Mon père, ce…
Par Maria Ferrari
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Les personnages et l'univers de Harry Potter appartiennent à J.K. Rowling.
Base : Tomes 1 à 4 de Harry Potter
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—Chapitre 7 – Révélations—
Dumbledore arriva sur le terrain de Quidditch pour trouver Lucius en pleine tentative de décollage. Il était juché sur un balai d'entraînement, les mêmes balais dont se servait Bibine pour donner des notions de vol aux premières années ; il avait volontairement choisi un balai lent.
« Luchus ! Qu'est-ce que tu fais ? Il est absolument pas question que tu joues au Quiddiche. Tu vas encore tomber, tu vas te faire très mal, tu vas en vouloir au monde entier, et tu vas voir que ta mère va encore dire que c'est d'ma faute ! »
Les lèvres serrées, Lucius se retourna lentement vers le directeur de Poudlard pour le toiser de tout son haut.
1) Il l'appelle "Luchus".
2) Il le tutoie.
3) Il s'inquiète pour lui ?
4) Qu'est-ce que sa mère vient faire là-dedans ?
5) Son haleine empeste l'alcool ! Ce dernier point explique sans doute les précédents.
« Dumbledore, vous avez bu, lui dit-il d'un ton froid et posé. Allez cuver votre vin ailleurs et laissez-moi m'entraîner. »
Intérieurement, Lucius se fit la réflexion qu'on ne pouvait décemment pas appeler ce qu'il faisait un "entraînement" ; son instrument de vol demeurait désespérément statique. Il reporta son regard droit devant lui et se concentra sur la tâche délicate qu'il entendait mener à bien, dusse-t-il y passer la nuit.
« Tu n'es pas zentil avec ton papa ! »
Il ferma les yeux pour chasser son agacement et tourna à nouveau lentement la tête vers Dumbledore.
« Vous savez que vous ne vous arrangez vraiment pas avec l'âge ? » dit-il avant de se concentrer à nouveau sur son balai. Ce type n'avait rien d'autre à faire que de raconter des inepties ? Son père ? Il ne manquerait plus que ça !
Albus tourna tristement les talons. Il croisa Drago en chemin, ce dernier avait eu vent du défi lancé à Ronnigton et venait aux nouvelles. Il trouva son père, campé droit comme un "i", son balai entre les cuisses, au milieu du terrain de Quidditch.
« Papa, qu'est-ce que tu fais ?
— Je tricote ! Ça ne se voit pas ? » hurla alors Lucius.
Ça y est : ses nerfs le lâchaient.
~oOo~
Assise devant le bureau de Dumbledore, Minerva observait son éminent supérieur d'un œil désapprobateur. Ce dernier n'était guère reluisant ; il se tenait la tête entre les mains et paraissait souffrir mille morts.
« J'en ai entendu de belles ! Albus, n'avez-vous pas honte de vous être mis dans pareil état ?
— Minerva, je vous en conjure, parlez moins fort, Poppie n'a pas fini de préparer mon remède », répondit le directeur. Sa voix n'était qu'un mince filet et il aurait aimé que son professeur de métamorphoses lui parle aussi en murmurant, ou mieux, qu'elle se taise.
« Il fallait y réfléchir avant ! Qu'est-ce qui vous a pris d'ailleurs ? »
La voix de McGonagall n'avait pas perdu la moindre décibel malgré sa supplication, Dumbledore laissa échapper un gémissement désespéré avant de lui répondre : « J'ai appris une drôle de nouvelle hier.
— Quelle nouvelle ?
— Je ne peux pas vous en parler pour l'instant. »
Minerva haussa les épaules, se leva et sortit. Dumbledore fut alors le plus heureux des hommes, du moins autant qu'il pouvait l'être dans ces conditions.
~oOo~
Une semaine passa.
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Lucius avait élu domicile à Poudlard, précisément dans la chambre de Severus. Cette manœuvre avait pour but, outre se rapprocher de son amant – au plus grand bonheur de celui-ci – d'avoir les balais lents des premières années à portée de main (il ne se voyait pas se rendre dans une boutique acheter un balai de débutant sans même avoir l'excuse de l'offrir à son fils). Pour l'instant, ses efforts s'avéraient vains – son balai refusait toujours obstinément de quitter la terre ferme – et plus l'échéance du match approchait, plus l'anxiété le gagnait.
Drago, mis au courant des difficultés de son père, avait voulu l'emmener avec lui sur son Nimbus pour commencer par vaincre sa peur. Lucius, lourdement vexé par cette initiative, avait refusé. Drago avait tenté de lui faire comprendre que son orgueil serait bien autrement blessé s'il devait déclarer forfait pour le match, mais son père, tout à sa vexation, avait superbement ignoré ses arguments.
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De son côté et pour la première fois de sa vie, Severus se sentait épanoui. D'autant plus que contrairement à ce qu'avait pensé son amant, leur liaison ne s'était pas plus ébruitée, ce qui l'arrangeait car ainsi les élèves ignoraient totalement la raison de sa bonne disposition à leur égard ; sans ça, des plaisanteries à ce sujet sur son compte auraient certainement circulé.
Il n'y avait bien que les Gryffondor qui n'avaient pas profité de ce changement dans la vie de leur professeur. Son comportement était toujours le même vis-à-vis d'eux ; il était toujours aussi sec, mordant et injuste. Ce qui rendait leur situation encore plus intenable, c'était qu'il était particulièrement gentil, compréhensif, voire même serviable avec les Serpentard, Serdaigle et autres Poufsouffle. Bref, le fossé qui existait en cours de potion entre les Gryffondor et les autres maisons s'était encore creusé.
Severus Rogue avait vraiment une dent contre eux.
Hermione Granger, ne se sentant plus capable de supporter cette animosité permanente jusqu'à la fin de sa scolarité (ce malgré le peu de mois qui lui restait à passer à Poudlard), avait constitué un dossier contre Severus Rogue et avait été plaider sa cause et celle de ses condisciples devant McGonagall, expliquant que Severus Rogue était un excellent professeur, qu'il était très compétent, et qu'il avait prouvé avec son comportement nouveau envers les Serdaigle et les Poufsouffle qu'il savait oublier que certains élèves n'étaient pas de sa maison, alors, pourquoi, grands dieux, pourquoi ne pouvait-il pas être un tout petit peu plus juste envers les Gryffondor ?
Minerva McGonagall, connaissant l'aversion qu'avait son collègue envers sa maison, n'était pas persuadée de réussir à le convaincre d'être moins partial ; cela faisait très longtemps que Severus agissait de la sorte et les années ne paraissaient rien pouvoir changer à cet état de fait. Elle avait tout de même promis à Hermione qu'elle ferait de son mieux et s'était alors demandé ce que pourrait être le "mieux" en question.
~oOo~
McGonagall avait finalement trouvé un angle d'approche qui, s'il ne garantissait pas une amélioration dans le comportement de Rogue envers les Gryffondor, présenterait au moins l'avantage de lui ôter toute excuse recevable pour les maltraiter. Elle avait été exposer son idée à ceux qui allaient l'aider dans son combat – celui d'Hermione Granger en fait.
« Je ne crois pas que ça soit une bonne idée, jugea Remus Lupin.
— Severus sait parfaitement faire la part des choses ; seulement, il n'a pas encore eu la volonté de le faire jusque-là », assura Minerva. Elle ne croyait pas tout à fait à ce qu'elle disait, mais prétendre que Rogue ne changerait pas de comportement si les choses se passaient comme elle le souhaitait était lui faire un procès d'intentions ; or, les Serpentard n'avaient été que trop victimes de ce type de procédé.
« Ce n'est pas Rogue qui m'inquiète, précisa le lycanthrope en jetant un coup d'œil à Sirius.
— C'est moi qui ne sais pas faire la part des choses ? C'est la meilleure ! s'exclama celui-ci, ulcéré.
— Le fait est que vous avez tendance à jouer les victimes dès que vous parlez de Severus ; or, si mes informations sont bonnes, c'est vous qui avez ouvert les hostilités », fit Minerva.
Sirius répondit par un rapide haussement d'épaules et son regard se détourna.
« Sirius, si tu ne veux pas admettre tes torts, autant repartir !
— Mes torts ?
— Oui, tes torts. Je veux bien croire que Rogue en ait, mais tu ne me feras pas avaler qu'il n'a pas d'excellentes raisons de nous en vouloir. Moi aussi, j'ai des torts, ou plutôt un : celui de vous avoir laissé faire.
— Oh ! Bien sûr ! Car tu n'as jamais participé peut-être ?
— Si, mais jamais à des actions biens méchantes. Certaines plaisanteries que vous lui avez faites s'apparentaient plus à des humiliations publiques qu'à autre chose ! » Sirius eut un sourire à cette évocation, Remus secoua la tête et poursuivit : « Il faut aussi tenir compte de l'accumulation : chaque petite blague que vous lui faisiez, séparément, n'était pas grand-chose – enfin… sauf pour certaines –, mais le tout s'appelle du harcèlement ! Ce genre de choses est très difficile à vivre, c'est normal qu'il nous ait pris en grippe. Qu'il déteste les Gryffondor en général, cela l'est moins, mais prétendre que ça ne découle pas en grande partie de ce que nous lui avons fait subir serait nous voiler la face. » Remus eut un sourire amical et jeta un regard doux à Sirius dans l'optique d'une autre approche : « Fais un effort, Sirius. Pense à tous ces Gryffondor qui auront des cours de potion supportables après.
— Je n'ose même pas imaginer l'étendue de ce que vous lui avez fait subir, constata Minerva, les lèvres pincées.
— Ah ! Le rôle de victime lui va bien ! s'exclama Sirius, amer.
— Ce rôle vous sied encore moins qu'à Severus ! Je sais à présent pour l'affaire du loup-garou. Croyez que si j'avais été au courant à l'époque, j'aurais demandé votre renvoi ! Je ne suis pas aussi indulgente que le professeur Dumbledore, Monsieur Black ! » gronda Minerva. Elle se retint d'ajouter que ce qu'avait fait le directeur dans ce cas précis méritait plus de s'appeler laxisme qu'indulgence. Quelquefois, il ne semblait pas se rendre compte de la gravité de certains actes. « Je vous laisse tous les deux. Tâchez d'arranger vos relations avec Severus », ajouta-t-elle.
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Sirius regarda Minerva s'éloigner avant de se tourner vers Remus.
« On ne va quand même pas s'excuser ?
— Moi si ; et toi à plus forte raison. C'est à toi qu'il en veut surtout, ainsi qu'à James ; je m'excuserai en son nom. »
Sirius fit la grimace. Il avait autant envie de s'excuser auprès de Rogue que de retourner à Azkaban ou d'embrasser Queudver sous sa forme animale. Et surtout il estimait ne devoir aucune excuse à Rogue ; ce n'était que des plaisanteries d'adolescents – sauf pour l'histoire du loup garou, mais le Serpentard l'avait bien cherché ! –, il n'y pouvait rien si Rogue était incapable de tourner la page, et il doutait que des excuses change quoi que ce soit dans ses façons de faire actuelles. Cependant, Remus avait l'air d'y tenir, McGonagall aussi. Il suivit son ami à contrecœur.
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Lupin tapa à la porte du bureau affecté au maître de potion.
« Entrez », invita Severus. Remus nota que sa voix était – comment dire ? – non pas guillerette car il ne fallait pas abuser non plus, du moins amicale. Il avait ouï dire que Rogue semblait plus à l'aise dans sa peau depuis quelques temps – McGonagall avait d'ailleurs abondé dans ce sens – ; le son de sa voix le confirmait.
Les deux anciens maraudeurs entrèrent ; Severus releva nonchalamment le nez des copies qu'il corrigeait. Il serra les dents quand il sut l'identité des visiteurs. Remus ne manqua pas ce changement dans sa physionomie et comprit que sa voix n'aurait plus rien d'amical tout le temps qu'il leur parlerait, à moins qu'il se détende une fois les excuses formulées ; ce qui était à souhaiter.
« Bonjour Sev… commença-t-il avant d'être sèchement interrompu.
— Que me voulez-vous ? Dépêchez-vous de me le dire, j'ai énormément de travail, je ne tiens pas à perdre du temps avec des gens comme vous, dit Severus en se concentrant à nouveau sur les feuilles de parchemin étalées devant lui.
— On ne va pas te déranger plus longtemps alors ! » Black effectua un demi-tour preste ; Remus ne fut pas moins rapide à le retenir en l'attrapant par le bras.
« Nous sommes venus te présenter nos excuses », déclara-t-il.
Severus se désintéressa des devoirs serdaigliens, s'appuya sur son dossier, croisa les bras et leva un sourcil interrogateur et étonné.
« Des excuses ? Voilà qui est surprenant !… Et puis-je savoir ce qui me vaudrait des excuses si tardives ? A quoi correspondraient-elles exactement ? Et que dois-je entendre par "nous" ?
— Je m'excuse en mon nom et en celui de James ; quant à Sirius… » ajouta Remus en se tournant vers son ami.
Sirius prit une profonde inspiration. Que certains mots pouvaient coûter !
« Je m'excuse, dit-il du bout des lèvres avec une évidente mauvaise volonté.
— Oh ! Black, la sincérité de tes excuses m'émeut, assura Rogue d'un ton affecté.
— Va te faire… commença l'ancien prisonnier.
— Sirius ! l'interrompit Remus. N'oublie pas ce que McGonagall et moi t'avons dit : il serait temps que tu avoues tes torts ! Oublie tes rancœurs et ne perds pas de vue que c'est par toi et par James que cette vieille querelle a commencé ! »
Severus se retint de sourire. C'était assez réjouissant de voir le sale cabot se faire gronder comme un petit chiot fautif par un loup-garou furieux. Sans compter que pour la première fois à sa connaissance, un des maraudeurs avouait qu'ils s'étaient conduits en parfaits crétins… pas tout à fait en ces termes – hélas ! –, mais c'était mieux que rien. Toutefois, que venait faire McGonagall là-dedans ? Serait-elle à l'origine de cette entrevue ?
« Admettons que Black ait été sincère dans ses excuses – il faut faire un effort d'imagination bien sûr, mais c'est du domaine du possible –, tu n'as pas répondu à mes autres questions, Lupin. Pourquoi, là, aujourd'hui, des années après nos études et après l'évasion de Black, avez-vous décidé de venir jouer les hypocrites – pardon, j'avais dit que j'admettais la sincérité de vos excuses –, pourquoi avez-vous soudainement décidé de venir vous excuser ?
— Tu n'as pas un comportement très impartial envers les Gryffondor », informa Lupin d'un ton hésitant. Avouer que leur démarche n'était pas désintéressée n'était sans doute pas ce qu'il y avait de plus constructif à faire pour faire accepter leurs excuses comme étant sincères, mais c'était la seule manière crédible de présenter les choses.
« En voilà une nouvelle ! » s'exclama Severus. C'est qu'il était drôle ce Lupin quand il le voulait ! « Et donc, vous avez décidé de venir remédier à cette injustice en vous excusant, en espérant qu'ainsi ma vengeance envers les Gryffondor s'arrêterait d'elle-même ?
— Ils n'ont pas à pâtir de ce que les Maraudeurs t'ont fait.
— C'est vrai, c'est très vrai, concéda Severus en hochant mollement la tête. Ce qui est dommage, c'est que j'y ai pris goût.
— Tu vois ! Ce type est indécrottable. Il n'a jamais pu supporter les Gryffondor, ce n'est pas aujourd'hui qu'il va commencer. D'ailleurs, ce que nous avons fait ne change rien au problème, nous n'aurions rien fait qu'il aurait exactement le même comportement aujourd'hui. »
A cette réplique, la bonne humeur de Severus devant cette situation s'évapora.
« Mais bien sûr, approuva-t-il en se levant, une lueur dangereuse dans les yeux, qu'est-ce que ça aurait pu changer à mon caractère de ne pas avoir eu à subir un bizutage permanent ? Pourquoi ma vision des Gryffondor aurait-elle été différente si je n'avais pas été persécuté par deux d'entre eux ? C'est évident que ça n'aurait rien changé du tout ! Heureusement que la suprême intelligence du sieur Black est là pour me signaler ces évidences. Sans ça, avec ma bêtise incommensurable et mes cheveux gras, comment aurais-je pu m'apercevoir de ces vérités premières ? »
Rogue s'était avancé lentement vers Black en disant ces paroles, ne le lâchant pas du regard. Sirius recula d'un pas par réflexe ; s'en rendant compte, il ne recula pas plus loin et laissa Rogue s'approcher autant qu'il le désirait.
« En y regardant de plus près, dans les maraudeurs, ce n'était finalement pas Pettigrow le plus con des quatre », cracha Severus à dix centimètres du visage de Black. Ce coup porta. La lèvre inférieure de Sirius tomba.
Un sourire jubilatoire fleurit sur les lèvres de Severus pendant qu'une joie malsaine se mettait à briller dans ses yeux. Blessé ! Il avait blessé Black ! Il le fixait avec des yeux de chien battu et étonné. Il l'avait frappé là où ça faisait mal et qu'est-ce que ça lui faisait du bien ! Cet instant valait à ses yeux autant que la somme de toutes les retenues et points enlevés aux Gryffondor depuis le début de son professorat jusqu'à ce jour.
C'était jouissif !
Black fut tellement offusqué par cette réplique qu'il ne trouva rien à y répondre et préféra tourner les talons ; il sortit en claquant la porte. Les deux personnes restantes fixèrent le panneau pendant quelques secondes après son départ, Remus, la tristesse marquée sur le visage, Severus, un sourire rayonnant aux lèvres.
Rogue ferma les yeux et poussa un soupir satisfait. Il se sentait plus léger. Décidément, tout allait bien dans sa vie depuis quelques temps : Voldemort était mort, Lucius était son amant, il avait mouché Black.
La vie était belle.
Il regarda Remus et se sentit étrangement enclin à l'indulgence. Le bonheur rendrait-il gentil ?
« Je te remercie, Lupin, pour tes excuses, celles que tu as faites en ton nom évidemment ; elles sont acceptées car je les sais sincères. De plus, je te reproche moins de choses qu'à Black. Mises à part quelques broutilles, la seule chose pour laquelle je t'en voulais était d'avoir failli me dévorer. Cela dit, ce n'était pas de ta faute ; tu n'es pas conscient de tes actes en tant que loup-garou, et c'est ton grand copain Black qui m'a jeté dans tes griffes. Je n'ai pas le droit de te porter responsable de ça, fit Severus, façon bon prince, en allant se rasseoir.
— Et pour les autres Gryffondor ? demanda Lupin, plein d'espoir devant la "magnanimité" de Severus.
— Comme je l'ai dit tout à l'heure, j'ai pris goût à les maltraiter. Mais je peux sans doute faire en sorte de freiner un peu le rythme. Après tout, j'ai trouvé un autre moyen de me relaxer.
— Ah oui ? Lequel ? demanda Remus, curieux.
— ça ne te concerne pas », répondit Severus d'un ton sec. S'il se laissait aller à faire des confidences à un Gryffondor, un ancien Maraudeur en plus, rien n'allait plus ! Surtout qu'il avait déjà fait des confidences à Lupin un jour, et que cet imbécile avait été répété à Potter et Black qu'il s'intéressait à la magie noire. Cependant, connaissant la personnalité de Lupin, Severus se doutait aujourd'hui qu'il n'avait pas pensé à mal en le faisant.
« Bien. Et pour James ?
— Quoi James ?
— Les excuses que j'ai faites en son nom.
— Son nom est maudit pour moi. C'est d'ailleurs pour ça, je pense, que je prends tant de plaisir à faire souffrir son fichu rejeton – sans compter que c'est le portrait craché de son crétin de père. Même mort, il n'est pas question que je pardonne à James Potter, surtout que c'était lui le chef de votre minable petite bande. »
Remus ne fut pas même ému par cette réflexion acerbe de Severus. Le temps et la trahison de Pettigrow l'avaient amené à reconsidérer son opinion sur le groupe d'amis que formaient les Maraudeurs.
« Il est encore plus coupable à mes yeux que Black, continua Severus, ce crétin qui, non content d'avoir tenté de me tuer, lui a offert l'occasion de me sauver la vie. Et Dumbledore qui a osé prétendre devant la progéniture de cet être détestable que je lui devais quelque chose ! Moi, j'ai sauvé la vie d'Harry Potter gratuitement ; je ne l'ai pas fait parce que, sans ça, mon meilleur ami se retrouvait accusé de meurtre !
— Je comprends », fit Remus, sentant que la joie qu'avait ressentie Severus avait été totalement effacée par la haine qui l'envahissait à nouveau à la pensée de James Potter. Il ne s'était jamais aperçu jusqu'à aujourd'hui de la force du ressentiment de Severus envers James. Le fait que celui-ci soit mort en héros alors que Severus le considérait comme un être abject n'avait en rien amélioré les choses. « Je pense qu'il est inutile de te demander si tu pardonnes à Sirius.
— Qu'est-ce que ça peut te faire de toute façon ? Je t'ai dit que je tâcherai d'être un peu plus juste envers les Gryffondor, c'est uniquement dans cet objectif que vous êtes venus vous excuser. Le fait que je pardonne ou non à Black ne renforcera pas ma décision ; je n'en ferai pas plus pour autant, ni moins. »
Severus laissa s'échapper un silence pendant lequel il regarda pensivement Remus.
« Entre nous – écoute bien ce que je vais te dire, Lupin, car je ne le répéterai pas deux fois –, je n'ai jamais compris ce que tu faisais parmi les Maraudeurs. Black et Potter n'étaient que de la racaille et Pettigrow, un moins que rien. Honnêtement, tu valais mieux que ça.
— Tu n'as pas le droit de juger les gens de façon si hâtive, remarqua Remus, enchanté tout de même que Severus ait une si haute opinion de lui malgré son enclin à juger sévèrement les Gryffondor passés, présents et à venir.
— Et pourquoi pas ? C'est bien ce que vous faisiez à mon égard de votre côté, non ? répondit férocement Severus.
— Très juste, et nous avions tort. »
Un nouveau silence. Severus croisa les bras et haussa le menton.
« En résumé, tu penses que l'image que j'ai de tes trois copains n'est pas fidèle à la réalité.
— Ne nous attardons pas sur le cas de James ou de Pettigrow, l'un est mort et l'autre nous a trahis. Sirius est quelqu'un de bien, tu sais ? D'accord, il a une dent contre toi et il ne se rend pas toujours bien compte de la portée de ses actes ou de ses paroles, mais c'est un type très bien.
— Mais je n'en doute pas une seule seconde, rétorqua Severus. Je suis même certain que Sirius Black est le plus délicieux des hommes avec les gens qu'il apprécie ; mais je peux t'assurer que c'est un fieffé connard avec les gens comme moi : ceux dont il a décidé qu'ils ne faisaient pas partie des gens fréquentables. Pour établir une comparaison, je dirais que dans l'esprit de Black, je suis classé plus bas que Weasley dans celui de Lucius Malefoy ; à la différence près que Lucius, lui, ne s'est jamais considéré comme un type bien. Vois-tu, Remus, j'ai une nette tendance à préférer les gens qui se revendiquent parfaits salauds et qui font parfois des choses biens que les gens comme Black qui sont certains d'être du bon côté et qui passent leur temps à juger et à humilier les gens sous le simple prétexte qu'ils ont l'impression de ne pas être du même bord qu'eux ! Bref, la présence et la façon d'agir de Black et Potter à Poudlard m'ont amené à considérer la fréquentation de Voldemort et des Mangemorts comme préférable. Je me fais bien comprendre ? »
Remus accusa le coup. Il avala sa salive.
« Oui, je comprends ton point de vue ; il est défendable, un peu exagéré peut-être, et discutable sur certains points, mais parfaitement défendable. Il y a quand même quelque chose qui me déplait dans ton argumentation : tu es en train de me dire que tu es devenu Mangemort à cause de nous ?
— Je n'ai pas dit à cause de vous ; je ne vous classe plus, toi et Pettigrow, dans le même panier que les deux autres depuis longtemps. Pour ce qui est de mon choix de devenir Mangemort, il y a d'autres éléments qui sont entrés en jeu, mais je ne te cache pas que ce que m'ont fait subir tes deux amis a été déterminant dans mon choix. »
Severus avait mis le plus de mépris qu'il pouvait (est-ce bien utile de vous préciser qu'il en a à revendre ?) sur le mot "amis".
« Je sais à quel point Sirius peut être désobligeant, accorda Remus. En sus, il est aveugle et fait souvent le contraire de ce qu'il devrait faire.
— Pourquoi "aveugle" ?
— Cela ne regarde que moi. »
Severus avait toujours eu l'esprit vivace et sa relation récente avec Lucius lui avait ouvert de nouveaux horizons. Il n'eut donc aucun mal à déchiffrer cette phrase sibylline : Remus s'était amouraché du cabot de service. Finalement, il était encore plus stupide que les trois autres.
« Un loup-garou miteux et un chien galeux, félicitations, vous formerez un très joli couple ! »
Remus eut l'air surpris. Son air étonné se transforma vite en moue amusée qui fit elle-même place à un masque de tristesse.
« Tu as toujours eu l'esprit sagace, dommage que ça ne soit pas le cas de Sirius.
— Si Black comprenait quoi que ce soit, cela se saurait !
— De toute façon, on ne sera jamais ensemble, le seul qui parait intéresser Sirius, c'est toi.
— Ah ça, il aime particulièrement m'être désagréable, c'est sûr que ça doit l'occuper. »
Remus émit un léger rire triste.
« Toi aussi, tu es aveugle, dit-il.
— Comment ça ? »
Rogue avait toujours eu une sainte horreur de la critique, surtout quand il la considérait comme non fondée, comme c'était le cas présentement car il se considérait au contraire comme quelqu'un de très clairvoyant.
« Tu te rappelles de Michael O'Donnel ?
— Ce gamin qui ne cessait de rendre la vie impossible toujours à la même fille ? répondit Severus, ne voyant pas ce qu'un étudiant de leur promotion venait faire dans le débat.
— J'ai appris récemment qu'il s'est marié avec. En fait, il voulait juste attirer son attention, alors, il n'arrêtait pas de lui chercher des crosses. Elle était sûre qu'il le détestait.
— Où veux-tu en venir ? » demanda Severus, n'appréciant pas – mais alors pas du tout – ce qu'il commençait à entrevoir dans les propos de Lupin.
Black ?
Amoureux de lui ?
Oh… pitié !
