Protect-me

Chapitre 9

Un plateau repas ?

Il m'a planté là, au milieu du hall et je reste tel un patin à qui on a arraché sa raison de vivre. Au bout de quelques minutes pendant lesquelles je fixe inlassablement le dernier endroit où je l'ai vu, sa porte de chambre, je retombe sur terre et décide de quitter cet endroit. Pourquoi est-ce qu'à chaque fois que je confronte Draco dans cette pièce ça se passe mal ? Et toi, saleté de mosaïque qui me nargue, ça t'amuse ?

Je récupère d'un geste las la cagoule noire de Draco et l'emmène avec moi. Je ne tiens pas à ce qu'il tombe dessus et je vais veiller à ce qu'il ne l'utilise pas... Je pousse une nouvelle fois la porte de la salle à manger et m'affale sur l'une des chaises. Pourquoi est-ce que nous devons supportez autant d'emmerdes ? On avait rien demandé...enfin, j'avais rien demandé moi, pour Draco j'en sais rien ! A croire que le destin s'acharne sur nous... Entre cette foutue marque, mes problèmes relationnels avec Draco, son initiation, mes problèmes avec Sirius... Parlant de mon amant, faudrait peut-être que je songe à aller mettre les choses au clair ! Je suis bien décidé à ne pas me laisser traiter comme une poupée ! Enfin, là n'est pas le problème ! Quoique, cette foutue histoire me perturbe pas mal, il faut bien l'avouer ! De voir son petit ami réagir comme ça n'est pas vraiment très flatteur, il faut bien l'avouer... Mais merde à la fin, qu'est-ce qu'il attend de moi ce mec ? Que je sois à sa petite disposition ? A-t-il seulement pensé que moi...je voyais notre relation comme sérieuse et sentimentale ? Vu son comportement, il ne voit pas cela de la même manière. Je commence à avoir la nausée de penser que pour Sirius qui a connu tant d'hommes avant moi, je n'en suis qu'un parmi tant d'autres...

Fawny apparaît et pense que je suis là pour prendre mon repas alors me sert. Je débute mon assiette plus par automatisme qu'autre chose puis me dit que de reprendre des forces ne peut pas me faire de mal.

J'en reviens à mon problème relationnel avec Draco. Quitte à broyer du noir, autant passer tout en revue ! J'avoue ne pas bien comprendre son dernier comportement. J'admets que de devenir mangemort et d'en acquérir toute la signification derrière ne doit pas être vraiment facile à accepter, mais c'est notre situation qui fait que... Raaa mais pourquoi c'est tombé sur nous, nous, nous, NOUS ?

Maintenant Draco nous tape le syndrome du miséreux qu'on prend en pitié. D'ailleurs pourquoi il pense ça, j'en sais rien ! Je ne vois pas vraiment ce que j'ai pu faire qui aurait pu lui faire penser ça... Quoique, je l'ai quand même prit dans mes bras. J'arrive pas à en revenir : j'ai pris mon pire ennemi dans mes bras pour le consoler ! Ce gosse de riche, hautain fils à papa et irrespectueux ! Tout que je ne pouvais supporter il y a de cela quelques jours ! Certes, mais il faut bien se serrer les coudes comme on dit, et s'entraider...Dans tous les cas, j'espère qu'il arrivera à s'en remettre, avec ou sans mon aide.

Il est déjà près de 20h et toujours pas de Draco. A cette heure-ci, on a normalement presque fini de manger. Je commence à m'inquiéter et je ne peux le nier. Le Draco que je côtoie depuis quelques jours n'est pas le Draco que j'ai dû supporter durant toutes ces années. Celui-là ressemble à un petit enfant qui est perdu dans ce monde, et malgré tout ce qu'il a bien pût me dire ou faire, je ne peux m'empêcher de penser qu'il ne mérite pas tout ce qu'il subit : un père plus qu'autoritaire lui créant à l'avance sa propre destinée. Il est obligé de devenir un esclave parmi tant d'autre de ce pourri de Voldemort. Je n'aimerais pas non plus avoir ma vie gérée, ne pas avoir entre mes mains les rênes de mon futur...

Je crois qu'il a décidé de me fuir et de sauter le repas. Je ne sais pas pourquoi, mais je le sais à l'avance. Peut-être que je commence à le connaître et que je m'aperçois qu'il n'est pas foncièrement mauvais, ou alors est-ce un contre coup de la marque ? Fawny réapparaît pour débarrasser ma propre assiette et alors qu'elle s'apprête à repartir, je lui attrape le bras et lui demande un plateau repas pour mon colocataire. Je ne tiens pas à le retrouver mort de faim dans sa chambre tout ça à cause de son foutu orgueil !

Une fois avoir récupérer le fameux plateau dans lequel on pouvait y trouver un repas équilibré, je sors de la pièce et me dirige vers sa chambre. Je sais qu'il ne veut pas me voir, qu'il va encore considérer ça comme un acte de pitié, mais je tiens à le lui amener moi-même. Je regarde de nouveau le plateau puis ayant une idée, je commence à chercher dans les poches de ma veste. Trouvant une de mes barres chocolatées préférées, celle étant rempli de lait et enrobée de chocolat sucré qui me remonte toujours le moral, je lui rajoute à son repas. Une fois devant sa porte, je commence à hésiter avec mon plateau entre les mains et l'air niais que je vais avoir lorsqu'il va ouvrir la porte. Je décide alors de le poser à terre puis je frappe et repars dans l'escalier. J'entends quelqu'un qui ouvre lentement la porte alors je m'arrête dans la pénombre de la descente en colimaçon. Je l'entends renifler puis soulever le plateau.

''Harry ?''

Je retiens mon souffle. Je ne sais pas pourquoi, mais de savoir qu'il a pensé à moi me rend le cœur plus léger. J'ouvre alors la bouche pour lui répondre puis la referme. Je ne sais pas pourquoi mais aucun son ne veut franchir mes lèvres. Après tout, c'est peut être mieux comme ça. Il vaut mieux le laisser seul, au moins pour ce soir...

''Merci…''

A peine un murmure qui s'éteint dans l'atmosphère. .. De rien Draco. Je n'allais quand même pas te laisser crever de faim ! Il referme la porte derrière lui puis plus rien. Je continue alors silencieusement ma descente pour m'apercevoir de l'heure relativement tardive. Le couvre-feu des élèves est déjà tombé, je peux enfin sortir de ma tourelle. J'ai besoin de me changer les idées, de respirer un peu. L'air lourd qui occupe ses lieux commence à m'oppresser. Me munissant de ma cape d'invisibilité pour plus de sûreté si je croise un quelconque professeur ou élève en infraction, je sors délicatement de mes quartiers.

Je fais attention à chacun de mes pas, regardant où je pose mes pieds délicatement, sans aucun bruit. J'arrive devant un croisement de couloir et mon regard ne peut s'empêcher de se poser sur la droite, menant aux quartiers des professeurs. Je détourne lentement les yeux pour poursuivre mon chemin, en direction des dortoirs des Gryffondors. Je ne peux tout de même m'empêcher de soupirer. Je ne peux pas nier que cette situation me fait mal. Je ne pourrais pas rester indéfiniment dans ces conditions plus que délicates, mais je n'ai pas le courage d'avoir une discussion sérieuse avec Sirius, pas ce soir. Je fixe inlassablement le sol, me guidant plus par habitude des lieux qu'avec ma présence d'esprit. Mes pas se stoppent alors que ma tête heurte quelque chose de dur et froid. Je relève les yeux et tombe sur le portrait de la grosse dame. Trop surpris d'avoir atterrit ici sans même m'en rendre compte, je prononce le mot de passe au tableau qui pivote sur lui-même et me laisse entrer.

La salle commune est vide, et j'en suis plutôt rassuré. Je retire la cape de mes épaules tout en pensant que je n'aurais pas une horde de questions me submergeant à tout va ! Je gravis rapidement les escaliers qui mènent jusqu'au dortoir des garçons et tombe sur mon ancienne chambre. J'ouvre délicatement la porte et entre à pas feutrés, m'approchant du lit de mon meilleur ami. Les rideaux sont fermés, comme à leur habitude lorsque Ron dort, alors je m'avance et entrouvre légèrement les longs pans de tissus rouge et or.

''Ron ! Ron !''

Je cherche à tâtons son bras ou une de ses épaules pour le secouer et le réveiller, mais sans succès. Je tombe sur un visage serein et doux qui ne ressemble nullement à celui de mon meilleur ami... Une voix féminine à moitié endormit et plaignante réponds alors à mon intrusion.

''- Hum...Ron...Qu'est-ce que tu fais ? C'est ma tête là...Laisse-moi encore dormir...

- Hermione ?''

Je crois que j'ai crié un peu trop fort car l'intéressée se relève précipitamment. Un autre gémissement m'informe ensuite que mon meilleur ami vient lui aussi d'être réveillé.

''-Harry ? Mais qu'est-ce que tu fais là ?

- Ba heu... J'avais besoin de vous voir et comme les dortoirs des filles sont inaccessibles, j'avais pensé parler à Ron en venant ici mais... Vous avez pas perdu de temps dites-moi ! Je m'absente une semaine et voilà le résultat...

- Oui bon, ça va hein ?''

J'aime tellement taquiner mon meilleur ami pour qu'il me sorte son infatigable '' Oui bon, ça va hein ?'' qui m'amuse à souhait ! Mais la question du jour n'est pas là, même si ça me fait extrêmement plaisir de les voir... J'aperçois dans l'obscurité Ron qui se relève lui aussi et qui prend 'mione dans ses bras. Une fois tous les deux assis confortablement, mon meilleur ami m'invite à m'installer à mon tour.

''Aller, rentre va ! Tu vas pas rester dehors...''

Je m'assois alors à mon tour face à mes deux amis et une fois avoir refermé les rideaux à doublures de velours derrière moi, ma meilleure amie lance un sort pour nous éclairer. ''Lumos''. Je les observe lentement, sentant mes yeux briller de joie face à cette vision si tendre... Hermione plaque contre elle la couverture, ses épaules dénudées entourées par les bras de mon meilleur ami. La tête de ce dernier prend appui avec douceur et attachement sur l'omoplate fine de sa bien-aimée, l'entourant d'un halo chaleureux et protecteur. Les joues de 'mione prennent une légère teinte rosée se rendant compte dans quelle situation je les retrouve...

''- Comment vous avez fait pour dormir ensemble ?

- On a attendu dans la grande salle que tout le monde soit couché et puis j'ai emmené 'mione avec moi... Avec les rideaux, il n'y a pas vraiment de risques. Enfin, sauf quand on s'appelle Harry Potter et qu'on surgit de nul part au lieu de s'occuper de son cher et tendre Draco Malfoy.''

Ron change de tête lorsqu'il s'aperçoit que je n'ai fait aucune grimace de dégoût.

''- Nan, ne me dit pas qu'il t'a...enfin...tu vois quoi !

- Ah non non ! C'est juste que voilà...quand t'apprends à le connaître tu comprends peut-être un peu plus pourquoi il réagit comme ça. Enfin, ça reste toujours Draco quoi mais...

- Attends, j'ai bien entendu, tu l'as appelé Draco ?

- Heu...Oui...''

Je commence à bredouiller tout seul et c'est à mon tour de rougir légèrement... Je leur explique brièvement les derniers évènements en date, comme quoi Draco a reçu la marque et qu'il n'a pas vraiment l'air d'apprécier. Ron ne semble rien dire sur le fait que j'ai tenté de consoler mon colocataire, mais Hermione se permet de le souligner.

''- Tu l'as...pris dans tes bras ?

- Bah vite fait quoi...

- Si un jour on m'aurait dit que tu prendrais Malfoy dans tes bras, je ne l'aurai jamais cru...

- Oui bah c'est fait c'est fait ! Et puis c'est toi la première qui voulait qu'on s'entende bien, alors...

- C'est pas une raison pour tourner autour de lui alors que t'es avec Sirius !''

La dernière phrase laisse un gros blanc. Les yeux d'Hermione n'annoncent pas de bons présages, me lançant des éclairs de feu.

''- Je ne tourne pas autour de Draco ! Et comment vous savez, pour Sirius ?

- Après votre petit 'incident' il est venu nous voir...

- Franchement Harry, t'aurai pu nous en parler ! J'croyais être ton meilleur ami moi...

- Comme si c'était si simple... Tu sais, quand ça c'est fait, j'étais super content et j'avoue que j'avais un peu peur de votre réaction. Moi avec un homme...

- Comme si on ne t'avais pas déjà accepté tel que tu es..

- Oui et bien je m'excuse ! Vous, vous n'êtes pas venu toquer à ma porte pour m'annoncer que vous alliez dormir ensemble cette nuit, si ? Et puis je peux pas sortir comme je veux de c'te tourelle. La dernière fois, je me suis fait agresser par des cinquièmes années avec des questions les unes plus débiles que les autres...

- Hum...oki... et pour Sirius, tu comptes faire quoi ?

- Pour être franc 'mione, j'en sais franchement rien... Je compte aller le voir pour avoir quelques explications, mais...

- Mais ?

- Bien...vu comment il a réagi avec moi, je n'espère plus grand chose...

- Oh...t'as trouvé quelqu'un d'autre ?

- Très drôle, Hermione ! Et qui veux-tu que je trouve dans la tourelle ?''

Les questions de ma meilleure amie se font de plus en plus oppressantes, comme si elle veut me faire avouer quelque chose même si son regard s'adoucit, devenant presque amusé. Elle comprend ma réaction vis-à-vis de Sirius et je la remercie silencieusement. Finalement, les deux amoureux se regardent et échangent un sourire puis Ron reprend la parole, une petite lueur de malice dans les yeux.

''- Draco pardi !

- Pff...Moi et Draco...Ça va pas la tête ? T'as fumé ou quoi ? N'importe quoi ! Moi et Draco... C'est un Serpentard et qui plus est mangemort, adepte de celui qui veut ma peau depuis que je suis né ! Et puis son père peut pas me sacquer et lui non plus d'ailleurs alors... Nan mais tu réalises ce que tu essayes de me faire imaginer ?

- Oui je réalise...Tu te cherches tout plein d'excuses, ce qui est loin d'être anodin..''

Un petit clin d'œil échangé avec sa petite amie et ils rirent légèrement. Ron est partant pour me taquiner davantage mais Hermione change vivement de sujet.

''- Et pour les entraînements, ça se passe comment ?

- Pour l'instant,ça c'est plutôt bien passé, si on fait abstraction à tous les sarcasmes qu'il m'envoi...

- Ah, tu vois, tu reparles encore de lui !''

A cette dernière remarque, Ron reçoit un coup de coude de la part de sa petite amie qui aimerait s'informer sur mon état psychologique et autres nouveautés de ma vie.

'' Sinon j'ai débuté cet après-midi une nouvelle discipline, l'invocation...''

Les yeux d'Hermione se mettent à briller. Ne me dites pas qu'elle connait ça aussi ? Je sais que d'un côté elle me pose toutes ces questions car elle aussi aimerait suivre cet entraînement, mais... Je n'ai pas choisi ma place et même si je découvre un nouveau Draco chaque jour, j'aurai peut-être préféré rester dans ma petite vie de routine... Ron a pas si tort que ça, je parle beaucoup de Draco...

''- J'ai déjà entendu parler d'invocations. C'était au temps des anciens, il y a des siècles de cela ! Une guerre avait éclaté entre les différentes communautés de sorciers... Et les sacrifices d'âmes avaient amenés à des..

- Chimères. Oui, c'est ce qu'on m'a expliqué aussi... Enfin, ça c'était y a longtemps... Au jour d'aujourd'hui je dois maîtriser les chimères de défense.

- Ha... Alors c'est toi qui a la plus grande marque... ?

- Oui. Draco n'a pas voulu me montrer la sienne mais je préfère lui faire confiance...après tout, il a ma vie entre ses mains et moi pareil, alors je ne vois pas l'intérêt qu'il aurait à me mentir.

- Ca va de soi... ''

Je raconte ensuite ma dernière invocation en date et cette description fait briller de nouveau les yeux de ma meilleure amie. Je sais qu'elle aimerait voir à quoi ressemble Ahurie, mais je me vois mal leur faire une démonstration là, maintenant, tout de suite ! Je termine tout de même en lui promettant de lui montrer dès que possible ce qu'est une invocation. On parle ensuite de tout et de rien, mes amis me racontant les derniers malheurs de Neville en cours de potions tandis que je m'écroule de rire. Ces moments passés avec mes amis me manquent et je profite de cet instant de pur bonheur pour intégrer tous les moindres détails de cette discussion.

Les minutes passent tellement vite lorsqu'on passe d'agréables moments... Nous sommes déjà au milieu de la nuit et je vois qu'Hermione baille à s'en décrocher la mâchoire. C'est vrai que demain ils ont des cours et moi un entraînement à suivre... Je décide alors de les laisser là. Une fois être ressorti du petit cocon amical, je passe devant mon ancien lit pour sortir du dortoir. Une fois devant la porte, je me retourne. Il est si tentant...

Je m'approche alors de mon lit tandis que Ron passe la tête à travers ses rideaux. Il voit mon ombre se déshabiller et se glisser sous les couvertures pour enfin refermer les pans de tissus rouge et or pour m'enfermer à mon tour.

''- Tu restes là Harry ?

- Mouais...Je peux pas me décider à retraverser le château et ces couloirs froids alors que je peux dormir ici.

- Tu voudras qu'on te réveille en même temps que nous, avant que les autres ne se réveille ?

- Si ça ne vous dérange pas, oui...

- Ça fait plaisir de te revoir Harry...

- Moi aussi ça me fait plaisir de vous voir 'mione...

- Bonne nuit...

- Bonne nuit les amoureux...''

Les bras de Morphée ne tardent pas à venir m'enlacer lentement avec douceur. J'aime cette douce sensation de bien-être, le cœur ralentissant sa course et le souffle se faisant plus régulier. Emmitouflé sous mes couvertures, je serre l'oreiller contre moi mais... il ne ressemble pas à la douceur du coton des dortoirs des gryffondors mais plus à celle du satin de mes nouveaux appartements. Je ne me reconnais pas, serrant davantage le coussin et en y enfouissant mon nez, je respire la douce odeur qui s'y trouve. Je fais ces derniers gestes presque par désespoir et cette odeur semble m'apaiser alors je continue à m'emmitoufler dans ses couvertures qui semble ne pas m'appartenir. Pourtant...elles me semblent si familières... J'ouvre les yeux et m'aperçois que je me trouve dans mon lit, dans la tourelle au tatoués. Même couleur, rouge et or, mais les tissus sont plus soyeux, plus luxueux. Je referme finalement les yeux, ne cherchant pas à comprendre la signification de ma présence en ces lieux, et je repose possessivement ma tête sur cet oreiller qui me plait tant. Je ne sais plus où je suis, j'ai perdu la notion du temps et de l'espace, mais une chose est sûre : je dors à poings fermés et mes propres songes tentent de me jouer de drôles de tour...

La pénombre de la nuit a déjà envahi les couloirs de Poudlard depuis déjà quelques heures. Le silence règne sur les longs corridors vides de toute trace de vie et pourtant... Une petite étincelle de lumière tente de survivre dans cet air froid et presque lugubre, dansant régulièrement selon les mouvements de son propriétaire. Des reflets clairs apparaissent sur des cheveux bruns, longs, à moitiés emmêlés et désordonnés depuis déjà des années. Un pas se fait bientôt entendre aux alentours de la tour des tatoués, un résonnement bref et rapide, déterminé. Après avoir lancé un sort légèrement plus intense, mettant de côté le côté discret de la petite lueur, le jeune homme posa sa baguette à même le sol. Le corridor précédant la porte d'entrée de la tourelle tant désirée est désormais totalement éclairé d'une douce lumière pâle et tamisée, mais suffisante pour apercevoir les contours de la lourde porte en chêne. L'ombre de l'individu se rapproche lentement de son but et tâte de la paume de sa main le bois rugueux venant accrocher sa peau à quelques endroits. Il observe les moindres reliefs significatifs ou non de cette entrée pour finalement se rendre à l'évidence: sans le mot de passe détenu par les deux seuls occupant de cette tourelle, c'est fichu.

Il souffle, relâche quelque peu son attention mais reprend son courage ainsi que son observation méticuleuse. Peut-être le secret de cette entrée réside-t-elle ailleurs que dans un simple mot prononcé? Il commence alors à tenter de pousser une première pierre puis une seconde, sans succès. Il finit par perdre patience, la chaleur montant en lui lentement en une douce colère froide. Il essaie alors d'actionner désespérément un quelconque mécanisme en se pendant aux chandeliers qui encadrent ce pan de bois mat, mais le tout reste obstinément clos... Là n'est pas le secret et il le sait, ce qui l'énerve encore plus. Pourquoi le sort s'acharne-t-il encore et toujours sur lui? Il veut simplement entrer, pouvoir voir le simple fruit de son désir lui dire que...

Et merde! Ce n'est pas un sujet à aborder dans ces temps de crises alors que l'homme perd littéralement patience. Il ne peut plus retenir ses poings qui viennent frapper avec colère le mur de pierre. Ses jointures lui font mal, devenant peu à peu blanches après l'impact subit contre la surface froide et dure, mais il ne dit rien. Même pas un gémissement traduisant sa douleur physique moindre comparée à sa douleur sentimentale... Mais après tout, il en a déjà vu des pires. Il sert les dents tel un chien atteint de rage, tentant de se calmer, mais le doux visage de son bien aimé lui revient en mémoire dans un geste de refus. Voir l'homme qu'il convoite plus que tout le repousser une nouvelle fois, que ce soit en réalité ou dans ses souvenirs, lui est insupportable. Son pied droit vient alors percuter successivement le pan de bois dans une folie sentimentale. Il perd le contrôle de ses propres actes, il croit perdre la raison par amour...

Une autre ombre s'approche lentement, calmement, de façon posée et supérieure. Elle commence à observer la première tandis qu'un petit sourire sarcastique se forme sur les lèvres froides et blanches de ce nouvel arrivant. Ce dernier sait d'ailleurs ce qu'il se passe, il a compris ce que venait faire là son collègue de travail et considère cette scène vraiment très amusante. Il ouvre alors silencieusement la bouche, lève un sourcil et laisse tomber sa remarque pertinente et froide, voulant au maximum faire honneur à son statut de redouté professeur de Potions.

''Sirius Black, mon très cher collègue… Pourrais-tu pourrais m'expliquer brièvement ce que tu es en train de faire...?''