Les personnages, lieux et événements que vous reconnaîtrez ne m'appartiennent pas. Ce ne sont que des marionnettes pour mon esprit torturé.
Avertissements : ce chapitre ( comme le précédent ) aborde des sujets graves ( torture, meurtre ) qui peuvent heurter la sensibilité de certain(e)s. Vous êtes prévenu(e)s.
Bonne lecture.
Le Loup à la Lune.
1ère partie : Et Arthur devint roi ...
Chapitre 6 - Et si tuer était un art ...
Le soleil n'était pas encore levé et Tristan chevauchait déjà depuis des heures. Il n'avait pas dormi cette nuit.
Arthur l'avait envoyé en mission de reconnaissance, pour surveiller l'avancée des Saxons, mais il n'avait encore détecté aucune trace d'eux. Apparemment, ils n'étaient pas aussi proches que le commandant l'avait craint.
L'éclaireur arrêta son cheval dans un endroit sûr et sauta à terre. Il ramassa de la neige et se la passa sur le visage pour se réveiller… comme il l'avait fait pour Mordred …
Tristan s'adossa à un arbre et laissa son esprit vagabonder. Des images des heures précédentes lui revinrent en mémoire.
Il revoyait la Scot attirer le garde romain, Octavius, dans la forêt. Assez loin pour ne pas risquer d'être dérangés ou surpris. Il les revoyait se tourner autour comme des fauves.
Lui. Epais et brun. Le nez cassé et la mâchoire tenue par un linge. L'air vil et presque grotesque dans sa lourde armure romaine.
Elle. Petite et légère. Ses cheveux blonds emprisonnés dans une longue tresse qui semblait briller sous les premiers rayons de la lune. Le corps agile et gracieux dans sa chemise trop grande.
Ils avaient parlé.
Lui. Proférant des insultes. Peignant de sa voix étouffée des scènes obscènes. Racontant le long calvaire de sa victime disparue.
Elle. Contenant difficilement la rage qui la consumait. Répliquant dans un mélange incohérent de latin et d'une langue que Tristan ne comprenait pas, cette même langue dans laquelle elle avait chanté cette autre nuit.
L'éclaireur s'était contenté d'observer. De s'assurer qu'ils ne seraient pas dérangés et que le Romain ne tenterait pas de s'enfuir.
Il n'était pas intervenu. Il n'en avait pas le droit. C'était son combat à elle. Pas le sien. Ils le savaient tous les deux et elle ne lui avait pas demandé son aide.
Elle n'en avait pas eu besoin de toute façon.
Tristan avait pu admirer avec quelle agilité elle parait les coups du Romain, et avec quelle précision elle portait les siens.
Il avait apprécié à sa juste valeur le don évident de la jeune fille pour le combat. Un don surprenant pour une femme, et qu'il n'avait trouvé que rarement chez les hommes.
En tous cas, pas de manière aussi évidente et … artistique.
Tristan sourit. Oui. Artistique. C'était le mot.
Et si tuer était un art – comme l'éclaireur se plaisait à le penser – Mordred était certainement le meilleur artiste qu'il avait jamais eu l'occasion de rencontrer. Hommes et femmes confondus.
Oh, bien sûr, il avait rencontré de grands combattants, et ses camarades Sarmates étaient de loin les meilleurs guerriers de tout l'Empire.
Mais il doutait qu'aucun d'eux puisse jamais atteindre une telle perfection, une telle … intimité avec la mort.
Bors aimait la bagarre et en provoquait beaucoup. Et Gauvain n'était pas en reste quand il s'agissait de foncer tête baissée dans la mêlée.
Lancelot, lui, avait une conception plus esthétique du combat. Il maniait toujours ses épées avec élégance. Il voulait prouver au monde qu'il était le meilleur. Dans tous les domaines.
Dagonet ne s'embarrassait pas de style. Il tuait par obligation. Pour défendre ses frères d'arme.
Quant à Galaad, il se battait par devoir. Parce qu'il n'avait pas d'autre choix. Et en cela, il ressemblait beaucoup à Arthur.
Arthur. Leur commandant. Leur chef de guerre. Il était peut-être celui qui appréciait le moins les batailles. Il considérait le fait de se battre comme un moyen pour atteindre un idéal.
Tristan ricana. Souvent, il s'était demandé quel idéal Arthur pouvait bien voir par delà les champs de bataille encore fumants, quand l'air empeste la chair morte et que la terre ruisselle de sang.
Tristan, lui, avait vu tout sentiment d'idéal le quitter au fur et à mesure des batailles et des morts.
Il avait appris à aimer tuer. Pas pour ce que tuer tel ou tel ennemi pourrait apporter au monde, non. Tuer pour le simple plaisir de tuer.
Il aimait sentir la lame de son épée trancher une chair étrangère. Il aimait voir le sang couler le long des flèches qu'il décochait.
Il aimait jusqu'au bruit sourd, presque imperceptible, de ses couteaux s'enfonçant dans un corps ennemi.
Galaad lui avait souvent reproché son goût du sang. Mais ses reproches s'étaient toujours heurtés au cynisme de l'éclaireur. Si le jeune blanc-bec voulait se persuader qu'il pourrait oublier les cadavres laissés derrière lui et vivre paisiblement, sans remords, c'était son problème.
Tristan, lui, avait accepté son destin. Il l'avait embrassé. Il vivait et mourrait sur les champs de bataille. Dans la chair et le sang.
Cette conviction était la flamme qui l'animait. Et c'était cette même flamme qu'il avait vue dans les yeux de Mordred cette nuit-là.
Quand elle avait transpercé le Romain en pleine poitrine. Quand elle avait roué de coups le corps encore tremblant de son ennemi. Quand elle lui avait arraché la langue et les yeux. Quand elle avait tranché le sexe encore frétillant de sa proie et l'avait enfoncé dans sa gorge en riant, étouffant un dernier cri d'agonie.
Les prédateurs se reconnaissent entre eux …
Les mots de Lancelot résonnèrent dans sa tête. Oui. Il avait raison. Tristan avait reconnu Mordred.
Il avait reconnu en elle la même flamme qu'il portait au fond de lui. Il avait reconnu en elle une sœur. Sa sœur de chair et de sang.
Et quand elle s'était enfin immobilisée, assise sur le torse inerte de ce qui avait été un Romain, un homme ; quand il l'avait vue haletante, perdue dans l'extase de son art, il avait su ce qu'il devait faire.
Lentement, il l'avait assise dans la neige et avait traîné le cadavre du Romain plus loin dans la forêt. Il l'avait caché de sorte que personne, jamais, ne puisse le retrouver.
Il avait méticuleusement effacé la moindre trace de son passage et, une fois revenu dans la clairière qui avait abrité le combat, il avait recouvert les flaques de sang avec de la neige vierge.
Alors, il s'était agenouillé près de Mordred, s'était assuré qu'aucune de ses blessures ne s'était rouverte, puis, doucement, il avait nettoyé son visage ensanglanté avec cette même neige immaculée.
Elle avait fermé les yeux et s'était laissée faire. Sans rien dire.
Ils étaient restés un long moment dans le silence de la nuit, assis dans la neige, Tristan prenant grand soin d'effacer la moindre trace de sang impure du visage de Mordred. De ses cheveux. De son cou. De ses mains.
Une fois sa tâche achevée, il avait passé sa main refroidie par la neige sur la joue de la jeune fille.
Elle avait ouvert les paupières et avait levé la tête vers lui, posant sur son visage son regard encore vague.
Puis, peu à peu, ses yeux si bleus s'étaient animés et il avait su qu'elle le voyait enfin. Elle avait cligné plusieurs fois des paupières avant de sourire.
Et un vague sourire avait effleuré les lèvres de l'éclaireur en réponse, tandis qu'il l'aidait à se relever et qu'il recouvrait son corps frêle et tremblant de sa lourde cape …
THUNK
Tristan cligna des yeux. Il reconnut tout de suite le bruit sourd qui avait percé le silence de la forêt. Le bruit d'une flèche qui atteint son but.
Il prit son arc, laissa son cheval à couvert, et se dirigea vers l'endroit d'où provenait le bruit.
Dissimulé derrière un arbre, il vit une grosse brute blonde et barbue, recouverte de fourrure – un Saxon de toute évidence – debout au milieu d'une étroite clairière, face à un arbre dont le tronc avait été recouvert d'une armure romaine.
Le Saxon tenait dans ses mains une grosse arbalète. Il en tendit la corde, visa, et décocha une flèche qui transperça l'armure et se planta profondément dans l'arbre.
Il ne semblait pas avoir remarqué la présence de Tristan, et l'éclaireur décida d'en profiter.
Il banda son arc et une première flèche atteignit le Saxon en pleine gorge, l'empêchant de crier tandis qu'une seconde flèche lui transperçait la poitrine.
Tristan s'approcha alors avec précaution et ramassa l'arbalète qu'il examina avec attention.
Ca intéressera sûrement Arthur …
Des éclats de voix l'arrachèrent à son étude. Apparemment, le Saxon n'était pas seul.
Tristan accrocha l'arbalète sur son épaule puis dégaina et se prépara à tuer.
Quand Tristan arriva au campement au galop, il fut accueilli par la voix enjouée de Bors.
" Combien en as-tu tué ? "
" Quatre. "
" Pas mal pour commencer la journée ! "
L'éclaireur sourit imperceptiblement au commentaire de son ami avant de jeter l'arbalète aux pieds d'Arthur.
"Ca transperce les armures. "
Le regard du commandant trahissait ses inquiétudes.
"Ils sont loin ? "
" Ils seront là avant la nuit. "
Arthur jeta un regard à Lancelot avant de répliquer.
"Que tout le monde se prépare à partir ! Tristan, tu passes devant. "
L'éclaireur acquiesça et s'apprêtait à obéir, quand il remarqua la scène étrange devant lui.
Le corps sans vie de Marius gisait dans la neige, une flèche plantée en plein cœur. Dagonet et Mordred, l'épée à la main, surveillaient étroitement les gardes romains, étonnamment désarmés.
Et chose encore plus curieuse, Guenièvre regagnait son chariot, un arc à la main.
Mordred parut remarquer le regard interrogateur de Tristan et s'approcha de lui, le sourire aux lèvres.
"Vous vous êtes bien amusés pendant mon absence. "
" Dis ça au Romain ! Je crains qu'il n'ai pas la même conception du mot « s'amuser » que nous ! "
" Je ne pense pas que les problèmes de définition l'intéressent beaucoup dans son état. "
La Scot ricana.
" Qu'est-ce qui s'est passé ? "
" Je te raconterai peut-être, si tu es sage ! "
Elle rengaina son épée et se dirigea vers les chariots.
Tristan la suivit des yeux et se mit en route.
J'espère que ce chapitre vous a plu.
Je ne remercierai jamais assez celles qui prennent le temps de laisser des reviews ( soyez bénies jusqu'à la fin des temps ! ).
Thaele Ellia : heureuse que tu n'es pas été choquée. Et rassure-toi : je suis au moins aussi fleur bleue que toi, et les choses vont évoluer entre Tristan et Mordred ... petit à petit ( et plus vraisemblablement à partir de la deuxième partie de ma fic, qui prendra place après la fin du film ).
Sereg : merci pour ta fidélité. Et comme tu as pu le voir, ta question trouve une réponse dans ce chapitre ( et oui, Mordred est vraiment une très, très vilaine fille ).
Kestrel : désolée d'écourter ton nom, mais il est vraiment trop compliqué pour mon petit cerveau. J'espère que tu continueras à lire mon humble fic et à me donner ton avis.
Et un grand merci à Ultimate-Darcy, mon irremplaçable bêta-reader.
Biz et à bientôt pour de nouvelles aventures.
Le Loup à la Lune.
