Chapitre 14 : Un allié venu de l'ombre :
Première partie :
Lorsqu'il décacheta la lettre
que lui adressait Voldemort, les mains de Severus ne tremblaient pas.
Rien ne pourrait entacher sa volonté de se battre pour
Dumbledore, bien sûr, mais aussi pour Livia. Ses yeux sautaient
de lignes en lignes et au fur et à mesure qu'il déchiffrait
le parchemin, son teint devenait de plus en plus blême. Une
boule obstruait sa gorge. Lorsqu'il lut la dernière phrase,
le papier s'embrasa entre ses doigts et se réduisit en
cendres qui s'éparpillèrent autours de lui. Il
entendit le bruit que faisaient les élèves qui
sortaient de la Grande Salle et la panique acheva de l'aveugler. Il
se mit à courir, fonçant tête baissée le
plus loin possible du lieu de sa lecture. Son cœur tapait à
grands coups dans ses tempes, la dernière phrase de la missive
dansant devant ses yeux « Tue-la au plus tôt. »
Il
courait sans but, trop désespéré pour raisonner.
Tous les plans qu'il avait conçus s'écroulaient
comme des châteaux de cartes. Il allait devoir la tuer
lui-même.
Des larmes s'échappèrent de ses
yeux, il dérapa sur le sol inégal des cachots et il
s'engouffra dans les ténèbres silencieuses de l'un
d'eux. Il avait trop mal pour penser à quoi que ce soit, il
voulait juste laisser sa douleur éclater dans toute sa
violence.
Il tomba lourdement à genoux et cribla le dallage
de pierre de coups de poings, se meurtrissant les doigts mais il n'en
avait que faire. Secoué par les sanglots, il cria son calvaire
et sa voix raisonna sur les murs suintants. C'était un cri
plein de souffrances et d'horreur, comme celui que pousse un animal
mourant que l'on achève. Tout l'enfer du monde
apparaissait dans ce son sauvage provenant du plus profond de son
être. Lorsque l'écho de sa voix mourut, étouffé
par les murs épais, Severus se recroquevilla sur lui-même,
pleurant, pareil à un enfant.
-S'il vous plait… supplia
t'il entre deux soubresauts, s'adressant à l'obscurité.
Ange ou démon, qu'importe mais sauvez-nous, sauvez Livia…
Faites que nous puissions être ensemble… S'il vous
plait…
La porte claqua brusquement et Rogue sursauta. Se
redressant précipitamment, il se saisit de sa baguette magique
et dit d'une voix tremblante, passant sa manche devant ses yeux
pour en chasser les larmes :
-Lumos !
Aussitôt le bout de
la baguette irradia une vive lumière blanche. Dans le faisceau
lumineux, un homme était accoudé au mur dans une
posture nonchalante.
-Tu as demandé un démon ?
susurra t'il avec un petit sourire qui dévoila deux canines
pointues aux reflets éblouissants.
Severus eut un mouvement
de recul et s'affola lorsque son dos heurta la paroi derrière
lui. Ce cachot était plus étroit que celui où
Livia avait séjourné et il sentit sa claustrophobie
s'insinuer peu à peu dans son esprit. Il ferma les yeux et
se força à respirer calmement malgré la
situation.
Le Vampire n'avait pas bougé, le fixant avec
un calme cruel.
-Qui… Qui êtes vous ? balbutia Rogue.
Il
avait la tête qui tournait et une nausée persistante lui
remuait l'estomac. Il devait se faire violence pour ne pas céder
à la panique qu'engendrait en lui sa condition.
Tout à
coup, le Vampire fut face à lui, tout près, bien qu'il
eut semblé à Severus qu'il n'avait pas effectué
un seul mouvement.
-Qui je suis ? souffla le Non-Mort. Tu ne
devines pas ? Je croyais que ma Livia aurait choisit quelqu'un de
plus vif…
-Vous êtes celui qui l'a mordue ! s'écria
le jeune homme, pris de panique.
Le Vampire bailla.
-Il t'en
aura fallu du temps…
-Que faites-vous là ? demanda Rogue
d'une voix glacée.
-Tu as appelé un démon,
n'est-ce pas ? – il prit une voix haut perchée – S'il
vous plait… Ange ou démon, qu'importe mais sauvez-nous,
sauvez Livia… Faites que…
-Assez ! rugit Rogue, mis hors de
lui par le ton de son opposant. Allez vous en sinon…
Ils
n'étaient plus séparés que par la baguette du
Serpentard. Celui ci était agité de frisons nerveux dus
à la colère et à la peur conjuguée. Le
Vampire eut un rire bref, sans joie.
-Sinon quoi ? Tu comptes me
faire quelque chose avec ton bout de bois ?
-Je… Je connais des
formules ! tenta Severus.
-Pauvre petit Mortel effarouché ;
riposta son adversaire. Pour cela il faudrait te mouvoir à mon
allure… Ce n'est pas parce que Livia se plait à adopter
votre vitesse d'escargot que nous agissons de même mon
petit.
-Ne m'appelez pas ainsi… grinça Rogue. Vous êtes
à peine plus âgé que moi !
De nouveau le
Vampire éclata de rire.
-Ah oui ? Tu approches de mes deux
cent quarante-trois ans ?
Severus demeura interdit mais se reprit
rapidement.
-Que faites-vous ici ?
-Tu as déjà
posé la question.
-Et vous n'avez pas répondu
!
-Pourquoi te le dirais-je ?
-Sinon je vous fais sortir d'ici…
Il fait plutôt beau malgré le vent froid…
-Je te
l'ai dit, tu ne peux rien contre moi !
-On parie ? provoqua
Rogue avec un rictus sadique.
-Tu ferais un Vampire acceptable ;
s'amusa son adversaire.
-Non, merci.
Le Vampire le dévisagea
et son regard acéré se posa sur la gorge du garçon,
s'attardant sur deux minuscules marques violacées à
peine perceptibles.
-Je vois que tu as déjà été
goûté…
-Et alors ? se défendit Rogue. Elle
avait faim !
-Evidemment ! Un Vampire n'est pas fait pour se
nourrir de rats, d'oiseaux et de chiens ! Ah, celle là !
Elle me rendra fou avant la fin ! marmonna t'il comme pour
lui-même.
-Des rats, des oiseaux et des chiens ? répéta
Rogue sans comprendre.
-Je vais finir par croire qu'elle a
choisit l'idiot de ce château… Saches qu'un Vampire peut
survivre en se nourrissant d'animaux mais, bien sûr, cela ne
satisfait que sa faim primaire, pas notre amour du meurtre et de
votre sang si savoureux.
Il avait prononcé ces derniers
mots avec une sensualité incroyable, passant sa langue sur ses
lèvres et attardant son regard sur la jugulaire palpitante de
vie du jeune homme. Rogue fit la moue et resserra instinctivement son
col montant.
-Ca ne me dit toujours pas ce que vous faites
ici…
-J'ai eut une impression étrange. Comme si quelque
chose m'avait coupé de Livia, quelque chose de plus puissant
que le lien qui nous unis… plus puissant que le lien qui unit deux
Vampires.
-Qu'est ce que c'est ? demanda Severus d'un air de
franche curiosité.
-Je l'ignore encore ; avoua t'il.
Mais je suis sûr que tu n'es pas étranger à ce
phénomène.
-Au fait ; interrogea Rogue, prit d'un
doute. Comment savez vous que je suis son petit ami ?
Le Vampire
sembla s'assombrir.
-Parce qu'elle est présente partout
sur et en toi. Elle ne te quitte pas un instant. Son parfum parcourt
ta peau, son image se superpose à la tienne…
Rogue haussa
les sourcils, il ne comprenait pas vraiment. Le Vampire c'était
tut, plongé dans ses pensées d'Immortel, oubliant le
jeune homme. Celui-ci aurait put s'éclipser mais,
étrangement, il n'en ressentait pas l'envie. Il était
même curieux de mieux connaître celui qui aurait dû
être son ennemi. Il se sentait fasciné par le savoir que
devait avoir accumulé cet être si puissant. C'était
une sensation très troublante. Plus il le détaillait,
plus il l'admirait avec sa peau laiteuse et veloutée, sans
âge, ses yeux améthyste qui brillaient comme des joyaux
et ses longs cheveux acajou qui couvraient son dos. Il était
d'une beauté divine ou plutôt… diabolique. Bien
qu'ils fassent à peu près la même taille,
Severus se sentait ridiculement petit comparé à cet
immortel fabuleux. Il avait abaissé sa baguette qui éclairait
toujours la scène, comme si, peu à peu, il lui
accordait sa confiance. La voix du Vampire le fit sursauter.
-Dis
moi… Je viens de penser à quelque chose… Est-ce que toi et
Livia avez couché ensemble ?
Les joues du Serpentard
prirent une teinte écarlate et il trouva soudain que le
plafond avait un intérêt fascinant. Il ne pouvait tout
de même pas lui avouer cela ! Mais son interlocuteur avait
compris.
-Vous l'avez fait… souffla t'il.
Il avait l'air
effaré, presque incrédule.
-Et alors ? aboya Rogue,
sur la défensive. Qu'est ce que ça peut faire
?
-Jamais au grand jamais un Vampire n'a fait cela avec aucun
être, Humain ou non…
-Pourquoi ?
-Parce que, pour nous,
un rayon de lune sur notre peau est comme une caresse délicieuse
alors imagine l'intensité qu'aurait pour nos sens une
union de ce type.
-Je vois ; fit rogue, pensif.
-De plus, par
ce geste, elle a presque brisé notre lien du sang. Cela parce
qu'elle s'est offerte à toi et juste à toi. Boire
le sang d'un être Humain est une expérience
formidable, lui donner du notre est, en matière des
sensations, comparable à ce que vous appelez « faire
l'amour. » C'est une véritable fusion. En agissant
de la sorte, Livia est devenue encore plus semblable à
n'importe lequel d'entre vous. Elle n'est plus ni Mortelle, ni
Immortelle.
-Savait-elle que cela aurait de si grandes
conséquences ?
-La connaissant, je suppose qu'oui…
-Elle
peut mourir maintenant ?
-Non, cela elle le garde du Vampire mais
elle peut donner la vie. Elle est la seule à posséder
ce pouvoir incroyable. Elle peut mettre au monde un enfant qui, à
sa mort, deviendra un Vampire. Elle est à la fois la Mort et
la Vie, elle a désormais la puissance d'un Dieu.
Le
Vampire et le Mortel se regardèrent. Ils savaient tous les
deux ce que cela signifiait. Livia avait choisit sa vie et c'était
auprès de Severus qu'elle la passerait.
-Vous m'en
voulez ? s'enquit brusquement ce dernier.
-Pas vraiment… Toi,
tu n'es pas éternel. Je n'ai qu'à attendre un
peu. Et puis… moi aussi je l'aime et rien ne me contente plus que
de la savoir heureuse. Pourquoi pleurais-tu tout à l'heure
?
-Parce que je vais devoir la détruire…
Severus
expliqua alors à son rival son double jeu vis à vis de
Voldemort.
-En résumé, je dois la tuer par moi-même,
contrariant toutes les habitudes de Vous-Savez-Qui.
-Non je ne
sais pas qui.
-Le nom du Seigneur des Ténèbres ne
doit pas être prononcé…
-Quel est son nom ?
Pourquoi est-ce qu'on ne peut pas le prononcer ?
-Parce que…
Severus hésita. Parce que c'est interdit.
-Pourquoi ?
Le
visage curieux du Vampire lui donnait un air enfantin, plus doux,
moins terrible. Il était plus beau que jamais. Le Serpentard
déglutit, troublé.
-Il est si terrible… finit il
par avouer. Il est affreusement puissant et cruel…
-Depuis tout
le temps que je foule cette terre, j'ai croisé par hasard ou
à dessein la route de nombreux Seigneurs ténébreux
et partout des hommes m'ont tenu un discours identique au tient.
Severus ne répondit rien, il savait que son compagnon
disait vrai mais il avait peur, peur de transgresser les interdits en
disant ce nom synonyme de mort. Il eut un silence d'une longueur
atroce pendant lequel le Mortel et l'Immortel s'entre regardaient
et la créature meurtrière semblait tenter de
l'encourager sans un mot. Puis, après une longue
inspiration, il dit dans un souffle à peine audible mais sa
voix était nette dans le silence pesant du cachot :
-Ne
m'obligez pas à le répéter. Lord
Voldemort
-Quoi ?
-Lord Voldemort ; répéta t'il
plus intelligiblement avec un long frisson.
Le Vampire sourit pour
la première fois depuis leur rencontre puis retrouva son
visage grave et impassible comme un masque blanc.
-Bien, pour
résumer, Livia est en grand danger parce que ton Lord Truc
veut la tuer mais que TU la détruise…
-Oui ; lâcha
piteusement Severus. Mais je ne veux pas le faire, j'ai si peur…
Je l'aime tellement…
Une larme s'échappa des yeux du
garçon, larme qu'il essuya en toute hâte. Son
interlocuteur le fixa avec compassion.
-Je crois que je vais
devoir m'en mêler ; trancha t'il en soupirant.
-Mais
comment ? s'exclama Rogue, l'espoir gonflant peu à peu son
cœur.
-Ca c'est mon affaire, petit Mortel. Va maintenant et ne
commet aucune folie avant de recevoir de mes nouvelles. Je sortirais
d'ici lorsque le soleil aura disparut derrière les collines.
Mais tu dois me promettre une chose…
-Laquelle ?
-Ne souffle
mot de cette histoire à personne, pas même à
Livia.
Severus hocha la tête et commença à
sortir du cachot mais soudain, il revint sur ces pas et murmura :
-Je
ne connaît même pas votre nom mais merci, du fond du
cœur.
Le Vampire sourit encore une fois et glissa d'une voix
mélodieuse au moment où Rogue se faufilait hors du
cachot :
-On me nomme Ivan.
La nuit était
calme. Les étoiles scintillantes annonçaient l'arrivée
de la froideur hivernale. L'air piquait agréablement,
l'atmosphère craquait de gelée.
La chauve-souris
se laissa porter avec délice le long des courants ascendants,
planant sans effort, s'amusant de la brise qui la portait.
Elle
adorait cela. Voler. Avoir la sensation de n'avoir aucune limite et
le ciel entier comme terrain de jeu. Mouvant lentement ses ailes
membraneuses, elle attaqua sa descente vers les fenêtres
brillamment illuminées d'un manoir perdu en pleine campagne,
comme vomi des entrailles même de la Terre. Elle fit plusieurs
fois le tour de l'imposant, en imprimant la conformation dans sa
mémoire. Il semblait n'avoir été taillé
que dans un seul block, formant un ensemble à la fois primitif
et sublimement ouvragé. Des gargouilles inquiétantes
hérissaient les crocs de leurs gueules de pierre le long des
gouttières. Le toit pentu était recouvert d'ardoises
dont le bleu miroitait sous la lune.
La chauve-souris repéra
une fenêtre, ouverte malgré le froid mordant et s'y
engouffra de son vol feutré, aussi silencieuse qu'une ombre.
La salle était immense. Des colonnes corinthiennes se
dressaient de part et d'autre d'un passage, presque aussi large
qu'une route menant jusqu'à un trône de pierre brute
d'une taille imposante. Les yeux de l'homme assit là
suivirent la forme ailée avec une pointe d'étonnement,
indiscernable cependant dans la froideur implacable de ce regard aux
teintes sanglantes. Sa longe cape s'étalait autours de lui
comme une nappe d'encre. La peau de l'homme avait la blancheur et
la rigidité du marbre, le rendant plus inquiétant
encore. Une crinière mouvante de cheveux de geais se hérissait
en mèches désordonnées autours de son visage
étroit. Ivan attendit d'être près du sol pour
reprendre sa forme originelle, retombant souplement sur ses jambes
dans un mouvement gracieux de félin. Il avança
lentement vers le trône, observant le Seigneur des Ténèbres.
Celui-ci ne broncha pas, jouant négligemment avec sa
baguette.
Le Vampire s'agenouilla, offrant sa nuque au mage noir
dans un geste de soumission.
-Qui es-tu ? Parles ! ordonna ce
dernier.
-Ivan Vladinostov, septième du nom, Duc de Saint
Peters bourg ; déclina le Vampire, se relevant sans effort et
fixant sur son interlocuteur ses deux sublimes améthystes aux
profondeurs irréelles.
-Que veux tu ?
-J'ai des
révélations à vous faire.
-Tu n'est pas
Sorcier, je le vois en toi. Pas plus que tu n'es Humain.
La voix
de Lord Voldemort était douce mais glaciale et coupante comme
du verre, presque hypnotique cependant.
-Je suis un Vampire depuis
plus de deux siècles ; attesta Ivan, son regard se durcissant
lorsqu'il ajouta ; mais vous êtes étonnamment proche
de moi… Votre peau blanche, votre regard…
Le Mage sombre eut
un, rictus empli de mépris.
-Un Non Mort à, un jour,
commis la folie de vouloir faire de moi sa proie – Il eut un
ricanement cruel – J'ai distillé son sang et l'ai
modifié jusqu'à atteindre la perfection absolue.
Encore quelques années et je serait totalement Immortel.
Le
cœur d'Ivan se serra et il sentit la haine l'embraser. L'endroit
empestait la mort, il savait que l'un de ses frères avait
trouvé ici une fin atroce. L'odeur diffuse lui donnait la
nausée, la colère et le dégoût coulait
dans le réseau bleuté de ses veines.
-Vous l'avez
détruit, n'est-ce pas ? siffla t'il, serrant les
poings.
-Cela pose un problème ? demanda innocemment
Voldemort.
Ivan dut se faire violence pour ne pas se jeter sur
lui. Il se força à fermer son esprit et se rappela la
raison qui l'avait poussé jusqu'en cet endroit. Le destin
de Livia ne tenait qu'à un fil et c'était lui qui
le détenait dans ces instants cruciaux où tout pouvait
basculer. La vie de sa protégée était en
équilibre plus que précaire. Alors, il se lança
:
-Je ne suis pas venu pour cela. Je vient vous empêcher de
commettre un erreur. Une erreur qui vous coûterai bien plus
cher que vous n'avez jamais osé l'imaginé.
-Quoi
donc ? s'enquit Voldemort, une pointe de curiosité dans la
voix.
-Ne chargez pas Severus Rogue de tuer sa petite amie.
Le
Seigneur des Ténèbres éclata d'un rire
lugubre.
-Et pourquoi pas ?
Ivan soutint son regard sans
ciller, sentant le Lord Noir fouiller son esprit. Il s'efforça
de ne laisser transparaître que quelques bribes de vérités,
envoyant le souvenir de la nuit où il avait fait de Livia un
Vampire dans l'esprit du Mage mais dissimulant le reste grâce
à ses pouvoirs. Il répliqua d'une voix posée
:
-Parce que cette fille pourra vous être utile.
-Pourquoi
serais-je intéressé par une Sang de Bourbe, une
Gryffondor ?
-Ne vous fiez pas à l'apparence. Elle est
plongée dans le monde des Ténèbres. Elle est de
ma race. Rogue ne l'a pas choisie au hasard.
-Qui me prouve que
tu dis vrai ? répartit son adversaire d'un air
sévère.
-Menez la à vous et vous verrez.
Qu'avez vous à perdre ?
-Du temps précieux.
-Elle
est pourtant toute disposée à servir votre cause.
Imaginez qu'un Vampire allie ses forces aux vôtres,
espionnant pour vous et tuant au moindres de vos gestes.
Ivan se
sentait à nouveau dans son élément, la duperie
et la séduction par la parole. C'était un art dans
lequel il était passé maître. Il prenait plaisir
à voir l'intérêt se marquer peu à peu
dans les yeux de son interlocuteur.
-De plus ; poursuivit-il ;
elle possède des atouts irrésistibles… sa beauté
Immortelle.
-Je vois… Au lieu de la tuer, j'en fait l'une de
mes serviteurs ?
Le Vampire sourit, son adversaire était
sous son emprise, conquis.
-Non, mieux que cela. Ne la marquez pas
pour ne pas attirer les soupçons. Votre ennemi la surveille
discrètement bien qu'il ignore sa nature. Utilisez Rogue et
elle de concert. Laissez les vivre leur vie comme n'importe quels
citoyens respectables, cela dissimulera leurs agissements
réels.
-C'est tentant…
Voldemort posa son menton
dans sa main, regardant Ivan avec intensité, cherchant à
déceler le piège mais il ne rencontra rien de tel dans
son esprit.
-C'est tentant ; répéta t'il. Mais
pourquoi l'utiliser elle alors que je pourrais t'avoir toi
?
-Parce qu'elle, elle est encore à Poudlard pour une
année et qu'elle risque de faire grossir sensiblement vos
rangs de fidèles.
Le Sorcier s'accorda un moment de
réflexion, l'idée le séduisait, le séduisait
même beaucoup en ses temps où chaque camps tentait de
prendre le dessus sur l'autre.
-D'accord. J'enverrais de
nouvelles instructions à mes Mangemorts mais gare à toi
si tu me trahis…
Ivan sourit une nouvelle fois et dit, juste
avant de se métamorphoser :
-Soyez sans craintes.
Et il
partit à tire d'elle, loin de ses lieux de mort.
Son
visiteur disparu, Voldemort jeta un œil sur l'échiquier qui
trônait sur une table de marbre blanc. Une reine était
apparue, l'ébène de la pièce luisant dans la
pénombre. Un sourire étira les lèvres du Lord et
il murmura en fixant le roi d'ivoire de l'autre côté
du jeu.
-Et maintenant, que feras-tu ?
-Remus…
appela la voix douce de Livia.
Le garçon ne répondit
rien, accélérant même le pas, serrant contre lui
son sac de cours comme si sa vie en dépendait. La jeune fille
était presque obligée de courir pour se maintenir à
son niveau.
-Remus… S'il te plait…
Remus céda. Il
s'arrêta, fuyant toujours le regard émeraude de son
amie. Amie qu'il avait attaqué sous sa forme de loup-garou,
amie qu'il avait manqué de tuer… Comme il pouvait se haïr,
comme il s'en voulait…
Livia posa sa main sur son bras mais
il ne la retira pas cette fois ci. Il avait la gorge nouée et
un voile de larmes embuait ses yeux.
-Arrête de me fuir…
supplia t'elle. Je t'en prie… Même si je n'ai pas été
capable de contenir ce… cette chose en moi…
-Ce n'est pas de
ta faute. Jamais je n'aurais dû sortir de la Cabane Hurlante…
Tout est de ma faute.
Livia s'approcha de l'adolescent et lui
leva la tête pour le forcer à la regarder. Elle
souffrait tellement de son silence, de sa manie de toujours rejeter
la faute sur lui-même sans raison. Tout n'était que le
hasard.
-Ne dis pas cela. Ce n'est pas de ta faute.
-J'ai
failli te tuer…
-Nous avons failli nous tuer tous les deux !
s'exclama t'elle, plus fort.
-Oui, mais…commença
Remus.
-Tout est arrivé par hasard ! le coupa t'elle. Si
j'était partit chasser quelques minutes plus tôt, ou
toi tu n'était sortit que plus tard, jamais nous ne nous
serions affrontés. Ne me fuis pas, même Severus m'a
pardonné de l'avoir mordu…
En entendant le nom du
Serpentard honnis, les yeux du Gryffondor reflétèrent
une haine implacable mais il demeura coi.
-Pourquoi ne pourrions
nous pas oublier cet incident ?
-…
-Remus ?
Le jeune homme
lui prit soudain les mains et approcha son visage tout contre le
sien.
Sa voix était rauque, presque fanatique.
-Parce
que je t'aime ! Parce que je ne peux pas me pardonner d'avoir
essayé de te faire du mal sous quelque forme que ce soit. Je
t'aime, tu entends ?
Livia retira ses mains des siennes avec un
petit air triste.
-Je suis avec Severus, tu le sais. Tu es un ami,
un être irremplaçable mais je ne peux pas répondre
à tes sentiments.
-QU'A T'IL DE PLUS QUE MOI ? DIS MOI
! DIS MOI POURQUOI ? POURQUOI PAS MOI ? s'emporta soudain Remus, la
prenant par les épaules.
-Je ne sais pas pourquoi… Je
l'ignore…
-MENTEUSE ! C'EST PARCE QU'IL N'EST PAS UN
LOUP-GAROU, PAS VRAI ? JE TE DEGOUTE, C'EST CELA ?
Elle se
dégagea de l'étau de ses bras, laissant échapper
un gémissement, suivit d'un sanglot.
-Ce n'est pas vrai
! Tu ne me dégoutte pas… Mais… mais je l'aime, lui… Je
ne sais pas pourquoi, je ne sais pas ! Tout ce que je sais c'est
que je veux le rendre heureux et être toujours à ses
côtés…
Elle pleurait maintenant franchement, sans
retenue et elle repensait à Voldemort qui voudrait la tuer, à
Severus lui déclarant son amour avec toute sa maladresse si
touchante, à ses heures qu'il avait passé avec elle
dans ce cachot glacé quant elle n'avait plus sa potion et
elle savait ses sentiments, elle refusait de le quitter malgré
Remus.
Le loup-garou la contempla encore un instant avant de
tourner les talons et de disparaître en courant dans le
couloir.
