Disclaimer : le monde d'HP appartient à Rowling

Chapitre 5/ Deuil…

« J'ai une sensation des plus étranges. Tu sais, c'est celle qui me prend lorsque tu t'apprêtes à faire une connerie plus grosse que toi, ce qui n'est pas peu dire. Je te conseille de garder ton calme. Quoiqu'il ait pu se passer, le moment est trop crucial pour te permettre le moindre petit écart… A bon entendeur, salut !

R. »

- Rei, grande sœur chérie, murmura Joyce en déchirant la lettre, toujours aussi aimable !

Une lettre de Madurei (Rei est son diminutif) s'accompagnait toujours de ce malaise sous-jacent : elle donnait sans cesse l'impression de lire dans ses pensées. Mais pour qui se prenait-elle ? Ce n'était pas elle qui était coincée dans une école de magie blanche, MAGIE BLANCHE !


La confection de la Potion n'allait pas sans quelques désagréments. Malgré les efforts de Malicia et de Shun pour attirer l'attention, Joyce n'était jamais totalement seule. Comment sortir les ingrédients volés à Rogue sans que personne ne s'aperçoive de rien ? En outre, le professeur faisait des rondes régulières pour vérifier le matériel.

- Il a du deviner, chuchota Malicia, sinon il ne nous harcèlerait pas comme ça.

C'était très agaçant, surtout que Joyce agissait pour lui… Le plus simple aurait encore été de lui parler mais cela ne servirait à rien : elle savait seulement comment il allait mourir, mais elle n'avait pas vu ni OU et QUAND. Et une sorte de sixième sens lui soufflait que Rogue avait déjà conscience du danger où il se trouvait, l'alarmer davantage serait inutile. Plus elle le regardait, plus il lui semblait le connaître… Ce n'était pas une vaine impression, son visage avait quelque chose de familier… Mais lorsqu'elle essayait de se concentrer pour rappeler un souvenir égaré, une stupéfiante terreur se glissait sous chaque fibre de son corps :

- Un serpent, un homme aux yeux rouges, une tête de mort, susurrait-elle parfois dans son sommeil.

Finalement, elle fut contrainte de commencer à préparer ses ingrédients dans la tour même de Gryffondor. En les coupant et en les faisant bouillir par avance, elle espérait modifier leur forme suffisamment pour qu'ils ne paraissent pas suspect.

Au bout de deux semaines, elle était sur le point de finir la potion. La dénommée Granger faisait une démonstration et tous buvaient ses paroles. Joyce mélangeait fébrilement sa potion.

- Du calme, lui dit Korée à voix basse, c'est bon, personne ne te passera des menottes.

Le liquide devint opaque, si sombre que même les yeux de Rogue auraient paru bien pâles face à lui. Joyce en prit dans un flacon et vida son chaudron.

- Hé ! s'écria Korée, puis en baissant le ton : ce n'était pas fini !

- Non, répondit Joyce, mais j'ai besoin de ma faux, on continuera cette nuit…

La porte claqua brusquement, Joyce se retourna prudemment en pensant voir Rogue mais il y avait juste un garçon blond avec deux armoires à glace. Granger fit un écart dédaigneux de la tête.

- Qu'est-ce que ce cours de Sang-De-Bourbe ? Demanda-t-il avec une voix veloutée.

- Merci, dit Joyce tout sourire, mais moi je suis juste une bâtarde…

« Hé ! Qu'est-ce qu'il m'a fait dire ce con ? »

- Tu veux quoi ? demanda-t-elle.

- Tu veux quoi, reprit le blondinet en imitant la tonalité féminine de son interlocutrice. Tu es bien cette fille bruyante qui se permet tout ?

- Laisse-la tranquille Malefoy ! Cria Granger.

Mais Korée s'intercala en dressant ses deux oreilles comme si sa vie en dépendait :

- Ne t'inquiète pas Hermione ! Il ne sait pas à qui il a affaire !

Malefoy renifla avec mépris et envoya brusquement une main en avant pour la frapper ou du moins la repousser.


- Elle l'a mordu…

- Mon dieu ! C'est terrible !

- Souvenez-vous de l'affaire de l'hippogriffe…

- Malefoy l'a presque fait exécuté !

- Pauvre Korée…

- Heu… Non, pas tout à fait…

- Quoi ?

- C'est Joyce qui l'a mordu…

Ainsi allaient et venaient les rumeurs par-delà les couloirs infestés d'élèves. Les professeurs Rogue et Macgonagall jetèrent un œil sur Malefoy qui brandissait sa blessure comme un étendard, puis ils dévisagèrent Joyce qui tripotait ses doigts en rougissant.

- Vous aviez… faim, dit Rogue en croyant avoir mal entendu.

Joyce fit un « oui » craintif de la tête en déglutissant :

- Et je voulais défendre Korée en même temps…

- Vous avez failli y casser le bras ! Gronda Rogue, il ne pourra pas jouer au quiddich pour le prochain match !

- Ben comme ça vous gagnerez peut-être…

- Miss Happer! S'indigna Macgonagall.

Elle se leva et ajusta ses lunettes qui tombaient sous le frémissement incessant de ses narines :

- Ecoutez-moi bien, que plus jamais une telle… affaire ne se reproduise. Mais vous serez bien puni, j'enlève 50 points à Gryffondor… Et vous êtes radiée de ce club de potion.

- J'en espérais une suppression complète, Minerva, dit Rogue dans un rictus.

- Nous n'allons pas punir les autres élèves pour elle, Séverus.

Rogue se leva à son tour et ouvrit la porte en faisant signe à Malefoy de sortir. Quand ce dernier eut quitté la pièce, il poursuivit sur le même ton que sa collègue :

- Je ne sais plus comment varier les punitions. Je crois que le professeur qui ne vous a pas encore eu en colle est celui de divination ? Bon, l'affaire est réglée.

Joyce s'était attendue à bien pire. Mais la réaction de Rogue ne semblait pas naturelle : il n'était pas assez… furieux. Il la retint quelques secondes dans l'entrebâillement de la porte alors que MacGonagall venait juste de quitter la pièce :

- Vous ne semblez pas chagrinée par cette exclusion, Happer, vous n'avez plus besoin de ce club n'est-ce pas ?

- Oui, monsieur, je pense avoir amélioré mon niveau.

- Quand aurai-je l'honneur de le voir ?

- Plus tôt que vous ne le croyez…

Elle tourna les talons et déguerpit à toute vitesse. Elle se sentait certainement fière d'elle, ce qui ne pressentait rien de bon car dans ces cas-là, elle finissait toujours par se montrer imprudente. En plus elle prenait goût à ce genre de dialogues à double-sens. Assurément, ce Rogue n'avait rien de banal. Il avait ces traits caractéristiques de sa grande sœur qu'elle appréciait tant, mais une dimension plus digne s'échappait de sa personne.

Quand Joyce apporta le billet que lui avait laissé la directrice de Gryffondor au professeur Trelawney, celle-ci le lut en silence. Joyce observait des volutes vertes qui s'échappaient d'une coupole quand la professeur se décida enfin à prendre la parole :

- Ecoutez, ma chérie, c'est plutôt fâcheux, je n'ai rien de précis à vous faire faire. Faisons comme si je vous avais donner une corvée quelconque. Je vous rappellerai quand je me serai décidée…

Ce futur ne sonnait pas du tout proche. Joyce poussa un soupir de soulagement et put enfin rejoindre ses amis dans la salle de banquet.

- Virée du club ? S'étouffa Malicia, mais qui sera notre présidente ?

- Hermione Granger, enfin, je vais lui proposer, dit Joyce en avalant une fourchette de riz.

- Et tu-sais-quoi ? Demanda doucement Shun.

- J'y verse quelques gouttes de mon sang, assura Joyce d'un air décidé, je fais décanter et c'est prêt !


La nuit régnait, maîtresse, sur le château endormi. Rogue, comme à son habitude, combattait l'ennui de l'insomnie en effectuant quelques rondes dans le couloir. C'était un moment qu'il goûtait sans toutefois l'appréciait pleinement. Que savait-il priser au juste ? Rien sans doute. Mais au moins, toute cette marmaille stupide n'était pas là pour l'exaspérer et il avait d'autres problèmes en tête.

- L'Homme aux Yeux Rouges…

Il fit volte-face mais ne trouva personne. Pourtant, il avait bien entendu une voix… Une voix d'outre-tombe, froide et enragée à la fois… Il secoua la tête, son esprit inquisiteur, que d'autres nommeraient l'imagination, devait lui jouer des tours…

Des bruits de pas résonnèrent : c'étaient un tintement léger comme les effleurements de petits chaussons d'enfant sur un parquet de bois. Il s'avança vers leur provenance :

- Qui va là ?

Seul l'écho de sa propre voix lui répondit. Instinctivement, il se dirigea vers la porte d'entrée et sortit : il avait flairé une présence hostile, une vague d'énergie lui rappelant vaguement celle de Lord Voldemord, cet homme qui a d'ailleurs les yeux rouges :

- Qu'est-ce que ça veut dire, cria-t-il, montrez-vous !

Des Mangemorts ? Ici ? Pourtant aucune réunion n'était prévue ce soir-là, et d'ailleurs elles n'avaient jamais lieu à Poudlard. (Encore heureux…)

Il y avait bien quelqu'un, il en était sûr. La pleine lune agrandissait les ombres des arbres, les rendant menaçantes. Il avait sorti sa baguette, prêt à se défendre. Mais soudainement, le rayonnement astral lui révéla une ombre imposante et acérée, il leva la tête : là-haut sur une tourelle, une apparition fantomatique, une silhouette enveloppée dans un voile noir et déchiré qui cachait entièrement son visage et son corps… Mais ce qui attira davantage les yeux de Rogue, c'était ce qu'elle tenait, c'était ce qui dessinait une ombre aussi redoutable : une faux.

Une faux noire, qui dégoulinait d'un liquide noir. Une faux…

La même voix alors, qu'il avait précédemment entendue dans le couloir, résonna en se faufilant dans la pesanteur nocturne :

- Ne bouge pas, et ce ne sera pas douloureux, ni pour toi, ni pour moi !

La forme s'élança en tendant la lame en avant : celle-ci décrivit un cercle, tourbillonnante aux côtés de la silhouette sombre. Rogue voulut tendre sa baguette mais un cercle tellurique apparut sous ses pieds, l'immobilisant. La silhouette avait fondu sur lui et la lame vint de planter dans sa main droite, ressortant largement dans sa paume avec un jet de sang, il lâcha sa baguette en hurlant de douleur.

- AVADA…. Cria la silhouette.

Non ! Il n'allait pas mourir comme ça, il saisit sa baguette de l'autre main. Le cercle se raffermissait.

- …KEDAVRA ! Acheva son adversaire.

Il n'avait pas encore eu le temps d'agir… Le métal sanguinolent vira au vert pâle. Il sentit tout son corps bouillonner de l'intérieur, comme si un sang nouveau se glissait dans ses veines. Une autre voix se répercuta en faible écho dans sa tête : « N'ayez pas peur ! Néréis ne vous laissera pas mourir ! »

Il lui donna un formidable coup de pied dans le thorax, la silhouette tomba à terre, la respiration coupée. Rogue arracha la faux qui transperçait encore sa main, son adversaire se releva et se jeta sur le manche.

- RENDS-LA MOI ! C'EST A MOI !

Mais Rogue empoigna férocement l'arme. « Laissez-la lui » redit la petite voix dans sa tête, « elle ne vous fera pas de mal ! »

- C'EST A MOI !

« Néréis vous aime bien, saviez-vous ? »

- Endoloris ! Cria Rogue en pointant sa baguette de sa main sanglante.

La silhouette voltigea de cinq mètres en arrière entourée d'une foudre violette et atterrit sur les dalles de pierre dans un râle sourd. Il se précipita sur elle, baguette pointée mais elle bondit sur ses jambes et grimpa à toute vitesse sur le mur le plus proche. Rogue tenta de la stupéfixier mais elle disparut sur le toit du château, aussi agile qu'un chat.

« Le saviez-vous ? »


Joyce s'écroula en plein milieu de la salle commune des gryffondors. Korée l'aida à se dépêtrer du drap noir où elle était emmêlée.

- Le sort a réussi, haleta-t-elle péniblement.

Korée lui tapota les joues pour la tenir éveillée. Joyce pleurait. Elle pleurait parce qu'on lui avait arraché un membre… On lui avait pris une partie d'elle-même :

- Il m'a volé ma faux, Korée, sanglotait-elle, comment a-t-il OSE ?

Joyce passa une nuit épouvantable : Perdre cette faux, c'était TOUT perdre. Sa main la brûlait atrocement, elle réclamait son du. Et Joyce voyait des images, des Yeux rouges, sa mère tremper dans son sang, un serpent écrasé. Elle en voulait à Rogue de ne pas l'avoir écouté quand elle lui avait parlé à travers la petite voix.

- Il ne risquait rien, grognait-elle au fond de son lit, moi, je l'aidais ! Quel besoin a-t-il eu de la prendre !

Mais l'aurore en même temps que le soleil sembla ramener sa raison : comment aurait-elle réagit à sa place ? C'était une agression ! « Excusez-moi, je vais transpercer votre main, vous allez horriblement souffrir, mais c'est pour votre bien… » Elle ricana sourdement : comme il avait du avoir PEUR lorsqu'il l'avait entendue jeter le sort mortel !

Et puis sa faux n'était pas perdue après tout, il lui suffisait de faire une excursion dans les cachots. Sa main lui faisait encore mal mais elle caressa le tatouage en lui promettant de ramener bientôt la Faux Promise…

- C'est bon, dit-elle à Korée qui la regardait avec tristesse. Je me sens mieux.

Elle reposa la tête sur l'oreiller et put enfin goûter à un sommeil moins agité.


Heureusement, c'était dimanche ce jour-là, mais sur les coups de midi, Malicia vint précipitamment la réveiller.

- Oui, dit Joyce en ronflant, le repas attendra, j'suis crevée…

- Rogue a été agressé ! Cette nuit !

- Je suis bien placée pour le savoir…

Malicia retint une exclamation, mais elle avait pressenti que Rogue avait été l'objet de tant de soins et qu'il était le destinataire de la potion.

- Il y a des complications ? Demanda Joyce en cachant mal son inquiétude.

- Non…

- Si la nouvelle fait le tour de l'école c'est bien qu'il y a un problème…

- Mais non ! C'est juste qu'il y avait un élève à l'infirmerie qui a tout vu et entendu quand Rogue est allé se faire soigner…

Joyce jeta ses ouvertures à terre :

- Tu vas me raconter tout ça, ne laissons rien au hasard.

Ce fut à la fois une déception et un soulagement pour Joyce : aucun élève n'avait mentionné sa faux. Elle préférait garder cela secret mais elle aurait payé cher pour savoir ce que Rogue en avait fait. « Pas chez Dumbledore » pensa-t-elle avec force, « Pas chez Dumbledore… »

En s'habillant, elle avait remarqué que l'empreinte du coup qu'il lui avait donné marquait encore son buste… Etait-ce pour ça qu'elle avait tant mal à la poitrine ?

- Il faut la retrouver, maugréa-t-elle tandis que Korée flottait à ses côtés, bon sang ! Qu'en a-t-il fait ?

- Je ne ssssais pas, mon présssssssieux…. (honteuse parodie du Seigneur des Anneaux…)

- Ho ! Ne te moque pas de moi !

- Saleté de petit prof ! Il me l'a volé ! Ma préssssieuse…

- Gollum ! Dit un élève de poufsouffle qui trottinait derrière eux, je suis un fan !

Joyce les distança avec rancœur.


Le repas du soir était plus animé qu'à l'accoutumée. Joyce n'arrivait pas à avaler quoi que ce soit. Elle ne cessait de lancer en direction de Rogue un regard tantôt rancunier, tantôt plein de remord. Et les élèves piaillaient, piaillaient, piaillaient…

- Moi je dis que si Rogue a enfin eu la monnaie de sa pièce, déclara un élève, c'est qu'il y a une justice dans ce monde !

Joyce se mordit les lèvres.

- Tu sais, j'ai entendu de nombreuses rumeurs sur lui… Dit un autre.

- Ce ne sont pas que des rumeurs…

Du sang coula entre ses dents, elle l'avala avec une sorte de rage sinistre.

- Oui, enfin, on le voit rien qu'en le regardant, c'est un man…

Un Homme aux Yeux Rouges… Joyce allait hurler mais un cri plus angoissant la devança. Elle leva la tête : un corbeau venait de rentrer et longeait la salle en battant ses ailes sombres. Il portait une enveloppe noire. Elle tomba droit dans les mains de Joyce.

- Regardez, dit un serpentard que Joyce crut identifier comme étant Malefoy, Happer a enfin reçu son courrier de Noël !

Joyce avait reconnu l'écriture sur l'enveloppe, elle devinait qui avait ainsi inscrit son nom en rouge-sang. Elle tremblait, elle ne voulait pas l'ouvrir… Mais ses mains agissaient bien malgré elle. Lentement ses doigts décachetèrent, puis déplièrent la feuille tout aussi opaque. C'était l'alphabet de son pays natal :

« Père s'est suicidé. C'est de ta faute…

Ta petite sœur qui t'aime. »

Joyce se figea, les yeux agrandis d'effroi : « Ne tremble pas, ne pleure pas, elle te ment… » Se dit-elle à elle-même…

« Rei te l'aurait dit sinon, elle t'aurait mis au courant… »

« C'est de ta faute… »

« Tu n'as rien à te reprocher… »

« Comment m'a-t-elle retrouvée ? »

Les mots que Rei lui avait écrit en début d'année retentirent dans sa tête : « Si jamais tu venais à recevoir une lettre d'eux, ne pense pas qu'ils t'ont forcément trouvée. Les hiboux sont des animaux habiles, ils peuvent dénicher quelqu'un même sans adresse. »

« Les hiboux, peut-être, mais les corbeaux sont-ils aussi rusés ? »

« Et surtout, ne crois pas un mot de ce qu'on pourrait te raconter. Pas un ! »

« Non, c'est des mensonges tout ça, papa, enfin père n'est pas mort… Elle cherche à te déstabiliser… »

- Joyce ?

« Elle te ment… »

- Joyce !

Malicia la saisit par le bras. Le teint de Joyce avait viré à un blanc cassé à la limite du lait qui a tourné.

- Tout va bien, dit-elle, c'est une sale blague.

Un autre croassement lui déchira les tympans. Un corbeau encore plus gros fit son entrée, il portait quelque chose, mais il était encore trop loin pour qu'on puisse distinguer quoi que ce soit. Il lâcha l'objet : une coupe d'or, sertie d'un couvercle de même éclat.

La coupe tournoya quelques instants avant de se stabiliser. Joyce eut le souffle coupé.

« C'est quoi ? »

Elle le pressentait.

Elle tendit une main.

« Non, non, non, non… »

Elle souleva le couvercle…

« Non, non… »

Si…

Des cendres.

Joyce eut un tel geste de recul qu'elle faillit renverser sa chaise. D'une main elle avait recouvert sa bouche pour ne pas hurler et de l'autre elle avait refermé la coupe avec horreur.

- Qu'est-ce que tu as ? demanda Shun qui s'inquiétait à son tour.

Elle saisit la lettre qu'elle enfonça dans sa poche, Korée tenta de dire quelque chose mais elle la repoussa violemment.

- Mais enfin, Joyce ! S'écria Malicia.

« … »

Son regard croisa celui de Rogue… Tous les professeurs avaient les yeux braqués sur elle. Sans rien dire, elle prit la coupe et sortit de la salle.

- C'est un cadeau de tes parents ? Lança Malefoy, vous avez de ces goûts dans la famille !

Sa respiration devint saccadée, elle tenait la coupe à bout de bras, l'éloignant le plus possible d'elle. Ses joues dégoulinaient de larmes, les rendant toutes poisseuses.

« Je te conseille de garder ton calme. Quoiqu'il ait pu se passer »

« Rei, tu étais au courant ? Et tu ne m'as rien dit ? »

Une silhouette familière vint se placer au milieu du couloir. Rogue, la mine légèrement inquiète, s'avança vers elle en silence.

- … Pr… Professeur R-Rogue, parvint-elle difficilement à articuler… Je v-vous présente…

Elle secoua la coupe en avant en poussant un reniflement retentissant :

- Je vous présente mon père…

Après avoir esquissé un geste de recul, Rogue saisit délicatement le calice mais Joyce offrit de la résistance :

- C'EST A MOI !

Le visage de Rogue prit un air étrange : sans doute avait-il avait reconnu cette voix comme étant celle de la fille à la faux. Joyce réalisa trop tard qu'elle s'était trahie, mais cela lui était à présent bien égal. Elle continua d'une voix plus faiblissante :

- C'est à moi…

Elle lâcha l'objet maudit et tomba à genoux, Rogue la rattrapa et la soutint juste au dessus du sol :

- Relevez-vous, dit-il doucement, je vous ramène dans votre chambre. Vous y prendrez vos affaires pour passer la nuit à l'infirmerie, cela vous évitera de répondre aux questions gênantes de vos camarades.

Elle se redressa fébrilement, son cœur bondit douloureusement quand elle vit sa main recouverte de pansements :

- C… C'est grave ? demanda-t-elle entre deux sanglots.

- Non, dit-il, j'ai utilisé une potion régénérante : demain, il n'y aura plus rien.

Joyce osa enfin le scruter sans ciller, un demi-sourire se dessina sur sa figure humide, ses yeux toujours rougis par les pleurs qui les rongeaient devinrent plus expressifs.


Rogue préféra remettre le calice au directeur et n'avait fait aucune allusion à la faux. Dumbledore lui-même vint rendre visite à Joyce à l'infirmerie. Celle-ci aurait préféré de loin la compagnie de Rogue, non pas qu'elle n'aimait pas le directeur, mais elle le sentait totalement étranger à elle-même. Ce vieillard « joyeux » l'irritait par moment, elle n'aimait pas fréquenter des gens dont l'enthousiasme la dépassait. Bien sûr, ce soir-là, il garda un air grave de circonstance. Il lui expliqua qu'il se chargerait des formalités et que la coupe serait enterrée dans un cimetière.

- Il est déjà incinéré… murmura Joyce un peu décontenancée.

- Il n'est pas raisonnable que vous le gardiez sur votre table de nuit. Vous souffririez trop…

Il lui tapota l'épaule, elle trembla.

- Où est le professeur Rogue ? Demanda-t-elle prudemment. Quand il est sorti, je ne l'ai pas vu prendre la direction de son bureau…

- Il a eu une affaire urgente à régler…

Sorti ? C'était le moment où jamais de retrouver sa faux. Dumbledore resta encore un petit moment pour la réconforter. C'était assez étrange, la plus-part du temps il ne disait rien, il se contentait d'être présent. Par moment, il disait quelques paroles bienveillantes que Joyce oubliait presque aussitôt. Elle pensa d'ailleurs non sans amertume qu'il devait être habitué à ce genre de situation.


Korée était venu la rejoindre au beau milieu de la nuit. Mme Pomfresh dormait paisiblement. Elles avaient commencé par fouiller le bureau de Rogue mais l'arme ne s'y trouvait pas. Joyce décida de tenter sa chance dans ses appartements… Elle ne savait pas où ils se trouvaient exactement mais ils ne pouvaient qu'être dans les cachots.

- Alohomora, susurra Korée.

Elles entrèrent silencieusement dans des couloirs toujours plus sombres. Par moment, Joyce s'essuyait le visage où perlaient encore quelques larmes.

- Alohomora, redit Korée.

La fillette éclaira l'allée obscure en faisant briller ses cheveux :

- Pourquoi y a que moi qui lance des sorts ? Tu peux pas te servir de ta baguette ?

- Je n'ai pas de baguette, expliqua Joyce, c'est ma faux placée dans ma main qui me sert de baguette. Ce dont je me sers en cours est un vulgaire morceau de bois.

Elles parvinrent devant une porte où une sinistre peinture semblait représenter les trois parques, créatures mythologiques qui présidaient à la destinée humaine.

- Il faut un mot de passe ici, dit Korée.

Joyce réfléchit deux secondes :

- Potter est un (censure.)

- Potter est un (autre censure,) reprit joyeusement la fillette.

L'adolescente passa une main tendue dans ses cheveux défaits, peut-être que le mot de passe avait un rapport avec le tableau ? Non, de la part de Rogue, ce serait trop facile, à moins que ce fût justement cela le piège ? Elle commença donc à balancer tous les noms que lui inspiraient ces figures antiques :

- Atropos ! Dit-elle avec espoir, Lachésis ! Clotho ! La Nécéssité, le fil du destin. La mort, la naissance, le mariage…

- Transplanons ! S'impatienta Korée.

- Je ne peux pas sans ma faux.

- Mais tu peux rien sans elle ou quoi ?

- …

De dépit, Joyce s'appuya contre la toile. Un froid inconnu la traversa alors, elle voulut décollée ses mains, terrorisée, mais elles restèrent plaquées contre la peinture. Les trois créatures dessinées tournèrent lentement leur œil vers ses doigts écrasés. Bizarrement, elle remarqua que si les deux premières parques étaient telles qu'on pouvaient les imaginer au sortir des légendes antiques, la troisième (et qui logiquement devait être la dénommée Atropos) avait une figure des plus humaines… Joyce réussit enfin à se libérer et fut projetée à terre. Korée l'aida à se relever :

- Elles me l'ont dit, Korée, le mot de passe ! Elles me l'ont dit !

Une fois debout, Joyce murmura avec détermination : « poisson soluble… »

Les oreilles de Korée tiquèrent un peu : Bon sang, pourquoi tous les mots de passe de ce château n'avaient-ils ni queue, ni tête ?

Elles pénétrèrent enfin dans un corridor aux motifs de serpents. Il y avait sur les murs les tableaux des anciens directeurs de Serpentard.

- Que veux-tu ? Il n'est permis à aucun élève de pénétrer ici ! dit une femme en pointant une ongle acérée.

Joyce pressa le pas sans répondre. Une porte après, elles franchirent le seuil des appartements de Rogue. Elles se séparèrent pour mieux chercher. Au bout de trois quarts d'heures, Joyce eut la joie de rappeler son amie :

- Je l'ai trouvée !

Korée plana dans sa direction :

- Regarde ! Le chapeau de Dumbledore !

Joyce réintégra sa faux dans son tatouage avant de lui prêter attention :

- Ils ont du discuter de ma faux ensemble… Et il aura oublié son chapeau.

Malgré cette affirmation optimiste, elle se sentait mal à l'aise. Elles résolurent de partir.


En sortant des cachots, Joyce eut l'impression qu'une créature sinueuse avait refermé ses larges crochets sur elle. Elle tenta d'appeler à l'aide mais une lumière verte la traversa de part en part.

- Joyce ! Cria Korée.

Rogue… Il venait de recevoir l'Avada Kedavra… Elle avait réussi son sort d'Alceste: elle l'avait reçu à sa place.

- Joyce ! Geignit Korée.

- Tout va bien, lui répondit-elle en haletant, tu sais très bien que je ne peux pas en mourir, moi… Je ne crains pas ce sort !

Elle se releva en souriant mais une autre fulguration émeraude s'empara d'elle. Elle s'écroula lourdement sur le dos. Deux fois ? Merde ! Elle avait compté qu'après avoir reçu l'Avada Kedavra, Rogue fasse le mort… Mais si sous la surprise d'avoir survécu il s'était relevé ? Ce deuxième coup porté en était la preuve… Qu'allait-il se passer ? Il y a des milliers de façon de tuer quelqu'un… Si cette manière ne marchait pas, l'Homme aux Yeux Rouges en essaierait d'autres. L'Homme aux Yeux Rouges ?

Korée parvenait à peine à soutenir une Joyce titubante, et c'est avec beaucoup de difficultés qu'elle l'a réinstalla dans son lit à l'infirmerie…

- Je croyais, dit la fille-lapin dans un murmura angoissé, que tu ne craignais pas ce sort…

- J'avais oublié un détail…

Elle respirait par à-coups.

- Je n'ai pas été prudente… J'avais oublié… Son sang… Le sang de ma maudite jumelle a coulé dans mes veines…

- Qu'est-ce que tu racontes ?

- Je ne suis pas ce… ce que je semble être… j'ai bu un polynectar avancé, à base de son sang…

Comment avait-elle pu oublié un tel détail ! Il y a de longs mois de ça, bien avant de gagner Poudlard, Néréis avait pris une décision des plus lâches et des plus égoïstes : elle avait décidé pour échapper à son passé de se métamorphoser radicalement. Le polynectar avancé, aussi appelé Prophasis dans le pays d'où elle venait, le lui avait permis. Mais en échange, elle avait perdu certaines de ses capacités…

Mais ce n'était pas tout, elle avait bu aussi une potion d'oubli partiel, pour oublier les détails de sa vie les plus déplaisants.

- Joyce ? Cria Korée en la voyant tomber dans un sommeil profond, JOYCE ? Infirmière !


« Je rêve, je suis en train de délirer, qu'y a-t-il devant moi ? Qu'est-ce devant moi ? »

- Ne t'approche pas d'eux, Néréis ! gronda une fille brune en attrapant une enfant en bas âge par sa petite menotte.

« Rei me tient par la main… »

- Pourquoi père accepte-t-il de recevoir un tel homme ici ? dit une fille aux cheveux d'argent.

« Elle, c'est Salana, c'est la sœur jumelle de Rei. »

- Que fait encore Joyce ? grogna Madurei… On la croirait fascinée par ce spectacle…

« Elle a de la chance, Joyce, elle vit pour vivre, elle sait ce qu'elle veut. »

- Ce monstre veut nous la prendre, souffla Salana.

- Ce Jédusor…

« Joyce ? »

Mais Jédusor n'est pas seul… Il y a des gens qui le suivent, qu'ils sont bizarres ! Surtout celui qui est en retrait dans le fond, celui qui a des cheveux noirs qui lui tombent sur les épaules. Est-ce que c'était lui que Néréis avait essayé d'oublier en devenant « Joyce Happer » ?


- Asseyez-vous ici Sévérus.

C'était la voix de Dumbledore.

- Mais Happer ? Demanda Rogue.

- Elle dort profondément affirma Pomfresh.

Joyce fronça les sourcils, ce boucan l'avait réveillée mais elle resta silencieuse.

- C'est incroyable, disait le professeur de métamorphose, deux fois, vous l'avez reçu deux fois et…

- Je suis encore en vie, oui, grogna Rogue.

Quel soulagement dans la tête de Joyce encore endolorie par le deuil ! Il avait pu s'enfuir.

Mme Pomfresh sortit, prétextant aller chercher des cataplasmes magiques dans sa réserve. Dumbledore s'empressa de demander à Rogue ce qui s'était passé :

- Séverus, il a compris que vous l'espionniez ?

- Non, murmura Rogue, il s'agissait de Snow. Cet imbécile ne supportait plus la pression. Il en est devenu fou.

Macgonagall essuya ses lunettes, le professeur de potions poursuivit :

- J'étais seul avec lui. Il a soudainement essayé de me tuer. Mais ça n'a pas marché. Quand je me suis relevé pour la seconde fois, il a pris peur et s'est sauvé. Enfin, j'ai du donner l'alarme et il a été exécuté dans le couloir pour trahison par mes « confrères » avant d'avoir pu dire quoi que ce soit. On m'a même remercié pour mon intégrité ensuite….

Il avait ajouté ces derniers mots d'un ton amer. Mais Joyce n'avait pas écouté, une nausée avait trouvé naissance dans le creux de son estomac et remontait doucement le long de sa gorge. Les trois professeurs tendirent l'oreille : elle toussait. Doucement au départ mais le bruit s'intensifia.

- Miss Happer, dit le professeur Macgonagall avec douceur, tout va bien ?

Elle entendit un bruit de vomissement : du sang coulait sur le matelas blanc. Mme Pomfresh, qui était de retour, bondit vers elle :

- Elle est prise de convulsion, aidez-moi à la tenir.

L'adolescente se débattit en crachant davantage de sang. Korée se réveilla brusquement.

- Avalez ça ! Dit l'infirmière, ça ira mieux après…

Mais la jeune fille remua dans tous les sens en serrant les dents, elle balançait ses mains devant elle comme pour griffer un monstre invisible.

- Qu'est-ce que ce gant ? dit Mme Pomfresh, cela doit vous gêner.

L'infirmière lui saisit la main et tenta de lui retirer son gant. Joyce fit un sursaut horrifié et hurla comme une démente :

- NON ! NON ! NON ! NON !

Elle donna un coup de pied à Macgonagall qui bascula en arrière.

- OU BOULOMAI ! Cria Joyce tandis que Dumbledore ramassait sa collègue. NAI ! NAI !

Elle parlait une langue étrangère… Par moment, quelques mots compréhensibles par ses professeurs se glissaient dans ses cris :

- OU PROSEKEI KAKON… JE SERAI… NAI ! UNE GENTILLE FILLE… ALLA GAR, NE TUEZ PAS, KAI … REI !

- Ne touchez plus sa main ! Cria Rogue qui venait à leur secours.

Il saisit ses deux bras et se penchant sur elle pour la plaquer vigoureusement contre le matelas.

- Albus, ouvrez-lui la bouche ! Annonça Pomfresh, je vais lui administrer le médicament.

Dumledore lui maintint difficilement la bouche ouverte au risque de se faire mordre. L'infirmière vida une petite fiole violette entre les dents écartées et au bout de quelques secondes la jeune fille sombra dans le sommeil.

Tous poussèrent un soupir de soulagement, à l'exception de Rogue qui reporta son attention sur la main gantée.

- Sévérus, intervint Dumledore.

Les deux hommes se regardèrent. Le directeur fit signe aux autres de sortir, même Korée dut y consentir.

- Ne faîtes pas ça, dit calmement Dumbledore, si Melle Joyce ne veut pas que l'on y touche alors nous devons respecter son choix. Il est important que nous… que vous gagniez sa confiance.

Rogue posa son regard sombre sur la triste endormie :

- Albus, cette fille n'est pas ce qu'elle prétend… Elle…

- …Vous a sauvé la vie. D'une drôle de façon, soit, mais elle vous a sauvé.

Il fit une courte pause avant de poursuivre :

- Certes, elle a agi inconsciemment et d'une manière inconsidérée, et il s'en ait fallu de peu pour que ses efforts soient vains. Cependant, quand j'ai accepté son admission à Poudlard, je savais pertinemment à quoi m'en tenir.

Le visage assombri, Rogue songeait à tout ce qu'il aurait voulu dire, il aurait voulu parler de la voix maléfique qui s'était adressée à lui, du fait que Joyce connaissait vraisemblablement « l'Homme aux Yeux Rouges » Voldemort… Mais il savait par avance que Dumbledore l'arrêterait dans son élan. Le directeur ne voulait rien lui dire pour l'instant, il jugea qu'il devait avoir ses raisons. Aussi, il se contenta d'une question dont il connaissait déjà la réponse :

- Vous pensez réellement que ce qu'elle m'a fait -il montra sa main blessée- m'a permis de survivre ?

- Quoi d'autre aurait pu ?

- …Croit-elle réellement que nous sommes si… dupes ?

Il reporta son attention sur elle, une juste colère imprégnant sa figure.

- A propos Albus, cette faux que je vous ai montrée, c'est elle qui lui a permis de transplaner l'autre soir dans mon bureau ?

Le directeur marqua un temps de réflexion :

- Oui.

- Comment est-ce seulement possible !

- Vous verrez en temps voulu, Severus. Disons que cette arme est un présent lui venant d'un lointain ancêtre, l'un des fondateurs de Poudlard pour être plus précis…

Joyce sommeillait paisiblement à présent, Rogue la fixa longuement… De toute façon, il n'avait plus envie d'exiger d'elle quelques explications. Un autre détail venait de lui revenir en mémoire.

- J'y pense moi aussi, approuva Dumbledore comme s'il lisait dans ses pensées. Qui donc a pu avoir la cruauté de lui envoyer les cendres de son père ?

« Vous vous en sortez bien, miss Happer » songea le maître des potions. « Votre douleur présente éloigne pour un temps toutes représailles… Nous réglerons donc ces petits problèmes plus tard… »


Cependant Joyce était tombée gravement malade… Le blanc de ses yeux virait lentement au jaune ocre, sa peau se rembrunissait comme prise de gangrène. Comme elle avait déjà connu cette douleur auparavant, elle savait qu'il n'y avait rien à faire. Il fallait que ça passe, tout seul…

Shun et Malicia vinrent la voir après chaque fin de cours. Elle avait même reçu la visite de Londubat et d'Hermione Granger. Il n'était certes pas normal que cette « maladie » dure autant. Elle tâtait son tatouage dessous son gant : c'était sa marque à elle, elle signifiait que son père l'avait traitée comme un vulgaire rat de laboratoire. Elle et ses sœurs… Elle, elle était immunisée contre l'Avada Kedavra… Sa sœur jumelle résistait sans peine à l'Imperium. Quant à Rei, sa grande sœur, elle ne craignait pas le sortilège Doloris. Pour ce qui était de Salana, elle ne s'en souvenait plus mais cela n'avait pas d'importance : elle était morte il y avait des années dans un terrible « accident ».

Dans chacune d'elles, le sort qu'elles ne craignaient pas coulait presque dans leur veine : elles pouvaient en user, même sans baguette, ce qui pouvait s'avérer fort utile. Mais les effets secondaires pouvaient être parfois terrible. Joyce avait complètement oublié cette histoire de polynectar/prophasis : en prenant l'apparence de sa jumelle (car en réalité elles étaient totalement différentes l'une de l'autre, de même que Madurei ne ressemblait pas à Salana), elle avait pris une partie de son être, et cette partie étrangère ne pouvait pas supporter l'Avada Kedavra…

Ou alors peut-être que toute cette souffrance venait de cette marque ? Peut-être suffirait-il d'une pommade à appliquer dessus ou d'une potion pour en finir. Mais Joyce ne pouvait se résoudre à en parler, c'était son secret.

- Vous avez bien fouiné dans mon appartement ?

Elle leva les yeux et aperçut Rogue à contre-jour. L'infirmerie était déserte.

- Je ne vois pas de quoi vous voulez parler, dit Joyce en lui tournant le dos avec indifférence.

- … C'est cela… Votre état empire de jour en jour, nous pourrions vous soigner si vous nous disiez seulement ce que VOUS avez fait.

Elle pivota en grognant dans ses couvertures, semblable à un vers se débattant dans une toile d'araignée :

- Qu'ai-je donc fait ?

- Je ne crois pas au hasard, miss Happer… Cette Fille à la faux me jette un sort et je survis à vous-savez-quoi… Je veux bien fermer les yeux sur certaines petites choses puisque vous m'avez « aidé »…

- … Je peux vous faire confiance ? Demanda craintivement Joyce.

- Vous en doutez encore ? Répondit sévèrement Rogue en s'asseyant sur le lit.

Elle le considéra avec méfiance. En elle, deux voix se battaient, celle qui lui disait d'en finir avec cette souffrance et l'autre qui prétextait qu'il fallait l'emporter dans la tombe. Mais Joyce est lâche, elle a peur de mourir. Aussi, elle lui tendit sa main gantée. Il retira lentement le gant de cuir pendant qu'elle fixait le plafond d'un air faussement intéressé, dévoilant ainsi une main bleuie.

- Vous ne l'avez pas laissée assez respirer ! dit-il.

Il observa minutieusement la marque, cachant sa surprise devant ces symboles qu'il ne connaissait que trop bien (certains icônes comptaient parmi les favoris de Voldemort) avant de partir sans mot dire. Joyce attendit anxieusement, assise sur son oreiller, prévoyant un improbable verdict. Rogue revint dans la soirée. Il reprit sa place et trempa ses doigts dans une pommade argentée qu'il avait apportée. Joyce, le cœur battant, lui tendit à nouveau le bras. Mme Pomfresh, qui préférait administrer les soins elle-même, râlait au bout de la salle.

Au bout de trois jours, Joyce fut de nouveau sur pied. Certes, pas au meilleur de sa forme (elle avait encore quelques nausées) mais il lui semblait qu'elle avait bien « évacué » les Avada Kedavra reçus. Par ailleurs, elle n'avait pas demandé à Rogue ce qu'il lui avait passé, et en conclut juste que c'était efficace.