Disclaimer : Le monde d'HP appartient à Rowling...
Chapitre 4/ En catimini.
La formule d'Alceste… Dans l'antiquité, le tragédien Sophocle racontait une bien étrange histoire. Un homme se fit un jour prédire sa mort prochaine. "Tu peux échapper au destin" lui dit la pythie (prêtresse devineresse) "si tu trouves quelqu'un pour mourir à sa place." Il alla quérir son père mais celui-ci refusa de se sacrifier en prétextant qu'il avait encore de belles années devant lui. Au final, c'est son épouse Alceste qui accepta l'offre à condition qu'il lui soit fidèle dans son veuvage. Bien entendu, cette histoire se termine par un happy-end forcé car le demi-dieu, Héraclès, ému par le courage de la jeune femme, décida d'aller la chercher jusque dans les Enfers. La formule d'Alceste consistait en ce principe : pour un sort particulier, on peut immuniser quelqu'un à condition qu'une autre personne le subisse à sa place. Joyce savait déjà qui serait la "garantie" de Rogue, mais le plus dur était encore de jeter le sort au professeur sans que celui-ci ne s'en aperçoive. Elle aurait pu lui parler directement mais l'aurait-il seulement crue ? Une autre complication résidait dans le fait qu'il fallait des ingrédients spécifiques afin de fabriquer une petite potion dont elle aspergerait sa faux. Ensuite, il ne lui resterait plus qu'à tracer un cercle tellurique, s'arranger pour que Rogue soit au milieu et enfin le tailler avec la lame imprégnée du liquide. (Trop fastoch !)
- Du gâteau ! S'écria Korée quasiment épouvantée.
Parcourir la forêt en sens inverse fut sans nulle doute plus court : Joyce courait avec précipitation et affolement. Il était presque 4 heures du matin quand elles arrivèrent au château.
- Voilà, haleta-t-elle, on a le temps pour voler ce qu'il nous faut dans le bureau de Rogue !
- Oula ! Répondit la fillette, t'es trop fatiguée, là ! Remettons ça à demain !
- On ne sait pas quand "ça" va arriver, Korée ! Il faut agir le plus vite possible !
- On ne sait pas si "ça" arrivera tout court ! Je te trouve bien présomptueuse ! Tu crois avoir la science infuse ? Tu penses réussir le sort d'Alceste comme ça ? Parce que ton petit cœur l'a décidé ? C'est déjà surprenant que tu le connaisses ! Réveille-toi, ma pauvre fille! Tu es peut-être en 6ième année mais je te rappelle qu'en réalité tu n'as que 14 ans !
Joyce "rangea" sa faux et s'engouffra par une petite porte qu'elle savait toujours ouverte. Korée la suivit à contre-cœur. La jeune fille s'était murée dans un hostile silence. Ses pas la conduisirent rapidement vers les cachots. Sans attendre, elle ouvrit le bureau de Rogue et se faufila à l'intérieur. Elle fit scintiller une flammèche bleue au bout de sa baguette levée et s'approcha du placard où se trouvaient tous les ingrédients. Si elle se contentait de dérober ceux qui lui seraient utiles, Rogue serait capable de comprendre quelle potion le voleur comptait fabriquer… Aussi, elle déroula la housse où Korée se trouvait enveloppée et y jeta une trentaine de produits.
BOOOING !
Un bruit épouvantable résonna dans tous les cachots.
- Mince ! S'exclamèrent les deux cambrioleuses à l'unisson, Peeves !
Les grognements de Rusard ne tardèrent pas à se joindre aux railleries de l'esprit frappeur. Joyce, prise d'une incontrôlable panique, ferma la porte dans un immense fracas et… se retrouva coincée dans le bureau de Rogue.
- Bon sang ! Cria Korée, tu fais fort là ! Normalement on aurait du SORTIR, tu le sais, ça ?
- Et si Rusard n'était pas loin de la porte ! s'inquiéta Joyce, j'arrive pas à déterminer d'où vient sa voix !
Il était cependant trop tard, Rusard avait entendu la porte se refermer et avait accouru vivement. Joyce, avec l'aide de Korée, cala un fauteuil contre l'entrée.
- Ouvrez ! Hurla le concierge, je sais que vous êtes là !
Aucune des deux amies n'osait parler, de peur d'être reconnue, elles se regardaient, hébétées. La fillette gardait toutefois une certaine rancœur au fond de ses yeux dorés : c'était la faute de Joyce si elles se retrouvaient dans un tel pétrin. Elles avaient bien remarqué une petite porte dans le fond du bureau mais elle était fermée à clé.
- Que se passe-t-il, Rusard ? Dit une voix implacable.
C'était Rogue… Joyce sentit ses entrailles se vider d'un coup. Elle aurait donné n'importe quoi pour se retrouver tranquillement au fond de son lit, paisiblement endormie.
- Ouvrez ! Siffla Rogue en tapant contre la porte.
- Cette racaille n'ose même pas réponde, maugréa le cracmol.
Les coups se firent plus violents"ils essaient de l'enfoncer " s'alarmèrent les deux voleuses. Le professeur de potion perdit rapidement son sang froid :
- Je vous laisse une dernière chance, sinon je fais exploser la porte !
Joyce serra contre elle le drap contenant ses larcins et Korée qu'elle étouffait presque.
"C'est pas possible ! Je veux partir ! Partir ! PARTIR "
- Un ! Cria Rogue.
"Me volatiliser "
- Deux !
"Disparaître "
- Trois !
"Maintenant "
- Perire !
La porte vola en éclats, le fauteuil fut propulsé en arrière, mais Rogue resta abasourdi. Rusard passa son affreuse tête dans l'ouverture béante :
- Il n'y a personne !
Seule flottait dans l'air une épaisse fumée rouge.
Shun avait mis son réveil très tôt ce matin-là pour finir son devoir de "Défense contre les forces du mal". Confortablement installé dans la salle commune des Gryffondors, il tentait vainement de se souvenir de la différence entre les silènes et les satyres. Une boule de feu apparut soudainement au milieu de la pièce, il sursauta et se cala contre le dossier du divan. Une épaisse nuée écarlate se diffusa aux alentours et une fille sortit brusquement de la brume sanguine :
- Korée ! Cria Joyce avec enthousiasme tandis que les ingrédients de Rogue s'étalaient sur le sol, on a réussi ! On a transpl…
Elle se figea net devant le visage abruti de Shun.
- Tu dois me jurer de ne rien dire à personne ! Acheva Joyce dans une plainte.
Shun se tenait assis à une demi-douzaine de mètre d'elle. Il arborait une mine soupçonneuse. L'adolescente avait tenté de lui expliquer les derniers évènements dans leur globalité. Bien entendu elle n'avait aucunement évoqué sa faux ainsi que sa prédiction au sujet de Rogue.
- Tu peux ré-expliquer plus lentement ? Finit-il par dire.
- Oki, soupira-t-elle, cette nuit je suis allée détruire mon jeu de cartes. Tu sais, c'est comme le lait, quand le jeu tourne, il faut le jeter. Seulement j'ai vu que quelqu'un allait mourir. Alors pour changer ça, je suis allée voler des ingrédients pour préparer une potion qui me permettra de sauver cette personne…
- Admettons ! Mais ça n'explique toujours pas comment tu transplanes !
- Comment veux-tu que nous nous justifiions ! Intervint Korée avec colère, on est aussi surprises que toi ! Mais tu ne dois en parler à personne ! Surtout pas à Malicia !
Joyce se rapprocha et s'accroupit juste devant lui, elle posa une main décidée sur son genou.
- Tu ne vas pas me demander en mariage ? Marmonna-t-il, gêné.
- Nous verrons cela plus tard, ricana-t-elle. Ecoute, c'est très sérieux. Si je suis venue à Poudlard, c'est dans l'unique but d'échapper aux miens. Si tu dis quoi que ce soit, la rumeur se propagera et ils devineront que je suis là…
- Et que se passera-t-il ?
- … Je mourrai.
Elle se releva lentement. L'aurore transperçait doucement les volets, dessinant sa silhouette dans l'obscurité. Shun contempla la tête auréolée de la jeune fille. Un air grave avait envahi son visage, elle paraissait indifférente, nantie d'une indélébile froideur.
- Ce sont des gens si mauvais que ça ?
- Tu n'as pas idée…
Il se remémora le jour où elle était arrivée à Poudlard : elle avait été si maigre, si pâle, comme si elle avait demeuré enfermée depuis des lustres, ses yeux brillant d'une profonde mélancolie.
- Bon, je veux bien te croire… admit-il.
La figure de Korée se teinta du rouge de la jalousie tandis que Joyce souriait avec douceur.
Jamais Rogue n'avait paru aussi en colère. La nouvelle du vol se répandit comme une traînée de poudre et prit des proportions démesurées. Interprétant avec trop de ferveur le témoignage (ou plutôt les mugissements) du concierge, on finit par en convenir qu'un groupe d'élève avait totalement saccagé le bureau avant de prendre la fuite sous le nez de Rogue et de Rusard, les ayant supéfixiés au passage. Pendant les pauses, les plus curieux se glissaient jusqu'aux cachots pour admirer la porte détruite, ignorant que c'était Rogue lui-même qui s'en était chargé.
Pendant le cours de potion, le professeur se montrait particulièrement agressif. Même les serpentards n'osaient plus bouger. Joyce se sentait d'autant plus mal qu'elle était persuadée que la culpabilité se voyait sur son visage. A son grand soulagement, Shun simulait parfaitement l'ignorance et il tendait même à l'encourager de coups d'œil rapide.
Juste avant la fin de la séance, elle renversa sa fiole de liqueur d'aquadrille.
- Je suppose, rugit Rogue, que si je vous fais la moindre remontrance, vous allez encore vous évanouir ?
Elle saisit rapidement une éponge et se mit à nettoyer frénétiquement. Les élèves rangèrent leur affaire et commencèrent à se lever dans un silence religieux.
- Je t'attendrai devant la porte, souffla Shun.
- Dépêche-toi, lui chuchota Malicia, il est pas de bonne humeur.
Joyce n'avait pas du tout envie de se retrouver seule avec Rogue, elle savait qu'il lui suffirait d'une seule question pour qu'elle se trahisse lamentablement.
Elle rinçait son éponge quand elle réalisa que Rogue l'observait depuis déjà un bon moment.
- Je vois que vous allez mieux, dit-il d'une voix doucereuse. Mais vous semblez encore un peu fatiguée.
« Tu parles ! J'ai fait nuit blanche à cause de toi ! »
- En outre, il est très gênant que vous perdiez vos moyens face à un serpent. Savez-vous que les potions les utilisant sont très fréquentes aux examens de B.U.S.E. ?
« Pourquoi il me parle de ça ? »
- Je suis désolée, murmura-t-elle…
« … d'avoir pillé votre armoire »
- … d'avoir perturbé le cours la dernière fois, mais je ne parviens pas à manipuler les serpents.
- J'avais bien vu…
- Je ferais des efforts, dit-elle avec une voix faiblissante.
- J'en doute.
- QUOI ! Fit-elle, indignée.
Une de ses mains se cala d'horreur contre sa bouche tandis que Rogue sourcillait, elle reprit avec une voix d'avantage chevrotante :
- Pourquoi dîtes-vous ça, professeur… Je ne suis peut-être pas douée mais q-quand même…
Rogue lui tourna le dos et se rendit directement à son bureau. Une fois assis, il commença à feuilleter des copies d'élèves.
- N'est-ce pas évident, dit-il d'un ton autoritaire, vous êtes de ceux qui se jettent dans la bataille seulement s'ils sont surs de remporter la victoire. Vous ne travaillez que si cela vous flatte, votre concentration dépend de la facilité avec laquelle vous allez pouvoir mener votre action. Un peu comme les enfants…
C'est fou comme il lui faisait penser à sa sœur. Pas à cette détestée jumelle mais à sa grande sœur. « Ne prends pas tes grands airs avec moi ! » disait-elle toujours en serrant les dents, « sans ta faux, tu ne serais rien. Cette arme est un don du ciel, quel dommage que celle qui en a héritée soit incapable de l'apprécier à sa juste valeur ! »
- Vous pensez que je ne ferai aucun effort parce que…
- …Vous ne le voulez pas réellement.
La porte s'entrebâilla, la tête de Malicia apparut discrètement :
- Joyce, souffla-t-elle, qu'est-ce que tu fais, on a cours !
- Heu, oui ! Excusez-moi, dit-elle en s'adressant à Rogue, je dois partir.
Il ne répondit même pas. Joyce vola à travers la classe et rejoint ses deux camarades. Se précipitant dans les couloirs, elle réfléchissait : où pourrait-elle préparer la potion ? Shun qui était maintenant au courant l'aiderait certainement mais comment se débarrasser de Malicia ?
- Encore en retard après le cours de Rogue ! S'écria Korée qui venait d'arriver en flottant. Je vais aux cuisines me chercher une douceur, bonne chance !
Ils arrivèrent enfin au cours de métamorphose, le professeur Macgonagall les accueillit avec un regard noir.
- Le professeur Rogue, gémit Malicia.
- Mesdemoiselles ! Siffla le professeur, et monsieur, ajouta-t-elle en posant les yeux sur Shun, vous n'allez pas toujours utiliser la même excuse !
Ils s'assirent d'un air morose. Et une idée avait germé sous la chevelure châtaine de Joyce. Elle attendit la fin du cours. Pendant que tous se dirigeaient vers la salle du banquet, elle accourut vers la directrice de Gryffondor :
- Excusez-moi professeur, je voulais savoir, est-ce que les élèves peuvent "réserver" une salle de cours pour s'entraîner à la préparation des potions ?
Devant les lunettes inquisitrices, elle ajouta :
- Ce n'est pas une matière comme les autres, on ne peut pas s'entraîner dans les dortoirs… C'est pourquoi je voulais votre autorisation pour…
- Il serait plus logique que vous consultiez le professeur Rogue, miss Happer.
- Ho, non ! Il se moquerait. Et il n'acceptera pas puisque soi-disant mon ego démesuré ne fait des efforts que si et seulement si cela me flatte.
Elle avait prononcé cela d'une voix catastrophée. Macgonagall, esquissant un léger sourire, finit par acquiescer :
- Très bien, miss Happer, mais il ne serait pas juste que vous soyez la seule à en profiter. Tentez votre chance du côté du directeur. Préparez un petit mot, une sorte de lettres de motivation et nous verrons ce que cela donnera.
- Une association de potions ! S'exclamèrent Shun et Malicia en même temps.
Joyce laissa tomber sa fourchette en gémissant :
- Pas si fort ! Je ne veux pas que cela s'ébruite !
Elle avala avec rage un morceau de poulet et poursuivit :
- Je n'ai pas le choix, si je veux…
Shun fronça les sourcils.
- … m'exercer dans la préparation des potions, je dois fonder un club. Ce qui m'énerve, c'est que je ne voulais pas que Rogue soit au courant mais les séances se tiendront dans sa salle.
- Il a donné son accord ? Demanda Malicia.
- Je crois que l'administration a du lui imposer, aucune autre salle n'a été aménagée dans cette optique, et les autres profs n'auraient jamais accepté.
Elle lacéra un morceau de steak avec désespoir.
- Ne t'en fais pas, dit Shun, tout se passera bien, tu ne devrais pas avoir beaucoup d'adeptes.
- J'espère ! De toute façon, je ne compte pas faire de la pub…
- Ho, ho ! Trop tard ! Regarde !
Leurs trois paires d'yeux volèrent en direction du bout de table : le préfet des gryffondors s'était levé et réclamait le silence. Le cœur de Joyce palpita.
- J'ai un message de la direction, prononça-t-il avec un air solennel. Un club de potions va ouvrir ses portes. La première séance aura lieu ce soir sous la direction de… la présidente du club Happer Joyce. N'hésitez pas à venir nombreux.
- C'est celle qui a peur des serpents ? Dit une voix.
- Mais elle est nulle en potion, elle !
- C'EST BIEN POUR CA QUE JE FONDE UN CLUB ! Hurla l'intéressée, WEASLEY ! J'AVAIS DEMANDE QUE CA RESTE DISCRET !
- Hé, faut se calmer !
- Elle est folle celle-la !
Elle plongea les yeux dans son assiette, rouge de colère.
- Les profs m'ont entendu ? chuchota-t-elle avec inquiétude.
- Oui, dit Malicia à voix basse, Rogue n'a pas l'air du tout content. Mais ça va, ils se remettent à manger comme si de rien n'était.
Après les cours, Joyce se rendit à pas feutrés à la salle de potion : Rogue n'y était plus et personne n'était encore arrivé. Elle poussa un soupir de soulagement et se cala contre le bureau en guettant la porte. Korée ne tarda pas à arriver suivie de près par Shun et Malicia :
- Alors, se plaignirent-ils, tu ne nous attends pas !
Joyce poussa un petit couinement plaintif.
- Quel sera le programme ? réclama Malicia avec enthousiasme, qu'est-ce que tu nous as préparé ?
- Je vais me contenter d'une première approche pour l'instant. Susurra l'aimable présidente.
Enfin, des bruits de pas résonnèrent dans le couloir. Trois élèves de Serdaigle entrèrent, l'une d'eux étaient en 6ième année, les deux autres en 5ième. Deux gryffondors de 5ième année vinrent à leur tour, un garçon fébrile et joufflu poussé par une jeune fille aux cheveux longs, ébouriffés et à l'air sûre d'elle. 6 élèves de Poufsouffle, toute section confondue, firent leur entrée. Joyce sursauta en voyant leur nombre. Finalement, un serpentard arriva et s'installa dans un coin de la pièce en silence.
« Depuis quand ces vendus de serpentards ont des ennuis en potion ? »
- Bonjour, dit Joyce avec un sourire forcé, merci d'être venu si nombreux. Pour essayer de voir ce que nous allons faire ensemble, j'aimerai savoir si vous êtes ici pour le plaisir de faire les potions ou parce que vous estimez que vous avez besoin d'aide et de vous entraîner.
Des murmures s'élevèrent, Joyce entendit de vagues "besoin d'aide" s'étioler avec des "Rogue trop sévère".
- Je suis rassurée, poursuivit-elle, c'est tout à fait mon cas ! Shun et Malicia au premier rang pourront témoigner.
- Une vraie horreur, confièrent-ils.
Quelques élèves gloussèrent. Joyce était ravie qu'il règne une ambiance aussi détendue, c'était assez inhabituel dans cet obscur cachot.
- V-vous pensez, dit le garçon de gryffondor, qu'on arrivera à faire des progrès ?
Joyce le fixa :
- Comment t'appelles-tu ?
- N-Neville Londubat.
Il était clair que son attitude le montrer qu'il n'avait absolument confiance en lui.
- Ecoute Neville, dit-elle en plissant les yeux, l'on raconte de part le monde que chaque chose a son contraire, n'est-il pas ?
- Heu… Oui…
Toute l'assistance fit de grands yeux ronds.
- Or, continua Joyce, la perfection n'existe pas, donc la NULLITE ABSOLUE ne peut pas exister non plus, c'est impossible, c'est métaphysique ! Nous pouvons tous apporter quelque chose dans ce cours. Le but ici est de s'entraider les uns les autres. On ne pourra que s'améliorer ici.
Les élèves approuvèrent d'un signe de tête.
- T'es assez space comme fille, dit la Serdaigle, je l'avais déjà remarquer dans nos cours en commun.
- Bon, dit un poufsouffle, c'est pas tout ça, mais comment on va s'organiser ?
- Permettez-moi, reprit Joyce, de faire une modeste proposition. Comme nous sommes chacun dans des classes différentes, nous n'aurons pas à travailler sur les mêmes potions. Donc, il faudra définir une sorte de planning au moins une semaine en avance pour que je puisse réunir les ingrédients nécessaires à nos essais.
- D'accord, intervint un Serdaigle, mais c'est toi qui t'occuperas de les réclamer au vieux Rogue.
- Et aussi, dit Malicia, il faut voir à quelle fréquence nous nous verrons.
- Nous avons droit à deux séances par semaine, répondit Joyce.
- Nous ne sommes pas obligés de venir à chaque fois ? dit un autre poufsouffle.
- Bien sur que non, rétorqua Shun, on pourra faire deux groupes et tourner. Ceux qui veulent venir aux deux séances pourront quand même.
Ils papotèrent encore un peu, fixant les derniers détails. Joyce s'était assise sur le bureau de Rogue, complètement détendue. Elle ne pensait pas que cela aurait été si facile. Cependant il lui fallait trouver un moyen de préparer sa potion sans se faire prendre par les autres élèves.
Elle entraperçut une ombre dans l'embrasure de la porte. Instinctivement, elle se remit debout et réalisa que son intuition ne l'avait pas trompée (une fois n'est pas coutume) : Rogue venait de rentrer. Certains élèves, qui s'étaient eux-aussi assis sur une table, se redressèrent fébrilement; les autres se retournèrent sans rien dire.
Le professeur s'avança jusqu'à Joyce qui rentra la tête dans ses épaules.
- Ne faites pas la tortue ! Marmonna-t-il.
Elle rougit et rehaussa le cou.
- Je suis ravi, poursuivit-il, de constater quelle attraction exerce sur vous ma matière. Je suis d'autant plus heureux de voir l'inauguration d'un tel club que je suis l'un des derniers à avoir été mis au courant.
Joyce avait l'impression qu'on lui assénait des petits coups de marteaux sur les tempes.
- J'ai eu l'idée, susurra-t-elle en se dandinant sur la pointe des pieds pour paraître plus grande, après le cours de métamorphose, subitement, comme ça… Je n'ai pas eu le temps de vous prévenir moi-même…
- Tranquille Emile, chantonna joyeusement Korée, nous prendrons soin de votre salle, profecheur (Joyce la fusilla du regard), vous pouvez dispos…
- KOREE !
Joyce l'avait furieusement enlacée en la bâillonnant d'une main.
- Excusez-la professeur, dit-elle sur un ton désolé, elle n'a que 4 mois après tout. Elle n'a pas encore saisi le sens de la courtoisie.
- Si c'est vous qui êtes chargée de son éducation, tout s'explique.
- Cela va vous surprendre, répliqua Joyce qui s'impatientait, mais je suis tout à fait d'accord avec ce que vous venez de dire.
- Au moins vous le reconnaissez, c'est bien là votre seul mérite.
Ils se toisèrent un instant, Malicia jugea bon d'intervenir :
- Nous avons prévu une liste pour notre prochaine séance, monsieur, et…
- Miss Clint, la coupa Rogue (Joyce sursauta : elle ne connaissait même pas le nom de Malicia !), au cas où vous ne l'auriez pas encore compris, j'ai eu… quelques soucis avec mon armoire, vous attendrez donc que tout cela soit réglé, la priorité est d'abord aux classes.
« A tes classes, tu veux dire… »
- Je vous en prie, couina Joyce dont le souvenir des cartes était encore bien présent dans son esprit, il faut que nous commencions dès la semaine prochaine.
- Pourquoi tant de précipitation, miss Happer ? Murmura Rogue d'un ton corrosif, vous n'êtes pas à quelques mois près.
- Nous sommes déjà au milieu du deuxième trimestre, dit la fille de Gryffondor, nous devons…
- Vous, ne parlez que si l'on vous y a invité, miss Granger !
Puis se tournant vers Joyce, il reprit sévèrement :
- J'aurais deux mots à vous dire seul à seul.
Il n'en fallait pas plus en ce qui concernait les autres élèves pour leur permettre de déserter. La salle se vida dans une rapidité alarmante, en particulier le dénommé Londubat avait filé comme une flèche. Joyce tapota Korée en lui faisant signe de sortir. Celle-ci s'exécuta de mauvaise grâce, elle tira la langue dans le dos de Rogue avant de disparaître.
- Mes cours ne sont pas assez bien pour vous, gronda-t-il, il vous faut des rattrapages et bien sur, votre niveau est si excellent que vous n'avez pas besoin de l'aide d'un professeur…
- Mais c'est u-une méprise, professeur ! je n'ai jamais prétendu une chose pareille ! Ce matin, quand vous m'avez traité de faignante…
- D'incompétente, corrigea Rogue.
- … de bonne à rien, j'ai cru qu'il fallait me reprendre en main. Je n'ai aucune prétention avec ce club. Enfin ! Cela ne vous fait pas plaisir que vos élèves travaillent davantage?
- … Vous me cachez quelque chose, miss Happer.
Elle tressaillit et posa une main sur le bureau pour se soutenir :
- Que voulez-vous dire ? Je n'ai rien…
- Où étiez-vous cette nuit ?
- Dans mon lit… Vous me soupçon…
- Que cachez-vous sous votre gant ?
- Une brûl…
- Que faîtes-vous réellement à Poudlard ?
Elle se tut, il ne lui laissait le temps de répondre à aucune de ses questions : il savait qu'elle mentait à chaque fois.
- J'ai des devoirs, il faut que je par…
- Partez donc !
Il avait lancé cette dernière phrase avec une note de colère. Joyce s'échappa en vitesse de la salle et retrouva Korée dans le couloir :
- Il a compris, lui chuchota-t-elle avec frayeur, ne parvenant plus à respirer, il m'a bombardée de questions !
La fillette lui caressa les cheveux :
- Calme-toi, on dirait que tu vas exploser ! Tu aurais du me demander conseil avant de fonder cette association…
- Tu m'aurais aidé comme pour les cartes ?
Korée parut vexée :
- Bon, je l'admets, je n'avais pas assuré sur ce coup-là.
Mais l'adolescente respirait toujours par à-coup :
- CALME-TOI, répéta Korée avec plus de force, faisons un tour par les toilettes avant de remonter dans la tour. Tu vas me raconter tout ce que t'a dit Rogue depuis ce matin : autant bien, il cherche juste à t'intimider…
Accoudée à l'évier, la jeune fille s'aspergeait doucement le visage d'eau, elle observa dans le reflet des miroirs les gouttes qui perlaient ses joues rougies.
Korée avait écouté en silence. Joyce finit par cogner le rebord marbré en râlant :
- Ca a commencé quand il m'a dit que ma peur des serpents me générait pour passer mon BUSE, je pensais me servir de cette excuse pour m'entraîner aux potions et faire tu-sais-quoi.
La fillette remua frénétiquement comme si elle avait attrapé le hoquet :
- Mais Joyce, geignit-elle, tu es en sixième année, le buse, tu es censée l'avoir passé il y a un an !
- Pourquoi alors Rogue m'a parlé de ça, répondit-elle étonnée, il s'est trompé ?
- Non… A mon avis, il a du deviné que tu avais menti sur ton âge. Il voulait sans doute guetter ta réaction.
Joyce frappa encore les bords de l'évier en râlant sourdement. Elle tenta de se justifier :
- Il m'a piégée en beauté ! En fait, j'ai jamais suivi de cours de manière officielle, moi ! Je n'ai aucun diplôme… Ma fiche d'inscription n'est en fait qu'un ramassis de faux documents…
Elle s'adossa contre un mur en s'essuyant les mains :
- On aurait du savoir qu'une gamine de 14 ans ne pouvait pas se faire passée pour une jeune fille de 16 ou 17 ans !
Comme pour vérifier ses dires, Joyce se scruta avec attention dans le miroir : coupe au carré souvent décoiffée, grands yeux bleus puérils, visage naïf voire enfantin… Elle avait en effet l'air beaucoup plus jeune…
- Il te faudra être plus prudente, acquiesça Korée, Rogue ne doit avoir que des soupçons, s'il avait la moindre preuve, il t'aurait déjà traînée devant le dirlo.
Quant elles se rendirent enfin à la tour des gryffondors, Shun et Malicia les attendaient depuis un bon moment, le jeune garçon en particulier montrait un visage courroucé.
- Te voilà ! Marmonna-t-il, devine pourquoi Rogue n'est pas venu plutôt à notre séance pour nous casser.
- Je ne sais pas, dit Joyce en haussant les épaules.
- Ce sont les jumeaux Weasley qui le raconte à tout le monde, répondit Malicia : un centaure est sorti de la forêt et a demandé à parler à Dumbledore.
- Rogue et Macgonagall s'en sont chargés, le centaure était furieux.
Joyce s'assit en faisant une grimace :
- Cela me fait une belle jambe !
- Attends, lança Shun en mettant un main en avant, on ne t'a expliqué ce que ce centaure voulait.
Joyce leur adressa un regard circulaire, elle avait l'impression de se retrouver dans le box des accusés. Malicia continua en faisant miroiter ses prunelles avides :
- Quelqu'un, cette nuit, s'est rendu dans la forêt. Les centaures avaient débroussaillé toute une clairière pour procéder à l'une de leur fête rituelle. Et ce quelqu'un s'en est servi pour faire de la magie noire.
- Ils ont retrouvé des cendres et une étoile satanique précisa le jeune homme.
- Ca ne peut être qu'un élève de Poudlard, ils ont suivi ses traces jusqu'ici.
- De la magie noire, Joyce !
L'accusée croisa nerveusement les doigts :
- Ne me regardez pas comme ça !
- Shun m'a tout raconté, dit Malicia avec un air vexé, qu'est-ce que tu nous caches encore ?
- Y a pas d'amitié sans confiance réciproque, ajouta Shun.
- Que voulez qu'elle fasse, s'égosilla Korée en faisant mine d'être outrée, qu'elle se présente comme coupable pour vous faire plaisir ?
- Laisse tomber, soupira Joyce.
Elle se leva et jaugea les deux adolescents : il fallait qu'elle satisfasse leur curiosité si elle ne voulait pas qu'ils finissent par se retourner contre elle. Elle commença par s'assurer qu'ils étaient bien seul, et puis :
- Très bien. Très bien. J'ai effectivement utilisé la magie noire pour me débarrasser de mes cartes. Cependant vous noterez que j'ai eu la décence de pratiquer le sort en forêt. J'ignorais que ce trou perdu appartenait à des centaures, sinon j'aurais choisi un autre endroit.
- D'où détiens-tu ce savoir ? s'enquit Malicia en pinçant sévèrement les lèvres.
- Shun ne t'a pas dit que les miens sont des gens peu sympathiques ? Je sors d'une famille de mages noirs, assurément.
- Des… Mangemorts ?
- Heu… Non, il y a eu quelque cas de cannibalismes mais de là à…
- Mais non idiote ! On te parle des partisans de Tu-Sais-Qui.
- Qui ça ?
- Arrête de nous prendre pour des imbéciles !
Korée fit le signe d'une cicatrice en forme d'éclair sur son propre front, Joyce s'écria le visage radieux :
- Ha oui ! Voldemort !
Les deux amis sursautèrent et la considèrent avec effroi mais elle n'avait rien remarqué :
- Non, je vous rassure, on ne connaît pas ce type. Nous sommes un groupe indépendant.
Elle donnait l'impression de parler d'industries agroalimentaire. Quand son cœur retrouva un rythme normal, Shun put enfin articuler quelques mots sensés :
- Ne prononce plus son nom ! Tu es folle !
- Je ne vois pas ce que j'ai fait de mal, rétorqua-t-elle.
- Mais on ne peut pas le prononcer ! Approuva Malicia, c'est dangereux !
- Pourquoi, il peut entendre ?
- Ne plaisante pas avec ça.
Joyce croisa les bras d'un air hautain :
- Vous vouliez de la sincérité, alors en voilà : je n'avais jamais entendu parler de Vol-machin (c'est bien pour vous faire plaisir que je sabote son nom) avant mon arrivée ici. J'ai besoin de temps pour me faire à toutes vos petites manies. Maintenant, vous avez mon destin entre vos mains…
Elle fit un geste théâtral :
- Si vous me dénoncez, je serais renvoyée et à la merci des miens qui considèrent que je les ai trahis en choisissant la voix de la magie blanche.
Elle essaya de paraître honnête, mais c'était évidement un gros mensonge : elle n'avait pas du tout l'intention de faire de la magie blanche pour le restant de sa vie. Non pas qu'elle voulait faire le mal, mais elle trouvait plus excitant de manipuler des forces disons plus obscures…
- Franchement, dit Malicia en décroisant les jambes, je veux bien te faire confiance, on le voit à ta tête que tu n'es pas quelqu'un de mauvais. En plus, Shun m'a expliqué que tu voulais sauver la vie de quelqu'un avec une potion. A ce propos qui est-ce ?
- Vous n'apprécierez pas si je vous le disais, vous ne l'aimez pas du tout.
- Alors ne dit rien, répondit Shun, mais à partir de maintenant, plus de cachotteries, ok ?
- Oui, reprit Malicia, et en échange on va t'aider à préparer ta potion en douce…
Korée, qui se trouvait derrière eux et face à Joyce, fit un "non" déterminé de la tête en tordant frénétiquement le cou de droite à gauche. Mais Joyce était trop ravie de pouvoir ranger deux camarades à ses côtés :
- D'accord, je ne vous mentirai plus, mais je ne pourrai pas non plus tout vous dire, il y a certains sujets qui me… gênent. Plus tard, avec le temps, peut-être que…
Peut-être que… Malicia et Shun se regardèrent en silence et acquiescèrent
