Auteur : Kazy

Disclaimer : Tout ce que vous ne connaissiez pas au début de la fic est à moua.

Protection parentale : G

Résumé Général : Les Maraudeurs ont seize ans, Voldemort monte en puissance, il faut faire un choix. Faudra-t-il renier son éducation ou l'accepter pour vivre en paix avec soi-même ? Sans se sentir manipulé ?

Résumé du chapitre précédent : Electre est morte, assassinée par un Mangemort. Les Maraudeurs et Lily font un bilan de l'attaque et en viennent à conclure que la Voix de la Vérité avait bon, mais qu'il aurait fallu creuser un peu. Et plus que tout, la Voix de la Vérité avait raison pour Ambre : elle est bien morte. Morte de l'intérieur.

Note de Wam : Je suis désolée pour l'attente, mais avec mes devoirs (bouhouhou) je galère un peu. Vu que je me casse un peu la gueule pour le moment, je travaille beaucoup et je n'ai donc pas le temps d'écrire autant que je le voudrai. Heureusement, je viens de sortir de ma spirale gonflante. Les chapitres suivants devraient être plus faciles à écrire normalement mais bon. Je suis encore désolée pour l'attente.

Entre Ombre et Lumière Chapitre 21 : Au clair de Lune

Le soleil se couchait derrière la Forêt Interdite. Le ciel offrait aux rares spectateurs son plus beau dégradé aux couleurs parfois chaudes, souvent froides, laissant présager une belle journée le lendemain. Mais pour la plupart des élèves de Poudlard, le lendemain ne les intéressait pas. La veille non plus. Le mois de janvier avait tellement éprouvé Poudlard que l'on voulait à tout prix oublier ce mois, cette semaine, ce simple jour qui avait gâché la vie de l'école toute entière. Alors les élèves préféraient vivre au jour le jour, n'osant penser à l'avenir, ne voulant pas se souvenir du passé. Les journées à Poudlard se suivaient, et se ressemblaient plus ou moins.

Le mois de janvier s'était terminé rapidement, au plus grand plaisir des élèves qui voulaient oublier ce mois maudit. La neige était venue avec février, détendant un peu les Sorciers qui faisaient vivre l'école. Et mars venait de commencer, avec ses pluies diluviennes, ses jours parfois frais, parfois chauds, souvent orageux… Comme le moral de Poudlard.

Le moral était non seulement orageux, mais très bas. Plus bas que jamais personne ne l'aurait soupçonné. Inquiétant. Au lieu de rapprocher les Maisons, le gouffre qui les séparait se creusait toujours plus, sans cesse, augmentant la rumeur des préjugés, intensifiant les stéréotypes, accroissant les disputes et détruisant peu à peu les amitiés.

Malgré les souffrances et le découragement ambiants, les protagonistes de la vie de l'école continuaient à vivre. L'histoire devait continuer.

Chez les Poufsouffle, le moral était au plus bas, pour plusieurs raisons dont on ne voulait plus parler. C'était comme une cicatrice grande ouverte, saignante et infectée que l'on avait faite à la Maison toute entière. Ça avait été la Maison la plus touchée, suivie de près par les Gryffondor. Même les meubles, les tableaux, et le blaireau qui ornait le blason de la Maison semblaient pleurer. La Directrice de la Maison de Poufsouffle, la douce et vieille Roselyne Garden, était morte pendant la bataille. Tous les tableaux de la zone des Poufsouffle pleuraient et portaient le deuil. On avait même trouvé un vieux tapis étrangement mort (la plupart des élèves avaient été étonnés de savoir qu'un tapis était vivant).

Chez les Serdaigle, on était plus calme, on ne parlait pas, on ne pleurait pas, on était comme perdu. Depuis la mort d'Electre, David Golth était, lui totalement égaré, ne reconnaissant pas toujours tout le monde, ne se souvenant parfois plus de qui il était lui-même. Souvent, il se réveillait en sueur en criant le nom d'Electre. Pourtant, le reste du temps il ne semblait pas savoir qui elle était, et encore moins si elle avait existé. Les élèves de Sixième Année avaient été relativement sauvés sauf un garçon du nom de Niall Uster et Electre. Niall avait été un garçon très gentil, quoiqu'un peu turbulent et légèrement lent à la détente. Quant à Electre, elle n'était plus à décrire.

Du côté des Serpentard, Ambre Daray n'était plus que l'ombre d'elle-même, un corps errant volé de son âme, allant en cours, mangeant, dormant, alignant trois ou quatre mots par miracle, lorsqu'elle semblait de bonne humeur. Elle repoussait quiconque était près d'elle à moins de vingt centimètres, et refusait d'engager une simple discussion. Lorsqu'on lui demandait comment elle allait, ou elle ne répondait pas, ou elle baragouinait quelque chose qui ne donnait pas envie de s'accrocher. La mort d'Electre l'avait totalement détruite. Elle avait accepté sa mort. En deux mois, elle avait réussi par quelque prodige à accepter le fait que sa sœur n'était plus. Et elle tentait de réapprendre à vivre, sans sa jumelle, avec une partie d'elle en moins. Et elle avait besoin d'y arriver seule, sans l'aide de personne. Elle avait besoin qu'on la laisse seule. Elle avait besoin de réfléchir, et de réapprendre à vivre.

Katy Mulder avait été choquée par toute cette violence. Poudlard lui avait découvert un côté peace & love étonnant. Elle avait été la première personne à comprendre que Ambre avait besoin d'une solitude parfaite et nécessaire. Son père avait tenté de l'obliger à rentrer chez elle, et ça avait été avec consternation que la jeune fille avait découvert en son propre père un amour jusque là insoupçonné. Peut-être l'avait-elle mal jugé. Elle avait refusé de rentrer chez elle malgré la protection que son père pouvait lui offrir, mais s'était promis d'avoir une discussion avec lui à son retour chez elle. Mais ça avait été avec une déception bien dissimulée qu'elle avait remarqué qu'il avait fallu un massacre pour que son père s'inquiète pour sa propre fille.

Les jumelles O'Brien avaient gardé leur position. Fières d'être des sang-pur, elles paradaient toujours dans Poudlard avec ce sourire agaçant au visage. Dès qu'elles avaient vu que Londubat avait attrapé le vif d'or, elles avaient couru vers Poudlard et étaient montées dans la tour d'astronomie afin d'admirer l'hécatombe. Déçues par le comportement des sœurs Daray, elles avaient été partagées par deux sentiments lorsqu'elles avaient appris le sort d'Electre, tristes d'avoir pu observer la décadence d'une des leurs, mais contentes d'être débarrassées d'une adolescente névrosées aux tendances psychotiques. Dès le lendemain une dispute monumentale avait divisé Ambre et June. Ambre avait accusé June et April de meurtre, et ni l'une ni l'autre n'avait nié. Après un duel effrayant entre June et Ambre interrompu par Dumbledore en personne, accompagné par Wilkes, les deux jeunes filles avaient pris la décision de s'éviter le plus possible.

Rogue, Wilkes, Avery et Klein étaient pareils à eux-mêmes : Rogue suivait les Maraudeurs comme un chien, sortant même après le couvre-feu de temps à autres pour les surprendre, Wilkes et Avery étaient plus méprisants que jamais, toisant les plus jeunes et arborant avec fierté le blason de la Maison la moins touchée par le carnage. Quant à Klein, il restait tel qu'il était : il suivait le groupe, se pavanant avec ses muscles, et foudroyait du regard les premières années en les menaçants s'ils ne baissaient pas les yeux. Une bataille avait également explosée entre les Maraudeurs et les Serpentard. Peter avait fait manger sa baguette à Klein, Rogue s'était retrouvé avec un nez à la Pinocchio et des cheveux sous forme de spaghettis, Wilkes avait été transformé en cochon grâce aux bons soins de Sirius, et Remus en était presque venu au mains avec Avery lorsque leurs baguettes avaient échoué quelques mètres plus loin. Encore une fois, Dumbledore avait dû intervenir.

Du côté des Gryffondor, on ne paradait certainement pas.

James devait supporter la protection des trois autres Maraudeurs qui craignaient qu'on ne l'enlève, même si c'était impossible à l'intérieur de Poudlard. Le tournoi de Quidditch avait été annulé jusqu'à l'année prochaine où de nouvelles mesures seraient prises. Ses parents lui avaient envoyé une lettre alarmiste lui intimant, voire lui ordonnant de rester à Poudlard, de ne pas sortir après le couvre-feu faire de sales coups, et de ne surtout pas aller dans le parc particulièrement s'il était seul. Quant à des balades illégales dans la Forêt Interdite, c'était à définitivement rayer de la liste des choses à envisager jusqu'à la fin de sa scolarité. Mais James n'en avait cure. Il était assez puissant et assez intelligent pour s'en sortir. Et de toute façon il n'était jamais seul. Il n'avait donc rien à craindre, et il n'avait jamais manqué une pleine-lune depuis qu'il était devenu animagus. Alors une lettre n'allait certainement pas le faire changer d'avis.

Remus, lui, avait vécu une longue période de fatigue tant morale que physique suite à l'attaque. Le Loup qui avait menacé de prendre le dessus sur le jeune homme l'avait presque achevé, et Pomfresh l'avait gardé une semaine et demi à l'infirmerie afin d'être sûre qu'il se repose. Heureusement pour lui, les Maraudeurs venaient le voir tous les jours et passaient des heures à discuter avec lui sous l'œil attendri d'une Pomfresh pourtant épuisée et affairée.

Peter avait été très choqué par l'attaque. Voir ses amis étendus sur des tables, parfois à même le sol, gémissants, effrayés, pleurants, ou tellement choqués qu'ils semblaient être morts. Dans ses rêves, il revoyait les yeux violets de Déborah totalement hagards. Il se souvenait de ses paroles confuses, de son regard perdu, de ses mouvements las… Il avait essayé de parler un peu avec elle histoire de la rassurer, et à dire vrai, il avait même réussi. Il l'avait même bercée pour l'aider à s'endormir. Il s'en était voulu d'être heureux dans un moment pareil, mais il ne pouvait pas s'en empêcher. Depuis, il voyait souvent Déborah et ils parlaient souvent ensemble.

Sirius était dans un état pitoyable. Il faisait très bien illusion, mais ses amis n'étaient pas tout à fait dupes. Il savait que l'attaque l'avait totalement bouleversé. De plus, Ambre ne lui parlait plus ou presque, et il s'inquiétait de plus en plus chaque jour, se demandant ce qu'il pourrait faire pour l'aider. Il avait demandé conseil à ses trois meilleurs amis, mais aucune réponse ne l'avait satisfait : 'Laisse faire le temps' avait dit Remus ; 'Remus a raison, il n'y a rien à fait. Je pense qu'elle doit régler ça seule' avait ajouté Peter ; 'Remus et Peter ont raison, y a rien à faire à part être là pour elle, garder un œil sur elle, et la laisser régler tout ça toute seule' avait clos James. Ce qui ne lui avait pas du tout plu, c'est qu'il avait entendu ce qu'il pensait lui-même. Il fallait qu'il la laisse dans sa souffrance. Et il n'aimait pas ça. Les cours de Potions étaient un vrai calvaire. Il n'y avait que quelques rares moments où elle le laissait approcher… Des moments où il aurait préféré qu'elle soit différente…

Lily aussi souffrait. De voir Ambre vivante mais morte, de ne plus avoir devant elle qu'un cadavre vivant, de ne plus avoir l'espoir de la voir radieuse et espiègle comme avant. De voir ses camarades perdus, tristes, ne perdant pas leurs airs moroses malgré les deux mois écoulés. Le temps semblait vraiment être à l'image du moral de Poudlard. Combien de nuits avait-elle pleur ? Elle ne les comptait plus. Souvent, elle entendait les pleurs d'Alice, parfois ceux de Julia, mais elle n'entendait plus ceux de Shen. Non pas parce qu'elle était morte, mais parce que ses parents l'avaient rappelée pour qu'elle rentre chez elle, comme beaucoup d'autres élèves. Lily trouvait cela idiot, car malgré tout, Poudlard restait la meilleure protection que l'Angleterre ait jamais connue.

Mais le pire chez les Gryffondor était sans conteste Frank. S'il avait fallu faire l'élection de la personne la plus indéfinissable possible dans Poudlard, tous les élèves auraient voté pour Frank. Il était une boule de sentiments divers et variés, plus venimeux les uns que les autres, qui le bouffaient totalement et le rendait presque fou. Mais tous les Gryffondor, depuis le plus jeune Première Année au plus je m'en foutiste Septième Année compatissait avec lui. Tout Poudlard savait ce qui s'était passé.

Jenny avait été enlevée par un Mangemort. Ça avait fait un choc à tout Poudlard, sauf à quelques Serpentard sûrement mis au courant par Ignatus ou leurs parents. Frank avait été tellement choqué qu'il n'avait pas parlé pendant deux semaines. La mort de Dave l'avait déjà tellement secoué que la disparition de sa sœur l'avait achevé. Il refusait même de parler à Alice qui était presque arrivée à en faire une crise de nerfs. Alan n'avait même pas eu besoin d'entendre les pleurs de sa femme pour se retirer sur le champ. Dumbledore n'avait même pas tenté de l'en dissuader : il comprenait parfaitement et l'acceptait. Mais Voldemort n'avait pas rendu Jenny comme il l'avait promis. Plusieurs semaines les Londubat avaient attendu le retour de la fille chérie.

Le quatre février, la fillette avait été retrouvée. Ensanglantée, quelques doigts en moins, les deux jambes cassées, quelques côtes brisées, couverte de sueur et de larmes, incapable de prononcer le moindre mot. Elle gisait sur le parterre de fleurs qui ornait la magnifique demeure des Londubat. Mais ni les larmes de Mme Londubat, ni la colère de Alan Londubat, ni la haine de Frank n'avait pu retenir Jenny. Elle était morte de ses blessures deux jours après à Ste Mangouste. Pendant une semaine, personne n'eut de nouvelles de la famille, et Alice se rongeait les sangs, n'en dormait plus, vivant avec appréhension chaque seconde, se torturant psychologiquement. Jamais Lily ne vécut de moment aussi angoissant de sa courte vie. Lorsqu'il était revenu, tout le monde l'avait attendu avec quelque chose. Mais Frank avait simplement pris Alice dans ses bras et ils étaient montés dans le dortoir des garçons. Personne n'eut l'idée de faire une réflexion lubrique, ou d'aller les déranger. Mais depuis, Frank disait à qui voulait l'entendre qu'il deviendrait un grand Auror, et que Voldemort paierait pour la mort de sa sœur.

Malgré les cinquante points accordés par Mc Gonagall et Dumbledore à chaque élève ayant défendu son école et ses camarades, la tension était à son comble malgré deux mois écoulés. Mais tout le monde tentait de faire comme si rien ne s'était passé. Tout le monde tentait de reprendre une vie normale.


La lune toute ronde devenait de plus en plus lumineuse alors que les derniers rayons du soleil rouge dépassaient les hautes cimes des différents arbres qui cachaient une bonne partie du ciel. Les ténèbres angoissantes prenaient le dessus sur la lumière rassurante du jour. Le parc de Poudlard était déjà vide, et presque noir. Peu à peu, les lumières de Poudlard commençaient à s'éteindre, en même temps que le soleil se couchait. Bientôt, la seule lumière éclairant l'École de Sorcellerie fut la lune. Le sommeil bienfaiteur enveloppa l'esprit de tous les élèves… Tous ? Non. Trois élèves ne dormaient pas, et étaient bien décidés à ne pas dormir avant de longues heures passées à s'amuser et à profiter de leur jeunesse.

Trois élèves que même un œil avisé n'aurait pu apercevoir, dissimulés par une cape d'invisibilité avançaient le plus vite possible près d'un arbre, un grand arbre que peu de monde osait approcher depuis qu'un élève avait failli perdre un œil. Lorsqu'ils furent cachés par un gros buisson épineux, ils retirèrent la cape et se sourirent.

« Hé hé h ! » fit le brun aux cheveux mi-longs. « Enfin ! Je n'en pouvais plus ! »

« Moi non plus ! Vous pensez que Remus est déjà transform ? » demanda un autre brun qui lui portait des lunettes.

« Oui, la lune est haute et bien ronde dans le ciel. Il est forcément transformé. » répondit un garçon plus petit et un peu plus enveloppé que les deux autres.

« On y va alors ? » demanda le brun à lunettes.

« J'allais le dire Cornedrue ! »

Ils posèrent la cape dans le bosquet et le brun à lunettes les retira pour les mettre dans la cape. Puis il attrapa sa baguette et prononça une formule : 'Méyeurvu'. Les trois adolescents se regardèrent, confiants, puis se transformèrent dans un 'pop !' amusant. Le brun aux cheveux mi-longs était devenu un chien qui ressemblait à un labrador avec des poils sensiblement plus longs. Il jappa en remuant la queue et s'amusa à courir après sa queue pour amuser les deux autres. Celui qui portait des lunettes était devenu un magnifique cerf dont les bois avaient bien poussés par rapport à l'année dernière. Il avait une allure fière et majestueuse qui lui donnait l'air d'être un prince. Il brama, ce qui arrêta le chien. Le dernier garçon était devenu un petit rat à la longue queue ressemblant à un long ver de terre. Il se faufila entre les jambes du cerf qui brama une seconde fois. Puis ils s'arrêtèrent, et se regardèrent. Le rat, appelé Queudver, partit à toutes pattes vers l'arbre qui tenta de l'arrêter mais qui s'arrêta soudainement lorsque le rat appuya sur une de ses racines. Le cerf, Cornedrue, et le chien, Patmol, foncèrent alors vers l'arbre qui dissimulait un passage. Ils se faufilèrent dans l'embrasure et pénétrèrent dans le long couloir humide qui menait à la porte solidement fermée. Le rat se retransforma en humain et sortit de sa poche une fine baguette. Après un sort, la porte s'ouvrit alors que le jeune homme redevenait animal.

La porte s'ouvrit sur une petite pièce déjà transformée en capharnaüm. C'était une grande pièce en bois, avec un lit transformé en brindilles, une couette qui n'était plus qu'un bout de tissu avec les plumes autour, et quelques meubles ci et là plus ou moins abîmés. Et au milieu de la pièce, un loup. Un loup-garou, pour être plus précise. Gigantesque, terrifiant, les babines retroussées montrant de grosses canines laissant deviné une puissante mâchoire. Mais lorsqu'il vit Patmol, Queudver et Cornedrue, il se calma immédiatement, et eut une sorte de sourire. Aussitôt, Patmol se jeta sur Lunard et ils jouèrent quelques instants. Cornedrue brama un peu, et alla les embêter, alors que Queudver courait planter ses griffes dans les poils du loup-garou.

Après une petite heure à jouer dans la cabane, savamment surnommée 'hurlante' à cause des cris poussés par Lunard lors des nuits de pleine lune, les trois animaux et l'hybride sortirent dans le couloir qu'ils traversèrent dans un fracas épouvantable. Puis ils furent dehors. A l'air libre, libres tout court, d'ailleurs. Sans même échanger un regard, ils se mirent à courir jusqu'à la Forêt Interdite, l'un jappant, un autre hurlant, un troisième poussant des petits cris, et le dernier aboyant. Ils étaient libres, libres pour une nuit. Pour quelques heures trop courtes.


Sirius Black était épuisé. Se transformer en Patmol n'était jamais une mince affaire, et c'était toujours éprouvant, même si cela valait parfaitement le coup. Ils s'étaient amusés jusqu'à près de quatre heures du matin sans s'arrêter, se baladant dans la Forêt Interdite, jouant même avec les rares animaux qui n'étaient pas effrayés par le loup-garou. Mais cela avait sincèrement valu tous les trésors du monde. Oubliés les trois mois précédents, les souffrances diurnes, les malheurs habituels, l'animagus qui était en James, Peter et Sirius avait pris très vite le dessus, et la liberté leur était très rapidement montée à la tête.

James et Peter s'étaient endormis comme des masses à leur retour, vers quatre heures du matin alors que Sirius s'était battu pour ne pas fermer les yeux et rester éveillé. Il avait encore quelque chose à faire. Un rendez-vous à honorer. Un rendez-vous plaisant, mais étrange.

Il gravit la colline en traînant les pieds. Il y allait de gaieté de cœur, mais il était tellement fatigué qu'il hésitait à ne pas rentrer au dortoir pour finir sa très, très, très courte nuit. Mais lorsqu'il vit son rendez-vous, il finit par ne plus rien regretter. Il fallait qu'il reste, même si ce n'était pas toujours la franche rigolade. Apparemment, son camarade avait l'air de s'amuser. Dès que celui-ci le vit apparaître, Sirius s'arrêta.

« Tu es en retard. » attaqua la jeune fille.

« Je suis fatigué, à part ça, ça va. Et toi ? »

« T'as mauvaise mine. » fit remarquer Ambre.

« Dit-elle, avec des valises tellement grandes que même un sort de rétrécissement ne pourrait pas les cacher. » répondit Sirius du tac au tac.

« Mais c'est tout un art, cher Sirius, tout un art, d'avoir des valises sous les yeux. Mais elles sont un peu lourdes, tu m'aides à les porter ? »

Ambre eut un sourire lugubre et inquiétant en lui tendant une bouteille de bièraubeurre alcoolisée. Elle tenait aussi entre ses doigts un rouleau de papier rougeoyant à un bout. Elle le porta à ses lèvres, aspira, recracha une fumée en toussant, puis elle éclata de rire. Sirius secoua la tête en acceptant la bièraubeurre.

« Où as-tu eu ça ? » demanda-t-il.

« Ah, ah ! Mystère et boule de gomme ! Z'aimeriez bien l' savoir, hein m' sieur Sirius Black ? Ben vous le… Saurez pas ! » répondit Ambre en éclatant de rire.

« Laisse-moi deviner, pour le rouleau, tu l'as demandé (ou tout simplement piqué) à Katy. Et pour les bièraubeurres, tu es tout simplement allée les demander en cuisine. Tu as dû abuser de ton pouvoir d'humaine sur les Elfes. C'est bas. »

« Les Daray tombent très, très bas, mon cher. Vous devriez le savoir depuis le temps. Et puis, vous en avez eu un excellent exemple à Halloween. »

Sirius se raidit pour deux raisons. La première était que depuis deux mois qu'ils avaient pris l'habitude de se retrouver dans le parc au beau milieu de la nuit quelques soirs par semaines, jamais au grand jamais Ambre n'avait abordé le sujet 'Electre'. D'un commun accord, ni l'un ni l'autre n'avait parlé de la sœur d'Ambre. La deuxième raison qui inquiétait Sirius, était que Ambre était parfaitement au courant pour le coup de Halloween, et que jamais elle n'avait fait quelque chose. Était-elle vraiment si impuissante vis à vis de sa sœur ?

« Quoi ? » demanda Ambre devant son regard fixe. « Qu'est-ce qu'il y a ? T'as vu un fantôme? »

« Non. Tu m'as juste parlé de ta sœur. Depuis… Depuis le… » Sirius prit une grande respiration. « Depuis l'attaque, tu n'en as plus parlé, et dès qu'un prénom commençait par le son 'é' tu déraillais totalement. »

« Elle me manque. » répondit simplement Ambre. « C'est tout. »

Sirius eut un sourire mental. Enfin ! Il y arrivait ! Peut-être qu'enfin Ambre allait se confier et parler de ses peurs, de sa douleur et de ses larmes. En tout cas, c'était en bonne voie, et Sirius était content d'avoir réussi à l'amener à se confier un peu plus. Pour Ambre, avouer que sa sœur lui manquait tenait presque du miracle. Il fallait continuer. Il fallait que la jeune fille s'explique et déballe tout ce qu'elle avait sur le cœur.

« Je comprends. »

« Toi, tu ne sais pas ce que c'est. »

« Comment ça ? »

« Tu n'aimes pas tes parents, tu détestes ta famille, et tes amis, ta vraie famille, tu l'as avec toi vingt-quatre heures sur vingt-quatre. Tu ne sais pas ce que c'est d'avoir quelqu'un qui te manque. »

« Tu me déçois, Ambre. »

« Ah bon ? » demanda-t-elle en riant. « Et pourquoi cela ? »

« Parce qu'il y a beaucoup de choses qui me manquent. Ma mère me manque, tu sais. Non, je vois ce que tu veux dire, ma mère en elle-même ne me manque pas, mais… La présence d'une mère me manque. Tu comprends ? Et puis, après, si… Il y a du monde qui me manque, ma cousine, Andromeda par exemple… Et puis, toi aussi tu me manques. »

« Hein ? »

« Oui. Tu me manques. »

« Bah chuis là ! »

« Tu parles. T'es plus là. Tu ne m'envoies plus de vannes, tu n'es plus agressive… Ou alors tu l'es trop. »

Ambre le regarda, puis un sourire éclaira son visage, et elle lui attrapa une joue.

« T'es troooooooooop chou ! »

Sirius eut un regard vide. Moui. Si elle voulait. On ne pourrait pas dire qu'il n'avait pas essayé. Finalement, il lui sourit.

« C'est vrai en plus. » avoua-t-elle. « T'es chou. Même mignon. Moi je te trouve mignon. Mais faut pas te le dire, hein ! »

Sirius haussa un sourcil.

« Promis, je ne me dirai rien. »

« Ouf. En fait je te trouve sacrément mignon. Pas beau, mais mignon, et puis en fait, je me disais que peut-être que si Electre était moins embêtante, et ben je sortirais avec toi. Après tout, c'était bien parti, tu ne trouves pas ? »

C'était étrange d'avoir ce genre de conversation. C'était comme s'ils n'étaient pas eux, qu'ils étaient deux personnes différentes parlant d'eux-mêmes. Mais c'était amusant.

« Si. »

« Qu'est-ce qui c'est passé, Sirius ? »

La première bouteille de bièraubeurre avait été engloutie en un instant. L'alcool lui montait déjà à la tête. C'était étrange : habituellement, il tenait relativement bien à l'alcool. Peut-être était-ce la fatigue… Ah oui. Et puis Ambre s'était procurée les bièraubeurres les plus alcoolisées. D'accord. C'était donc normal qu'il soit un peu paf. Le temps qu'il se remémore la question qu'Ambre lui avait posée, et il répondit, l'air de rien :

« Bien simple, ta sœur est morte. »

« Mais non, ça n'a aucun rapport. »

« Tu vois, je me suis toujours dit que s'il n'y avait pas eu Electre, il y aurait pu y avoir un 'nous' pour toi et moi. Mais en fait, je n'avais jamais vu le lien qui t'unissait à elle. Je le soupçonnais, mais je n'étais pas sûr. Et maintenant que ce qui aurait pu te libérer se produit, tu n'en es que plus malheureuse. »

« Tu sais quoi ? Tu me plais depuis des années. Tu m'énerves, mais tu me plais. Alors tu vois, hein, euh… Voilà. Même que tu sais, même si t'es Gryffondor, t'es pas trop bête mais par contre, t'es méchant, mais je te pardonne. »

« Tu me trouves mignon ? » demanda Sirius. « T'es pas mal non plus, tu sais. »

« Merci. Sirius ? »

« Mmh ? »

« T'as le regard d'un gnou qui aurait loupé sa migration. »

« C'est bath. »

« Nooooooooooon ! Non, c'est pas bath Sirius ! Encore moins épatant, c'est… C'est triste. Très triste. Tellement triste que j'ai envie de pleurer. »

« Noooooooon, pleure pas, s'il te plaît. Faut te dire que c'est bath, sinon t'avances plus dans la vie. »

« Rapport à l'ineffabilité. »

Sirius la prit dans ses bras et se rapprocha d'elle.

« Tu sais, il fait froid. » dit Ambre.

Leurs têtes se rapprochaient.

« Je suis fatigué en plus. Alors tu vois tout ce que je fais pour toi ? »

Elle eut un petit rire créant à Sirius un étau étroit qui enserra vicieusement son estomac. Il n'aimait pas du tout cette sensation.

« Tu es un gentil garçon, Sirius. Tu as le droit à une récompense. »

Elle se pencha un peu plus, et pausa ses lèvres sur les siennes dans un sourire. L'étau qui enserrait l'estomac de Sirius se resserra d'avantage et grossit allant jusqu'à compresser son cœur. Il avait embrassé des dizaines de filles, mais jamais il n'avait ressenti ça. Pourtant, il répondit plutôt deux fois qu'une au baiser enflammé de la jeune fille. Il passa sa main le long de son dos et se rapprocha un peu plus d'Ambre qui ne le repoussa certainement pas. La jeune fille approcha sa main de son visage et la passa délicatement dans ses cheveux, pressant de plus en plus ses lèvres contre celles de Sirius, jouant malicieusement avec sa langue.

Lorsqu'ils se séparèrent, à bout de souffle, Ambre avait un grand sourire qui lui fit perdre son air cadavérique, et qui effacèrent ses cernes. Elle avait presque l'air normal, son regard semblait plein de vie, complètement différent de celui qu'elle avait depuis le mois de juillet. C'était comme si tout était redevenu comme avant.

« Pas mal. » commenta-t-elle.

Oui. Tout était redevenu comme avant…

Ambre se tourna, pencha la tête en avant, et vomi.

… Ou presque. Sirius fit une grimace et lui tapota la tête.

« Toi aussi tu te débrouilles bien. »


« Elle t'a quoi ? » s'exclama Lily.

« Chut bon sang ! Moins fort ! »

« Excuse-moi. Mais ça me paraît tellement… impossible ! »

« Quoi ? Ben… Pourquoi ? »

« Sirius, je suis vraiment très contente que vous ayez avancé dans votre méli-mélo sentimental…

« C'est Ste Mangouste qui se moque de la charité ! » ricana Sirius.

Lily le foudroya du regard, et poursuivit :

« Mais ça ne ressemble pas vraiment à la Ambre du moment… »

« Oui, je sais. Elle était ivre, donc elle ne s'en souviendra pas. On ne s'est pas vus hier puisque nous sommes tous les deux restés au dortoir, mais aujourd'hui, je la verrai en Potions. »

« Tu comptes en parler avec elle ? »

« Je verrai avec elle. »

Sirius se retourna, et s'apprêta à quitter la salle commune, un peu déçu.

« Sirius ! » l'appela Lily alors qu'il allait sortir.

Le jeune garçon se retourna.

« Je suis quand même contente pour toi, tu sais. Et pour Ambre aussi. Peut-être que ça l'a aidée à guérir, tu ne crois pas ? »

« J'espère. Mes baisers ont toujours eu un effet bienfaiteur sur les gens, sauf quand ils tombaient dans les pommes juste après ! »

Il lui fit un clin d'œil et Lily sourit.

« Comment ont réagi tes copains ? »

« Ils se sont moqués de moi. Et je leur ai répondu que moi au moins je me bougeais. »

« Ce à quoi ils ont répondu… ? »

« Peter a dit qu'il préférait rester ami avec Déborah pour le moment, Remus que la mort de Sean Summers avait tellement ébranlée Emma que ce n'était même pas la peine de lui parler pour le moment, et James a dit que la dernière fois qu'il avait essayé, il s'était pris une baffe retentissante qui l'avait convaincu de ne plus recommencer… »

Lily, qui avait hoché la tête avec compréhension pour Peter et Remus, fit une grimace de dégoût et foudroya Sirius du regard lorsqu'il parla de James. Sirius se souvenait très, très bien de la scène en Quatrième Année, lorsque James avait non seulement demandé à Lily de sortir avec elle, mais qu'il avait accompagné son geste d'un baiser. Lily avait alors écarquillé les yeux et était restée pétrifiée jusqu'à ce que James décolle ses lèvres des siennes. Elle lui avait alors collé une baffe monumentale et lui avait craché les pires insultes que l'on pouvait dire à James… Qui n'avait pourtant pas baissé les bras.

« Mouais. Ça ne m'étonne pas d'eux. Et dit à James qu'il vaut mieux pour lui et pour ce qui pourrait lui servir pour plus tard qu'il continue à éviter de m'embrasser. »

« Je veux bien te croire. Mais ne t'inquiète pas, James (il insista bien sur le prénom) a bien compris qu'il valait mieux qu'il ne t'embrasse pas… pour le moment. »

« Ca veut dire quoi, ça ? »

« Qu'un jour où l'autre il faudra bien que tu te rendes à l'évidence. Tu n'es plus pareille. »

« T'es aussi clair que Dumbledore, là. »

« Vis à vis de James, tu n'es plus pareille. D'abord, tu l'appelles par son prénom. Ensuite, tu n'es plus aussi méprisante envers lui qu'avant, et enfin tu es quand même amie avec moi, Sirius Black, meilleur ami du mec qui te harcèle depuis trois ans. Et je ne cite pas Remus et Peter….Ta haine et ton dégoût envers James perdent peu à peu leur crédibilité. Si elle n'a pas disparu totalement, d'ailleurs… »

Lily ne répondit rien et Sirius décida de partir, fier d'avoir semé le doute dans l'esprit tortueux de sa camarade. Après tout, elle l'avait perdu, alors il lui devait bien ça. Et puis de toute façon, il pensait tout ce qu'il venait de dire : Lily n'était plus la même depuis quelques mois. Elle s'était rapprochée des Maraudeurs, passait des soirées entières à discuter d'Ancienne Magie avec Peter qui était un passionné de cette Magie et qui regrettait de ne pas la manipuler comme il le voudrait, des après-midi à travailler avec Remus qui lui avait appris les échecs, et des nuits à parler de tout et de rien avec Sirius. Seul James avait été un peu mis sur le côté, mais les moments qu'ils passaient tous les deux étaient calmes. Sauf quand Lily était décidée à se montrer détestable envers James. Les Maraudeurs avaient découvert en la personne de Lily, une belle garce qui adorait embêter le monde. C'était assez déroutant.


Lorsque Sirius pénétra dans le cachot numéro quatre, il eut l'une des plus grosses peurs de sa vie. Ambre était déjà présente, mais elle était si pâle, si blanche même qu'elle avait l'air d'un fantôme. Mais le pire étaient ses cernes profondes et bleuâtres, ses yeux noirs qui n'évoquaient qu'un vide abyssal effrayant, et ses cheveux fins qui tombaient dans son dos, lui donnant définitivement l'air d'un cadavre. Même les zombies avaient l'air plus vivants que ça. Qu'aurait-il donné pour revoir un sourire illuminer son visage ? Qu'aurait-il fait pour l'entendre dire un mot qui le rassurerait ? Qu'aurait-il abandonné pour voir une lueur de malice égayer ses yeux noirs ? Mais qu'aurait-il refusé pour que tout redevienne comme avant ?

« Salut ! »

Ambre leva ses yeux morts vers Sirius et hocha la tête pour le saluer.

« Ca va mieux ? » demanda-t-il.

« Mieux ? »

« Oui, tu n'étais pas en cours hier. Tu ne t'étais pas couchée dès que je t'ai ramenée l'autre nuit ? »

Bravo Sirius ! s'applaudit-il. Plus subtil que ça tu meurs. Si là elle ne voyait pas où il venait en venir, il pouvait se faire théomage, ou même s'enrôler chez les Mangemorts. Peut-être même qu'il retournerait chez lui, tiens !

« Ah oui… » percuta Ambre. « D'ailleurs, je voulais m'excuser à ce propos. »

« Comment ça ? »

« Oui, pour tout ce que j'ai dû te dire l'autre soir. J'étais ivre, et quoique j'ai pu te dire ou faire, je ne le pensais pas. »

« Hein ? »

« Euh… Tu étais là non ? L'une des rares choses dont je me souvienne, c'est de toi arrivant et me serrant dans tes bras… J'ai rêvé ? »

« Non » répondit Sirius en riant. « Non, non. Tu n'as pas rêvé. »

« Enfin bref, j'ai l'impression de devoir m'excuser auprès de toi pour quelque chose que j'ai dit ou que j'ai fait. Il s'est passé quelque chose de grave ? »

Oh, tu m'as juste embrassé, puis presque vomi dessus ; presque rien, de fait, ironisa Sirius mentalement. C'était un comble quand même ça ! Elle ne se souvenait même pas de leur premier baiser ! Alors que quatre-vingt-dix pour cent des filles de Poudlard rêvaient toutes les nuits d'échanger ne serait qu'un petit baiser de rien du tout avec lui, elle oubliait simplement qu'elle l'avait carrément galoché ! Et pas qu'un peu ! C'était… Fantastique. Ce n'était pas très flatteur, mais c'était mieux ainsi : pas de conversations compliquées, pas de disputes, pas de regrets non plus, pas de tensions, c'était parfait. Égoïste, mais parfait.

« Non. » mentit Sirius. « Il ne s'est rien passé de grave. En fait, j'ai moi aussi tout oublié, ou presque. Donc s'il s'est passé quelque chose de grave, je ne m'en souviens pas. »

« On a peut-être tué quelqu'un. » fit Ambre.

Sirius releva immédiatement la tête et regarda Ambre. Il n'avait pas rêvé, là ! Elle avait fait du cynisme, elle était bien là ?

« Qu'est-ce que tu viens de dire ? »

« Qu'il était cinq heures du matin. Quand on est partis, je veux dire. Il était très tard. Ou tôt, comme tu veux. Et nous étions passablement ivres. Normal qu'on ne se souvienne de rien entre la fatigue et l'alcool. »

« Sûr… Sûrement. » bégaya Sirius.

Il se mettait à halluciner maintenant… Son cas commençait à devenir sérieux, là. Wilkes entra dans le cachot en vociférant, interrompant net toutes les conversations qui avaient commencé. Il tempêta cinq minutes sur la fainéantise de ses élèves et leur ordonna de commencer immédiatement la potion du jour. Sirius grommela dans sa barbe dans l'espoir de faire sourire Ambre, mais ce fut peine perdue.

Ce ne fut que lorsqu'il leva la tête vers le tableau qu'il remarqua que Rogue le fixait. Il n'écoutait pas les vociférations de James, il fixait Sirius avec un regard mauvais, un rictus sadique et il se tenait à la façon des nobles familles de Sorciers. Puis il se retourna et ignora superbement James. Celui-ci regarda Sirius avec un air compatissant et leva les yeux au ciel en montrant Rogue du doigt.

Sirius sourit à James, l'air de rien. Mais il bouillait de rage. Rogue ne cessait de le narguer depuis trois mois. Sans arrêt, il les suivait, les observait, et semblait noter intérieurement chaque faits et gestes qu'osaient faire les Maraudeurs. Sirius ne le supportait tout bonnement plus. C'était impossible, il ne pouvait plus le voir même en peinture. C'était impossible. De plus, le jeune homme le rendait responsable de l'attaque. Après tout, c'était vrai, non ? Il était Mangemort, il en savait plus sur la Magie Noire que tous les élèves de l'école réunis. Même Electre Daray faisait figure d'apprentie de quatre ans face à Rogue. Et il était parti se cacher dans l'école, à observer le spectacle gentiment. Il était inhumain. Il avait participé indirectement aux meurtres des soixante-sept élèves et professeurs morts pour sauver leur Ecole. Il était aussi coupable que Voldemort. Si ce n'est plus. Car il aurait pu prévenir. Il aurait pu tout éviter s'il l'avait voulu. Mais il n'avait rien fait. Juste attendu de voir la peur, la sueur et le sang remplacer le brouillard qui recouvrait le terrain de Quidditch.

Et il le narguait. C'était comme un aveu. Ça valait un aveu. Tous les aveux du monde, même. Lui et sa bande de potes idiots… Petit crétin.

Un bruit de verre cassé résonna à ses oreilles. Il se retourna, détachant son regard haineux de Rogue et observa avec désolation les trois fioles cassées et le chaudron renversé. Tous les élèves s'étaient tournés vers eux, et la plupart des Serpentard riait. Les Gryffondor regardaient le spectacle avec compassion, et Wilkes s'approcha d'eux avec un sourire sadique.

« Dites-moi miss Daray, vous les collectionnez en ce moment ! »

« Je… Je suis désolée… Ca m'a échappé des mains et… »

« Vous êtes désolée. Ça vous a échappé des mains. Toute la désolation du monde ne rachètera pas ces fioles et les ingrédients de cette potion, miss Daray. Je suis au regret de devoir retirer cinq points à Serpentard. »

Sirius en tomba sur sa chaise. Il retirait des points aux Serpentard, maintenant ? Pour si peu ? Mais… C'était injuste ! Qu'est-ce qu'Ambre lui avait fait ?

« Comme le cours est bientôt terminé, vous pouvez sortir. »

Le cours était bientôt terminé ? Hein ? Mais c'était impossible ! Il venait à peine de débuter. Sirius regarda sa montre. Ah ben non. Il restait quand même vingt-cinq minutes. Étrange. Ambre était furibonde. Elle ramassait ses affaires avec rage et les fourrait dans son sac en grommelant des insultes contre elle, se traitant d'idiote incapable. Wilkes avait un regard victorieux qui intriguait Sirius. Il n'avait jamais spécialement apprécié Ambre comme il appréciait son fils ou Rogue, mais il n'avait plutôt eu tendance à l'ignorer jusque là. Alors pourquoi était-il si exécrable maintenant ?

Sirius attrapa rapidement ses parchemins, sa plume et l'encre et les mit doucement dans son sac. Ambre s'apprêtait à sortir, Sirius sur les talons lorsque Wilkes reprit :

« Oh j'allais oublier. Miss Daray a peut-être renversé tout cela, mais elle avait tout préparé seule. Je retire donc dix points à Gryffondor pour fainéantise. »

Sirius ne s'y intéressa plus et sortit avant de faire une bêtise. Ambre était déjà un mètre devant et semblait les avaler à une vitesse phénoménale. Sirius eut du mal à la rattraper.

« Hey ! Ambre ! Attends ! »

« Lâche-moi Sirius ! Je suis désolée d'avoir tout renversé, mais tu n'avais qu'à m'aider ! »

« Mais je ne t'ai rien reproché ! » démentit Sirius avec bonne foi.

« Tu parles. Tu allais le faire. »

« Mais non, je m'en fous de ça, la Potion ça ne sert qu'à devenir Auror. De toute façon ça ne m'intéresse pas. »

« Alors pourquoi tu me suis ? »

« Pourquoi es-tu en colère ? »

« Oh, tu m'énerves, fous-moi la paix ! »

Sirius lui attrapa le bras et l'immobilisa. Ambre le foudroya du regard.

« Il y a à peine une heure, tu étais aimable, et presque joyeuse. Et là, juste parce que tu as renversé quelques fioles et foutu ta potion en l'air, tu me piques une crise de nerfs… Je ne te suis pas ! Il y a quelques temps, tu aurais éclaté de rire, tout nettoyé, et nous serions allés en retenue ou nous balader dans Poudlard. Et là tu… Tu m'envoies balader en me soupçonnant de t'en vouloir alors que tu sais parfaitement que je m'en moque ! »

« Je suis fatiguée, Sirius, laisse-moi. »

« Tu sais très bien que tu peux me parler. »

« Parler de quoi ? D'elle ? Non. Je n'ai aucune envie de parler d'elle. Et après ? »

« Je ne sais pas. Ça me tue de te voir comme ça, tu comprends ? »

« A plus tard, Sirius. »

Ambre tenta de se défaire de l'étreinte de Sirius mais il resserra sa prise sur son bras.

« Contrairement à ce que tu penses, tu n'es pas seule. Si tu ne veux pas me parler à moi, alors parle à Lily. Mais ne reste pas silencieuse. Je t'en supplie, parle à quelqu'un. Même à Wilkes si tu préfères ! »

Ambre n'eut même pas l'ébauche d'un sourire. En fait, des larmes commençaient à remplir ses yeux. Bientôt, elles se mirent à couler et Sirius se sentit définitivement mal. Que pouvait-il faire ? La prendre dans ses bras ? Ca paraissait si facile quand on le disait. Mais à faire… Et puis les mots d'Ambre lui tombèrent dessus sans crier gare…

« C'est ma faute. »

Sirius ne sut pas quoi dire, ni comment réagir. Bien sûr que ce n'était pas sa faute ! Elle avait tout fait pour ne pas qu'Electre meure, et sa sœur savait parfaitement ce qu'elle faisait. Ce n'était pas sa faute. C'était de la faute de Voldemort. Et de ses Mangemorts.

Ambre laissa tomber sa tête sur le torse de Sirius qui en lâcha son bras.

« C'est ma faute si elle est morte… »

Sirius la prit dans ses bras et la berça lentement.

« Elle ne devait pas mourir. Elle ne voulait pas mourir, elle ne voulait pas défendre Poudlard. C'était ma bataille, pas la sienne. »

« Elle avait fait son choix. » répondit Sirius.

« Elle l'a fait pour moi ! »

« Elle l'a choisi. Elle savait ce qu'elle faisait ! Elle était assez grande pour prendre ses décisions seule. Je pense qu'Electre était loin d'être une idiote sans personnalité. Si vraiment elle n'avait pas eu envie d'aller se battre, alors elle ne l'aurait pas fait. »

« Si j'étais partie… »

« Avec des si on referait le monde. Par exemple, si ma tante en avait, on l'appellerait 'mon oncle', si j'étais moins débile, si Lily pouvait être moins bornée et si Snivellus pouvait être moins bête… On n'a pas fini, hein ? »

Ambre se tut. Sirius sentit qu'elle avait envie de lui dire quelque chose. C'était étrange, mais il sentait qu'elle voulait s'expliquer, dévoiler un secret ou n'importe quoi qui l'aurait soulagée. Mais il n'arrivait pas à discerner tout à fait son sentiment. Et puis il n'avait aucun dont empathique, alors c'était sûrement une impression. Cependant, Ambre sembla se décider. Après deux minutes d'intense réflexion, toujours enlacée contre le corps de Sirius, elle releva la tête.

« Je suis vide, Sirius. »

Il ne sut pas quoi répondre. La seule fois où il avait dû faire face à la mort de quelqu'un, c'était à celle de son père lorsqu'il avait douze ans. Indifférent à son géniteur, il n'avait pas versé une seule larme, même pas à l'enterrement. Sa mère l'avait disputé pour cela, mais une de ses amies lui avait dit qu'il faisait son deuil à sa manière. Pourtant, Sirius ne s'était jamais senti vide, ou véritablement triste. Il n'avait jamais beaucoup apprécié son père, et malgré le lien qui les unissait, M. Black ne lui avait jamais manqué. Jamais il ne l'avait défendu face à sa mère, jamais il ne l'avait étreint, jamais il ne lui parlait… Au fond, il était invisible. Inexistant. Son seul intérêt était son nom de famille. Alors il ne savait pas ce que ressentait Ambre. Il pouvait le comprendre, car on disait que les jumeaux, inconsciemment ou non, partageaient des choses inimaginables, mais il ne pouvait pas le savoir. Alors il ne répondit pas, invitant d'un simple regard Ambre à continuer.

« Je ne m'en étais jamais vraiment rendu compte, mais… Elle était une partie de moi, et même si je ne voulais plus d'elle dans ma vie, j'avais besoin d'elle. Et j'ai besoin d'elle. Mais elle n'est plus là… Elle est morte… »

C'était la première fois qu'Ambre acceptait la chose en disant clairement que sa sœur n'était plus. Jamais elle n'avait dit sérieusement qu'elle était morte, ce qui impliquait qu'elle ne la reverrait plus jamais. Le plus gros du travail était fait. Il fallait désormais qu'elle apprenne à vivre avec. Ce fut ce que Sirius lui dit.

« Je sais, mais c'est dur ! Je m'attends à chaque moment à la voir arriver, à l'entendre me parler, me crier dessus ou me cajoler… Je voudrais encore me disputer avec elle… Et pourtant… Combien de fois ai-je souhaité sa mort ? »

« On ne sait jamais vraiment ce qu'on veut, tu sais. »

« Maintenant, je sais ce que je veux. »

Sirius voulut lui demander ce qu'elle voulait, mais les mots restèrent coincés dans sa gorge lorsqu'il croisa son regard. La haine, la vengeance, la colère, et la cruauté dansaient dans ce regard. Sirius en fut choqué. Où étaient passées la souffrance et les larmes de douleur ? Puis Ambre sembla confuse, toute trace de colère ou de méchanceté disparut de ses yeux noirs, et la maladresse et la confusion les remplacèrent. Sirius se sentit d'avantage mal à l'aise. Elle était sérieuse. Pourquoi être gênée autrement ? Ambre, de surcroît. Ça ne collait plus à son caractère. Ambre était forcément sérieuse. Elle comptait se venger, et ce ne serait pas beau à voir.

La jeune fille raffermit sa poigne sur la bandoulière de son sac et s'arracha de l'étreinte de Sirius. Il ne tenta même pas de la retenir. De toute façon, il ne pouvait rien faire. Juste espérer. Espérer que le meurtrier d'Electre ne ressurgirait pas. Espérer que l'âme d'Ambre s'apaise. Mais lui restait-il seulement son âme ?

« Aurais-tu la capacité de réfléchir Black ? Tu m'en vois tout esbaudi ! » se moqua-t-on.

Sirius leva les yeux. Rogue accoudé au mur, le toisait avec hauteur et un sourire narquois.

« Qu'est-ce que tu fiches l ? Il reste dix minutes avant la fin du cours. »

« Ma perfection est si prononcée que Wilkes m'a laissé partir. »

« Et James ? »

« Il nettoie tout. »

Sirius lui lança un regard noir.

« Et tu es venu me tenir compagnie ? Comme c'est gentil. Tu veux te mêler aux grandes personnes alors… »

« N'échange pas les rôles. »

« Dégage. »

« Tu deviens mal-poli, là. »

« Si j'avais été mal-poli, je t'aurais dit d'aller te faire foutre. Là, j'en suis resté à 'dégage'. Mais puisque tu insistes : va te faire foutre. »

« Tss… Ta manman va être triste de voir son fifils adoré devenir un vilain garçon. Oh ! J'oubliais, Lucrecia le sait déjà… Un Gryffondor chez les Black… Tss… Quel vilain petit canard. »

« Tes parents doivent être ravis de voir que tu es un gentil mouton. En plus, tu es déjà marqu ! Même plus besoin d'appeler les Aurors si jamais tu venais à disparaître. »

Rogue eut un nouveau sourire hautain et narquois.

« Tu es hargneux aujourd'hui… Ta chérie va mal ? Et dire que cette loque est une Serpentard à la famille puissante. Ça ne m'étonne pas qu'elle traîne avec toi ! »

C'en fut trop pour Sirius. Sa réaction fut débile, mais il saturait depuis quelques temps. C'était la goutte qui avait fait déborder le chaudron. Il se jeta sur lui, le plaquant violemment contre un mur. Il entendit un des os de Rogue craquer, et jamais il ne l'avouerait, mais cela lui fit plaisir. Il sentait la peur de Rogue, il sentait sa colère, mais son impuissance. Et il aimait ça.

Rogue, cependant, trouva Sirius ne sut où, le courage (ou la fierté) de retrouver son abominable rictus satisfait et méprisant.

« Tu es aussi sombre que ton nom Black. Et quoi que tu fasses pour t'en défaire, ce sera vain. »

« Merci pour cette brillante explication sur ma psychologie. Je te dois combien ? »

Rogue le foudroya du regard,

« Quant à Ambre, Snivellus, c'est toi qui a tué sa sœur. »

« Mais bien sûr, évidemment, je lui ai jeté un sort de mort devant tout le monde. »

« Tu vois très bien de quoi je veux parler. »

Il était autant coupable que Voldemort, ou que l'assassin d'Electre. Il valait même moins qu'eux. Parce qu'il savait. Parce qu'il savait que les Mangemorts allaient attaquer, parce qu'il savait qu'il y aurait des morts, parce qu'il savait que les professeurs ne pourraient pas venir l'aider. Il avait contribué à la mort d'Electre, et à la destruction psychologique d'Ambre. Il était coupable. Ces trois mots résonnaient dans sa tête : « Il est coupable ». Comme une danse folle dans sa tête, ces trois mots qui tournaient et tournaient dans sa tête, sans relâche.

Il fallait qu'il paye. C'était la seule solution. Ça ne le rachèterait pas, mais ce serait à égalité.

Sirius se sentait comme fou. Il venait de trouver la solution pour calmer sa colère, sa peine et sa douleur. Il avait trouvé le moyen de venger un peu Ambre. Ça ne valait pas le Mangemort qui avait pris la vie de sa sœur, mais c'était déjà ça. Il fallait qu'il paye. Ces mots virent s'ajouter aux autres, comme une chansonnette « Il est coupable, il faut qu'il paie ». Cela lui semblait si évident !

Rogue dut voir son regard, à la fois hanté par les yeux d'Ambre et fou de trop de choses pour être totalement décrites, car il se tendit davantage et laissa l'inquiétude filtrer son masque de cynisme et d'indifférence.

Sirius sourit de voir que Rogue était déstabilisé. Il allait payer. Il avait trouvé le moyen efficace.

« Tu nous suis depuis pas mal de temps, n'est-ce pas ? Si, si, Snivellus. Depuis le début de l'année tu nous suis. Tu es aussi discret qu'un dragon dans Honeydukes. Tu veux connaître le secret de Remus, n'est-ce pas ? »

Sirius vit que Rogue sentait le piège. Il le vit, c'était évident. Mais la curiosité de Snivellus était piquée à vif. La folie de Sirius semblait le rendre capable de lui dévoiler le secret de Remus Lupin, et c'était indéniable que Rogue voulait savoir. Il lui manquait certaines données pour être sûr de ce qu'il croyait. Black allait-il lui donner satisfaction ?

Rogue hocha la tête. Plus la peine de mentir.

« Ah… Alors Snivellus veut connaître le secret de Remus J. Lupin… »

La chanson se répétait dans sa tête « Il est coupable, il doit payer », sans cesse, sans s'arrêter. Sirius lâcha Rogue et passa son bras autour de ses épaules, le regard plus fou que jamais.

« Viens, je vais t'expliquer comment il faut faire… »

Fin du chapitre 21.

Réponses aux reviews :

Eiream : lol ! Ta review me fait rire. Comme je ne connais pas les mystères que tu voudrais voir éclaircir, je peux même pas te mettre sur la voie. Quant au traître… Gniark gniark gniark. Je sais pas trop si ça se voit ou pas. Je laisse quelques indices par ci par là, mais si vous avez trouvé qui c'est, s'il vous plaît, taisez-vous. Merci.

Kimmy : Merci pour les commentaires. Ça me touche.

Broack Dincht : MDR !! Rien à faire, je ne m'en remets pas de ta review ! Je l'adore ! Encore, encore ! Oui, des discussions à trois ! Je veux !! J'adore, vraiment. Surtout quand tu insultes ton autre toi. C'est… Fantastique. Vraiment. Vive l'électre-icité. Elle est toujours aussi morte. Bisous.

Sinwen : Bravo ! C'est bien que tu aies compris pour Ambre. C'est super ! Voilà la suite !

Hedwige93 : J'écris deux chapitres à l'avance parce que bien que j'aie fait un synopsis, il ne me sert à rien puisque je ne le suis pas et que je le modifie constamment. Donc pour pallier à des changements d'humeurs malencontreuses qui colleraient pas avec le passé ou qui tomberait comme un cheveu sur la soupe, je garde un moyen de modifier quelques trucs au cas où. Electre l'a emportée avec elle, ça veut dire que sans Electre, Ambre n'est rien et effectivement qu'elle voudra la venger et patati et patata. Merci pour tes encouragements.

Solly : triste le chapitre 20 ? Mouais, je trouve pas spécialement, moi.

Merci à tous les reviewers d'avoir pris le temps de reviewer et à toutes les personnes qui lisent dans le silence. Vraiment merci.

Kazy

Preview chapitre 22 :

Une folie passagère, une amitié gâchée, des blessures plus profondes à l'intérieur qu'elles ne le seront jamais à l'extérieur.

Chapitre 22 : La rancune de Rogue : POV James.