi ce mauvais rêve ? demanda-t-il d'une voix douce.
- Tu m'avais quitté… Parce que j'étais devenue chiante depuis que j'étais à Marseille, et tu me supportais plus…
- Si y avait qu'à Marseille… plaisanta-t-il en rigolant doucement.
- Eh ! protesta-t-elle en boudant.
- Je plaisante…
- J'ai peur Antoine… confia-t-elle en nichant sa tête dans le creux de son cou.
- De quoi ?
- De partir là-bas, que ça se passe mal, que j'y arrive pas et qu'on résiste pas à la distance tous les deux… J'veux pas te perdre… chuchota-t-elle les larmes aux yeux.
- Arrête de te torturer avec ça… T'as vu tout ce qu'on a traversé en dix ans ? C'est pas quelques kilomètres qui vont nous séparer. Puis tu vas voir que trois mois ça va passer vite…
- Hum… Mais ça va quand même être long… rétorqua-t-elle en venant l'embrasser.
- Ça oui… confirma-t-il en l'embrassant à nouveau. Ah ! Je crois que la petite est réveillée… déclara-t-il contre ses lèvres en l'entendant pleurer.
- Toujours au bon moment… pesta-t-elle. J'y vais…
- Je croyais qu'elle avait une mère ? la taquina-t-il en l'observant s'emparer du biberon et de quitter la cuisine."
Candice se retourna et lui tira la langue avant de disparaître de son champ de vision.
. . . . .
Les portières de la voiture de Candice claquèrent et le couple pénétra derrière la grande grille du parking des professeurs. Vide d'élèves, le collège accueillait tout de même la quasi-totalité du personnel. Ils s'approchèrent de la porte d'entrée. Antoine la devançant, s'accapara de la poignée de la porte et s'arrêta soudainement.
« J'ai le droit d'aller dire bonjour à madame Berdot ? demanda-t-il sur un ton enfantin pour la taquiner.
Candice éclata de rire.
- Il est mignon… lâcha-t-elle en souriant faussement. Tu veux pas l'inviter à déjeuner non plus ?
- Et pourquoi pas ? continua-t-il pour plaisanter en ouvrant la porte.
- Même pas en rêve ! répliqua-t-elle en avançant devant lui
- Bah quoi… Faut bien la remercier pour ses infos… bouda-t-il en la suivant. »
Candice hocha la tête de gauche à droite, légèrement amusée par les taquineries de son commissaire. Ils longèrent le couloir avant de débarquer devant la salle des professeurs étonnement silencieuse. La commandante poussa la porte et tomba sur l'homme au chapeau de paille, accroché à l'évier.
« Bonjour…
- Ah bonjour ! Vous cherchez quelqu'un ?
- Euh… commença Candice avant de plisser les yeux en l'observant. Vous n'avez pas cours ?
- Si ! Mais je laisse mes élèves en autonomie.
- En autonomie ? répéta Antoine sans comprendre.
- Bah oui… Je dois faire le thé pour les collègues.
- Le thé ?
- Oui ! Avec la menthe du jardin. Vous voulez boire une petite tasse ? C'est fait maison !
- Oh bah pourquoi…
- Non ! la coupa Antoine. On a pas le temps.
Candice fit une moue boudeuse.
- Vous savez où on pourrait trouver Mr. Garcia ?
- Sûrement dans sa salle… en 101 je crois.
- Merci ! On y va… annonça Antoine avant de quitter la salle. CANDICE ! cria-t-il parce qu'elle ne la suivait pas.
La porte s'ouvrit sur la commandante, tenant une tasse fumante.
- T'as tort ! Il est super bon en plus…
- Tu veux pas des croissants non plus ? »
La commandante se mit à sourire face à la moue désabusée de son compagnon qui ronchonnait. Elle le suivit en prenant le soin de souffler sur sa tasse fumante et très vite, ils débarquèrent dans la salle du collègue de Justine.
« Mr. Garcia ? demanda Candice en entrant dans la salle ouverte.
- Oui ?
- Commandant Renoir et Commissaire Dumas de la BSU de Sète. On… On aurait souhaité vous parler de Justine…
- Ou… Oui… Je vous écoute.
- À vrai dire c'est votre collègue de français qui nous a signalé que vous et Justine étiez proches…
- C'est vrai ! Entre nous, ça a tout de suite été une évidence amicale. On se ressemblait tellement… J'avais… J'avais l'impression d'avoir ma sœur face à moi. Puis on se voyait quasiment tous les jours… On parlait beaucoup…
- Vous connaissiez son compagnon ?
- Elle m'en parlait beaucoup oui. Justine souffrait de plus en plus de la distance entre eux… Mais elle l'aimait…
- Mais vous ne l'avez jamais rencontré ?
- Si ! Une fois. En début d'année. Pourquoi ? Vous pensez que c'est lui qui ?
- On en sait rien pour l'instant… C'est encore trop tôt…
- Vous étiez au courant des soucis entre Justine et la direction ?
- Bien sûr… Elle n'en avait parlé qu'à Charline et moi.
- Et qu'est-ce qu'elle vous a dit précisément ?
- Le chef aurait été un peu trop avenant avec elle… Sauf qu'elle l'aurait repoussé et depuis il lui faisait vivre un enfer. Harcèlement par des mots dans le casier, dans sa boîte aux lettres même… Elle recevait des e-mails aussi… et parfois c'était en face. Mais elle voulait rien dire. Elle était convaincue que parler ne servirait à rien…
- Vous savez si elle gardait ces lettres, ces mots quelque part ?
- Toujours dans sa sacoche… Elle voulait pas que quelqu'un tombe dessus. »
Le couple le remercia et fit le point avant de se rendre chez le principal de l'établissement. En effet, la sacoche de la victime avait été triée et rien n'était ressortie de tel. Le coupable avait donc récupéré les traces pour les effacer. Candice contacta son équipe. Tous les soupçons étaient désormais portés sur Mr. Alphonse. Elle demanda de relâcher le compagnon de Justine et envoya son équipe à son domicile pour une perquisition. Remonté contre le chef qui les avait baladés, Antoine débarqua dans le bureau, visiblement prêt à en découdre. Hélas, David Alphonse était tenace et niait en bloc les faits qui lui étaient reprochés. Perdant patience, Antoine le rapatria à la BSU et chargea une autre équipe de perquisitionner le bureau. De retour devant l'hôtel de police, le couple resta en voiture et observa en silence leur suspect s'immiscer à l'intérieur.
« Bon… Je vais pas pouvoir me charger de l'interrogatoire. Je dois filer à la mairie… expliqua Antoine.
- Ok… Bah je m'en charge alors !
- Ouais… Et tu le lâches pas ! Je suis sûr qu'il y est pour quelque chose.
- Bah tu me connais quand même…
- Hum !
- Mais le problème c'est que sa femme et sa fille sont formelles. Il n'a pas quitté la maison de la soirée. Ils sont même allés promener le chien ensemble…
-Elle a très bien pu mentir…
- Et forcer sa fille à mentir ?
- Pourquoi pas… Bon ! Moi j'y vais ! Tu me tiens au courant !
- Promis… chuchota-t-elle en tendant ses lèvres.
- Juré ? répondit-il en l'embrassant.
- Oui… chuchota-t-elle contre ses lèvres avant de l'embrasser à nouveau.
Le téléphone d'Antoine se mit à sonner.
- Merde… C'est le maire… C'est le maire… paniqua-t-il en quittant la voiture.
- File ! lâcha-t-elle le sourire aux lèvres en l'observant courir »
