Chapitre 12 : Deux étoiles :
-Ange ? Je peux te
parler une minute s'il te plaît ?
Le jeune homme brun
glissa sa main dans ses cheveux comme il le faisait souvent lorsqu'il
était anxieux, chassant les mèches rebelles qui lui
tombaient devant les yeux. Une pointe de rose colorait ses joues et
son regard d'un noir plus profond que le plus sombre gouffre
reflétait l'éclat incandescent des chandelles.
La
dénommée Ange releva la tête et ses lèvres
pâles exprimèrent la surprise et l'incompréhension.
Elle acquiesça silencieusement, balayant d'un regard glacé
les rires des filles qui l'entouraient. Son cœur s'emballait en
un galop tumultueux semblable à la course effrénée
d'un cheval.
Toujours sans un mot, elle se leva et suivit le
garçon hors de la Salle Commune des Gryffondors. Elle s'adossa
au mur, croisant les bras, attendant, les fins rubans de sa belle
chevelure havane encadraient son visage au masque impassible mais en
elle, un volcan grondait et embrasait son âme amoureuse.
Sirius
s'approcha au point de la frôler, sentant monter en lui son
attrait pour cette fille si secrète et fermée qui
l'avait un jour consolé sans une seule parole inutile, juste
par la chaleur de son corps.
Il entortilla l'une des mèches
brunes, appréciant la douceur soyeuse de la chevelure de sa
compagne. Ses doigts fins coururent lentement sur le pourtour ovale
du visage à la peau mate, levé vers lui. Son index
descendit sous le menton, attirant un peu plus vers lui le visage de
la jeune fille en une tendre pression.
Ange eut soudain conscience
de la proximité du visage de l'adolescent, dont le regard
perçant ne laissait échapper aucun des plus infimes
mouvements de sa partenaire.
Les lèvres minces de Sirius
glissèrent comme en rêve pour parcourir les derniers
centimètres qui les séparaient encore du bouton de rose
que formait la bouche d'Ange.
Celle ci entendit plus que jamais
son cœur tambouriner puissamment dans son sein. Elle avait
l'impression que le temps s'était suspendu dans sa course,
les lèvres du jeune homme qu'elle aimait en silence allaient
entrer en contact avec les siennes d'un instant à
l'autre.
La main gauche de Sirius suivi le creux de sa taille,
descendant dans une caresse se déposer sur ses hanches. Le
cœur de l'adolescente battait presque au point de se rompre, elle
était comme pétrifiée, prise au dépourvu.
Sirius
laissa ses yeux se fermer mais sa bouche ne rencontra jamais sa cible
convoitée. Le baiser termina sa course sur la joue veloutée
d'Ange qui venait de détourner la tête à
l'instant crucial. D'une geste brusque, elle s'écarta de
lui et lança, non sans froideur :
-Je peux savoir à
quoi tu t'amuses ?
Sirius resta bouche bée, bras ballants
devant cette réaction. Les yeux de la jeune fille envoyaient
des éclairs furibonds dans sa direction.
-Mais… Tu n'es
pas contente ? Pourtant d'après Livia, tu es amoureuse de
moi… balbutia t'il, sans comprendre.
Ange se redressa comme un
paon qui se rengorge, imprimant un frisson courroucé à
la ligne de ses épaules.
-Le Sirius que j'aime ne se
conduit pas comme un goujat ! lâcha t'elle dans un murmure
mais sa voix claqua comme un coup de feu dans le silence du
couloir.
Elle tourna les talons avec un mépris tangible,
teinté de chagrin et de colère.
Cependant Sirius la
retint par le poignet, se sentant tout penaud.
-Pardon… C'était
stupide de ma part, je n'aurais pas dû faire cela. Attends et
discutons…
Ange fit les gros yeux, comme devant un enfant qui
viendrait de faire une bêtise.
-Discutons ? …
-Oui,
puisque je ne peux te témoigner ce que je ressens par des
actes, parlons-en.
-Je t'écoute.
-En fait… Voilà…
Tu me plais, et j'aimerais bien sortir avec toi ; avoua t'il avec
un aplomb déconcertant.
-Minute papillon ! s'exclama
Ange, levant les bras au ciel, totalement dépassée.
Depuis quant est-ce que je t'intéresse ?
-Depuis le matin
où je t'ai croisé en revenant de l'infirmerie.
-Ne
te sentirais-tu pas un peu seul ces derniers temps par hasard ?
-Non…
Enfin si… Mais ce n'est pas le problème !
-Justement,
tout le problème est là ! répliqua t'elle,
haussant la voix. Je te prends dans mes bras, tu te renseignes sur
mes sentiments et comme cela à l'air d'être positif,
tu t'imagines que tu peux m'embrasser et me demander de sortir
avec toi comme cela, juste parce que tu te sens seul ! Désolée
de te décevoir mais, moi, je ne marche pas ainsi, va donc voir
ces glousseuses dans la Salle Commune, elles se pendront à ton
cou !
-En résumé, tu t'échafaudes que je ne
suis qu'un sale type qui sort avec toutes les filles de l'école
à condition qu'elles soient un peu jolies ?
-Je n'ai
pas dit ça, ne m'en fait pas dire plus que ce que je ne
pense !
-Mais bon dieu ! Que penses-tu alors ? s'agaça
Sirius.
Ange s'abîma dans la contemplation d'un paysage
campagnard où une brise douce agitait les branches d'un
chêne immense ; un corbeau passa dans le ciel bleu. Elle avait
mal. Pourquoi fallait-il qu'elle envenime toutes les situations
?
-Voilà ce que je pense ; dit-elle avec mélancolie.
Je ne suis bonne qu'à nous faire nous disputer même si
tu ne peux savoir combien j'ai pu rêver du jour où tes
beaux yeux me verraient enfin.
-Arrête ! s'écria
t'il violemment.
Ange sursauta et le regarda, surprise.
-Pourquoi compliques-tu ce que tu ressens ? Pourquoi te
laisses-tu aller à ton désespoir et t'accuses-tu sans
cesse sans jamais voir les gens qui aimeraient être avec toi ?
Si tu me plait, c'est qu'il y a une raison alors endigue un peu
tes craintes ! proclama Sirius avec fougue.
Ange baissa les yeux
et se mordit la lèvre. Les paroles de Sirius touchaient à
un point sensible et rudoyaient ses certitudes jusque là
acquises. Elle se sentait les larmes aux yeux.
-Non ; se dit-elle.
Non, tu ne dois pas lui montrer ta faiblesse !
Elle aspira
profondément pour ne pas se laisser aller.
-Tu n'as pas à
me dire ce que je dois faire ! Tu n'as pas à me juger, tu ne
sais rien de moi ! s'emporta t'elle brusquement.
- D'accord
! D'accord ! J'ai compris ! Mais dis-moi alors pourquoi tu me
repousse !
Il avait crié, l'attrapant par les épaules
pour la forcer à le voir. La jeune fille ne lutta pas contre
cette étreinte puissante mais ses prunelles trahissait son
désespoir, sa peur aussi mais surtout toute la rancœur
qu'elle accumulait depuis des années et qui semblaient prête
à crever comme un abcès.
-Je te repousse parce que
j'en ai marre d'être prise pour une imbécile,
surtout par des garçons et puis aussi parce que c'est ta
dernière année et qu'après je ne te verrais
plus !
Sa voix se brisa devant ses derniers mots. Elle avait mal,
mal à en devenir folle. Elle qui aimait éperdument
Sirius et rejetait ses avances à cause de cette stupide peur,
tellement présente qu'elle en était presque physique,
palpable et plus insoutenable que jamais.
-De quoi as-tu peur…
Je ne vais pas te faire de mal… Et puis… Si nous sortons
ensemble, rien ne dit que nous resterons un couple pour la vie…
La
voix du garçon s'était radoucie tandis qu'il la
tenait toujours par les épaules, comme pour l'empêcher
de fuir. Ange sentait les larmes lui picoter les yeux sous ses
paupières baissées.
- C'est justement ceci qui me
fait peur… Je ne veux pas m'attacher à toi et souffrir
lorsque tu me laisseras… avoua t'elle piteusement.
Sirius
poussa un soupir entre l'exaspération et la tendresse.
-Mais
enfin ! Si tu ne tente jamais rien, tu ne connaitras jamais rien !
C'est en connaissant des échecs qu'on avance, voyons !
moralisa t'il.
De nouveau, Ange se libéra des mains qui
la retenaient avec une violente secousse, elle n'en pouvait plus de
toujours entendre les mêmes discours, de se voir faire la
morale.
-MAIS JE LE SAIS ! hurla t'elle, libérant toute
son amertume avec l'énergie d'un torrent trop longtemps
contenu. FOUS-MOI LA PAIX ! QUI ES-TU POUR ME JUGER ? POUR ME
CONDAMNER ? TU NE SAIS RIEN DE MOI ! TU NE SAIS RIEN… RIEN…
Elle
étouffa un hoquet, des sanglots rageurs la secouaient tout
entière.
Son compagnon eut l'air de recevoir une gifle.
Alarmé, il s'approcha de nouveau mais elle tendis le bras
pour le chasser. Elle avait enfouit sa tête dans ses
mains.
-Tu…es content ? Tu as réussit ? … Tu pourras te
vanter de m'avoir fait pleurer… gémit-elle entre deux
éructations, refusant de le conserver dans son champ de
vision. Vas-y ! Va donc le raconter à tout le monde !
Sirius
la fixa avec compassion.
-Ange… Je ne veux pas me moquer de toi,
tu sais. Pleurer n'est pas une marque de faiblesse, au contraire !
Il faut avoir du courage pour oser pleurer parce que cela veut dire
que tu affrontes ce qui te fait du mal, que tu oses voir tes
souffrances en face. Pour moi, c'est la preuve d'une grande
force… Et puis si je ne sais rien de toi tant pis… J'apprendrais
!
La jeune fille se retourna et le considéra comme si
c'était la première fois qu'elle le voyait
réellement, au-delà de son physique charmeur qui lui
retournait le cœur. Elle le pensait bellâtre sans cervelle
mais tout à coup, elle prenait conscience de son esprit et de
sa gentillesse. Elle détailla son visage qui la contemplait
également, ses yeux suivant le contour de ses prunelles
sombres, de ses cheveux dont l'obscure teinte se détachait
sur sa peau aristocratique à la blancheur du lait.
Tout à
coup, elle se jeta contre lui et se remit à sangloter
désespérément. Sirius, un peu surpris, l'enferma
de ses bras et un sourire se dessina sur son visage.
Le jeune
homme laissa errer ses lèvres dans son cou, goûtant à
la peau dorée qui l'attirait si irrésistiblement et
cette fois ci, Ange se laissa faire, les dernières traces de
ses pleurs disparaissant de ses joues. Elle se serra un peu plus
contre lui, épousant la forme de son corps comme pour inscrire
son empreinte en elle à tout jamais. Un désir sans
borne consumait Sirius, le rendant fou de passion au contact de sa
partenaire. Il laissa ses mains errer le long des hanches
harmonieuses, épousant de ses mains la forme du bassin. Sa
bouche courut sur les joues d'Ange qui gardaient un goût de
sel, les effleurant de son souffle tiède. Les mains de la
jeune fille agrippèrent passionnément la chemise de
Sirius, s'accrochant à lui comme pour l'entraver et le
garder près d'elle. Sentant cela, il laissa ses lèvres
glisser jusqu'à celles d'Ange et cette dernière se
sentit parcourue d'un long frisson intense de délice,
abandonnée et offerte à ses tendres
étreintes.
Lorsque, bien plus tard, elle se remémora ce moment, elle se souvint de quelque chose de très doux, baigné par les larmes qu'elle versait.
Lorsque l'heure du dîner sonna, Sirius se saisit de la main de sa nouvelle conquête et ils descendirent ainsi. Lorsque Livia les croisa, se rendant elle aussi à la Grande Salle, un air radieux illumina son fasciés bienveillant et doux. Ange lui rendit son sourire et c'est le cœur léger qu'ils franchirent ensemble la porte de la pièce.
La
main glissée dans celle de Livia, Severus tremblait
imperceptiblement. Tous ces regards braqués sur eux, tous ces
visages qui les guettaient, l'effrayaient au plus au point. Il se
sentait au bord de la nausée.
-Ce n'est pas le moment de
fuir… Courage Severus, au moins une fois dans ta vie fais en preuve
! pensa t'il.
Se forçant à demeurer impassible
pour ne pas inquiéter sa petite amie, il continua d'avancer
avec l'impression que la distance qui les séparaient des
sièges les plus proches était interminable. Son regard
anxieux croisa tout à coup celui de Lucius Malefoy et
l'expression de ses yeux gris bleu métallique le glaça
tout entier. Une sueur froide glissa le long de sa colonne vertébrale
et il déglutit péniblement, incapable pourtant de se
soustraire à ce regard d'acier, implacable et cruel. Il lui
semblait que son esprit s'engourdissait, que le froid envahissaient
peu à peu ses membres. Sa Marque des Ténèbres le
picotait désagréablement, présageant les pires
catastrophes.
Livia, de son côté, ignorante du
trouble malsain qui envahissait son amant, avançait la tête
haute, pleine de mépris et de défis pour ceux qui
osaient la critiquer – et il y en avait !
Elle aperçut
dans la foule James, Lily et Remus qui souriaient, sans beaucoup de
conviction néanmoins pour les deux garçons. Se tournant
vers Severus, elle chuchota :
-Gardes-moi une place avec toi, je
reviens tout de suite.
Le Serpentard sentit son pouls se
précipiter lorsque la seule personne qui le maintenait encore
conscient s'éloigna vers ses trois amis. La tête lui
tournait, la peur lui nouait les entrailles. Lucius ne l'avait pas
sortit une seule seconde de son champ de vision et lorsque Livia se
retira, il murmura quelques mots à l'oreille de la fille
pendue à son bras et commença à avancer vers
lui.
Severus se hâta en direction des chaises alignées
contre le mur, Lucius lui emboîta le pas. Jetant un regard
paniqué par-dessus son épaule, il força
l'allure, fou de panique, courant presque pour rejoindre les
sièges, se faufilant là où la foule était
la plus dense dans l'espoir de semer son camarade de classe. Las !
Lucius le rattrapa lorsqu'il allait s'asseoir.
Lucius
Malefoy, Sang-Pur de la maison de Serpentard, fervent partisan de
Lord Voldemort et dont la cruauté n'était plus à
démontrer, posa la main sur l'épaule du garçon
qui le fuyait, agrippant sa proie de son étau mortel.
-Bonsoir
Severus… chuchota t'il presque avec sensualité, en se
penchant à l'oreille de Rogue.
-Bonsoir Lucius… gémit
ce dernier, terrifié, n'osant plus bouger un
muscle.
-Mignonne ta compagne… Elle est vraiment… à
croquer. Son seul défaut, je crois, est d'être une
Gryffondor… et une Sang de Bourbe…
Rogue demeura muet, son
cœur cognant à grands coups quelque part dans sa gorge.
-Cela
m'étonne beaucoup de toi, Severus ; poursuivit son
interlocuteur avec un sourire de prédateur non dénué
de charme. Je ne pensais pas que tu saurais un jour user de tes atout
pour te jouer de ces créatures inférieures. Tu vois la
fille là-bas ? Celle qui me sert de cavalière ? Et bien
elle est à Serdaigle et je la sais totalement folle de moi.
Elle est de l'espèce de ta petite amie… C'est ce qui
rend la chose si… excitante. Je vais lui faire caresser le rêve
de me « posséder » - il eut un petit rire - et
puis quand j'aurais obtenu d'elle ce que je désire, je la
laisserais tomber et prendrais plaisir à la voir souffrir…
-Tu
es immonde ! siffla Rogue entre ses dents.
-Je sais ; répliqua
le blond d'un ton léger. C'est ce qui me rend si proche du
Seigneur des Ténèbres… Tu n'as pas oublié
jusqu'à son existence du haut de ton nuage ?
-Je sais qui
il est.
-Bien. Et je suis sûr qu'il serait ravi d'avoir
de la distraction si tu vois ce que je veux dire…
Rogue démentit
d'un signe de tête. La panique le suffoquait, Livia était
en danger. Il avait fait la folie de croire qu'il pourrait sortir
avec elle, lui ! Un Mangemort !
-Je suis intimement persuadé
que torturer une créature aussi séduisante ne pourra
que le ravir…
-Lucius, espèce de sale…
Mais Rogue ne
pût finir sa phrase.
-Tututut, mon ami ! Surveille ton
langage, n'oublie pas à qui tu parles… Passe une bonne
soirée… ajouta t'il pernicieusement en voyant arriver
Livia.
Rogue ferma les yeux, mortifié. Une masse
écrasante s'était abattu sur ces maigres épaules,
rongé de remords. Il sentit la présence de Livia près
de lui mais il était incapable d'affronter son regard, de
lui parler.
-Eh devines, quoi ! Dumbledore fait venir le groupe
des Crécelles, c'est génial ! s'exclama
t'elle.
Elle semblait si heureuse, si joyeuse… Comment
pourrait-il lui gâcher sa soirée avec une nouvelle aussi
terrible ?
-Qui ? se força t'il à articuler avec
un temps de retard.
-Sev' ? Ca va ? s'inquiéta t'elle,
le dévisageant, intriguée.
-…
Il ne pouvait
pas, il n'y parvenait pas. Comment faire pour le lui dire
d'ailleurs ? Il se sentait perdu, perdu dans un brouillard
opaque.
-Tu veux en parler ? murmura t'elle en glissant sa main
sur sa joue.
-…
-Viens, sortons.
Il se laissa entraîner,
sans force, par sa main ferme. Il avait la sensation oppressante
d'être plus mort que vif.
La salle où Livia le
guida était déserte et tranquille mais elle lui
paraissait lugubre, telle une crypte froide et les tables faisaient
comme des cercueils.
- C'est ce Malefoy, n'est-ce pas ? Que
t'as t'il mis en tête ?
La voix de sa douce amie
résonnait dans le silence, un peu hésitante mais son
timbre clair lui apportait un peu de chaleur. Il était gelé
jusqu'à la moelle, impuissant à lui apporter les
réponses qu'elle désirait pourtant.
-Sev'…
Parles-moi… supplia t'elle doucement, lui caressant de nouveau la
joue. J'ai fais quelque chose de mal ?
Il aurait tant voulu tout
lui narrer mais sa langue pesait une tonne. Il fit simplement non de
la tête. Il avait envie de pleurer, de se laisser glisser au
sol et de vider son cœur du fardeau qui l'écrasait. Rien
que l'idée de Livia face à Voldemort le rendait
malade, il voulait tant la protéger. Elle lui était si
chère…
Livia le regardait, ses yeux émeraude
brûlants comme la flamme d'une bougie, emplis de tendresse et
de patience. Elle se recula de lui, indécise, incapable de
réagir à son état.
-Severus… Ne me laisse
pas…
Elle avait prononcé cette phrase avec une infinie
tristesse. Il ne pouvait rien dire, il s'en sentait
incapable.
-…
-… Je t'aime… glissa t'elle, les yeux
rivés au sol.
Rogue réagit à ces paroles.
Pour la première fois, elle les prononçait. Il ne put
se contenir plus longtemps. En un éclair il fit volte face et
se jeta contre elle, la pressant dans ses bras, pleurant plus de
larmes que ces yeux en contenaient et n'en finissant plus de lui
répondre par les mêmes mots.
Il ne la préviendrait
pas du danger qu'elle courait et s'emploierais à la
protéger, seul contre tous. Il irait voir Dumbledore dès
le lendemain matin. Il avait choisit son camps.
Il
s'apaisa dans la chaleur soyeuse de ses cheveux. Quelque chose lui
faisait mal au ventre mais ce n'était plus la panique. Ce
qu'il avait refoulé toute son adolescence se manifestait
plus puissamment que jamais malgré la gravité de la
situation. Mon dieu qu'il la désirait ! Elle était si
belle… Son parfum si enivrant… Brusquement, une pensée
horrible lui traversa l'esprit :
-Lupin aussi l'a tenu dans
ses bras comme tu le fais, lui aussi l'a embrassé…
Etre
sûr d'avoir le pas sur son rival fut sans doute ce qui le
décida.
Avec lenteur et mille précautions, il
laissa ses lèvres parcourir l'arrondis de son épaule
dénudée, guettant la moindres réaction de sa
partenaire. Il avait envie d'explorer chaque centimètre
carré de son corps d'albâtre, de la posséder un
instant à lui seul au points de ne faire plus qu'un avec
elle. Il ponctua sa descente le long de son bras de petits baisers,
remonta de nouveau jusqu'au creux de son cou et posa ses lèvres
sur les siennes en un long contact vibrant et humide.
Livia avait
fermé les yeux, sa respiration s'accélérant.
Elle n'avait jamais ressentit pareille sensation, comme si son
cerveau était incapable de réfléchir à
quoi que ce soit, comme si chacun des atomes de son être
vibrait à l'unisson. Elle ne le repoussait pas, le noir
absolu gagnait son esprit, chaque pression du corps du jeune homme
était un éclair de lumière. Le dos collé
au mur, elle s'abandonnait totalement, éperdue, n'aspirant
plus qu'au contact de cette chair humaine dont la tiédeur
l'étourdissait. Pour la première fois, le Vampire et
elle cessait leur lutte silencieuse pour un but commun : ne pas
quitter ces bras, ne rompre cette sensation grisante pour rien au
monde.
Severus n'était plus maître de lui-même,
dominé par son désir envers Livia. Sa poitrine ronde,
blanche l'hypnotisait tel un papillon attiré par la flamme
mortelle d'une chandelle. Tremblant légèrement, sa
main glissa sur la taille de la jeune fille, frôlant le velours
de sa robe jusqu'à atteindre les fines bretelles qui la
maintenaient en place. Il hésita quelques instants, son esprit
semblant sortir de l'état second dans lequel il se trouvait
mais un léger gémissement arraché des lèvres
de sa partenaire l'y replongea immédiatement. Sa bouche vint
se loger dans le cou de la jeune fille et ne quitta plus cet endroit
douillet. Il fit jouer les lanières de tissus qui glissèrent
lentement le long des épaules, puis des bras avant de
rejoindre le sol en un froissement d'étoffe dérangée.
Un
grand frisson secoua Livia et elle glissa lentement ses mains
fraîches jusqu'au col de la robe de sorcier de Rogue,
s'attardant sur les boutons qui la fermait. Elle les défit
d'une main adroite, le souffle court. Le Vampire ressentait chacun
des souffles du Serpentard comme une caresse forte, la pression de
ses mains était intolérable tant elle déclenchait
en elle des sensations comparables à l'éruption d'un
volcan. Un long son plaintif s'éleva de sa gorge en une note
sourde lorsque Rogue mordilla légèrement la ligne de sa
jugulaire. Elle avait la tête qui tournait, rendue folle par ce
contact qu'elle subissait pour la première fois.
Elle
comprenait maintenant pourquoi les vampires ne faisaient jamais
l'amour. Ses sensations étaient quintuplées par
rapport à celles des Mortels, devenant presque difficilement
supportable par leur intensité.
Ils étaient maintenant recouverts de leurs seuls dessous.
Livia caressa délicatement le torse pâle aux muscles fins et discrets mais présents, donnant la chair de poule à l'adolescent. Son désir atteignait son paroxysme, rendant précipités chacun de ses mouvements. Alors lentement, avec une délicatesse infinie, il prit Livia dans ses bras, l'allongeant sur leurs vêtements qui recouvraient le sol dallé et l'aima avec passion.
Dehors la pluie tombait des nuages bas, ruisselant sur les vitres de la salle de métamorphose, jetant un voile obscur sur les deux silhouettes embrassées, la musique provenant de la Grande Salle retentissait faiblement et leurs corps blancs trouaient la noirceur la nuit tels deux étoiles tombées du firmament.
