Auteur : shiv5468

Traduction benebu février 2005

3. Dans lequel Hermione entre en scène :

Severus n'avait pas ses entrées au Ministère, mais il connaissait un homme qui les avait. Un homme qui, si son petit-fils lui avait bien fait son rapport, lui devait une faveur.

Le vieux Lucius.

Ainsi, Severus envoya un hibou au Manoir des Malefoy, s'invitant à dîner. Il reçut une réponse gracieuse de Narcissa, une note charmante disant que de vieux amis comme eux n'avaient pas besoin de faire de chichis, qu'il pouvait venir à 19h30 pour dîner à 20h00, et que le Jeune Lucius et sa sœur étaient chez eux en ce moment, n'était-ce pas formidable ?

Il comprit que les robes de cérémonie n'étaient pas nécessaires, et que s'il voulait toujours venir dîner sachant que les enfants seraient là, il devait vraiment être désespéré.

Il était désespéré.

Il arriva à 19h45, pour se voir offrir un apéritif. Pas de sherry, grâce aux dieux, mais un bon verre de porto blanc. Lucius avait bon goût en la matière.

Severus laissa les soucis des semaines précédentes s'évaporer pendant qu'il faisait tourner le vin dans son verre, inhalait profondément pour en sentir le bouquet, puis le goûtait. « Très agréable, » dit-il. « J'aimerais qu'Albus fasse faire la sélection des vins à Poudlard par quelqu'un de plus compétent. Je jurerais qu'il fait son choix sur l'allure de l'étiquette ou l'exotisme du nom. »

« Oh, mon pauvre, » dit Lucius, compatissant, « est-ce qu'il utilise des phrases comme 'un petit vin sympathique qui vous amusera avec ses prétentions' ? Personnellement, je n'ai jamais trouvé les prétentions très amusantes. »

« Les prétentions déçues ont cependant leur charme, » avança Severus.

Lucius sourit tel un prédateur. Requins, lions et tigres prendraient leurs distances avec ce sourire en sifflotant innocemment. Même de grands dinosaures, aux instincts agressifs développés, en auraient fait autant, si l'espèce n'était pas éteinte. En fait, si le Vieux Lucius était aussi vieux que ça, il était probablement responsable de l'extinction des dinosaures. Il aurait suffi que l'un d'entre eux le regarde un peu de travers, et bang, finie l'espèce.

Severus aimait penser à Lucius comme à un ami ; il aurait détesté devoir penser à lui comme à un ennemi.

Le dîner fut une affaire civilisée, malgré la présence des enfants. La pièce était chaude, sans courants d'airs sifflant à ses pieds ou sur sa nuque, il n'y avait ni fantômes ni poltergeist pour apparaître soudainement devant lui et lui faire ajouter trop de sel dans sa soupe, et il n'y avait pas d'Albus pour essayer de le persuader de faire des choses qu'il n'avait pas envie de faire.

La nourriture était excellente, les vins étaient choisis, et la compagnie était intéressante. Il ne serait pas allé jusqu'à dire plaisante, parce que dîner chez les Malefoy était un peu comme être un crapaud de laboratoire : on savait bien comment ça risquait de se terminer.

Même les enfants avaient été dressés pour donner l'air de bien se tenir. Il n'aurait pas su deviner l'âge de la fillette, mais sans aucun doute viendrait-elle rôder dans Poudlard d'ici quelques années. Chloé avait pensé être mignonne et attendrissante, mais avait abandonné les zézaiements et les tortillements de mèches de cheveux en voyant la mine implacable du Professeur de Potions.

Le dîner ayant été négocié avec succès, Severus et Lucius se retirèrent vers le bureau avec une carafe de porto, laissant Narcissa veiller sur le coucher des enfants.

Confortablement installé face au feu, un verre d'excellent porto en main, Severus étendit ses jambes devant lui et admira la brillance de ses bottes. C'était comme ça qu'il aurait dû passer Noël : l'estomac plein à en éclater, et immobile.

« J'ai entendu dire que Dumbledore était parti en vacances cette année pour Noël, » dit Lucius, interrompant la confortable torpeur de Severus.

« Hmmm. »

« Tu vas me dire pourquoi, ou est-ce que c'est un secret que tu as juré de garder sauf si on te torture à mort ? »

« Il est violet. »

« Ah, je crois comprendre. » Lucius était déterminé à rester imperturbable, mais il mourait d'envie de savoir ce qui s'était passé.

Severus le laissa mijoter suffisamment longtemps pour montrer qu'il savait que Lucius était une incurable commère, et que son air d'indifférence ne trompait certainement personne. « Je suis surpris que le Jeune Lucius ne t'ait pas tout raconté, puisqu'il était le premier concerné. Un petit ajout dans un chaudron pendant qu'Albus me remplaçait, et maintenant Albus est d'un violet éclatant. Pour je ne sais quelle raison, il n'a pas l'air de vouloir que des gens le voient dans cet état, et il a disparu dans la nature jusqu'à ce que la couleur s'estompe. Si elle s'estompe. »

« Le Jeune Lucius a bel et bien fait mention d'un incident en cours de Potions, mais il a commodément oublié de mentionner qu'il en était responsable. »

« Sans blague, » remarqua sarcastiquement Severus.

« Comment est-ce qu'il se débrouille à l'école ? »

« Ca va. Il a la plupart des camarades de son âge à sa botte, il est la source de la plupart des problèmes, bien que ce soit assez difficile à prouver, mais il a besoin de travailler sa flatterie. Il manque de subtilité et il sonne faux. »

« Il n'a que douze ans, » dit Lucius en manière de défense, « on ne peut pas attendre de miracles à son âge. »

« C'est vrai. Mais c'est toujours une faiblesse à éliminer au plus vite, avant qu'elle ne devienne une mauvaise habitude. Il n'y a pas de raison de se relâcher parce qu'on n'a plus à traiter avec des Lords Maléfiques. Après tout, il y aura toujours des Ministres de la Magie. »

Lucius lui accorda ce point d'un signe de tête. «C'est vrai, c'est vrai. »

Un silence confortable descendit sur la pièce, ponctué seulement par les craquements du feu et par les bruits étouffés des voix des enfants réclamant une autre histoire.

« C'est bon d'avoir les enfants pour Noël. Ce ne serait pas la même chose sans leurs visages joyeux et souriants, » dit Lucius, une oreille tendue vers la bataille qui avait lieu un étage plus haut. « Tu as des projets cette année, ou est-ce que tu est bloqué à Poudlard comme d'habitude ? »

« Pire que d'habitude, » dit amèrement Severus. « Albus m'a eu en beauté. »

« Raconte. »

« Eh bien, Albus a décroché le rôle de Père Noël cette année. On ne peut pas avoir un Père Noël violet, alors il à décidé de déléguer ce rôle. De me le déléguer. »

Lucius s'étouffa sur son porto, puis abandonna toute bienséance et laissa échapper de grands éclats de rire. « Je n'ai jamais imaginé que tu avais le look d'un Père Noël, » dit-il, une fois qu'il eut arrêté de rire suffisamment pour articuler une phrase.

« J'aimerais encore mieux faire une pédicure au Dark Lord. »

« Santa Severus. Attends un peu que je raconte ça à… »

« Chloé est sur la liste des enfants sages, » interrompit Rogue. « Ca peut encore changer. »

« …absolument personne, » compléta Lucius sans s'interrompre. « Tu es un bâtard sans cœur, Severus. »

« Tu dis ça comme si c'était une mauvaise chose, » répondit Severus, souriant maintenant qu'il avait récupéré la main. Le Noël de la petite Chloé était maintenant suspendu à son bon vouloir. « Cependant, il reste, comme qui dirait quelques difficultés locales. »

« Et tu as besoin d'aide. » Ce n'était pas une question.

« Et j'ai besoin d'aide. Les Elfes de Maison ont indiqué que si je voulais qu'ils collaborent, il fallait que je leur gratte le dos. »

« Métaphoriquement, j'espère. »

Severus eut une grimace. « Ce n'est vraiment pas une jolie image. Ce qu'ils demandent est le retrait - dans le sens non-létal du terme – de Miss Hermione Granger. J'ai cru comprendre qu'ils n'étaient pas totalement satisfaits de sa Directive de Temps de travail. »

« Personne ne l'est. Je suis certain que Narcissa pourrait te détailler en long en large et en travers tout ce qu'il y a à redire sur le sujet. En tout cas, elle ne se prive pas de me le faire savoir. » Lucius se passa pensivement la main sur la joue. « Et je suppose que c'est pour le retrait non-létal de Miss Granger que tu veux de mon aide ? »

« Pour le bonheur de la pauvre petite Chloé. »

« Oui, d'accord, pas besoin de revenir sur ce point, » dit Lucius avec irritation. « Et n'oublie pas que je pourrais acheter des cadeaux et les mettre moi-même sous le sapin, et éviter totalement de faire appel à toute cette histoire de Père Noël. Ce serait sans doute mieux que de laisser un vieux rabat-joie comme toi entrer dans ma maison. »

« Mais ce ne serait pas la même chose, » répondit Severus. « Et je suis sûr que, dans le fond de son cœur, elle le saurait. Et la magie de Noël serait ruinée à tout jamais pour elle. Ensuite, elle arrêtera de croire aux fées, et on sait bien où ça nous mène. »

« Tu as passé beaucoup trop de temps à lire de la littérature Moldue. Mais je me rends compte que j'ai besoin de toute l'aide disponible pour persuader la petite Chloé d'être sage. Si je lui disais que je connais personnellement le Père Noël, et qu'il viendra la voir en personne le soir du réveillon… » Lucius fit une pause chargée de sens. « Alors le Ministre pourrait faire à Miss Granger une offre qu'elle ne pourra pas refuser. »

« Rien de drastique, j'espère. » Miss Granger lui avait été utile par le passé, apaisant l'administration du Ministère par un mot glissé dans l'oreille appropriée. Il y avait même eu un déjeuner pendant le quel il s'était dit que sa manière de dépeindre son supérieur était à la fois limpide et inventive. Il avait quitté la table avec une admiration secrète pour sa langue acérée, et il avait été assez déçu que leurs chemins ne se soient pas recroisés depuis.

« Tss, » fit Lucius. « Ca ne sert à rien de ressasser les vieux souvenirs, il faut que l'on se tienne à carreau maintenant. J'ai entendu dire qu'elle n'était pas tout à fait heureuse de son poste actuel, alors je suis sûr qu'une promotion dans un autre département ne serait pas entièrement malvenue. Wiggins a été quelque peu décevant récemment, et je suis sûr que c'est dû uniquement à la pression de son travail, et non à mon refus d'augmenter ses pots-de-vin de 10. Quoi qu'il en soit, ce dont il a besoin c'est d'une nouvelle assistante. Miss Granger, travailleuse et consciencieuse, est juste la personne qu'il lui faut. »

« Je n'arrive pas à imaginer Wiggins devant finalement lever le petit doigt, » ricana Severus. « Je lui donne six mois. »

« Tant que ça ? » murmura Lucius. « Tu as peut-être raison. Et bien sûr, une fois que Monsieur Wiggins aura quitté son poste, il faudra que quelqu'un le remplace. Je suis sûr que si quelqu'un présentait l'affaire en ces termes à Miss Granger, elle y verrait son intérêt. »

De toute évidence elle détestait son patron, et elle sauterait sur l'occasion de se débarrasser de lui, mais il était peu probable qu'elle prenne bien le fait de se faire doubler, si jamais c'était ce que Lucius avait en tête. « Miss Granger est très premier degré, » dit-il.

« Hmm, » fit Lucius sans se compromettre.

« Elle a tendance à croire ce qu'on lui dit, ou plus précisément, si quelqu'un lui fait une promesse qu'il ne tient pas, elle se met très en colère. Et quand elle est en colère, elle ne se contente pas de s'asseoir dans un coin pour ruminer. Elle a tendance à agir. »

« Je suis bien conscient de la tendance de Miss Granger à agir. En fait, je compte dessus, » répondit Lucius. « Ca fait un moment que je pense à elle pour ce poste, mais je n'avais pas de moyen de l'approcher convenablement. Elle ne me ferait certainement aucune confiance. Par contre, toi, elle te respecte et elle te fait confiance. »

Severus ne savait pas toujours déterminer quand Lucius mentait, mais sa proposition sonnait vrai, ou au moins à 90 vrai, ce qui était suffisamment proche. Il pouvait voir l'avantage d'avoir un directeur de département totalement honnête au Ministère, un peu comme d'avoir la reine au centre d'un échiquier pour bloquer les mouvements de l'adversaire. Ce qui le surprenait, c'était la suggestion qu'elle le respectait et qu'elle lui faisait confiance.

« Si j'étais toi, » continua Lucius sur le même ton, « J'emmènerai Miss Granger déjeuner demain et je lui ferais ma demande. Je suis sûr que vous avez beaucoup de temps à rattraper. »

Un déjeuner ? Bien, il supposait que c'était possible, même s'il ne voyait pas pourquoi il ne pouvait pas simplement prendre rendez-vous à son bureau.

Ma demande ?

Lucius ne suggérait certainement pas que… ?

Oh-oh.

Lucius le suggérait certainement. Sa voix avait eu une inflexion particulière au mot 'demande'.

« Tu as peut-être raison, » répondit Severus, décidant de repousser l'étude de cette suggestion à plus tard, quand il serait seul, et pourrait lui accorder toute l'attention qu'elle méritait. « Bien. A quelle heure pense-tu que le Père Noël pourrait passer chez toi ? »

Severus pensait à Miss Granger, et il était parvenu à ces conclusions :

Lucius était traître à vous poignarder dans le dos, et le meilleur Machiavel depuis le premier du nom. Il était aussi suffisamment intelligent pour savoir que poignarder quelqu'un dans le dos est une chose que l'on ne peut faire qu'une seule fois, alors il fallait être sûr de son coup. Ce qui signifiait qu'il était un homme de parole, la plupart du temps. C'était le 'la plupart du temps' qui donnait du mal aux gens, mais 'la plupart du temps', c'était statistiquement mieux que vos chances avec n'importe qui d'autre, y compris Albus.

Lucius ne vous planterait un poignard dans le dos que s'il avait une bonne raison de le faire, et Severus avait beau essayer, il ne voyait pas pourquoi Lucius essaierait de le caser avec Miss Granger si tout ce qu'il risquait d'obtenir en retour était une main dans la figure.

Alors, selon toute probabilité, inviter Miss Granger à déjeuner était une bonne idée.

Et puis de toute façon, ce n'était pas comme si c'était une déclaration d'amour, ou une demande en mariage, c'était juste pour traiter une affaire dans des circonstances agréables. Ce qu'il voulait dire qu'il pourrait évaluer la situation sans montrer les cartes qu'il avait en main.

Ce qui menait à la question de savoir s'il avait des cartes en main. Il avait espéré tomber sur elle de nouveau à l'occasion, c'était vrai, mais uniquement parce qu'il la considérait comme une personne à qui il était un peu moins désagréable de parler qu'aux autres, et non pas par intérêt amoureux. Ce qui voulait dire qu'il devrait également évaluer son potentiel en tant qu'intérêt amoureux pendant leur déjeuner.

Ce déjeuner promettait d'être intéressant.

Il arriva à 12h30 précises, pour trouver une Hermione épuisée qui aboyait sur l'un de ses subordonnés qui, d'après elle, ne faisait pas la différence entre son cul et sa tête, et ne trouverait ni l'un ni l'autre sans une carte.

Cette diatribe était plutôt impressionnante, et, d'ici dix ans, peut-être serait-elle capable d'atteindre son propre niveau d'éloquence.

Aussitôt qu'Hermione remarqua Severus, le subordonné fut renvoyé corriger ses rapports. Il s'enfuit, accordant à peine un regard à la terreur de Poudlard, et quitta le couloir à toute vitesse, comme s'il était poursuivi par un Détraqueur. Hermione remit ses cheveux en place, et contourna son bureau pour venir lui serrer la main. « Je suis désolée pour cette scène, mais avec l'approche de Noël, ils ont tous la tête à leurs vacances et pas à leur travail. »

« On ne trouve plus de personnel de nos jours, » dit-il, plaisantant à moitié.

« C'est vrai. Je voudrais leur jeter un bon Imperio, et ce serait réglé. »

« J'ai pensé ça plus d'une fois pendant les réunions de professeurs. Permettez-moi, » dit-il, prenant le manteau d'Hermione de ses mains et l'aidant à le passer.

« J'ai pensé que vous n'aimeriez pas manger à la cantine du Ministère, » dit-elle par dessus son épaule, rougissant légèrement. « Alors j'ai réservé une table dans un bistrot du quartier. Rien de spécial, mais la nourriture n'est pas mal. »

« Ce qui est plus que ce qu'on peut dire de la cantine du Ministère. »

Le bistrot n'était pas loin, dans une petite rue à l'écart, et il avait l'air assez modeste de l'extérieur. Il fut soulagé de voir que les apparences étaient trompeuses, et qu'on n'attendait pas de lui qu'il mange avec une cuillère grasse. A l'intérieur, l'endroit était propre et ordonné, limite spartiate, avec des tables en pin récurées et des nappes blanches. Il y avait un vase sur chaque table, contenant une fleur fraîche, et le menu était écrit sur une ardoise accrochée sur un mur.

L'écriture était exécrable, et il eut des difficultés à savoir ce qu'on lui proposait. Les standards d'écriture déclinaient clairement, et pas seulement pour l'écriture manuelle : on imprimait des caractères de plus en plus petits, et les gens laissaient les panneaux indicateurs et les panneaux d'affichage devenir sales et flous. C'était une saleté de nuisance, voilà ce que c'était.

En louchant, il ne put que deviner que l'un des plats était du saumon en croûte. Ca ferait l'affaire, même s'il aurait préféré du gibier.

Leurs plats arrivèrent peu de temps après qu'ils les aient commandés, et le sien était bon. La pâte était légère et croustillante, le saumon tendre et moelleux, et la sauce était délicatement parfumée. Ca ne tenait pas la comparaison avec son dîner de la veille, mais au moins il n'allait pas risquer un empoisonnement alimentaire, ce qui n'était jamais exclu avec la cantine du Ministère. Les seules personnes qui y mangeaient étaient celles trop pauvres pour se permettre quoi que ce soit d'autre, ou celle qui connaissaient des sorts de digestion en béton.

« Comment ça se passe à Poudlard ? » demanda Hermione. « Comment va Minerva ? »

« D'une humeur de chien, » dit-il. « Albus est parti en vacances en lui laissant une montagne de travail, et très peu de temps pour le faire. »

« Albus ne part pas en vacances d'habitude, » dit-elle. « Pas au moment de Noël. »

« Eh bien, il n'est pas violet non plus, d'habitude. »

Hermione l'écouta avec une attention gratifiante résumer les étapes qui avaient mené le Directeur à cet état. « Ses cheveux sont d'un lavande très doux. C'est de très bon goût, mais le reste… violet éclatant ! »

Hermione riait. « J'aurais aimé voir ça. Je suppose que personne n'a pensé à prendre de photo ? »

« On aurait dû le faire, ne serait-ce que pour des raisons de recherches médicales. Ce n'est pas tous les jours que quelqu'un se teint en violet. »

« Ce qui me surprend c'est qu'il soit parti en vacances. Je ne crois pas qu'un Albus violet détonne tant que ça par rapport à l'ordinaire, quand on voit les robes qu'il porte en temps normal. Vous avez vu celle qu'il portait à la dernière réunion mensuelle du Ministère ? Orange et rose. Je jurerais que cet homme est daltonien. »

« Je ne crois pas, » la contredit Severus. « Je crois que c'est une tentative délibérée de révolter la sensibilité des autres membres du Comité pour qu'ils accélèrent le rythme. Avant, les réunions duraient des heures, mais maintenant, elles tiennent en 45 minutes, pause café comprise. »

« Je me demande si la même tactique fonctionnerait pour mes réunions de Départements, » se demanda Hermione. « Mon Dieu, elles sont interminables. »

Severus saisit cette occasion pour jeter un regard sur Hermione. Ses cheveux étaient toujours les mêmes, impossibles à maîtriser. Sa silhouette était soignée, et elle dégageait une impression générale d'enthousiasme et de vitalité qui était plutôt attirante.

Cet enthousiasme méritait d'être utilisé pour un usage autre que de rester assise dans un bureau pour superviser des incapables.

« Et comment se passent les choses de votre côté ? » demanda t'il, connaissant d'avance la réponse. Lui rappeler combien son supérieur était ennuyeux la mettrait dans le bon état d'esprit pour entendre l'offre de Lucius.

« Oh, c'est toujours la même chose. Trop peu de monde pour faire trop de travail, et un patron qui pense que diriger par l'exemple signifie disparaître pour de longs déjeuners, et quitter le bureau en avance le soir. Quoi qu'il en soit, on avance plus vite quand on ne l'a pas dans les pattes. Il souffre d'un cas grave de réunionnite. On doit prévoir une réunion pour décider de tout, et parfois un groupe de privilégiés se réunit avant la réunion pour prévoir l'ordre du jour. Bien sûr, il y a également un débriefing après la réunion. Je crois qu'une fois le débriefing a suivi la réunion de prévision, et qu'on a oublié de faire la réunion elle-même. »

« Ca semble presque aussi déplaisant qu'à Poudlard, » dit-il.

« Presque ? » Badina t'elle. « Pourquoi est-ce que ce n'est pas pire ? »

« Il n'y a pas d'enfants impliqués, ni de produits chimiques dangereux. Croyez-moi, ça ajoute tout un nouveau niveau de terreur à la quantité que de trop nombreuses réunions peuvent provoquer. »

« Je suppose que vous marquez un point, » concéda t'elle.

La conversation pausa un moment, ils se concentraient tous deux sur leurs assiettes. Maintenant qu'il avait semé les graines, tout ce dont il avait besoin était de la parfaite ouverture pour mettre sur le tapis l'Offre Qu'Elle Ne Pourrait Pas Refuser.

« Vous restez longtemps à Londres ? » demanda t'elle.

« Je rentre après le déjeuner, enfin, après un petit détour par les librairies, en fait. »

« Flourish fait des soldes, vous devriez trouver quelques affaires à faire. »

Il fallait qu'il change de sujet, quelque fascinant qu'il soit, ou ils resteraient à discuter tout l'après-midi avant qu'il ne puisse mentionner la raison de sa visite. Très bien, la subtilité serait du temps perdu auprès de la si directe Miss Granger, alors autant être franc.

« Ma visite en ville avait pour unique but de vous voir, parce que j'ai une proposition à vous faire. En fait, c'est une idée de Lucius. Enfin, de nous deux. »

Elle écarquilla les yeux, ce qui n'était pas franchement encourageant.

« Un transfert sous les ordres de Wiggins, en échange d'une faveur. »

« Oh, grands dieux merci. Pendant un instant j'ai eu peur que vous veniez me proposer une partie à trois. »

Severus s'étouffa sur son saumon. « Hein ? »

« Vous ne sembliez pas très bien savoir lequel de vous deux faisait cette proposition, » fit-elle remarquer calmement. « C'était une hypothèse parfaitement logique. »

« Arg. »

« Alors, qu'est-ce qu'il faut que je fasse pour sortir de cet enfer ? »

Severus avait quelque difficulté à ramener sur le droit chemin son train de pensée qui avait déraillé. « Arg. » Partie à trois ? Partie à trois ?

« Qu'est-ce qu'il faut que je fasse ? » demanda t'elle à nouveau en le regardant avec amusement.

Il y avait toutes sortes de choses qu'elle aurait pu faire pour lui, et il essayait de toutes ses forces de ne plus y penser en ce moment.

« Je suppose que c'est en rapport avec le Elfes de Maison ? »

D'une façon ou d'une autre, les parties à trois, les Elfes de Maison et ce qu'Hermione pouvait faire pour lui, tout ça se mélangea, avec un résultat très désagréable. Ce qui voulait dire que son cerveau pouvait se remettre à fonctionner normalement, et qu'il avait retrouvé l'usage de la parole. « Oui, c'est ça. Les Elfes de Maison. J'ai besoin de leur aide pour un projet très important le soir du réveillon de Noël, ce qui veut dire qu'ils vont devoir dépasser le temps de travail autorisé dans la Directive, et j'ai besoin que vous les y autorisiez. » Ce n'était pas une bonne idée de lui expliquer que les Elfes voulaient se débarrasser d'elle. Elle aurait pu se mettre en colère, et ça aurait ruiné toutes ses chances. Toutes ses chances de la voir approuver un dépassement du temps de travail, c'est ce qu'il voulait dire. Oui, bien sûr. Le dépassement de temps de travail.

« De combien de temps ? » demanda t'elle. « Nous pouvons autoriser une heure par-ci par-là. Nous ne sommes pas déraisonnables. »

« D'environ six mois. »

« Et pourquoi diable est-ce que vous auriez besoin d'autant de temps ? »

L'idée le frappa avec une horrible certitude : il allait devoir passer aux aveux. Il y avait peut-être quelques femmes qui pensaient qu'un Professeur de Potions dans un tourbillon de robes était sexy, mais il doutait qu'aucune d'entre elles puisse être persuadée que le même Professeur de Potions dans un costume rouge bouffant, un oreiller sur l'estomac, était toujours aussi sexy, peu ou prou. « Je suis le Père Noël cette année, » marmonna t'il.

« Vous êtes QUOI ? »

« Baissez la voix, » siffla t'il. « C'est sensé être un secret. »

« Désolée. Je jurerais que je viens de vous entendre dire que vous seriez le Père Noël cette année. J'imagine que vous voulez dire pour la fête du personnel à Poudlard, ou quelque chose comme ça. »

Severus secoua la tête.

« Vous voulez dire le vrai Père Noël ? Putain de merde. »

« Alors vous pouvez voir, » dit-il avec empressement, « qu'il est vital que vous autorisiez le dépassement, parce que sinon les petits enfants seront tellement déçus et malheureux le matin de Noël. Vous ne pourriez pas vivre avec ça sur la conscience, pas vrai ? »

« Je suppose que non. » Elle joua un instant avec la nourriture qui restait dans son assiette. « Bien. Laissez moi voir le coût estimé en temps, et je le ferai approuver cet après-midi. »

« Euh, coût estimé en temps ? »

« Oui, vous savez, l'estimation du nombre d'heures de travail d'Elfe dont vous avez besoin, divisées en travail qualifié et non qualifié, avec des pauses et des périodes de repos.» Il avait l'air pris au dépourvu. Il n'avait pensé à rien de tout cela. « Vous avez un plan, non ? »

Il secoua la tête. « Jusqu'à hier, je n'avais même pas de costume à ma taille. »

« Alors, comment allez-vous distribuer les cadeaux aux enfants ? »

« En traîneau, » avança t'il, peu sûr de lui.

« Eh bien, c'est tout simplement idiot. Ca va prendre des jours en faisant comme ça. »

« Mais c'est la tradition. »

« C'est peut-être la tradition, mais je ne vois pas pourquoi vous devriez vous y prendre ainsi, et vous épuiser vous et les Elfes, alors qu'il existe une autre méthode, plus facile. Ce n'est pas comme si les enfants étaient censés vous voir. Qui saura que vous avez triché ? »

Quand elle l'exprimait comme ça, il pouvait comprendre son point de vue. Il avait été trop occupé à courir partout pour essayer d'arranger les choses, et il n'avait pas pris le temps de réfléchir à un moyen plus simple. De l'organisation, c'était ce dont sa petite entreprise avait besoin, et même si l'admettre lui faisait horreur, il connaissait une personne qui serait capable de mettre de l'ordre dans cette pagaille organisée : Hermione 'j'ai-un-emploi-du-temps-pour-dormir' Granger.

« Tout ça a été très mal organisé, » dit-elle, secouant la tête.

« Je suppose que vous pensez être capable de faire mieux ? » demanda t'il, espérant provoquer la réponse attendue.

« Je suis sûre de pouvoir, » répondit Hermione, relevant le défi.

« Prouvez-le. »

Le visage d'Hermione se figea quand elle réalisa qu'elle s'était fait avoir. Elle était une Gryffondor, et un femme de parole, et elle ne reculait jamais devant une cote défavorable. Maintenant, elle était irrémédiablement engagée à mettre de l'ordre dans ce chaos.

« Vous auriez pu tout simplement me demander mon aide, » dit-elle.

« J'aurais pu, mais c'était plus drôle de cette façon. » Pour la première fois depuis qu'Albus lui avait appris la nouvelle, Severus sourit du sourire heureux de l'homme tiré d'affaire.

Et, une fois que les cadeaux seraient distribués, il était tout à fait possible qu'Hermione, les joues rouges de lui avoir démontré comment s'y prendre, soit amenée à rougir pour d'autres raisons.

Elle lui laissa payer le déjeuner. Ca valait le coup.


Remerciements pour les contributeurs suivants :

« Severus aimait penser à Lucius comme à un ami, il aurait détesté penser à lui comme à un ennemi, » d'après la description du troll Chrysoprase par Terry Pratchett.

Hypnobarb pour la phrase « je préférerais faire une Pédicure au Dark Lord. »

JustJeanette pour la phrase « De l'organisation, c'était ce dont sa petite entreprise avait besoin, et même si l'admettre lui faisait horreur, il connaissait une personne qui serait capable de mettre de l'ordre dans cette pagaille organisée : Hermione 'j'ai-un-emploi-du-temps-pour-dormir' Granger. »

Mt Straycat, Theastrem, et les autres pour leurs suggestions de vocabulaire.