Protect-me
Chapitre 5
La tourelle aux tatoués
Je fais quelques pas dans ce grand hall circulaire où l'air est rance, fixant toujours du regard Malfoy. Je ne sais pas vraiment comment j'arrive à me contrôler après tout ce qu'il m'a fait et dit. Toutes ces insultes comme quoi je lui suis inférieur, comme quoi 'mione n'est qu'une Sang de Bourbe et qu'elle ne mérite pas sa place dans cet établissement… Je n'arrive pas à comprendre comment un être humain peut penser de telles choses, comment peut-on être aussi terre à terre et absurde dans ses propres raisonnements.
Je fais le tour de la pièce rapidement, m'apercevant qu'à chaque nouveau pied posé au sol, un bruit sourd de résonance envahit la pièce, soulevant par la même occasion un petit nuage de poussière. Sous l'épaisse couche de saleté apparaît faiblement les contours d'une mosaïque, jouant avec les différents coloris des petits carreaux de carrelage. Un serpent enlaçant le coup d'un griffon semble être la scène qui décore ce sol. Je ne sais pas comment prendre cette œuvre d'art, si c'est une atteinte à mon statut de Gryffondor… Je ne comprends pas non plus en quel honneur cette scène mettant en œuvre un duel entre les deux maisons opposées depuis toujours a véritablement sa place en ces lieux qui ont l'air relativement anciens et inhabités depuis des siècles. Je remarque des dorures sur le contour des portes alignées sur l'unique pan de mur circulaire. Cela devait être à l'origine les appartements privés du directeur de cette école, ou quelque chose dans ces eaux-là. Je ne quitte pas pour autant Draco qui commence à faire de même, découvrant lui aussi ses nouveaux quartiers. Malgré le manque de propreté, il semble satisfait du luxe qu'il y trouve, assouvissant ses goûts de pur aristocrate.
Je me retrouve au centre de la pièce, les deux pieds en plein sur la tête du serpent aux yeux jaunes et perçants. La pièce est relativement éclairée, ce qui m'étonne vu le manque visible de fenêtre. Cherchant une éventuelle source synthétique de lumière, je relève la tête tandis que mes yeux se plissent, étant éblouis. Au centre de la charpente en bois prend place une toiture transparente de verre, m'offrant la vue du ciel, clarté réchauffant le cœur par cette douce journée ensoleillée. J'aperçois au loin quelques oiseaux passant au-dessus de cette tourelle, me narguant de leur liberté accrue. Je détache mes yeux de cette magnifique vue pour le reposer sur Draco, ce dernier me fixant toujours avec un regard empli de dédain et de haine. Je reprends alors mon inspection des lieux, voulant jouer avec la patience de mon cher colocataire…
Je pose une main sur la première poignée que j'aperçois tandis que Draco commence à m'interpeller. Il n'a pas l'air tellement satisfait de voir que je prends des initiatives avant lui. Ne me voyant pas réagir à ses plaintes, il m'attrape par l'épaule et me pousse en arrière, m'empêchant ainsi d'ouvrir la porte. Monsieur veut dominer, il doit dominer, il vit pour cela. Il se sent supérieur à moi, il veut se faire écouter de moi, il veut que je lui obéisse. Je serai peut-être contraint de le faire un jour ou l'autre, mais je n'en ai point l'intention aujourd'hui. Je plonge mes yeux froids dans les siens. Ces derniers sont remplis d'une haine indescriptible. Je m'amuse devant son comportement juvénile du ''je t'ordonne, tu m'obéis, sinon….'' et j'en profite pour le narguer en lui offrant l'un de mes plus beaux sourires narquois. Je me déplace une nouvelle fois dans cette pièce vaste, l'occupant de mon regard et je pose ma main droite sur une autre poignée. Je le teste, tente de le pousser à bout. Je sais que cette attitude n'est pas vraiment plus mature que la sienne, mais j'aime à le faire enrager. J'aime le pousser au-delà des limites de sa patience, j'aime à voir ce petit air contrarié qui apparaît sur son visage, l'obligeant à froncer les sourcils et à retrousser son nez. Il s'apprête à me lancer un sarcasme des plus violents, me rappelant à l'ordre, mais il est interrompu par un petit ''pop'' sonore.
Il se retourne tandis que j'observe le petit elfe de maison qui vient d'apparaître, nous fixant tout deux. Cette créature semble féminine, tentant de nous offrir un faible sourire crispé, ayant peur face à l'air haineux de Draco. Malfoy bout à l'intérieur de lui, je sens à travers mon tatouage que sa seule envie est de faire payer cette intrusion. Je sais qu'il va s'en prendre à la malheureuse créature qui vient seulement pour nous aider à nous installer et je rattrape en l'air son bras qui allait gifler la petite elfe. Il se dégage de mon étreinte qui se veut agressive, me fixant de son air hautain.
''Excusez-moi de vous dérangez, maîtres…''
La petite elfe de maison se renfrogne, ayant trop peur de se prendre un coup ou de se faire disputer. Elle est d'ailleurs prête à s'infliger elle-même quelques punitions dignes de Dobby, mais j'arrive à l'en empêcher de justesse, au comble de Draco. La tenant à bout de bras, je l'incite à parler pour nous expliquer la raison de sa visite.
''Je m'appelle Fawny, monsieur Harry Potter, et je suis là pour vous servir, vous, monsieur Harry Potter, et votre ami, monsieur Draco Malfoy…''
Sa voix est hésitante, à moitié cassée et bégayant presque. Elle tente encore de se frapper le crâne pour avoir soit disant manquer de respect à ses nouveaux maîtres mais je retiens son poignet, voyant du coin de l'œil Malfoy contrarié d'un tel acte de respect envers Fawny. Il me lance alors un sarcasme digne de lui et de son tempérament dédaigneux.
''- Potter, ce n'est qu'une elfe de maison…
- Oui, ça j'avais remarqué que c'est une elfe de maison, Malfoy, mais tu vois, elle a un prénom et s'appelle Fawny. De plus, cette elfe de maison, comme tu l'appelles si gentiment, à une personnalité et une conscience. J'aimerais que tu en prennes notes et agisse en conséquent, Malfoy…Sinon…
- Sinon quoi ? Tu risques de jouer au pauvre petit qui se fait embêter auprès de Dumbledore ? Oh….que c'est touchant !''
Il imite un enfant en bas âge suçant son pouce à mon attention. Je n'aime pas ce genre de propos et je sens mon sang froid quitter mes veines. Je lâche sans même m'en rendre compte Fawny qui tombe à terre et commence à se taper la tête contre le mur tandis que je sors ma baguette magique d'un geste précis et rapide. Je vois qu'il ne prend même pas la peine de sortir la sienne, commençant à rire. Le son froid de sa voix se moquant de moi envahit la pièce, raisonnant d'autant plus dans ma tête. Je constate qu'effectivement, j'ai l'air faiblement ridicule…. Draco ne loupe pas une telle occasion pour m'enfoncer d'avantage, prenant un ton des plus ironiques.
'' Tu comptes faire quoi Potter ? Te battre contre moi, me jeter des sorts, me …stupéfixer ? Je te rappellerai par pur information que nous sommes liés par cette foutue marque et que, par conséquent, tout ce que je ressentirai d'intense, aussi bien les sentiments que les douleurs, tu le ressentiras toi aussi. C'est bien embêtant, n'est-ce pas ?''
Il se remet à rire… Il m'énerve… Je ne peux supporter d'avantage cette personne qui manque de respect à qui que ce soit. Ses parents auraient-ils seulement oublié de l'éduquer ? Je sais que je le fixe avec un regard rempli de haine, mais c'est ce que je ressens pour lui. Ne peut-il pas comprendre que Fawny est un être elle aussi ? Je tente de me calmer et range lentement ma baguette dans ma robe de sorcier, tout en maîtrisant mes gestes. Un sourire de satisfaction trône sur les lèvres de Malfoy. Il est satisfait de m'avoir fait obéir… Cette idée me rend d'autant plus malade. J'avais voulu m'amuser avec ses nerfs, et là, c'est lui qui joue avec les miens. Il me fait sortir de ma torpeur, attrapant la petite elfe de maison par le col et la soulevant à la hauteur de son visage.
''Qu'est-ce que tu nous voulait, elfe de maison ?''
Je sais qu'il fait exprès d'insister sur les mots ''elfe de maison'' avec dédain, mais j'arrive à contrôler ma main qui désir aller frapper de plein fouet le visage angélique et pâle de Draco. Cela l'amuse d'autant plus qu'il ressent mon envie de me venger. Finalement, Fawny adoucit l'atmosphère remplie de tensions en répondant à la question posée.
''Je suis venue pour vous faire visiter les lieux. Je devais aussi m'excuser pour l'irrespect qu'a fait preuve Roth en vous laissant ici, mais je n'ai pas pu, pardonnez-moi, excusez-moi, maîtres.''
J'écoute sa petite voix plaintive qui cesse pendant quelques instants durant lesquels elle tente de se frapper de nouveau. Cette fois-ci, Draco la laisse faire, un sourire sadique sur les lèvres. Elle reprend finalement ses explications.
''Il faut que vous choisissiez vos chambres pour que je puisse vous emménager…''
Malfoy laisse tomber la petite elfe de maison qui se précipite à la première porte à droite de l'entrée. Elle ouvre la porte, poussant la poignée en se mettant sur la pointe des pieds et s'engouffre dans l'embrasure si vite qu'elle disparaît de notre champs de vision. J'hésite à passer devant Draco, sachant pertinemment que ce serait une occasion pour lui de me railler une nouvelle fois sur le fait que je ne respecte pas la hiérarchie établie selon notre ''pacte''. Dans un petit grognement presque inaudible, je le laisse ouvrir le passage.
Je suis ses pas, un par un, montant à la même vitesse que lui le petit escalier en colimaçon qui s'offre à nous. Les marches en pierre nous conduisent directement à une chambre décorée avec goût. Les couleurs dominantes de la pièce tournent autour du vert, me rappelant avec une petite grimace de dégoût les couleurs des Serpentards. Je remarque tout de même, d'une façon objective, que cette chambre est magnifique. Cette dernière accueille un lit à baldaquins somptueux, aux rideaux de velours assortis, ainsi qu'une commode en chêne et une immense armoire sculptée avec grâce et portant de doux motifs. Le tout est éclairé par deux petites fenêtres incluses dans des petits renfoncements, créant ainsi deux petites niches agréables à fréquenter.
Fawny nous laisse à peine le temps d'admirer cette pièce qui est luxueuse est fascinante, malgré le fait qu'elle n'est point été entretenue depuis quelques années. Elle repart aussitôt à extrémité droite de la pièce, la traversant à toute vitesse en trottinant, et en profite pour ouvrir la porte qui nous fait face. La suivant avec entrain, nos pieds se succèdent sur le plancher qui craque légèrement sous nos poids respectifs. Draco passe en premier la tête par l'embrasure, et laisse échapper un petit hoquet de surprise. La pièce est tout aussi superbe que la première, nous offrant un spectacle tout àfait similaire. Une salle de bain est habituellement ordinaire, mais celle-ci, dans les mêmes teintes que la chambre qui lui correspond, est vraiment particulière.
Une grande baignoire occupe tout un coin, ayant la capacité d'accueillir largement deux ou trois personnes, elle offre le luxe d'une frise en forme de serpent sur tout son contour, allant se fondre dans les robinets en or massif. Les deux lavabos qui figuraient sur le pan de mur opposé de ce mini-bassin étaient tous deux semblables : robinets en or, tous deux sculptés en forme de serpents soignés et finement dessinés rehaussant les vasques de marbre.
Je sais que sur ce coup-là, je n'aurais pas le droit de choisir qu'elle chambre j'hériterai. D'ailleurs, mes prédictions se vérifient alors que Draco s'empresse de préciser à la petite Fawny qu'il veut qu'elle l'installe ici, dans cet univers de Serpentard. En remarque, ce n'est pas plus mal. Je préfère encore me taper un vieux lit et un seul lavabo plutôt que de vivre entouré de serpents. Quoique, je dis ça, mais tandis que nous ressortons tous de la petite salle de bain, j'espère en mon fort intérieur que mes appartements seront tout aussi confortables.
Fawny traverse une nouvelle fois à l'aide de son trottinement la chambre de Draco et ouvre une autre porte à l'autre bout de la pièce. Nous la suivons, moi respectant consciencieusement la hiérarchie établie par Malfoy. Nous tombons alors sur une espèce de balcon épousant la forme circulaire de la tourelle. Les balustrades sont simples, pour une fois, mais taillées dans une pierre fine et douce à l'œil. Des poteaux en bois viennent se fondre dans la pierre, portant une charpente en bois et une toiture, et accueillant pour fermer les pans de murs des vitres claires. L'ensemble reste quelques peu perturbant. Cela devait être à l'époque une sorte de passerelle non couverte puis, les habitants ayant jugés que cette architecture ne convenait pas à la météo de l'Angleterre froide et humide, les lieux furent fermés à l'aide de vitres. Le tout forme enfin de compte un couloir très éclairé et agréable, conduisant à une autre porte. Cette dernière s'ouvre sur une autre chambre, ma chambre.
Je pénètre dans cette pièce avec le cœur léger, découvrant les lieux avec plaisir et satisfaction. La pièce est organisée sur le même plan que la chambre précédente, mais les couleurs dominantes sont, à ma plus grande réjouissance, dans les tons rouge et or. Le lit à baldaquins semble tout aussi confortable si ce n'est plus, entouré de ces rideaux aux couleurs chaudes… Je me sens déjà à l'aise dans cet environnement qui me plait, mais à mon plus grand comble, la petite elfe ne me laisse même pas le temps d'apprécier cette vue ni de découvrir ma future salle de bain. Elle me pousse moi, ainsi que Draco, dans le petit escalier en colimaçon de ma propre chambre, nous faisant atterrir en face de la porte de l'escalier de Malfoy. Je suppose que les appartements sont identiques, étant exactement symétriques par rapport à la porte d'entrée, ma chambre étant la première porte à droite en entrant dans le hall.
''Je suis désolée d'agir de la sorte avec vous, maîtres, mais je dois à tout prix préparer vos appartements pour ce soir. En attendant, vous devriez aller vous amuser au dehors. Vous pourrez revenir en fin de journée. L'accès ne sera disponible que lorsque la porte s'ouvrira, répondant au mot de passe '' clathas palustris'', c'est à dire lorsque tous les appartements seront propres et emménagés.''
Je me retrouve alors devant la porte de mon nouvel habitat en compagnie de Draco. Nous n'avons pas eu le temps de dire quoique ce soit face à la détermination de la petite elfe. Moi qui voulais découvrir l'ensemble de cette tourelle qui déborde de surprises, je fais une moue dubitative face à ma frustration. Ne m'attardant pas plus longtemps en compagnie de Malfoy, je me décide d'aller rendre une petite visite à mon parrain, espérant peut-être croiser Ron et Hermione pour leur faire part de toutes ces nouveautés. J'espère en tout cas que mes deux meilleurs amis seront autorisés à venir me voir ! En remarque, Dumbledore n'a rien précisé en ce qui concerne les visites, je n'aurais donc plus qu'à passer outre les sautes d'humeur de Draco. L'image de mon nouveau colocataire furibond en face de moi et de mes deux amis m'arrache un sourire alors que je tente de concevoir la scène si le petit blondinet ''fils à son papa'' faisait de même avec ses deux acolytes. Je change alors de tête à cette dernière pensée qui m'horrifie : vu sous cet angle-là, la cohabitation risque vraiment d'être plus rude que je ne le pensais.
Je traverse Poudlard avec entrain et le cœur léger, même si certaines de mes angoisses persistes. Après tout, j'ai beau avoir de luxueux appartements, il n'en empêche que l'ultime combat face à Voldemort approche grandement. Je ne peux m'empêcher de frissonner alors que je me rends compte que Draco a entre ses mains ma propre vie. Si ce dernier n'est pas à la hauteur ou n'a pas envie de l'être tout court, je mourrai…
J'arrive au quartier de mon cher et tendre, comme l'appelle si bien Malfoy et je frappe avec timidité, ayant peut être un peu peur de ce qui va se passer ensuite entre nous deux. C'est vrai que j'en avais presque oublié ce baiser. Alors qu'il ouvre la porte lentement et que je me ressasse les événements de la pause de midi, je passe mes doigts presque au ralenti sur mes lèvres. Sirius se trouve dorénavant face à moi alors que je suis toujours planté devant sa porte, perdu dans mes propres pensées. Son image au lointain m'indique qu'il sourit, amusé de mon état d'amoureux transis.
Ne pouvant attendre plus longtemps, il passe la tête par l'embrasure, regarde à droite puis à gauche et m'attrape par la taille pour me faire entrer chez lui d'une façon plus que possessive. Ce geste me tire de mes pensées, laissant échapper un petit ''waow'' tandis qu'il me lâche et s'excuse timidement. Je crois qu'il n'a pas encore compris que cela me plaisait lorsqu'il s'occupait ainsi de moi… Peut-être n'a-t-il pas bien compris la signification de ce baiser ? Si je me suis laissé embrasser c'est que…cela me plaisait, non ?
Je ne sais pas vraiment ce qu'il me prend mais je m'approche délicatement de lui et pose timidement mes lèvres sur les siennes. Il répond au baiser, de son expérience que je n'ai pas et, à l'aide de sa langue, me caresse avec réserve mais douceur mes lèvres. Je n'ai jamais vraiment embrassé personne avant lui car Chô, ce n'était qu'un simple bisou de rien du tout et j'avoue que j'ai un peu peur. Je sais pourtant qu'il ne ferait rien qui me nuirait alors je me laisse aller à cet acte agréable qui m'envahit d'un voile chaud et réconfortant. Nos lèvres se séparent finalement, mettant fin à ce baiser tendre et rempli d'amour tandis que Sirius m'offre un de ses plus beaux sourires : un mélange de pur bonheur et d'affection relevé avec un peu de timidité.
Ses bras forts me plaquent contre son torse et je me laisse aller à cette douce étreinte qui me plait tant. Je ne sais pas combien de temps nous sommes restés là, debout, l'un contre l'autre, moi lui racontant ce qui s'était passé avec Malfoy et la rencontre avec la petite Fawny, mais j'ai l'impression que ce n'était que quelques secondes. Après trop peu d'autres baisers à mon goût, je le quitte à regret sous son autorité. Il ne veut pas que je perde trop de temps en sa compagnie et souhaite que j'aille renouer contact avec mes deux meilleurs amis. Il a raison, je ne veux pas perdre une amitié de sept ans tout cela à cause d'un excès de nervosité et une vulgaire engueulade.
Je repars tranquillement à la dérive dans les couloirs de Poudlard. Je vois défiler les portes une à une devant mes yeux embrumés par mon esprit qui divague. Je ne me rappelle même plus ce que je cherche dans cet établissement, mes pensées m'emmenant dans un autre monde qu'est le rêve. Je me revois dans les bras de Sirius, sa douce chaleur m'accompagnant encore dans le cœur tandis que l'image de la petite Fawny ainsi que le mot de passe me reviennent en mémoire. Tout devient flou dans ma tête, j'ai trop de choses à intégrer et mon cerveau refuse de trier les informations. Fawny apparaît alors finalement aux côtés de mon parrain qui me sourit tendrement… Non, je n'ai pas pu vivre cette scène… Je secoue la tête pour chasser cette image fausse de mes souvenirs et tente de retrouver mes esprits quand je tombe nez à nez avec mes amis, ces derniers venant de déboucher au dernier coin du couloir.
Ron me semble indécis, refusant presque d'être confronté à ma personne tandis qu'Hermione lui chuchote quelques mots d'un air autoritaire. Elle doit sûrement tenter depuis le début de la journée de me retrouver pour avoir une explication, supportant les supplications de mon meilleur ami, parfois trop peureux. Cette scène me fait pourtant sourire : ces deux-là se complètent plus qu'ils ne l'imaginent… J'arrive à leur hauteur et m'excuse brièvement, expliquant qu'en ce moment je suis un peu sur les nerfs et que je m'emporte facilement.
''- Harry… On est désolé aussi, on savait pas que ça te tenait à cœur à ce point… On t'as cherché pendant toute la journée et on ne t'as pas trouvé… Ou t'étais ?
- J'étais allé voir Sirius pour avoir quelques conseils quand j'ai eu une nouvelle vision de Draco recevant une lettre officielle de Voldemort… J'ai beaucoup de choses à vous raconter, mais pas ici…''
Comprenant que le fait de discuter en plein milieu d'un couloir n'est pas vraiment confortable et discret, mes deux amis me suivent jusqu'aux toilettes de Mimi Geinarde, là où nous avons l'habitude de tenir nos conseils. Une fois arrivé, Mimi vient nous saluer, comme à chaque fois, à l'aide de cris stridents et aigus. Une fois elle-même fatiguée de s'époumoner, elle se rassoit sur ses toilettes réservées tandis que Ron saute sur l'un des lavabos pour s'installer. Restant debout en compagnie d'Hermione, je débute mon récit détaillé, commençant d'abord par ma vision et terminant par mes nouveaux appartements.
''- Si vous voyez les chambres qu'on a, vous en seriez dingue !
- Tu nous fais voir ça se soir, hein ?
- Ron, là n'est pas le problème! Harry vient d'avoir une nouvelle responsabilité et tu ne penses qu'aux valeurs matérielles !''
Sur ce coup-là, 'mione n'a pas totalement tort. J'ai un peu l'impression que le directeur de cette école nous a gentiment logé dans ce luxe pour enrober le fait que nous risquons notre vie et que nous serons en première ligne lors de l'affrontement final. Comme lorsqu'on donne à un enfant en bas âge une sucrerie pour lui faire oublier la douleur qu'il éprouve parce qu'il vient de tomber… Un goût amer se fait sentir dans ma bouche face à cette vérité tandis que mon amie reprend son discours.
''Dis-moi Harry, Dumbledore ne vous a rien précisé de plus, comme ce que vous êtes censé faire ? A part vous entraîner, bien sûr…''
Je lui réponds négativement de la tête. C'est vrai que je trouve ça louche, moi aussi, qu'il ne nous ait rien conseillé. On ne sait même pas sur quoi nous devons exceller, ni comment nous devons nous y prendre. Hermione pense à la même chose que moi, je le vois dans son regard aux sourcils froncés, synonyme d'une intense réflexion. Apparemment, elle a l'air d'avoir trouvé une solution qui lui convient car ses traits se détendent, tandis que Ron joue à balancer ses jambes dans le vide, totalement déconnecté de la conversation.
''Bon écoute, voilà ce que je pense : à mon avis, Dumbledore vous fait confiance dans le sens où il pense que vous êtes assez grands pour vous débrouiller tout seul. Avec Ron, on va te chercher des renseignements sur ce que cette prophétie t'apporte de si génial, tu pourras alors orienter tes entraînements… En attendant, il va falloir que tu fasses des efforts pour ne pas t'entretuer avec Malfoy en essayant d'être plus mature que lui….''
Le débat est clos. Je dois être plus mature et attendre qu'on m'apporte les informations. Cela me va, mais est-ce que j'ai le droit entre temps de faire enrager un peu mon colocataire adoré ? Je crois que vue le regard qu'Hermione me lance, sérieux et déterminé, voire limite inquiet, je ne préfère même pas plaisanter sur ce sujet. En remarque, je ne suis pas obligé de lui raconter tout ce que je fais! Je me vois déjà en train de planquer ses chaussures ou autres affaires personnelles et jouer l'innocent face au regard plein de sous-entendus de Malfoy : ''Ah non non, je n'ai pas vu ton livre d'arithmancie''. Je m'en réjouis à l'avance !
Je quitte finalement mes amis après avoir pris des conseils auprès de Ron pour occuper Draco convenablement. Hermione juge qu'il est préférable que je rentre seul ce soir dans la tourelle aux tatoués, comme elle l'appelle si bien. Elle veut que je prenne d'abord mes marques dans ce nouvel environnement et que je m'installe à ma convenance. Peut-être, mais moi enfermé avec Malfoy dans une même tourelle, sans mes amis, à ne rien faire….ça risque sérieusement de dégénérer !
Je retrouve rapidement le chemin de mes nouveaux appartements et prononce distinctement le mot de passe au gros tableau représentant une jeune fée des glaces, peinture permettant de masquer l'entrée de notre nouvelle résidence. L'œuvre d'art bascule sur le côté, la fée aux couleurs pâles me faisant un petit clin d'œil charmeur, et je pénètre dans la tourelle propre et accueillante. Fawny a dû travailler très dur pour en arriver à ce stade éclatant. Les lieux ont un autre aspect que précédemment, la mosaïque ressortant plus vive et plus réelle.
Apparemment Draco n'est pas encore rentré, autant pour moi, et je compte bien découvrir le reste de ces luxueux appartements avant lui. Je me dirige alors vers la deuxième porte à ma droite, pièce jouxtant la porte menant à ma chambre et tourne la poignée d'un geste décidé. Je pénètre dans un petit escalier similaire à ceux des chambres mais descendant en profondeur. Je me retrouve dans une espèce de petit salon, une cheminée occupant une partie d'un des pans de mur, de grands fauteuils et une longue bibliothèque. Cela devait correspondre à une salle de détente car, tout en m'approchant des rayonnages de livres, je m'aperçois que les titres de ces derniers n'ont rien avoir avec un enseignement quelconque. Je caresse la couverture en cuir d'un bouquin et le tire de son emplacement tout en me retournant. Il est…là, assis dans un fauteuil, dans l'obscurité, me fixant de ses yeux gris et froids.
''T'étais où Potter ? Ca fait une heure que je te cherche et t'attends pour notre entraînement…. Tu es censé être à ma disposition, tu te rappelles ?''
Je me retiens de lui balancer le livre dans le visage face à son air si…hautain. Etre plus mature que lui, facile à dire 'mione, quand on a un abruti fini en face de soi !
