• (La Marque de l'Ange) •
Tadaaaaam…
Pour ce chapitre, voici le personnage principal de l'histoire (bon, d'accord, le deuxième personnage principal avec Harry) qui explique une partie de l'intrigue et mon pseudo à l'occasion. Suivez bien parce qu'il arrive dès le début. Oui, là tout de suite maintenant.
Bonne Lecture.
Chapitre 5 :
Laisse-moi te raconter son histoire
Une douleur fulgurante lui traversa la cheville, sembla se propager dans toute sa jambe, foudroya son mollet puis, enfin, se dissipa. Ce fut à cette seule douleur qu'elle eut droit en guise de réveil.
Les yeux ouverts, la respiration précipitée, elle resta un long moment à fixé un plafond blanc et écaillé sous lequel elle ne se souvenait pas s'être endormie. Emergeant à peine de la tiédeur de son sommeil, elle déplia ses doigts engourdis –discrètement- puis fouilla à tâtons les alentours.
Les draps qui la couvraient et la mollesse du matelas qui reposait sous elle ne laissaient pas à douter qu'on l'avait déposée dans un lit. Les vêtements qui la recouvraient n'étaient pas les siens. C'était long, confortable, frais, et semblait être proche d'une longue chemise de nuit. Sans quitter le plafond des yeux, elle effleura du bout des doigts les fines bandelettes qui pansaient ses poignets. Prenant garde à ne pas faire de bruit, elle sortit ses bras de sous les draps et porta ses mains à son visage, traça le contour de ses yeux, glissa un doigt sur son nez, sur ses lèvres avant de reposer ses bras le long de son corps.
Au même instant, un léger sifflement retentit un peu plus loin dans la pièce et quelques secondes plus tard, une forte odeur de menthe se répandit au-dessus d'elle. Instinctivement, Ange –car c'était son nom- ferma les yeux. Si quelqu'un se trouvait ici, autant qu'il la croie endormie.
Mais il n'y eut aucun autre signe de présence humaine. Pas un bruit, pas un murmure, pas un froissement de tissu, juste cette forte odeur de menthe qui embaumait toute la salle.
Cinq minutes se passèrent sans que rien ne se passe. Ange restait là, les yeux fermés, l'oreille aux aguets, comptant plus que jamais sur son ouïe hors norme. Mais rien.
Alors, d'un mouvement de jambes, elle se débarrassa des couvertures qui tombèrent sur le sol. Autour d'elle, tout était toujours silencieux. Sans plus hésiter, le cœur plein d'espoir et de fuite, elle bondit à bas du lit, prête à s'échapper de cet endroit inconnu quand la vision d'un homme la frappa d'horreur.
Grand et mince, le cheveu noir, tombant jusqu'aux épaules, et le teint étrangement blafard, l'homme n'avait rien de charmant dans son charisme. Il était même plutôt laid, malgré la droiture avec laquelle il se tenait, dans son étrange robe noire qui traînait sur le sol.
Pendant une fraction de seconde, un éclair de surprise passa à travers les iris noirs de l'inconnu à la vue de la jeune blessée.
- On m'avait dit que vous excelliez dans l'art de la discrétion, fit-il en s'approchant. Je ne pensais pourtant pas que vous puissiez vous lever sans que je ne l'entende.
Muette d'effroi, Ange recula d'un pas et heurta le rebord du lit qu'elle venait de quitter. L'autre venait de contourner les autres couches qui s'alignaient contre un mur et se tenait à présent juste devant elle.
- Vos plaies sont cicatrisées maintenant, reprit-il avec le même ton froid et métallique. Elles n'étaient pas profondes. Je suppose que vous n'ignorez pas ce qui en est à l'origine…
Ange ne répondit pas. Un sourire carnassier déforma la ligne fine qui dessinait les lèvres de l'homme tandis qu'il faisait mine de reculer.
- Recouchez-vous, je doute que vos jambes puissent vous porter longtemps. Je vais chercher le directeur…
- Inutile, Severus, fit une deuxième voix.
Ange et l'homme se tournèrent d'un seul mouvement vers la porte d'entrée. Là, se tenait le personnage le plus étrange qu'Ange n'ait jamais vu. Grand et svelte, le corps couvert d'une longue robe de velours bleue nuit, c'était un homme très vieux, avec un visage ridé, et deux yeux bleus aussi limpides qu'une eau de clairière. Tels ces magiciens que l'on rencontre dans les contes, il portait de longs cheveux, une moustache et une longue barbe argentés qui lui descendaient jusqu'à la ceinture. Sur sa tête était posé un chapeau de velours, assorti à sa robe.
Le vieil homme entra d'un pas tranquille dans la salle et adressa un bref signe de tête vers le dénommé Severus. Puis, se tournant vers Ange, il afficha un franc sourire auquel elle ne répondit pas.
- Bonjour.
- Qui êtes-vous ? interrogea-t-elle, avec tout le venin qu'elle pouvait mettre en trois mots.
De toute évidence, le vieil homme ne sembla pas s'en offusquer le moins du monde. Elargissant d'avantage son sourire indulgent, il reprit avec le même ton de discussion :
- Je suis le directeur du collège de Poudlard, où tu te trouves d'ailleurs. Je pense qu'on a déjà du évoquer devant toi le nom d'Albus Dumbledore…
Ange fut parcourue d'un frisson et planta son regard farouche dans les yeux scintillants de Dumbledore. Effectivement, on lui avait déjà parlé de Dumbledore. Mais comment, lui, pouvait-il le savoir ?
- Qui me dit que vous n'êtes pas un imposteur ?
Cette fois, Dumbledore afficha une mine surprise. Ange suivit le contour de son lit, s'éloignant un peu plus de lui :
- Il y a beaucoup de choses en ce monde que j'ignore, mais je me doute des facultés que vous avez. Je les ai vu faire des choses qui défient l'imagination ; vous seriez capable de prendre l'apparence de quelqu'un d'autre sans que je ne m'aperçoive de la duperie. Et puis si vous étiez le vrai Dumbledore, qu'est-ce que ça changerait ? Entre eux ou vous, qu'y a-t-il de différent ?
- Beaucoup de choses, Ange.
Elle sursauta à l'entente de son prénom.
- Tu te fais une mauvaise opinion de ce que sont les sorciers. Tu ne connais qu'une facette de notre communauté…
- Et je ne veux pas en connaître d'avantage !
- Tu…
- Non ! Toute ma vie, j'ai attendu ce jour. Je n'ai vécu que dans l'attente du jour où je saurai. Je croyais en vous, je croyais en ce monde ! Je me raccrochais à cet espoir, j'espérai chaque seconde connaître mon autre identité. Aujourd'hui, je voudrais que ce jour n'ait jamais existé !
Elle balaya les alentours du regard, reculant d'avantage. Si tôt qu'elle vit la porte ouverte, elle bondit derrière Dumbledore et se rua vers la sortie. Elle n'avait pas atteint le couloir qu'une main la saisit par le bras et la retint en arrière avec une poigne de fer. Ange se tourna brusquement vers le sorcier en noir et lui fis face de ses grands yeux noyés de peur.
Alors, comme s'il avait tenté de retenir de l'eau avec ses mains, la jeune fille se libéra de ses doigts et prit la fuite.
Le couloir dans lequel elle s'engagea était long d'une dizaine de mètres, s'achevant dans un tournant et où débouché un escalier dont elle ne voyait que les premières marches.
Elle stoppa et inspecta les alentours. Tout lui était inconnu, jusqu'aux portraits qui changeaient constamment de cadre et qui se massaient près d'elle. Elle sentit sa panique accroître, d'un commun accord avec les battements de son cœur. Où aller ?
- Ange !!
Derrière elle, les deux sorciers venaient de faire irruption dans le couloir. Le premier, celui qui se prénommait Severus, tenait dans sa main droite un bâton long et fin, visiblement en bois. Cette baguette, elle en avait déjà vu de semblables dans la main d'autres personnes et connaissait le mal qu'elles pouvaient faire.
Sans plus hésiter, elle tourna sur elle. Mais devant se tenait maintenant une troisième personne contre laquelle elle se cogna avec force. Elle tituba quelques pas en arrière et dévisagea le troisième venu. Son cœur sembla alors se figer, sa respiration de bloqua quelque part dans sa poitrine, de même que le Temps.
C'était un garçon. Bien que plus grand qu'elle d'une quinzaine de centimètres, il ne semblait pas excessivement plus âgé. Sa silhouette mince et chétive flottait dans des vêtements trop grands et il paraissait tout aussi déboussolé qu'elle. Son visage était fin, lisse, et avait quelque chose de maladif. Ses cheveux noirs et désordonnés lui tombaient sur les oreilles et le front avec une sorte de sauvagerie farouche. Ses grandes lunettes rondes laissaient à penser qu'il souffrait d'un grave problème de myopie mais derrière elles, Ange fit face aux deux yeux les plus beaux qu'elle n'eut jamais rencontrés. Ils semblaient être deux amandes taillées dans l'émeraude, tels un cadeau fait par les dieux, seul présent pour ce pauvre garçon à l'air si triste. Dans ce regard d'émeraude, elle pouvait lire une multitude de choses, allant de la surprise à la douleur, de la curiosité à l'admiration, de la douceur à la puissance. Il y avait quelque chose d'étrange, quelque chose de réellement magique dans ce regard.
Et puis, entre les mèches indomptables du jeune homme, une fine cicatrice zébrait son front, comme l'éclair dans le ciel les jours de mauvais temps. De la blancheur de sa peau, elle se démarquait par une teinte légèrement rougeoyante, tel que le sont toutes les blessures, presque sanguinolente. Cette cicatrice n'était pas une marque ordinaire, elle le sentait. Ce n'était pas une plaie temporaire, elle faisait partie de lui. Il avait du voir le jour avec cette cicatrice sur son front, ou à défaut, l'avoir depuis sa plus jeune enfance. Elle faisait partie de l'ensemble, elle était lui, c'était inexplicable.
Ange se sentait irrémédiablement attirée par cette cicatrice. Cet éclair de sang, cette déchirure particulière. Quelque chose s'éveillait en elle au vu de la cicatrice, elle le savait sans pouvoir l'expliquer. Comme un souvenir qui ne lui appartenait pas vraiment. Sans qu'elle ne contrôlât plus vraiment ses gestes, sa main frêle et timide se leva jusqu'à la joue du garçon, toujours aussi surpris, aussi curieux, et aussi silencieux.
Il ne tenta pas d'arrêta son bras qui se levait, tout aussi subjugué qu'elle. Il ne l'arrêta pas non plus lorsqu'elle posa le bout de ses doigts sur sa joue. Il la laissa remonter jusqu'à ses yeux, caresser timidement les traits de son visage, dessiner du bout des ongles le contour de ses yeux et arriver enfin sur la dite cicatrice. Ange en traça la forme, fébrilement, l'examina du regard, les yeux grands ouverts, le cœur toujours aussi inactif, et le Temps qui ne revenait pas.
Harry leva soudainement sa propre main et attrapa celle de la jeune inconnue. Il la retira de son visage, pour qu'elle ne lui cache plus les yeux, et la laissa retomber le long de leurs corps. Mais il ne la lâcha pas. Leurs regards se croisèrent. Quelque chose frémit sur sa nuque. Harry garda la main fragile entre les siennes. Elle était fine, féminine, gracieuse, et tellement froide.
Elle, elle continuait de le fixer de ses grands yeux verts. Mais ces yeux verts-là n'étaient pas les mêmes. S'ils n'étaient pas deux émeraudes, ils étaient un champ de verdure. Ou le feuillage d'un arbre, peut-être. Plus clairs que l'émeraude, tout aussi brillants, et pleins de charme, ils étaient entourés de longs cils foncés qui battaient de temps à autres, fermaient ses paupières pour un millième de seconde, puis se rouvraient et faisaient paraître, plus beaux encore, ses yeux pleins de printemps.
Cette fille était le printemps même. Jusqu'aux champs de blés qui faisaient ses cheveux, et tombaient jusque dans son dos avec la grâce de rayons de soleil. C'était une fleur. Une fleur au teint blanc, diaphane, délicat, aux joues à peines plus rosées, aux lèvres roses comme des pétales d'amandier. C'était une fleur blessée, une fleur coupée. Son corps gracile reposait dans une longue robe blanche, qui descendait jusqu'à ses chevilles et dont les manches évasées s'aboutissaient à demi bras. Un ruban blanc serrait sa taille, pourvu d'un large noeud mal fait. Des bandelettes entre le blanc et le gris s'enroulaient autour de ses poignets et de ses chevilles et les extrémités des bandages pendaient misérablement de chacun de ses membres.
Mais il y avait quelque chose d'autre dans ses traits délicats, quelque chose du plus sombre, ou du moins, quelque chose qu'Harry ne connaissait que trop bien, quelque chose de sinistrement familier. Une partie de sa raison ne voulait pas l'admettre, et pourtant c'était là, devant lui. Cette fille lui ressemblait, à Lui. Le Lui d'il y a si longtemps.
Harry étreignit un peu plus fort la main fragile sur laquelle il avait emprise. Sa blondeur, sa grâce, mais aussi sa pureté et sa clarté la différenciaient de Lui. A première vue, en tous cas. Mais leurs yeux étaient les mêmes, aussi nettement qu'Harry puisse s'en souvenir. Leurs regards, surtout, étaient identiques. Dans les traits de son visage, le dessin de son nez, de ses joues, de son menton, elle lui ressemblait encore. Quoiqu'elle fasse, quelque soit sa façon d'agir, d'observer, de se mouvoir, quelque soit l'angle d'où Harry la regardait, il n'y avait plus aucun doute : tout en elle trahissait sa ressemblance avec Tom Jedusor.
Pendant un bref instant, Harry songea que cette inconnue et Jedusor n'étaient qu'une seule et même personne. Peut-être était-ce le vrai Voldemort qui se tenait devant lui, sous l'apparence d'une jeune fille ? Mais il réfuta cette idée. Si ça avait été le cas, sa cicatrice l'aurait brûlé et Harry avait une confiance aveugle en sa cicatrice. Alors qui était-elle ?
Une main se posa sur l'épaule d'Harry, le ramenant aussitôt à la réalité. Il s'agissait de celle de Dumbledore qu'il n'avait pas vu arriver. Immédiatement, la main d'Harry lâcha celle de la jeune fille.
- Professeur…
- Je sais, Harry, coupa-t-il avant qu'Harry ne puisse vraiment s'exprimer. Je sais ce que tu as compris.
Les yeux du directeur brillaient étrangement. Harry n'était pas si sur d'avoir tout compris. Mais avant qu'il n'ait pu protester, Dumbledore se dirigeait d'un pas timide et voulu rassurant vers l'inconnue.
- L'Enchanteresse est dehors, fit-il à mi-voix. Elle t'a menée ici dans la nuit. Tu peux aller la voir si tu veux.
Elle leva la tête vers lui, et le dévisagea un instant. Son regard s'était adouci, comme ému. Puis elle acquiesça timidement du chef et suivit le directeur. Harry la vit à peine s'éloigné, encore bouleversé de la rencontre, et regarda d'un air absent les pans de sa robe blanche se soulevait au rythme de ses pas. Ce ne fut seulement une fois qu'elle et Dumbledore disparurent à l'angle du couloir qu'il réalisa réellement leur départ.
Derrière lui, une porte claqua et Rogue le dépassa à grandes enjambées, lui adressant au passage un regard inquisiteur. Harry quant à lui fis demi tour et repartit s'enfermer dans la salle commune de Gryffondor.
Comme à chaque fois qu'il longeait les corridors de Poudlard, les portraits du château l'interpellèrent sur son passage et cette fois plus que jamais, ils semblaient décidés à engager une discussion.
- J'ai entendu le tableau du rez-de-chaussée parler d'un nouveau garçon… disait la peinture qu'Harry reconnut comme la représentation allemande du Baron Von Grünfrosch.
- Mais non ! rétorqua une sorcière pompeusement habillée. La Sorcière Jaune est une bonne amie à moi, elle dit qu'il s'agit d'une fille.
- Le Professeur Rogue la portait, affirma un autre.
- Vous la connaissez ? fit un portrait en fixant Harry au milieu du brouhaha des autres tableaux.
Et comme Harry ne répondait pas, le Baron Von Grünfrosch répliqua sèchement :
- Je suis sur qu'il n'a même pas été tenu au courant ! En quoi cela peut-il concerner un adolescent de quinze ans ? Non, ne nous éloignons pas mon cher, Dumbledore sait très bien qu'il n'est pas prudent –ni nécessaire- de tenir au courant un tel enfant des affaires qui ne le regardent pas.
Harry lui lança un regard noir et accéléra le pas.
La salle commune était aussi froide et sans vie que lorsqu'il l'avait quittée. Le feu était mort dans l'âtre de la cheminée et Harry ne prit pas la peine de réanimer les braises. Il alla s'installer dans un des fauteuils défoncés de la pièce et replia ses jambes qu'il enlaça des deux bras.
D'une certaine manière, Grünfrosch n'avait pas tord : Harry n'était tenu au courant de rien. S'il n'était pas descendu pour prendre son déjeuner, il n'aurait jamais croisé cette étonnante jeune fille. Si le hasard n'avait pas forcé la rencontre, Harry concevait qu'il ne l'aurait jamais vue. Et pourtant cette étrange ressemblance avec Voldemort, cette proximité de l'Enchanteresse… N'était-il pas, lui, Harry, suffisamment impliqué dans la guerre pour avoir le droit d'être mis au courant ? N'était-il pas aussi un membre de l'Ordre ?
Harry enfouit son visage dans ses genoux. Les flammes ronflèrent de nouveau dans la cheminée.
Quelques heures plus tard, Harry fut tiré de sa rêverie misérable par les protestations affamées de son estomac. S'arrachant avec peine du confort du fauteuil, il quitta la salle commune et prit le chemin de la Grande Salle. Cette fois, les portraits lui accordèrent silence, peut-être était-ce du aux regards courroucés qu'il intima.
Il était midi et pourtant, la Grande Salle n'était occupée que de McGonagall. Elle lisait la Gazette du Sorcier et d'une autre main, mangeait distraitement les petits pois qu'elle s'était servie. Elle ne leva que très brièvement les yeux de son journal pour saluer posément le nouvel arrivant. Harry répondit vaguement et s'installa à ses côtés.
Il se passa quelques minutes sans qu'aucun bruit ne se fit, hors mis le tintement des fourchettes sur les assiettes, puis, dans un froissement de papier, McGonagall replia le journal et le posa calmement à l'autre bout de la table.
- Le directeur vous fait savoir que lui et Mademoiselle Ange sont partis au Quartier Général de l'Ordre.
En disant cela, elle avait baissé la voix, comme si elle avait peur qu'on ne l'entendît. Elle redressa ses lunettes sur son nez osseux et continua son repas.
Harry ne connaissait aucune personne qui portait le nom d'Ange, bien qu'il se doutait déjà qu'il s'agissait de la jeune fille de tout à l'heure. Ainsi, Ange et Dumbledore étaient partis pour la demeure de Sirius sans l'y convier. Harry en fut comme électrocuté. De quel droit cette jeune inconnue pouvait-elle assister aux réunions de l'Ordre alors que lui, Harry, avait du faire face à la franche hésitation de ses aînés ? Et pourquoi, maintenant qu'il avait été clairement accepté comme membre de l'Ordre du Phoenix, n'était-il pas lui aussi chez Sirius ?
Harry reposa brusquement sa fourchette, repoussa son assiette et se leva. Il n'avait plus faim.
Ne se préoccupant que très peu des sourcils froncés de son professeur de métamorphose, il traversa la Grande Salle en sens inverse, se glissa dans l'ouverture et disparut dans le couloir. Aveuglé par sa rancœur, il ne vit pas ses pas le conduire jusqu'au parc de l'école. Inconsciemment, il avait ressenti le besoin de prendre l'air, de ne plus pouvoir être enfermé. C'en était presque frustrant de savoir, qu'il y a quelques semaines, lorsqu'il était encore à Privet drive, il aurait tout donné pour être ici.
Le parc était toujours aussi silencieux, immobile et lourd de chaleur. Le soleil à son zénith frappait l'air de rayons chauds et étouffants et la pelouse n'était à présent plus qu'une vaste étendue d'herbes séchées et jaunâtres. Parmi les fleurs, l'absence du garde-chasse se faisait plus que jamais remarquer.
Harry traversa la verdure morte, irrémédiablement attiré par la fraîcheur du sous-bois. En ce jour d'été, l'orée de la Forêt Interdite avait quelque chose de rassurant. Elle avait perdu son obscurité et ses premiers arbres rayonnaient de clarté, sous le soleil ardant. Les feuillages offraient ombre fraîcheur et une brise tiède soufflait entre les arbustes.
Les mains dans les poches, Harry alla s'installer sous un Eglantier Nocturne dont on disait qu'il prenait toute sa beauté au coucher du soleil. La brise ébouriffa ses cheveux, les décoiffant un peu plus. Des mèches lui tombèrent dans les yeux et il les repoussa d'un geste de main.
Derrière lui, la Forêt se fit plus agitée. Le vent soufflait plus fort, les chants des oiseaux étaient plus présents, la Vie semblait bouillonner de chaque recoin. Harry n'en prit pas garde mais lorsque des pas se firent entendre à quelques mètres de son dos, il se hissa sur ses pieds dan un bond prodigieux et dégaina sa baguette.
Espoir.
L'Enchanteresse le fixait de ses yeux bleus pleins d'étoiles, sa silhouette équine et scintillante de blancheur se démarquant avec irréalisme de l'obscurité, et le regard confiant malgré la baguette de laquelle elle était menacée. Si tôt qu'il la vit, Harry rangea sa baguette dans sa poche, un peu honteux de l'empressement avec lequel il s'était armé.
Comme pour lui faire comprendre qu'elle ne s'en était pas offusquée, Espoir secoua sa tête, faisant voler autour d'elle des crins rosés. Plus que jamais, elle semblait sortir d'un conte. Ses sabots dorés martelèrent une fois de plus le sol et elle vint se poser près d'Harry. Son souffle chaud passa sur la joue du garçon, elle hennit faiblement, puis se coucha sous l'Eglantier à son tour.
Elle replia ses membres sous elle et secoua de nouveau la tête. Harry ne sut pas vraiment ce qu'il convenait de faire. Après un moment d'hésitation, il s'assit à son tour. Le dos appuyé contre le tronc de l'arbre, il posa une main distraite sur le chanfrein de l'Enchanteresse. Ses doigts se déplièrent et caressèrent doucement le poil blanc. C'était doux au toucher, aussi soyeux que le pelage d'une Demi guise, aussi brillant que celui d'une Licorne, aussi délicat que les plumes d'un oiseau.
Ses oreilles étaient pointées vers lui : elle lui accordait toute son attention. Elle posa son nez aux reflets mauves sur l'épaule du jeune sorcier, souffla dans son cou, lui arrachant un frisson. Dans le moment présent, Harry se sentait bien. La peur qui tenaillait son ventre avait disparu. Il n'avait plus peur, il ne pensait plus mourir, l'image de Voldemort s'était retirée de son esprit. Tout allait bien. Il reprenait confiance. Il croyait en son avenir, il rêvait de nouveau. Il entrevoyait des images d'aventure, des décors enchantés. Il rêvait. L'espoir emplissait son cœur. Une musique résonnait à ses oreilles. Elle était lointaine, il s'en rapprochait. Le vent disparut, emportant avec lui le goût amer des larmes et de la rancœur.
Harry s'était endormi. Espoir le laissa se caler contre elle, encourageant de sa magie les songes peuplés de merveilles du garçon.
Les heures s'écoulèrent et Harry n'émergeait toujours pas de son sommeil. Ce ne fut seulement lorsque le soleil commença à décliner à l'horizon que les yeux émeraudes apparurent sous des paupières ensommeillées.
Harry cligna plusieurs fois des yeux puis s'étira. Il bâilla à s'en décrocher la mâchoire et se releva. La position dans laquelle il s'était endormi aurait eu de quoi être douloureuse mais étrangement, il n'en avait pas souffert. Espoir le regarda se lever et s'épousseter sans bruit. Puis, sans qu'Harry ne sache vraiment pourquoi, elle tourna la tête vers le parc, les oreilles dressées, tout son attention portée vers un point caché par les arbustes.
Harry mit quelques secondes avant de comprendre que quelqu'un approchait. Il ne pensa pas en revanche à tirer sa baguette de sa poche. Une silhouette apparut, frêle et ondoyante. Un rayon de lumière passa sous les branches et l'éclaira.
Il s'agissait d'Ange. Ses longs cheveux dorés voletaient autour de son visage. Elle avait quitté sa robe d'infirmerie pour une longue robe vert foncé, qui serrait sa taille, laissait deviner sous le tissu léger la forme de ses jambes et dont les manches évasées tombaient sur ses bras avec souplesse. La robe était frappée d'un serpent d'argent qui s'enroulait sur lui-même au niveau de l'épaule. Harry tiqua sur ce détail et en parut bouleversé.
Derrière lui, Espoir se redressa avec souplesse et s'approcha de sa jeune protégée. La dénommée Ange quitta Harry du regard et porta sa main à l'encolure de l'Enchanteresse qu'elle flatta distraitement. Harry se décida finalement à parler, captant de nouveau l'attention de la fille :
- C'est une robe de Serpentard que tu portes, non ?
- C'est le professeur Dumbledore qui m'a dit de la porter, répondit-elle d'un air méfiant comme s'il l'avait accusée de vol.
Sa voix était claire, évidemment féminine, et douce à l'oreille. Un rien farouche.
Harry acquiesça. Il hésita un instant puis finalement demanda :
- Est-ce que tu connais le nom de Tom Jedusor ?
Et comme elle le fixait impassible, il insista :
- Tom Elvis Jedusor ? Ou simplement le nom des Jedusors ?
- … Tu le connais, toi ?
- Un peu, oui, répondit Harry en grimaçant.
- Que sais-tu de Jedusor ?
De toute évidence, cette Ange connaissait Jedusor, mais elle semblait intéressée d'en connaître l'avis d'Harry. Celui-ci fut pris au dépourvu.
- Tom Jedusor était élève à Poudlard il y a une cinquantaine d'années, fit-il mal assuré. Espoir l'écoutait à présent avec une grande attention. Il… il est l'héritier de Serpentard.
Harry marqua une pause et chercha une signification dans les yeux verts de son interlocutrice.
- Il est Voldemort, continua-t-il avec gravité.
- Toi tu es Harry Potter, n'est-ce pas ?
Harry fronça des sourcils et croisa les bras.
- Tu ne réponds pas à mes questions, pourquoi devrais-je répondre aux tiennes ?
Elle haussa des épaules et d'un bond, elle enfourcha la Jument Enchanteresse. Elle se tenait avec une telle droiture, une telle souplesse et une telle fierté qu'il était impossible de ne pas voir la ressemblance avec Tom Jedusor.
- Je suis Harry Potter, se précipita ce dernier alors qu'elle faisait mine de partir. Toi qui es-tu ?
- Qui crois-tu que je suis ?
Interloqué, Harry ouvrit la bouche sans qu'aucun son n'en sorte. Le visage de Jedusor s'imprima plus clairement encore dans son esprit. Ange détourna le regard. Espoir avança un sabot sur la terre couverte d'humus, puis deux. Elle trotta jusqu'à disparaître dans l'obscurité.
•
Harry tambourina à la porte qui s'ouvrit aussitôt, laissant apparaître un Dumbledore souriant.
- Je trouve que vous avez une confiance démesurée en ma logique, fit Harry sans même être entré. Ou alors je suis trop bête pour comprendre la subtilité de vos paroles.
Dumbledore s'effaça de l'embrasure et lui fit signe de le suivre. Et alors que le vieux sorcier allait s'installer dans son fauteuil ouvragé, Harry s'assit sur une chaise, de l'autre côté du bureau.
- Je m'attendais à te voir, Harry. Le contraire m'aurait étonné. Mais je t'en prie, j'aimerais savoir en quel honneur tu te trouves… bête.
Le sourire de Dumbledore s'agrandit légèrement et Harry rougit, avec le sentiment d'être plus idiot encore.
- Ce matin, reprit-il gêné, lorsque j'ai rencontré Ange –c'est son nom n'est-ce pas ?- vous m'avez dit que vous saviez ce que j'avais compris. Et à l'instant, elle a sous-entendu qu'elle était ce que je pensais qu'elle était.
Harry fit de petits moulinets avec ses mains comme pour faciliter la compréhension de sa phrase.
- Seulement vous vous trompez tous les deux. Je ne sais pas qui elle…
- Thé ? Café ?
- Quoi ?
- Le thé est meilleur pour la digestion.
Dumbledore claqua des doigts et un plateau apparut, lévitant au-dessus du bureau. La théière s'en éleva, s'abaissa à plusieurs reprises puis deux tasses fumantes vinrent se poser devant les deux sorciers.
- Oh… il manque du sucre, commanda Dumbledore avec désinvolture en fixant le plateau de ses yeux pétillants.
Une petite cuillère plongea dans le sucrier puis vint déverser sa poudre blanche dans la tasse du directeur amusé. La cuillère se tourna vers Harry qui ne sut que faire non de la tête pour signifiait qu'il ne voulait pas de sucre. La cuillère alla se poser sur le plateau qui disparut, laissant à la place une assiette de gâteaux.
Harry baissa un regard déconcerté sur sa tasse. Face à lui, Dumbledore soufflait sur sa boisson trop chaude avant de demander sur le ton de la conversation :
- Qui penses-tu qu'elle soit ?
- Je ne sais pas.
Dumbledore posa un regard plus sérieux sur le jeune homme.
- Enfin… ajouta Harry, si elle est ce à quoi je pense, vous êtes devenu complètement fou.
Dumbledore dodelina de la tête, une moue réflective, avant de chuchoter :
- Ce n'est pas tout à fait faux, entre nous.
- Professeur ? Elle n'est pas Tom Jedusor ?
Dumbledore retrouva son sérieux et fit non de la tête.
- Je n'aurai pas laissé Voldemort entrer dans Poudlard. D'ailleurs c'est impossible. Et puis, l'Enchanteresse n'aurait pas amené un corps qui contiendrait l'esprit de Voldemort. Mais je conçois qu'elle lui ressemble.
- Elle est tatouée de la Marque des Ténèbres !
- Elle n'en connaissait pas la signification jusqu'à aujourd'hui, Harry.
- Mais…
- Laisse-moi te raconter son histoire.
Harry se tut aussitôt, tout à son attention. Dumbledore avala sa dernière gorgée de thé, reposa délicatement la tasse dans sa soucoupe et se leva. Derrière la large fenêtre de son bureau, le soleil émettait ses derniers rayons.
- Il y a quatorze ans, quelques mois après ta naissance, Voldemort a quitté la Grande-Bretagne. Son départ s'est fait dans la plus grande discrétion, si bien que nos alliés ont mis du temps avant de s'apercevoir qu'il n'était plus là. Il avait cependant laissé des consignes derrière lui et ses Mangemorts ont continué de semer la Terreur tant qu'il était absent.
De tous ses projets, ce fut le seul que Voldemort alla accomplir lui-même. Seulement cette fois, personne ne pouvait le faire à sa place. Il est parti au Royaume des Elfes, qui s'étend dans l'est de l'Europe, à l'écart des autres civilisations. Les Elfes de ce royaume ne sont pas les elfes de maisons qui gardent les cuisines de Poudlard. Ce sont, à l'instar des Géants, des Sorciers, et des Vampires, des humanoïdes dont les yeux prennent la forme d'amande, et dont les oreilles sont grandes et pointues.
Harry se souvint d'une illustration sur un livre d'Histoire de la Magie. Il se morigéna de n'avoir pas retenu le contenu du texte.
- Comme les Vampires, dont ils sont une sorte d'opposés, reprit Dumbledore, les Elfes sont Immortels. Et comme tu peux l'imaginer, seule l'Immortalité a pu convaincre Voldemort à prendre les risques d'entrer au Royaume des Elfes. En temps normal, la Sagesse légendaire de ces êtres défait tous les leurs. Ils seraient capables de lire en l'âme de chacun, ce sont des legilimens doués et surtout des êtres purs. Ils aurait du le reconnaître. Mais Voldemort est un mage aussi noir que puissant. Il a réussi à tromper toute la communauté elfique. Et ce n'est pas un mince exploit. Seulement, Voldemort ou pas, les Elfes n'offrent pas leur Immortalité et l'Eternité n'est pas une chose qui peut se partager comme un corps.
Harry était à présent dressé au bord de sa chaise et buvait chaque parole. Plus Dumbledore parlait, et plus Harry devinait la suite.
- Mais Voldemort avait en sa connaissance des rites de Magie Noire auxquels il s'était préparé depuis longtemps et qui lui permettrait de prendre l'Immortalité d'un Elfe. Pour cela, une condition s'imposait : l'Elfe en question devait avoir du sang de Voldemort.
Harry ferma les yeux, les mains serrées sur sa tasse froide.
- Il réussit à charmer une jeune Elfe du nom d'Elwind. A force de magie et de douceur feinte, elle lui donna un enfant.
Dumbledore retourna dans son fauteuil où il s'assit, plus las encore.
- Cet enfant, c'est Ange biensur. Après deux mois de grossesse, Elwind comprit qui était Voldemort et ses sombres desseins. Mais il était trop tard pour reculer : les enfants magiques ne peuvent être avortés quand leurs pouvoirs ont commencé à se développer, c'est-à-dire après un mois de gestation. Le reste est assez évident : Voldemort a attendu que sa fille soit née pour tuer Elwind et retourner en Grande-Bretagne où il poursuivit son règne de terreur jusqu'à ce que tu interviennes.
Harry se massa les tempes.
- Voldemort ne peut avoir de fille ! fit-il avec force. Il n'est pas… il n'est pas… humain…
Dumbledore haussa un sourcil.
- Beaucoup d'être ne sont pas humains et se reproduisent quand même.
- Mais Voldemort…
- Est un être rongé de Magie Noire. Il est mauvais jusqu'à la couleur de ses yeux, tout autour de lui n'est que mort et désolation. Certes. Mais aussi inimaginable cela parait-il, Voldemort est, comme tout sorcier, naturellement doté de la capacité de procréer. Pour seule différence, il n'a pas donné la vie par amour mais par avidité de pouvoir. Beaucoup de sorciers ne voudraient pas croire qu'il est capable de quelque chose comme ça. Mais Ange n'est pas un blasphème. Tu l'as vu par toi-même : elle lui ressemble. Elle l'étrange équilibre entre la noirceur de son géniteur et la pureté de sa mère.
- Etrange, c'est le mot. Beaucoup de gens ne croiront pas en sa lignée. Ils diront que vous mentez, que c'est un coup monté et qu'elle n'est qu'une orpheline abandonnée qu'on a voulu faire passer pour l'héritière du Seigneur des Ténèbres.
Dumbledore acquiesça avec sagesse.
- Beaucoup préfère se cacher derrière leurs espoirs, refusant la vérité, ou même le doute. Nous en avons eu la preuve avec Cornélius Fudge. Personne ne veut croire que Voldemort est de retour, et personne ne voudra croire que son règne a une descendance. Seulement, ils oublient que le père ne fait pas le fils, pas plus qu'il ne fait la fille. Ange n'est pas Voldemort. Après tout, l'Enchanteresse lui a accordé sa confiance.
Harry soupira, accusant le coup.
- Si Voldemort est parti au Royaume des Elfes après ma naissance, elle est née l'année suivante, n'est-ce pas ?
- C'est la conclusion à laquelle je suis arrivé. En temps normal, Ange serait ta cadette d'un an.
- En temps normal ?
- Elle affirme être née à la toute fin de l'année 1980. La pendule magique -il désigna une étrange horloge fixée sur l'étagère- la soutient dans ses prétentions. Ce n'est pas réellement étonnant que Voldemort ait voulu qu'elle naisse le plus tôt possible. Il… ne pouvait pas attendre… pour des raisons dont il est sans doute un peu tôt de dévoiler.
Les yeux de Dumbledore brillaient étrangement.
- Je pense que Voldemort a du accélérer la grossesse. C'est un acte de magie, en plus d'être illégal, très dangereux. Cela expliquerait aussi pourquoi Ange a des difficultés à développer sa magie.
- Professeur, où était-elle pendant toutes ces années ? Pourquoi n'a-t-elle pas été à Poudlard ?
- Le transfert d'Immortalité est un échange qui met beaucoup de temps avant de se boucler. Il aurait fallu pratiquement un an de transfert avant que Voldemort ne puisse s'accaparer totalement l'Immortalité de sa fille. Le transfert a commencé un mois après qu'ils ne soient revenus en Grande-Bretagne. Chaque jour, Ange devenait de plus en plus mortelle, à l'inverse de Voldemort. Et puis tu es intervenu. Lorsque tu as renvoyé sur Voldemort le sort mortel, il avait déjà suffisamment d'Immortalité en son sang pour y survivre.
- Qu'est-il advenu d'Ange ?
- Les liens qui l'unissaient à son père, ceux que Voldemort avait conjuré pour le transfert d'Immortalité, ont entraîné Ange dans la même chute que lui. Autrement dit, elle a été elle aussi frappée par la mort. A la différence de Voldemort, Ange avait été fortement affaiblie par le transfert. Qui plus est, elle n'était âgée qu'une dizaine de mois.
- Vous voulez dire que lorsque j'ai renvoyé l'Avada Kedavra contre Voldemort, j'ai aussi tué Ange ?
- Non. Tu l'as renvoyé simplement contre Voldemort. Ce sont les liens magiques de transfert qui ont répercuté le sort sur Ange.
- Pourquoi n'est-elle pas morte alors ?
- Lorsque Voldemort a disparu, l'Ordre a du prendre en charge l'avenir de deux bébés : toi et Ange. Pour toi, nous avons décidé de t'envoyer dans la seule famille qui te restait.
- Et ce ne fut pas la meilleure idée que vous ayez eue ! grogna Harry en croisant les bras.
Dumbledore eut un sourire indulgent, puis reprit :
- Ange n'est pas morte sur le coup. Disons qu'elle mourrait à petit feu. Lorsque nous l'avons récupérée, elle était au bord de l'abysse. Nous ne pouvions plus rien faire pour elle. Le problème est que sa mort détruirait par ailleurs les liens qu'avait créé Voldemort. Il s'agissait de liens puissants, et qui renfermaient une source de magie conséquente. Lorsqu'ils seraient détruits, toute cette magie se libérerait, provoquant une gigantesque explosion. En somme, Ange était une bombe à retardement.
- Qu'avez-vous fait ?
- Nous l'avons abandonnée au cœur de la Forêt Interdite. C'est affreux de livrer un nourrisson à la mort, et de le laisser à son sort sans un regard en arrière. Mais nous n'avions pas le choix. Au cœur de la Forêt Interdite, nous savions que l'explosion ne parviendrait pas jusqu'à Poudlard. Les créatures qui y habitent ont été prévenues par les centaures. Ainsi, Ange mourrait sans faire de mal.
- Mais elle n'est pas morte.
- En effet. Espoir est intervenue. Lorsque tu m'as dit la première fois que tu avais rêvé d'Espoir, j'ai pensé que c'était une bénédiction de voir arriver une Enchanteresse parmi nous. Mais en fait, elle était là depuis bien longtemps. L'Enchanteresse a décidé il y a quatorze ans de rejoindre ce monde pour sauver Ange. La raison qu'il l'a poussée à faire ça reste un mystère. Il faut que tu saches, Harry, que les Enchanteurs ont un don de prescience. Il est possible qu'Espoir ait prédit que la survie d'Ange était décisive.
- Alors Espoir a le don de protéger de la mort ? s'exclama Harry en se redressant sur son siège.
- Hélas, non. La mort d'Ange est un cas particulier. Espoir a donné une partie d'elle-même pour sauver Ange. En lui redonnant une chance de vivre, Espoir a détruit les liens qui unissaient Ange à Voldemort et a temporairement enfermé les pouvoirs de la jeune fille dans une sorte de sommeil. Suite à cela, Ange est devenue Cracmol en quelque sorte. Quant à Espoir, elle s'est condamnée à perdre ses pouvoirs et à être enfermée dans une autre dimension, dont seul l'esprit d'Ange aurait la clé. Avant de disparaître, elle a eu le temps de livrer Ange à une famille de Moldus. N'ayant plus ses pouvoirs, Ange n'a jamais été recensée dans les registres de Poudlard.
- Comment sont-elles revenues alors ?
- En grandissant, les pouvoirs d'Ange se sont petit à petit réveillés. Elle affirme qu'à partir de ses douze treize ans, elle a commencé à sentir les changements qui opéraient en elle. Mais elle ignorait tout de ses origines, du monde sorcier et d'Espoir. De surcroît, elle vivait dans le monde moldu, hermétiquement fermé aux superstitions sorcières. Et puis un jour, Espoir l'a contactée. L'Enchanteresse a réussi à émettre une faille dans sa dimension, s'introduisant dans l'esprit de sa protégée. Espoir ne parle pas. Lorsqu'elle veut faire savoir quelque chose à quelqu'un, elle fait naître en lui un sentiment de véracité. Alors la personne est au courant de cette chose, sans vraiment savoir comment. Biensur, Ange s'est prise pour folle. Elle a mis du temps avant d'accepter cette sensation et de s'ouvrir un peu plus à son nouveau mentor.
Il faisait nuit noire à présent et le thé d'Harry était froid. Derrière Dumbledore, la lune brillait.
- Le réveil des pouvoirs d'Ange s'est accéléré quand Voldemort a commencé à aménager son retour à la vie, l'année précédente en somme. Plus Voldemort s'approchait de son résurrection, et plus Ange sentait sa magie accroître. Parallèlement, elle tentait de libérer Espoir de l'autre dimension. Cet été, lorsque Voldemort a retrouvé son corps, les pouvoirs de sa fille ont achevé leur libération. Dans le même temps, Voldemort, Ange et Espoir sont redevenus ceux qu'ils étaient. Espoir a tenté d'apprendre à Ange à maîtriser ses pouvoirs, rendus sauvages de leur enfermement pendant treize ans. Mais Voldemort a senti lui aussi que sa fille était toujours vivante. Maintenant qu'il était vivant et qu'il avait juré ta destruction, il lui fallait devenir Immortel et pour cela retrouver Ange, et la rallier à sa cause. Ce qu'il ignorait, c'est qu'Espoir était désormais présente et avait détruit l'Immortalité d'Ange.
- C'est pour cela que Voldemort n'a pas attaqué jusqu'à maintenant, déclara Harry. Il cherchait Ange, n'est-ce pas ?
- En effet. Avec l'envergure de ses pouvoirs, il n'a pas mis longtemps à la retrouver. Il a envoyé ses Mangemorts à sa poursuite. Entre temps, Ange et Espoir ont pris la décision de s'enfuir, pour éloigner le danger du village moldu où elles étaient. Espoir étant doté d'un pouvoir de vitesse, elles ont gagné le Nord du pays en quelques heures. Mais une nuit, Ange s'est échappée de la protection d'Espoir. Elles étaient dans une forêt et elle est partie.
- Pourquoi ?
- Elle pensait que rester avec Espoir, c'était la mettre en danger. Elle préférait affronter Voldemort toute seule. Elle ne connaissait évidemment la puissance de Voldemort.
- Alors il l'a trouvée.
- Il l'a trouvée et il a tenté de la convaincre de la rejoindre. Il lui a expliqué qui elle était, ses origines, le destin qu'il lui voulait. Il a parlé du monde sorcier dont elle ignorait totalement l'existence. Il lui a parlé de moi, de toi, de sa haine qu'il te vouait, de sa certitude qu'il te tuera un jour. Mais elle a refusé de le suivre. Espoir l'avait prévenue de ne jamais accepter cette alliance. Ange ne connaissait pas assez Voldemort pour prendre conscience des horreurs qu'il commettait. C'est par fidélité à son mentor qu'elle a refusé de s'allier à lui. Il faut aussi compter, qu'elle était terrifiée par l'apparence de son géniteur. La chance qu'elle a eue est que Voldemort ne voulait pas la tuer parce qu'il avait besoin d'elle. Sinon, il l'aurait tuée avec extrêmement de facilité. Ange n'avait que très peu de bases magiques, si ce n'est aucune. Elle n'avait aucune chance face à lui. Heureusement, Espoir l'a retrouvée à temps. Elle a désarmé les Mangemorts et créé un bouclier temporaire qui les a protégées –elle et Ange- des attaques de Voldemort. Ange est montée sur elle, s'est évanouie, puis ils ont pris la poudre d'escampette.
- Et Espoir m'a contactée pour me faire savoir qu'elle viendrait à Poudlard.
- En effet. Espoir te connaissait depuis ta naissance. Elle connaissait ton histoire. Lorsque elle et Ange ont erré dans le Nord, elle savait qu'il fallait qu'elle te contacte. Et qu'elle te présente sa protégée.
- Pourquoi ?
- Parce qu'elle te faisait confiance. Elle n'ignorait pas l'existence de personne comme moi ou les membres de l'Ordre mais elle en savait trop peu pour leur faire confiance. Toi, Harry, elle avait confiance. Alors elle t'a cherché. Elle t'a trouvé et elle s'est imposée dans ton esprit, au moment où tu étais le plus vénérable, c'est-à-dire lorsque tu dormais. Tu lui a ouvert ton cœur, renforçant sa confiance. Quand elle a arraché Ange aux griffes de Voldemort, il fallait qu'elle trouve un lieu sur, elle a pensé à toi et elle t'a demandé asile. Personne ne pouvait entrer à Poudlard dans le but de te voir si tu n'en donnais pas personnellement la permission. Les barrières l'empêchent. Alors elle est restée à l'entrée et elle t'a fait venir.
- Et je l'ai fait rentrée.
- Exact. J'ai eu une longue conversation avec l'Enchanteresse. Elle va nous aider dans cette guerre. Elle est une formidable alliée pour l'Ordre. Quant à Ange, nous ignorons ce qu'elle veut. Espoir dit qu'elle a attendu ce moment toute sa vie.
Harry acquiesça. Lui-même avait déjà rêvé d'appartenir à un tel monde lorsqu'il vivait chez les Dursleys. Un monde où on le connaîtrait, où ses origines qu'il détestait tant seraient reniées, un monde où on l'attendrait. Ange avait du être très déçue d'apprendre qu'elle était la fille d'un tel monstre.
- Où vont-elles aller ?
- Ange va rentrer chez elle, chez ses Moldus. Il va lui falloir du temps avant de prendre sa décision. J'ignore si le Royaume des Elfes accepterait de l'accueillir. Les demi elfes sont très rares et parfois mal acceptés. Et puis c'est une sorcière : on ne peut pas renier éternellement sa vraie place, surtout que l'importance de la sienne n'est pas moindre.
- Et Espoir ?
- Espoir ne peut rentrer chez les Moldus évidemment. Disons qu'elle occupe un peu plus de place qu'avant…
Dumbledore eut un sourire amusé.
- Elle va l'accompagner et revenir ici. Elle va passer les grandes vacances à Poudlard ; nous avons aménagé une stalle dans le parc. Ensuite, ce sera à Ange de décider.
- Professeur, vous pensez qu'elle va nous rejoindre ? Quand je l'ai vue, elle n'avait pas l'air très enchantée.
- On vient de lui apprendre beaucoup trop de choses en même temps. Son entrée dans le monde de la magie a été plus que catastrophique. Il faut réparer les erreurs et lui montrer que cette facette qu'elle a vue n'est pas la seule. Elle passera cette nuit à Poudlard, dans la chambre des préfets de Serdaigle. C'est la chambre de préfets la plus proche de la Grande Salle. Je pensais la mettre dans la tour de Gryffondor, mais finalement, elle a besoin d'être seule.
Harry acquiesça, bien que déçu. De la compagnie n'aurait pas été luxueuse, et puis surtout, il avait des foules de questions sans réponse.
La tête migraineuse, Harry prit congé, après avoir juré à Dumbledore de ne révéler l'identité de l'héritière de Serpentard à personne, pas même à Ron ou Hermione.
- C'est à Ange, et à elle seule, d'accepter la vérité et de la partager.
Harry ne présageait même pas en parler à ses deux meilleurs amis. Lui-même ayant du mal à digérer la nouvelle, il savait que les deux autres ne la comprendraient jamais. Il imaginait que trop bien la réaction catastrophée de ses deux amis.
Ce soir-là, Harry se dispensa de repas, redoutant de ne plus pouvoir rien avaler.
Fin de Chapitre
Ah ah, l'intrigue est enfin lancée. C'est maintenant que vous décidez si ça vous plait ou pas. L'hypothèse d'une héritière de Voldemort avait déjà été lancée dans quelques forums et tout le monde –ou la plupart- était tombé d'accord sur le fait que c'était tout simplement impossible. Moi aussi.
Mais cette théorie me plaisait. Inexplicablement, je voulais parler de celle dont JKR reniera toujours l'existence, imaginer une petite fille sortie de nulle part, dont on n'a jamais entendu parler, et qui débarque en catastrophe dans notre monde bien-aimé.
« Ô miracle, elle a l'âge d'Harry. » Non pas miracle du tout. Il y a une raison précise à cela. Dumbledore l'a dit mais c'est très flou. Vous le saurez au chapitre 42, précisément.
Voila, j'espère que l'histoire d'Ange a été correctement expliquée. Pour ceux qui ont rien capté, ils ont le droit d'envoyer une Beuglante par review
Parlant reviews, merki beaucoup pour ceux qui en ont envoyé. Laissez-en encore, ça fait tout plein beaucoup plaisir !
Réponses aux Reviews :
Onarluca : Voilà, chapitre décisif, et je tremble à l'idée de ne pas avoir plue. Mais bon, moi aussi il y a des fics que j'aime et d'autres que je n'aime pas. Bises à toi !
FloOo'z : Hé hé, si si, je suis effectivement passée par la GdS. Seulement j'avais prévenu mes lecteurs que je recommençais mes premiers chapitres étant donné la merdeusité de mes débuts. Bon ok, pas la peine de me la jouer grande, la suite n'est guère plus vaillante. Mais bon. Au fur et à mesure que je recommence mes premiers chapitres sur la GdS et Twwo, je les poste sur , PMW et hpmysteries. Vouila. Bises.
