Chapitre 5 : Le philtre de lune :

-Eh ! Lisez ça ! s'exclama Sirius, découvrant les gros titres de la Gazette du Sorcier.
Remus et James se penchèrent pour lire en même temps que lui tandis qu'un peu partout les élèves abonnés au journal découvraient l'article de concert avec les trois amis. Au-dessus du texte trônait la photo d'un enterrement.

« Terreur nocturne.

Dans la nuit du trois septembre, le tranquille village de Prés au Lard à été victime d'une terrible attaque. A trois heures du matin, un vampire s'est en effet introduit au 3, Principal Street et à fait son dîner d'un jeune couple. Les corps exsangues de Mr et Mrs Wyatt ont été retrouvés ce matin par leur femme de ménage. Celle-ci, en état de choc, nous a reçus en exclusivité. « Ils étaient allongés dans leurs lits, comme s'ils dormaient. J'ai tout de suite vu que quelque chose n'allait pas. Ils étaient si pâles… si pâles… Alors j'ai couru hors de la maison, j'ai appelé, j'ai crié… Pauvres, pauvres jeunes gens, ils étaient si gentils, jamais un mot de travers, toujours aimables ! »
Le maire du village, Mr Alexander, n'est pas resté silencieux après cette tragédie : « Le Ministère de la Magie a trop longtemps fermé les yeux sur ce problème. Ce genre d'attaques sont fréquentes dans certains villages reculés. Ce qui est inquiétant, c'est que c'est la première fois que cela se déroule si près de Poudlard. »
Des Chasseurs de Vampires d'élite sillonne le site, privilégiant la piste de la maison hantée locale, « la Cabane Hurlante », qui pourrait bien abriter la créature aux dires des villageois. L'autorisation a même été demandée au directeur de Poudlard, Mr Albus Dumbledore, de fouiller la Forêt Interdite après que celui-ci ai exprimé son étonnement à l'idée que la Cabane Hurlante soit le repaire d'un vampire.
« A cette heure, le vampire reste introuvable mais nous allons continuer les recherche jusqu'à ce qu'il soit définitivement mis hors d'état de nuire. » déclare Mr Alexander.
Gageons que les parents d'élèves ne resterons pas inactifs avec une aussi grande menace pesant sur la vie de leurs enfants.
J. Smith, reporter à la Gazette du Sorcier. »

- C'est terrible ! soupira Sirius.
Livia se tortilla sur sa chaise, prise de nausées.
-Oui… Terrible… se força t'elle à articuler.
-Ca fait peur… couina Peter
-Oh non… gémit faiblement Remus. La lune est pleine dans trois jours… qui sait ce qui se passera s'ils n'ont pas finit les recherches d'ici là…
-Au pire tu auras un compagnon de jeu pour aller croquer quelques innocents ! fit James avec légèreté. Je ne vois pas pourquoi vous paniquez, tous, cette bestiole n'aura fait que passer, en plus, il est impossible qu'elle entre dans Poudlard, c'est trop protégé. Aller, nous n'allons pas se prendre la tête pour un bête vampire, n'oubliez pas ce que nous sommes !
-Oui, c'est vrai ! Aucune créature ne peut venir à bout des Maraudeurs ! s'enthousiasma Sirius, gagné par sa fougue habituelle.
La petite voix de Livia s'éleva, un peu étouffée par la boule qui lui obstruait la gorge mais qui n'avait rien perdu de son ton sévère et inquiet à la fois :
- J'ose espérer que vous ne tenterez pas de retrouver le Vampire par vous-même…
-Mais non, ne t'inquiète pas ; répondit James d'un ton angélique.
-Mouais… Bon je vous laisse…
A quelques tables de là, Rogue – qui avait également lu l'article – la suivit des yeux, ses soupçons se muant en certitude. Cependant, quel que soit le risque qu'il prenait, il ne la dénoncerait pas, sa vie en serait-elle en jeu.

La journée se passa dans l'inquiétude pour Livia et elle eut toutes les peines du monde à se concentrer sur ses cours. Chaque fois qu'elle croisait Rogue au détour d'un couloir, elle lui jetait un regard interrogateur, pleine d'espoir, qui recevait systématiquement un discret signe de tête négatif. A la fin de son dernier cours, son avenir ne lui avait jamais paru aussi précaire.

De son côté, Severus Rogue avait l'impression d'avoir retourné toute la réserve, sans succès. Pourtant, il était certain d'avoir déjà lu quelque chose au sujet de cette fameuse potion. La journée tirait à sa fin sans que sa quête n'aboutisse. Il se laissa tomber lourdement sur un chaise de la bibliothèque et prit sa tête dans ses mains.
-Oh c'est sans espoir… Pauvre Livia, elle me faisait confiance mais je ne suis pas à la hauteur…
Il se lamentait intérieurement quant la voix sèche de Madame Pince, la bibliothécaire, retentit dans son dos.
- Qu'est-ce que vous faites ?
-Rien ; affirma Rogue – ce qui était vrai.
-La bibliothèque n'est pas un dortoir. Et je vous signale que vous avez un livre à rendre. Votre emprunt s'achevait hier. Si jamais vous l'avez perdu…
-Je l'ai dans mon sac… soupira t'il avec lassitude, habitué à ses colères dévastatrices envers quiconque risquait de faire la moindre éraflure à ses précieux ouvrages.
Il commençait à sortir le livre quant soudain cela lui revint. Se retenant de pousser un cri de triomphe, il dit d'une voix que son sentiment de triomphe jugulait :
-Puis-je le garder encore quelques temps ? S'il vous plait.
La bibliothécaire lui jeta un coup d'œil désapprobateur mais comme le livre ne semblait avoir subit aucun dommage, elle lui accorda à contre cœur un rajout d'une semaine.
Rogue se força à disparaître d'un pas tranquille, sentant le regard scrutateur de Madame Pince sur sa nuque mais sitôt eut-il passé la porte qu'il sprinta vers le parc, espérant que Livia serait seule.
Malheureusement, celle ci était, comme à son habitude entourée des Maraudeurs et de Célia en prime. Il resta planté là, à l'admirer de loin. Elle coiffait les cheveux de sa sœur en une multitude de petites nattes, souriante mais ses yeux étaient voilés par la crainte qui ne lui laissait aucun répit. Rogue se souvint avec émotion de leur baiser, quelques heures auparavant. Il se sentait délicieusement bien à ce souvenir, se rappelant sa chaleur, sa peau douce, ses yeux de velours qu'il aimait tant et qu'il avait possédé rien qu'à lui un tout petit, un minuscule instant fugace avec la sensation merveilleuse d'être emporté dans un tourbillon de feu.
S'approchant avec précaution pour ne pas éveiller l'attention des garçons en sa compagnie, il s'assura qu'elle l'avait vu avant de lui faire discrètement signe de le suivre.

Dès qu'elle l'aperçut, Livia se leva d'un bond par réflexe, faisant s'étonner ceux qui se trouvaient en sa compagnie.
- Qu'est-ce qui t'arrive ? fit Sirius.
-Rien… euh… je… j'ai oublié mon sac… euh… dans ma salle de cours… mentit-elle.
-Je peux venir avec toi ? demanda Célia, désireuse de suivre sa grande sœur comme son ombre.
-NON !… s'écria t'elle violemment.
Devant l'air perplexe de ses compagnons, elle s'empressa d'ajouter plus calmement :
-Euh… je veux dire… Non, je n'en ai pas pour longtemps, je reviens de suite.
Remus fut le seul à ne rien dire ; il avait aperçut le signe de Rogue.

Quant Livia put s'éclipser sans éveiller les soupçons, Rogue la suivit à distance raisonnable jusque dans la salle qu'ils avaient occupé ce matin même.
Lorsque la porte se referma, Livia se jeta dans ses bras, ivre de joie.
-Tu l'as trouvée ! Tu l'as trouvée ! scanda t'elle en se serrant contre lui. Merci, merci infiniment !
Rogue, ne sachant comment réagir à ce brusque emportement lui tapota maladroitement le dos. Livia paru se rendre soudainement compte de son geste et s'écarta de lui en rougissant.
-Hum… excuse-moi mais je suis tellement soulagée…
- 'Pas grave ; fit son interlocuteur d'un ton un peu bourru. Tient, regarde : Chapitre 13, le Philtre de Lune.
Il ouvrit le grimoire et tous deux se penchèrent sur la page parcheminée. Soudain Rogue eut un sursaut.
- Qu'y a t'il ? s'inquiéta Livia.
-Regarde le temps de préparation…
Le visage de l'adolescente se décomposa, prenant une teinte livide.
-Trois semaines… souffla t'elle, l'estomac contracté. Non… Ce n'est pas possible, jamais je ne pourrait tenir cela…
Elle plaqua soudain ses mains sur sa bouche, s'apercevant de sa gaffe et lança à Rogue un regard catastrophé, réfléchissant à toute allure à un rattrapage possible.
-Ne te fatigue pas, j'avais deviné. J'ai lu le journal ce matin ; dit le Serpentard avec nonchalance comme si le meurtre de Livia n'était pas plus extraordinaire que de manger un beefsteak.
A sa grande surprise et consternation, Livia éclata en âpre sanglots, prenant son visage dans ses mains.
-Je ne savait pas que j'avait tué ces pauvres gens… Je ne me souvenait pas… « Il » avait trop faim… Trop faim… sanglota t'elle, rongée de remords.
Emu, Rogue l'attira dans ses bras et l'y laissa pleurer de tout son saoul avant de chuchoter :
-Ce n'est pas ta faute…
-Si… Si, ça l'est… Si seulement j'étais capable de lui résister, si seulement j'était plus forte… Maintenant que je n'ai plus ma potion, je vais devoir partir de Poudlard, quitter tous ceux que j'aime…
-Ne t'inquiète pas, je t'aiderais.
-Mais ce sera si long ! Oh, Rogue… Que puis-je faire ?
-Tes parents sont au courant ?
-Oui… Oui… Ce fut un coup terrible pour notre famille…
-Dis-leur de te couvrir, de te trouver une raison de t'absenter trois semaines.
-Pas question ! Je ne veux pas leur causer d'ennuis !
-Tu devrait en parler à quelqu'un d'ici alors.
-Non, je refuse ! Je ne veux pas être découverte !
-Tu devrait le dire à Dumbledore, lui t'aidera !
-Non ! Non ! Il va me renvoyer !
-Je ne pense pas. Il pourra t'aider. En tout cas tu n'as rien à perdre.
-…
-Tu dois essayer !
-D… D'accord…
-Vas-y dès maintenant… Si… Si tu veux, je peux… t'accompagner… proposa t'il timidement – elle était toujours dans ses bras.
Livia hocha lentement la tête en signe d'acquiescement et regarda soudain son nouvel allié comme si elle le voyait vraiment pour la première fois.
-Pourquoi fais-tu ça pour moi ? Tu me déteste…
Le Serpentard baissa la tête avec douleur. Quant il la releva, ses yeux habituellement froids et vides semblaient éclairés de l'intérieur par un feu ardent.
-Je croyais que c'était évident… Que tu comprendrais…
-Je ne comprends pas… admit-elle, étonnée.
-Tu ne comprends pas… ou ne veux pas comprendre ?
Elle le fixa avec une grave douceur.
-Peut être que je ne veux pas encore comprendre…
Il paraissait triste et blessé par ces mots.
-Penses-tu vraiment cela ? Enfin… C'est mieux si tu ne t'en rends pas compte…
Il laissa un instant la détresse emprisonner son cœur dans son étau glacé, troublant le miroir profond de son regard d'où semblaient couler les ténèbres. Livia sentait les larmes lui remonter aux yeux. Heureusement, Rogue secoua la tête et repris le contrôle de ses émotions.
-Allez, vient ; on va voir Dumbledore. Il doit être dans son bureau.

Tout en marchant, aucun ne souffla mot, trop accablés chacun à leur manière pour vouloir ouvrir les lèvres. Mais quand leurs mains se frôlèrent au hasard de leurs mouvements, ils ne se lâchèrent plus. Leurs sentiments n'étaient déjà plus les mêmes.