Mon père, ce…
Par Maria Ferrari
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Les personnages et l'univers de Harry Potter appartiennent à J.K. Rowling.
Base : Tomes 1 à 4 de Harry Potter
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—Chapitre 19 – Annonce—
Comment décrire l'ahurissement général ? Quels mots trouver pour qualifier le silence qui s'abat soudainement sur la table des Serpentard et qui gagne à présent les autres tables ? Les Gryffondor, stupéfiés, qui se retournent ; les Serdaigle, ébahis, qui en laissent tomber leurs fourchettes ; les Poufsouffle, perturbés, qui relèvent des regards craintifs, ne connaissant pas la raison de ce silence oppressant car trop éloignés du lieu du Crime, et peut-être aurait-il mieux valu pour eux ne jamais la connaître.
Les professeurs ne sont pas en reste : Hagrid s'étrangle avec un morceau de viande, Bibine parait avoir avalé son balai, Rogue reste bouche bée, Sinistra se pince pour vérifier qu'elle est bien réveillée, Dumbledore n'en croit pas ses oreilles, Minerva marmonne des mots sans suite.
Mais parlons du Crime, un scandale, une union contre nature, défiant toutes les règles établies depuis des siècles : un Gryffondor avec un Serpentard.
Et pas n'importe lesquels ! Non, il n'est pas question de deux élèves anonymes perdus dans la foule, que personne ne remarque pas même leurs professeurs ; il ne s'agit de rien de moins que Drago Malefoy, descendant d'une longue lignée de sangs purs, tous à Serpentard (mis à part quelques faux pas du côté d'un Gryffondor mais l'alcool étant en cause, vous nous excuserez de ne pas trop nous attarder sur la question), supportant mal les Gryffondor et tout ce qui s'y rapporte ; la notoriété du second n'est plus à faire, Harry Potter, celui qui a survécu, celui qui était désigné pour tuer celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom, celui (bien peu le savent) qui a refusé d'aller à Serpentard, celui qui a dédaigné la main que lui offrait Malefoy.
Les deux ennemis pouvaient-ils vraiment être liés par un tendre sentiment ? Est-ce le sang de Dumbledore présent dans les veines de Drago qui a entraîné cette absurdité ? Est-ce le côté Serpentard d'Harry qui a permis d'opérer ce rapprochement aberrant ? Nul ne le saura jamais. Quoiqu'il en soit, les propos du blond ne pouvaient être mis en doute ; pas plus qu'on ne pouvait ignorer le regard intense de Potter en direction du Serpentard.
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Laissant de côté le trouble consécutif à l'annonce solennelle qu'il avait faite à ses amis d'une voix suffisamment forte pour être entendu par le plus grand nombre, Drago reprit le cours de son repas là où il l'avait laissé comme si de rien n'était.
Pansy fut la première à se remettre de ses émotions.
« Si j'avais pu m'attendre à un coup pareil ! Je veux dire, je savais que t'étais homo, mais jamais je n'aurais imaginé… Potter ? Je croyais que tu avais meilleur goût !
— Ouais ! Y a des tas de gens beaucoup mieux, pourquoi lui ? » marmonna Goyle, apparemment fâché.
Drago releva un regard étonné. Il était habitué aux piques de Pansy ; cependant, c'était la première fois que Gregory lui parlait sur ce ton. Il avait l'air furieux contre lui.
« Pourquoi lui ? Pourquoi un Gryff' ? Pourquoi pas un Serpentard ? Quelqu'un que tu connaîtrais vraiment ! Lui, tu le connais même pas !
— Greg, qu'est-ce qui te prend ? » demanda Crabbe, inquiet de voir son ami prendre la chose tellement à cœur.
Certains, contrairement à lui, avaient déjà compris ce qui se passait.
« Tiens ! Je préfère partir ! annonça Goyle en se levant.
— Tu n'as même pas terminé ton plat ! protesta Drago.
— C'était la deuxième fois qu'il en prenait, fit Pansy.
— Il en prend toujours au moins trois fois, répliqua Drago. Qu'est-ce qu'il lui prend ? D'accord, je suis avec un Gryffondor. D'accord, il s'agit d'Harry Potter. D'accord, c'est surprenant, inattendu et tout ce que vous voudrez. Mais pourquoi Goyle se met-il dans un état pareil pour ça ?
— Tu n'as pas compris ? demanda Pansy, stupéfaite. Ça crève les yeux pourtant !
— Qu'est-ce qui crève les yeux ?
— Il a le béguin pour toi ! » répondit Millicent.
Drago mit quelques secondes avant de réaliser que ce qu'elle venait de dire était exact.
« Oh non… oh, pitié, non ! se lamenta-t-il.
— Milly, t'es sûre de ce que tu viens de dire ? demanda Crabbe, les sourcils froncés.
— Oui, elle en est sûre… et moi aussi », approuva Pansy, accompagnant ses propos d'un hochement de tête ferme et assuré.
Vincent accepta cette information, l'analysa et se tourna vers Drago.
« Faut pas le faire souffrir, c'est mon ami.
— Je le sais que c'est ton ami, et c'est le mien aussi, mais ce n'est que ça, et il n'est pas question que ce soit plus. Je ne ressens rien d'autre pour lui que de l'amitié. Je suis désolé qu'il ressente autre chose. Et si sous prétexte qu'il est amoureux de moi, je doive me mettre avec lui bien que je ne l'aime pas, comment cela finira ? Je suis déjà avec quelqu'un pour qui je ressens quelque chose… il est hors de question que je laisse tomber Harry.
— Personne ne t'a demandé de laisser tomber Potter, ni de te mettre avec Greg. Néanmoins, tu devrais aller lui parler et mettre les choses au clair… avec tact.
— Pansy Parkinson me parle de tact. C'est l'hôpital qui se moque de la charité.
— Quoi ? Je n'ai pas de tact ? Avec toi, peut-être ; mais si le besoin s'en fait sentir, je suis parfaitement capable d'en avoir.
— Avant-hier, tu m'as dit que mes cheveux étaient filasses et que mon nouveau pantalon ne m'allait pas du tout, raconta Millicent dans une moue dubitative.
— ça, ce n'est pas du manque de tact, c'est de la franchise.
— Je ne t'avais pas demandé d'être franche. Je ne t'avais même pas demandé ton avis sur mon pantalon ou sur mes cheveux. »
Pansy se mordit la lèvre inférieure.
« Il est vrai que quelquefois je peux être un peu brusque dans mes paroles, mais… »
Drago se tourna vers Crabbe, laissant de côté Pansy qui défendait son sens aigu de la diplomatie.
« Je vais voir Gregory, je vais discuter avec lui. Tu viens avec moi ?
— Tu voudrais pas attendre que le dessert soit là ? En plus, t'as presque rien mangé.
— Je n'ai plus faim. S'il te plait, viens.
— Je viens… mais c'est bien parce qu'il s'agit de Greg ! décida Crabbe. Il y a du gâteau au chocolat en dessert, ajouta-t-il pour démontrer l'ampleur de son sacrifice.
— Tu reviendras ici après. Cela ne devrait pas durer très longtemps. »
~oOo~
Pendant que se déroulait ce drame à la table des Serpentard, un autre se préparait à la table des professeurs.
« Cette journée est catastrophique. D'abord mon nez, ensuite ça, se plaignait Sirius après l'annonce inattendue de Drago.
— Je trouve cela plutôt positif. Cela peut améliorer les relations entre les maisons. Elles sont moins tendues qu'auparavant, ce n'est toutefois pas encore l'entente cordiale dont on peut rêver.
— Quelle importance les bonnes relations entre maisons ? Cela a toujours été tendu et c'est très bien comme ça ! Les Gryffondor et les Serpentard ne sont pas faits pour s'entendre. Un Gryffondor avec un Serpentard, c'est aberrant.
— C'est bien à toi de tenir ce propos ! s'exclama Remus d'un ton sarcastique.
— Qu'est-ce que tu veux dire ?… Ah non ! Tu ne vas pas t'y mettre aussi ! J'ai déjà assez de Julius Rogue qui insinue que je désire son frère », murmura Sirius. Il avait peur qu'on l'entende.
« C'est amusant, ça. Tu as tout de suite su de quoi je parlais. »
Sirius avala sa salive.
« ça suffit Remus. J'en ai assez de ces conneries.
— Moi aussi, j'en ai assez. Assez que tu détestes les Serpentard comme s'ils étaient les responsables de tout ce qui t'arrive de mal dans la vie. Assez que tu haïsses Severus et que tu le désires ardemment dans le même temps, murmura Remus d'une voix dangereuse.
— Je ne le désire pas ! » cria Sirius en bondissant de sa chaise.
Il partit à grands pas, les regards des élèves fixés sur lui. Il s'en passait des choses ce soir !
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« Journée mouvementée, n'est-il pas, Minerva ? déclara Albus.
— Un peu trop à mon goût. Que se passe-t-il avec Sirius à présent ?
— Je serais bien en peine de vous le dire. Cela a peut-être un rapport avec l'annonce de Drago… mais je ne vois pas lequel étant donné la phrase qu'il a hurlée. »
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Severus, lui, voyait le rapport.
Il avait tout de suite compris que Black parlait de lui. Ce qui s'était passé n'était pas dur à retracer. Drago avait fait son annonce. Un Serpentard et un Gryffondor ensemble. Black avait dû dire que ça le dégoûtait et qu'il n'arrivait pas à le croire. Lupin, excédé, lui avait enfin dit ses quatre vérités.
Tout cela avait bien peu d'importance de toute façon. Dans moins de deux mois, lui et Lucius annonceront qu'ils sont ensemble. Black se retrouvera sûrement calmé dans ses ardeurs.
Il y avait des problèmes plus importants à résoudre.
En entrant dans la grande salle, il avait immédiatement été trouver Dumbledore pour lui demander s'il savait où était Julius. Celui-ci lui avait répondu qu'il se trouvait dans les derniers appartements inoccupés du deuxième étage, mais qu'il valait mieux qu'il attende demain pour aller le voir : Julius avait besoin d'être seul.
Severus était reconnaissant au directeur de ne pas lui avoir posé de questions sur ce qui s'était passé avec Julius pour que ce dernier choisisse de s'isoler.
~oOo~
« Alors maintenant, c'est officiel. »
Ron était au comble du désespoir. Dire qu'il avait espéré un instant que Harry soit parti larguer Malefoy, et voilà que Malefoy en revenant annonçait à voix haute qu'ils étaient ensemble !
Le pire, c'était Harry. Il avait l'air tellement content au moment où Malefoy avait dit qu'il était son petit ami, tellement fier.
« Oui, répondit l'intéressé avec un sourire.
— Chouette ! s'exclama Weasley mollement.
— J'arrive pas à croire que tu sois avec Malefoy, avoua Neville. Remarque, c'est vrai qu'il est plutôt mignon… mais ça reste un sale gosse de riche doublé d'un enfant gâté. »
Harry haussa les épaules, son sourire satisfait toujours soudé aux lèvres.
~oOo~
Goyle était couché sur son lit, la mine triste.
« Tu m'en veux ? demanda Drago.
— Non… excuse-moi, je suis bête d'avoir réagi comme ça. De toute façon, j'avais aucune chance avec toi ! » jugea Gregory.
Malefoy venait de s'expliquer avec lui, soutenu par Crabbe.
« Il ne faut pas dire ça. Je suis avec…
— Etre avec Potter ou pas n'y change rien. Je suis moche, tu es beau. Je ne roule pas sur l'or, tu es riche. Je suis bête, tu es intelligent. Bref, par rapport à toi, je ne vaux rien ! Pourquoi perdrais-tu ton temps avec un type comme moi ?… C'est pour ça que je t'ai jamais rien dit. »
Un silence coupable s'installa. Ce qu'avait dit Goyle était le reflet exact de la réalité, Crabbe ne l'ignorait pas et Drago non plus.
« Je suis désolé, finit par dire Malefoy.
— Faut pas. Je m'en remettrai », assura piteusement Gregory.
~oOo~
Lucius, qui s'était sustenté chez lui, venait d'arriver dans les appartements de Severus. Il constata que celui-ci était absent. Pour tromper son attente, il fit apparaître un grand miroir qu'il plaça en face du fauteuil. Il s'y assit comme il le faisait d'habitude et se regarda faire. Severus lui avait fait une remarque à ce sujet quelques jours auparavant, il n'avait pas eu le temps de vérifier ce qu'il lui avait dit.
Force lui était de constater qu'il avait raison : sa manière de s'asseoir était un rien trop sensuelle. D'un coup, il comprenait mieux les regards indéfinissables qu'il s'attirait quand il s'asseyait en public.
Le pire, c'est que tout le monde devait penser qu'il le faisait exprès alors que ce n'était absolument pas le cas. Il se remémora Lord Corsfeld, un vieux monsieur qu'il avait croisé dans une réception et qui l'avait collé durant toute la soirée. Il se rappela la tenue qu'il portait ce soir-là – un pantalon plutôt moulant et une grande cape ample qui lui seyait à la perfection – il s'était assis en même temps qu'il lui disait bonjour, un léger sourire aux lèvres (oui, son sourire était beaucoup trop charmeur aussi !).
Le pauvre vieux avait dû croire qu'il tentait de le séduire !
D'où la difficulté à s'en débarrasser par la suite.
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La porte s'ouvrit pour laisser passer Severus.
« Ah, tu es là ! » s'exclama-t-il dans un sourire.
Il se dirigea vers un placard et sortit une bouteille de Cuerco (un alcool sorcier tout à fait délicieux) et deux verres à digestif. Lucius le regarda faire, intrigué : depuis le début de leur relation, c'était la première fois que Severus lui offrait un verre. Il lui avait offert du café, son lit, son corps, mais un verre jamais. Peut-être Severus avait-il un peu peur de l'alcool à cause de l'ivrognerie de ses parents… ou peut-être qu'il n'y avait tout simplement pas pensé.
Severus s'assit.
« C'est pour quelle occasion ? demanda Lucius. La décision d'annoncer notre union dans peu de temps ?
— Tu brûles ! Il s'agit effectivement d'une annonce de ce genre… et de taille ! déclara Severus en servant.
— Tu m'intrigues. »
Rogue lui tendit son verre.
« Santé ! » trinqua Lucius.
Ils burent un peu.
« Alors, quelle est cette annonce ?
— C'est ton fils qui l'a faite au cours du repas.
— Tiens donc ?
— Oui.
— Qu'a-t-il annoncé de si intéressant ? pressa Lucius avant de porter à nouveau le verre à ses lèvres.
— Il sort avec Potter. »
Lucius cracha ce qu'il venait de boire.
~oOo~
« Je ne suis pas attiré par Rogue ! D'ailleurs, je ne suis même pas homo ! » s'exclama Sirius.
Il se trouvait dans les appartements prêtés par Albus. Remus avait pris le temps de terminer son repas – laissant ainsi la possibilité à Sirius de se calmer – et l'avait rejoint.
« En es-tu bien sûr ? Moi, je crois que tu refoules et que tu ne t'en rends absolument pas compte. Résultat : tu t'aigris sans même savoir pourquoi !
— Je ne suis pas aigri.
— Si… tu te défoules sur Rogue pour que cela ne se voie pas. D'ailleurs, ton défoulement mêlé à ton refoulement a sans doute fait naître ton désir pour lui.
— Combien de fois devrais-je le dire ? Je ne le désire pas !!
— Si. Tu le désires et tu le détestes. Et moi, je t'aime et je ne sais même plus pourquoi. »
…
« Tu m'aimes ? »
Sirius était stupéfait par cette déclaration. Il ne se serait jamais attendu à ça.
« Si j'avais su… »
Cela lui faisait oublier qu'il n'était pas censé être homosexuel.
« Si tu avais su… encouragea Lupin.
— Je… j'aurais… »
Sirius laissa tomber l'usage des mots et caressa la joue de Remus.
Lupin fut un instant tenté de le laisser faire, puis préféra intervenir. Il enleva la main de Sirius.
« Es-tu sûr que c'est ce que tu veux ? C'est Rogue qui t'attire.
— Ce n'est que du désir, pas de l'amour », expliqua Sirius.
Tiens ! Cela lui faisait même oublier qu'il n'était pas censé désirer Rogue.
« Et moi, tu m'aimes ? » demanda Remus.
Sirius parut pris de court par cette question, et surtout par la froideur du ton qu'avait employé son ami pour la poser.
« Réfléchis-y. Prends tout le temps qu'il faudra. Pense à ce que tu ressens pour moi. Actuellement, je suis ton ami et je ne voudrais pas devenir moins en croyant devenir plus.
— Comment ça ?
— Je ne veux pas être un objet pour assouvir tes besoins sexuels. Je veux être aimé. Réellement aimé. Si tu ne t'en sens pas capable, s'il te plait, oublie ce que je t'ai confié… Je te laisse, pense à ce que je t'ai dit. »
Remus sortit au grand désespoir de Sirius. Il se laissa tomber sur un fauteuil et regarda la porte se refermer.
