Disclaimer : Le monde d'HP appartient à Rowling

Chapitre 10/ Moi, dit le Mangemort.

Tout ce petit monde était rassemblé dans le bureau du directeur : Dumbledore, Rogue, Madurei, Joyce et Trelawney. Cette dernière, dont le cou portait encore les marques des ongles de Rei, montrait une mine des plus étranges : à la fois gênée et sur la défensive. Elle se refusait obstinément à parler, prétextant avoir tout oublié. Elle envoyait régulièrement des regards peinés vers son élève.

- Et vous, Melle Happer, vous vous rappelez quelque chose ?

Elle leur raconta tout ce qu'elle pouvait dire (elle évita soigneusement de discuter du moment où sa professeur l'avait nommée Néréis et lui avait parlé de son père et de sa sœur jumelle.)

- Mais je suis sure, acheva-t-elle, que ce n'est pas le professeur Trelawney qui m'a attaquée, « cette chose », ce n'était pas elle…

Sybille paraissait atterrée.

- Hé bien, intervint Rogue, vos vapeurs vous seront finalement montées à la tête, professeur. Vous ne voulez toujours rien dire ?

Terriblement confuse, l'adolescente préféra contempler ses pieds. La colère de la veille calmée, sa grande sœur paraissait plus disposée à réfléchir : Elle fit jouer la carte de la Racine entre ses doigts.

- Nous allons vite savoir ce qu'il s'est passé, annonça-t-elle, montre-moi le passé…

Une aura lumineuse naquit dans la masse verdâtre de ses yeux, la carte suivit le mouvement lumineux et étincela. Trelawney avait subitement pâli et baissait la tête. L'éclat subsista un certain temps avant de se rompre dans un tourbillon de ténèbres. (Attention : si la carte de la Racine pouvait montrer n'importe quelle scène du passé, ce serait trop facile. En fait, elle ne peut dévoiler que ce qui s'est passé en sa présence ou réveiller les souvenirs d'une personne mais sans les montrer aux autres.)

- Je vois, dit doucement Rei…

La professeur de divination secoua son visage désolé.

- Quoi donc ? demanda Dumbledore.

Rei se tourna vers sa sœur en tentant de se montrer rassurante :

- Ce n'était pas Trelawney qui était possédée, Joyce, c'était toi

Baoum ! Ce fut l'effet d'une bombe.

- Pourquoi n'avoir rien dit, Sybille ? dit gentiment le directeur.

Elle désigna une Joyce pâlissante d'un coup de menton en gémissant :

- Je ne voulais pas lui causer des ennuis. Elle était tellement étrange, j'ai eu l'impression qu'elle parlait toute seule au début. Mais je ne comprenais rien à ce qu'elle disait, elle parlait bien trop bas. J'ai voulu lui demander ce qu'il se passait et… Elle m'a jeté le sort imperium ! Et puis elle a sorti une fiole de sa poche et m'a forcée à lui jeter le sort imperium à elle aussi pour que je l'oblige à la boire…

- C'est une histoire de fou ! s'exclama Rogue.

- Mais c'est la vérité, murmura Rei en colère.

- M-Mais où ai-je trouvé cette potion ? Bredouilla l'adolescente.

- Il ne vous manque pas un échantillon dans votre bureau, Rogue ? Gronda la grande sœur. Décidemment, c'est un vrai couloir ! Tout le monde peut se servir !

- Q-Qui a pu me posséder, ainsi ?

- Je n'ai pas besoin de vos sermons, maugréa Rogue, ce n'est pas ma faute si votre sœur a l'habitude de fourrer son nez partout !

- E-Et personne ne m'écoute en plus ?

- Si, moi je vous écoute, acquiesça Dumbledore.

- C'est cela, glapit Rei, vous êtes le premier d'habitude à sauter sur les mystères. « à fourrer votre nez », comme vous dîtes, « dans les affaires des autres ». Enfin, si on peut nommer cette immonde appendice un nez…

- Espèce d'impertinente ! Moi au moins je ne dois pas mon poste à mon physique !

- Et pour cause !

- LA FERME ! Brailla Joyce en secouant les bras à la manière d'une mouche battant des ailes, je suis possédée et vous vous en foutez !

Un silence de circonstance se répandit comme une traînée de poudre, ce qui signifiait que ça exploserait à nouveau très bientôt si on ne changeait pas tout de suite de conversation.

- Normalement, commenta Dumbledore tandis que Rogue et Rei se tuaient réciproquement dans leurs pensées, personne ne peut traverser les barrières de Poudlard pour posséder quelqu'un. Le cas de Harry est très rare.

- Hein ? fit Joyce.

- Potter Harry, soupira Rei, n'es-tu au courant de rien Joyce ? Voldemort peut communiquer avec l'esprit de ce garçon.

- Ça, dit Dumbledore amusé, vous n'étiez pas censée le savoir, lady Madurei.

La jeune femme s'empourpra, Rogue eut un sourire cynique.

- Sybille, dit calmement le directeur, vous pouvez disposer. A la condition bien sur que vous ne répétiez JAMAIS ce que vous venez d'attendre. Et je vous interdis formellement d'harceler Harry avec ceci.

- Oui, monsieur le directeur.

Joyce n'aurait jamais cru que Dumbledore puisse être aussi… effrayant. Non pas qu'il paraissait cruel mais son ton avait quelque chose de menaçant. La professeur de divination ne demanda pas son reste et s'en alla sans rien dire.

- Félicitation, Madurei, prononça Rogue avec une lenteur étudiée en faisant mine d'applaudir. Happer n'est pas la seule à avoir cette détestable tendance à trop parler…

En guise de réponse, ses canines se laissèrent entrevoir avant de s'écarter pour s'adresser à sa petite sœur :

- Maintenant, Joyce, réfléchis. A ton avis, à quel moment as-tu été envoûtée ?

- Je ne sais pas, je… Mais si ! Sur le chemin, avant d'arriver à la tour, j'ai eu très mal à la tête, et à ma main aussi… Mais je ne me souviens pas avoir pris la direction des cachots par la suite.

- … Cette personne t'a fais perdre complètement le sens de l'espace et du temps.

- Et pas que ça ! renchérit Joyce, pendant qu'elle contrôlait mon corps, elle a su me faire croire que c'était moi la victime…

« Même tout ce que Trelawney m'a dit n'était que le fruit de mon imagination… »

- Très intéressant, déclara Rogue d'un ton acerbe, et ce fameux soir où vous m'avez, (comment dire pour employer des termes sobres ?) « immunisé » contre le sort mortel, vous étiez contrôlée ?

- N-Non, pas du tout, mais ma faux tend à me rendre dingue parfois…

La jeune fille se sentait à présent très mal à l'aise. Sa grande sœur qui s'était alors enfouie dans une intense réflexion redressa soudainement la tête :

- Je crois savoir QUI t'a joué ce vilain tour, Joyce. Réfléchis… QUI possède un lien ineffaçable avec toi ? QUI possède le don de contrôler comme elle veut l'imperium ? ajouta-t-elle dans leur langue natale.Qui donc aurait pu prendre possession de toi à cette distance ?

- L'Ecarlate !

Joyce avait encore la bouche grande ouverte comme l'ahuri qui vient d'avoir une illumination.

- Qu'avez-vous dit dans votre langue, Madurei ? Interrogea Rogue d'un ton qui ne souffrait aucun refus.

- L'Ecarlate aurait fait ça ! S'écria Joyce.

- Qui est l'Ecarlate ? demanda le directeur.

- Sa sœur jumelle, répliqua Rei. Enfin, c'est son surnom.

Madurei se trouvait forte heureuse de ne pas avoir eu à répondre au maître des potions. Elle croisa les jambes en signe de satisfaction et poursuivit d'une voix cinglante :

- Ta sœur a toujours eu un sens de l'humour qui m'échappe, ma petite.

- Je voulais simplement mettre certaines choses au point, Madurei.

La jeune femme resta sans voix pendant quelques instants. Dumbledore réajusta ses lunettes en demi-lune tandis que Rogue songeait : cette voix, c'était bien la voix qui s'était adressée à lui le soir où elle l'avait « attaqué », quoi qu'elle en dise.

Joyce avait changé : un sourire malfaisant s'était inscrit dans sa chair. La pupille de ses yeux avait disparu, la pulpe d'un fruit qu'on aurait écrasé leur servit d'iris. L'Ecarlate s'apprêtait à parler à travers elle.

- Tu sais très bien que je ne ferai jamais de mal à ma jumelle. Ce n'était qu'un jeu, rien qu'un jeu…

- Tu l'as pourtant mis en danger, gronda Rei.

- Vous m'aviez abandonnée !

- C'est toi qui n'as pas voulu nous suivre, tu as préféré rester auprès de notre père…

- Où était le mal… Tu n'as jamais eu le sens de la famille, Madurei !

- … et lorsqu'il est mort, je suis revenue te chercher mais tu avais déjà disparu!

- Tu ne croyais quand même pas que j'allais attendre que l'Homme aux Yeux Rouges vienne me tuer ?

- Le Seigneur des ténèbres ? murmura Rogue, il en a après vous ?

Sa question était surtout dirigée vers Rei.

- Nous pouvons vous aider, Ecarlate, lui proposa Dumbledore, vous avez encore votre place ici. Il n'est pas trop tard pour nous rejoindre…

- Où es-tu ? S'enquit sa grande sœur, dis-le, et nous viendrons te chercher !

Mais les lèvres de l'adolescente prirent le pli de l'épouvante :

- Vous pensez sincèrement pouvoir me sauver de LUI ! Mais un de ses hommes est dans cette pièce !

Elle pointa un doigt tremblant en direction de Rogue :

- Son Rouge-Gorge!

Et sa voix se perdit soudainement en un cri de douleur, elle agrippa furieusement son propre crâne en se balançant violemment d'avant en arrière :

- SORS DE MA TETE ! MAUDITE…

« Joyce Happer » était de retour, elle cacha ses yeux en appuyant fermement ses mains dessus :

- Les yeux de la néréide sont comme autant de miroirs, énonça-t-elle ne parlant dans leur langue maternelle, ils ne reflètent que ce qu'ils voient.

Les yeux des néréides en effet reflétaient leurs environnements. Joyce, pourtant à demi-sorcière, pouvait même, lorsqu'elle se concentrait, révéler à travers ses propres yeux ce que sa jumelle regarder. Quant à Madurei, elle était beaucoup trop forte de caractère pour permettre à quoi que ce soit de remplir son regard.

Joyce respira profondément pour mieux se concentrer, puis elle desserra légèrement les doigts et laissa entrevoir ses orbites brûlantes :

- Qu'y vois-tu, Rei ?

Sa sœur parut intriguée, elle se pencha légèrement sur elle :

- Ils sont… rouges…

Joyce fit une moue de dégoût et se concentra davantage :

- Et maintenant ?

- Je vois la mer, des landes… Je reconnais ces fleurs… Ta sœur est dans le nord de l'Ecosse…

- Elle coupe le contact, soupira Joyce désappointée, je suis désolée, je ne perçois plus rien…


- Et là, glapit Joyce, ils m'ont dit de les laisser entre adultes !

Allongés sur l'herbe (malgré l'air frais qui soufflait en ce mois de Mars), non loin de la cabane du gardien des clés, Shun et Malicia froncèrent les sourcils : ils n'y étaient pour rien, eux. Pourquoi leur hurler ainsi dessus ?

- Je sais que ce n'est pas le grand amour entre ta petite sœur et toi, commenta Korée, mais d'après ce que tu dis, elle est en danger…

- Mais pourquoi me laisser hors du coup ?

Mais ce qu'elle voulait dire, c'était pourquoi secourir sa jumelle, pourquoi ? Ils ne voyaient donc rien ? Tous, tous ceux qui la regardent, ils ne comprennent rien. Pour Rei, ce n'était que des caprices, des rivalités entre jumelles. Mais Néréis savait, Néréis savait à quel point il fallait craindre l'Ecarlate. Cette fille est volage comme un parfum, aussi traîtresse que la mer ! Jamais lui faire confiance, jamais !

Ne trouvant pas en ses amis le réconfort qu'elle recherchait, Joyce rentra au château. Personne ne pouvait comprendre, ils n'avaient pas vu ce qu'elle avait vu, pas entendu ce que ses oreilles avaient écouté avec horreur… Une compréhension mutuelle était quasi impossible.

- Qu'est-ce qu'il y a, Harry ?

C'était Hermione.

- R-Rien, c'est ma cicatrice.

- Attention ! Ricana Malefoy qui arrivait par derrière avec ses deux gorilles, Potter s'est branché sur Seigneur-des-ténèbres.FM. Hé l'auteur ! C'est pas logique que Malefoy connaisse les radios moldues ! Réponse de l'auteur : je sais mais je suis trop fatiguée pour trouver une autre vanne, mettez ça sur le compte de mon cerveau déclinant…

- Ça t'amuse, morveux ?

Joyce était pourtant consciente mais quelqu'un d'autre s'était emparé de ses lèvres. Elle s'avança vers le petit groupe.

- Je t'ai entendu Malefoy, j'ai déjà attendu les horreurs que tu balances sur le dos des parents du survivant. C'est très mal de réveiller les morts. Mais tu trouves un malin plaisir à commettre ce sacrilège. On ne pouvait espérer que tu t'élèves au-dessus de la nature de ton père. Il en est de même pour vous.

Elle désigna Crabb et Goyle.

- Mais votre châtiment viendra.

Son sourire s'élargit et sa voix ne devint plus qu'un chuchotement railleur :

- Car les fils payeront pour le crime des pères…

Le serpentard fit un abominable rictus en observant son interlocutrice qui semblait complètement droguée. Contre toute attente, il préféra battre en retraite.

- Wouaa ! S'exclama Ron une fois les cravates vertes hors de son champ de vision, tu lui as sorti le grand jeu !

Mais Joyce ne répondit pas, trop occupée à contempler les voûtes.

- Je vous construirai des murailles, murmura-t-elle.

- Pardon ?

Un souffle puis un ton plus dur parcourut sa langue. Ses iris s'épaissirent, rougirent avant de se fendre chacun par une fente verticale.

- Je vous construirai des murailles, non pas de ces murs qui tombent sous les affres de l'homme et du temps mais des remparts comme on en voit seulement bâtis par des mains IMMORTELLES !

Ses bras étaient tendus à moitié, paumes retournées vers le ciel.

- Non pas de ces murs qui tombent sous les affres…

Potter avait pris la relève, ses yeux brillaient d'un éclat malsain et sa voix se para d'accents plus graves tandis que ses deux amis tressaillaient. Joyce et lui se mirent à parler en même temps. La jeune fille se plaça juste devant lui, émerveillée par l'entente réciproque qui s'était installée entre eux :

- Des mains immortelles…

- …Mais des remparts comme on en voit…

- …Pour un Seigneur immortel !

- bâtis par des mains immortelles !

- Des murailles séparant les peuples…

- Des mains immortelles…

- Brisant les alliances…

- Pour un Seigneur Immortel !

- Attisant les haines !

- Des murailles séparant les peuples !

- Je vous construirai des murailles !

- Brisant les alliances, attisant les haines ! Des murailles !

- Des murailles !

Ils en vinrent à se prendre par les mains, captifs d'une véritable euphorie, errant tous deux dans un espace infini peuplé de batailles prenant les allures de boucheries insensées, divaguant sans limite d'espace et de temps, dans le noir absolu. Mais deux mains apparurent dans ce paysage de néant. L'une agrippa Harry, l'autre Joyce :

- STOP! Hurla Rei en les soulevant, que faisiez-vous ! Vous êtes devenus fous…

Les enfants restèrent sans rien dire.

- Potter, vous entendiez un discours de Voldemort ?

Devant l'acquiescement du jeune garçon, elle le lâcha et s'intéressa à sa sœur dont les yeux étaient heureusement redevenus normaux :

- Et toi, Joyce, que diable fabriquais-tu ?

- Je… Je ne sais pas…

- Notre sœur est prés de lui, n'est-ce pas ? Annonça Rei dans leur propre langue afin que Potter et ses amis ne puissent la comprendre. Il est plus que temps d'aller la chercher !

Sous un regard apeuré, l'adolescente dissimulait son envie de vomir.

- Retournez à votre tour, dit sa grande sœur au trio, et toi, suis-moi.

Elle ajouta sans grande conviction :

- Rogue nous attend, il tient à nous présenter quelques-uns de ses « amis »…


Oui, Joyce avait distinctement entendu la voix de sa sœur jumelle dans sa tête. Et si Potter avait quant à lui entendu Voldemort, cela ne voulait dire qu'une chose : L'Ecarlate devait être présente lors du discours du Seigneur ténébreux. En cette nuit de vendredi, les deux sœurs quittèrent le château sous la direction de Rogue. Joyce ne savait toujours pas ce qui s'était dit dans le bureau du directeur après son départ, Rei n'avait daigné en souffler mot. Elle nota seulement que son professeur de potion paraissait plus inquiet qu'à l'accoutumée.

Ils marchèrent longuement, l'incertitude harcelait toujours la conscience de Joyce. Elle devrait leur dire que c'était inutile, sa jumelle ne méritait pas un tel soin.

« Néréis, pardonne à ta petite sœur… » C'était les mots de leur mère. « Vous m'en demandez trop, mère » râla Joyce dans ce qui lui restait de pensée, « cette fille attire le malheur partout où elle se trouve …»

Mais une nouvelle présence l'écarta de son débat intérieur. Ils aperçurent en bordure du chemin un homme dont le visage était couvert de cicatrices.

- Voici Maugrey Fol-Œil, déclara Rogue sans solennité.

- Mais qu'est-ce qu'il est mo… Bredouilla Joyce.

Elle allait bien sur dire « moche » mais un coup de poing de sa grande sœur sur le sommet de son crâne lui permit de se rattraper :

- Bile… Qu'est-ce qu'il est mobile ! Déjà, là ! C'est fou, non ?

- Qui est-ce cet exemple de politesse ? Demanda l'Auror.

- « Joyce Happer », marmonna Rei, nous aurons besoin d'elle pour retrouver sa chipie de sœur.

Il les accompagna et leur présenta l'affaire en quelques mots :

- Nous avons aperçu un regroupement de Mangemorts il y a quelques temps là où devrait se trouver la petite. Vous avez de la chance, nous avions prévu de toute façon de faire une excursion ce soir.

- « Nous » ? S'enquit la jeune femme.

- Oui, nous sommes trois. En voici un autre : Rémus Lupin…

Devant une vieille cabane abandonnée les attendait un autre homme qui devait avoir l'âge de Rogue. Mais ce qui ameuta l'œil aiguisé de Joyce, c'était la bête poilue qui se trouvait à ses pieds.

- Bonjour, dit cordialement Lupin en lançant une main vers Rogue qui fit semblant de ne pas l'avoir vue, bon… Je suppose qu'on ne se fera pas la bise non plus.

- Ha ! Hurla l'adolescente dont les rouages s'étaient subitement mis en place, c'est le chien de l'ivrogne qui m'avait sautée dessus ! Sale bête !

- Du calme, Happer ! Soupira un Rogue qui aurait souhaité se trouver à mille lieux de là, c'est un Animagus.

- QUOI ! S'exclama-t-elle, pourquoi vous ne me l'avez pas dit avant ! Ce n'est pas parce que c'est votre ami que vous devez le protéger !

Un bruit épouvantable traversa la gorge du professeur de potions, Rei elle-même sursauta. Il prononça un mot, un mot horrible, vulgaire, à mi-chemin entre l'enfer et les ténèbres. (Oui, je sais, j'en fais un peu trop…)

- Severus, du calme voyons, s'indigna doucement Lupin, il y a une dame parmi nous.

Il fit un léger coup de tête vers Madurei qui dévisageait scrupuleusement son confrère. Rogue lui lança son regard le plus hostile mais Rei garda un air perplexe. Le chien noir reprit forme humaine devant l'assistance :

- Je m'excuse d'avoir été un peu brusque la dernière fois, dit Sirius Black à l'adresse de Joyce, mais de toute façon…

Il fusilla Rogue du regard :

- Dumbledore m'a déjà bien sermonné…

- Bien fait, rétorqua la jeune fille en croisant les bras, ça vous, te… ça te servira de leçon…

- Si c'est pas mignon, gazouilla Lupin en frottant les cheveux de l'adolescente, elle boude !

- Hé ! On a pas gardé les cochons ensemble !

Sous un flux de colère, ses joues se gonflèrent.

- ça ne va pas, Joyce ? intervint Rei.

Sa petite sœur fit lentement non de la tête en repassant sous le mode « langue natale » :

- J'ai un mauvais pressentiment, je n'ai pas l'impression que je reverrai la lumière du soleil. C'est tout… De toute façon, Rei, c'est ta spécialité d'abandonner tes sœurs au bourreau.

- Si mes sœurs en question n'avaient pas vêtue à mes yeux la parade des assassins, ma réaction aurait été sans doute plus modérée.

- C'est énervant à la fin ! s'emporta Rogue, vous ne pouvez pas parler comme tout le monde ?


La cabane renfermait une cheminée qu'ils utilisèrent pour se téléporter près d'une gare en Ecosse. Ils s'étaient tous vêtus en moldue. Rei portait une longue robe noire, ouverte dans le dos, en débardeur, et des petites sandales.

- Vous n'avez pas froid ? S'étonna Lupin.

- Je viens des régions polaires…

Les néréides avaient coutume de vivre dans les eaux glacées de l'arctique. Joyce portait aussi une robe qui s'arrêtait au-dessus de ses genoux. Elle était bleu marine, des chaussettes épaisses recouvraient la moitié de ses jambes. Les autres avaient vêtu des habits de ville somme toute classiques. Maugrey s'était entiché d'un chapeau pour dissimuler son œil magique. « Et je ne pense étonner personne » dit Joyce en se prenant pour le narrateur, « si je disais que Rogue, mon charismatique professeur, s'était encore habillé dans les tons sombres ! »

Ils prirent le premier train en partance pour la baie des Crickets. Malgré l'heure tardive, le wagon était bondé. Sirius reprit sa forme de chien. Rei et Rogue durent s'asseoir à côté. Les deux autres hommes se séparèrent pour avoir plus de chance de trouver une place. La jeune fille était restée debout, elle ouvrit son sac à dos pour faire respirer Korée que sa grandeur sœur, pourtant, lui avait formellement interdit d'amener.

- Je ne supporte plus ça, murmura la fillette aux oreilles de lapin, pourquoi c'est toujours moi dans le sac ?

Joyce se saisit de la carte de la Racine, que Rei lui avait heureusement rendue après moult hésitations, et la fit lentement glisser entre ses doigts.

- Ne t'inquiète pas, dit Lupin qui n'avait toujours pas pu s'asseoir, nous allons juste en mission de reconnaissance, cela fait plusieurs jours que les haem (il baissa le ton), Mangemorts ont déserté les lieux, si ta sœur s'y trouvent toujours, on la ramène.

- Si tout danger est écarté, pourquoi y aller si nombreux ?

- …

Lupin ne trouva rien à répondre sur le moment.

De son côté, Rei fixait le paysage avec insistance, comme si son regard aurait pu s'accrocher à un arbre et ralentir le train. Au bout d'un moment, elle se décida enfin à enjoliver le silence :

- Vous n'auriez pas du venir… Vous auriez du penser à votre couverture avant tout.

Rogue se débarrassa d'une mèche de cheveux qui l'aurait empêché de répondre :

- Vous-Savez-Qui ne m'a pas du tout parlé de cette base en Ecosse. Je ne sais absolument rien de votre sœur de sa bouche. J'ai l'impression qu'il se méfie déjà de moi.

- Alors vous allez jouer franc-jeu ?

- … Ne vous inquiétez donc pas. Je lui dirai que, un peu égaré par le manque de confiance dont on faisait preuve envers moi, je vous ai suivi pour vous surveiller.

La jeune femme ne trouva rien à redire, se demandant seulement jusqu'à quel point on pouvait abuser impunément de l'Homme aux Yeux Rouges.

- J'ai vu, murmura Rogue, lorsque je suis entré dans l'esprit de Joyce, quelques scènes qui m'ont laissé perplexe…

- Dîtes toujours…

Son cœur s'était littéralement décroché de ses artères à la pensée de Salana, Madurei respira profondément en tentant de garder son calme.

- Vous êtes… les filles de Frédéric.

Etrangement, elle se sentit soulagée, malgré le fait que cette affirmation représentait pour elle un lourd fardeau :

- Je ne l'ai pas choisi, soupira-t-elle.

- Bien sûr, mais il y a un autre détail qui…

Il la regarda pour mieux l'interroger :

- Je me souviens de ce jour où « nous » sommes venus chez vous. C'était il y a 18 ans, des années avant la chute de Vous-Savez-Qui. Or vous paraissiez avoir déjà 12/13 ans et l'époque, même Joyce était née…

- Disons que nous vieillissons plus lentement, que ce soit mentalement ou physiquement..

- Peut-être parce que vous êtes à moitié néréide ?

Pour Rogue, contempler une demi-néréide était un fait inédit : en effet ces anges des mers mettaient d'habitude un point d'honneur à ne pas s'approcher des hommes. Rei parut surprise mais elle ne chercha pas à démentir :

- Comment le saviez-vous ?

- Simple déduction : Joyce s'est trahie en offrant l'une de ses plumes pour en garnir sa baguette magique. En outre, le fait que ses yeux aient reflété l'environnement de sa jumelle en ait significatif. Sans oublier que le jour où elle m'a dérobée des ingrédients, elle s'est évaporée dans une fumée rouge, et je crois savoir que les néréides transplanent toujours dans un nuage de couleurs assez voyantes. Et puis pour expliquer cette incohérence de temps, c'est la première idée qui m'est venue…

- Vous me faîtes penser, dit Madurei en faisant mine de réfléchir : Joyce m'avait d'ailleurs envoyé une lettre dans laquelle elle s'alarmait car elle croyait que vous aviez deviné son âge.

Rogue eut un ricanement sourd à l'ébauche de ce souvenir :

- Je la croyais plus jeune, en fait c'était l'inverse…

- Vous n'avez pas tout à fait tort. Physiquement et mentalement, elle a tout d'une adolescente de 15 ans, voire 14... Cependant elle-même n'en sait rien et n'a pas encore remarqué cette incohérence de temps. Evitez de le lui dire, le choc pourrait la tuer… (mais serait-ce véritablement un mal ?)

Bien sur, elle avait ajouté ces derniers mots avec ironie.

- Si ce n'est pas trop indiscret, poursuivit Rogue, quel âge avez-vous en fait ?

Rei fit une grimace :

- Vous ne parlez pas souvent aux femmes, je me trompe ? Enfin, je pense que cette question devait vous trotter dans la tête depuis un long moment malgré que vous me traitiez souvent de, je cite, « gamine sortant à peine de l'enfance… »

- Je n'ai jamais dit « gamine », répliqua-t-il.

- Mais vous le pensiez…

- Non.

Rei souffla pour signaler sa défaite et répondit enfin à la question :

- Je ne connais pas mon âge exact. Mon père n'a pas tenu utile de relever nos dates de naissance. Cependant le brave homme a quand même retenu nos signes astrologiques, comme si c'était vital, haem… Je pense avoir entre 60 et 70 ans.

Et comme pour se justifier, elle lança soudain :

- Mais pour une néréide, c'est jeune ! D'ailleurs, je n'ai pas l'impression d'avoir autant vécu.

- Pas étonnant… L'enfance d'une néréide se déroule sur environ 50 ou 60 ans… Je n'avais pas tout à fait tort : vous sortez vraiment de l'enfance. Gamine.

Soupir excédé de Madurei qui préféra se concentrer sur le paysage. Rogue en profita pour la contempler en silence : hum… Il disait ça pour la taquiner mais il devait bien se rendre à l'évidence : ce n'était pas une gamine qu'il avait devant les yeux mais une femme, et de caractère de surcroît…

Mais un autre détail vint turlupiner le professeur de potion : si elle était née il y a de cela une soixantaine d'année, qu'en était-il de Frédéric, son père ? Il s'empressa de lui poser la question.

- Ha ! Fit-elle négligemment, mon père possédait une sorte de « fontaine de jouvence »…

Mais le teint de la jeune femme s'était assombri, Rogue compris qu'il avait mis le doigt sur un sujet plus épineux qu'il ne croyait. Cependant devant la gravité de Madurei, il préféra ne pas en demander davantage pour le moment.

Brusquement, les yeux de Madurei s'emplirent d'une clarté impitoyable : là dehors, elle avait aperçu quelque chose, une étrange lueur violette venant de la mer parallèle aux rails, elle n'eut pas le temps de penser, elle agrippa un bras, celui de Rogue, et cria :

- Accrochez-vous !


Les reflets pourpres dansèrent sur les rails que le train quitta presque instantanément, il y eut une explosion, des explosions. Toutes les vitres sautèrent, déchirant des gorges moldues au passage. Sirius, toujours sous sa forme animale, avait bondi par une fenêtre explosée et roulé sur l'herbe. Il s'arrêta au pied de Lupin qui avait transplané.

- Vigilance constante, hein Fol-Œil, gronda Rogue en apparaissant à son tour. C'est réussi, bravo !

L'intéressé se matérialisa derrière lui mais ne songeait nullement à répondre à l'accusation :

- Nous n'avons pu sauver personne, tous les moldues sont…

- Où sont les autres ! S'écria soudainement Rogue, où sont Happer et Madurei ?

Madurei, il l'aperçut devant lui, pâle et droite sur le rivage, du sang coulait dans son dos en minces filets rougeâtres. Elle pointa un doigt vers la mer désignant un monticule de wagon qui semblait orner une île de métal sortit de nulle part.

- Mais cette plate-forme n'existait pas avant ! Grogna Sirius à nouveau humain. Qu'est-ce que ça veut dire ?

Mettant un pied dans l'eau, la jeune femme ressentit des vibrations oppressives :

- On ne pourra pas s'y rendre en transplanant. « Quelqu'un » a mis une barrière !

« Et je ne pourrai pas non plus voler » s'alarma-t-elle in petto. En effet, elle avait déjà déployé ses ailes pour se sortir du train (d'où le sang dans son dos), et il lui fallait un certain temps avant de pouvoir recommencer.

- Il ne reste plus qu'à nager, dit Rogue en la rejoignant.

- Non, pas vous, prononça Rei avec dureté, Jédusor est là-bas !

- Quoi, souffla Lupin atterré, vous êtes sure…

- Je le SENS, je le SAIS, gronda-t-elle, que voulez-vous de plus ?

Mais avant d'avoir pu ajouter quoi que ce soit d'autre, l'eau s'éleva en tourbillons, vomissant sur le sable de gigantesques créatures profilées en des allures reptiliennes.

- Des… Des naïades ! S'exclama Fol-Œil.


C'était lassant à la longue, encore une plate-forme. Encore un ciel noir, encore la marque des ténèbres qui naissaient lentement dans le ciel. « Je rêve encore ? » Joyce s'appuya sur ses mains tremblantes. Une large étendue métallique l'entourait. Aux extrémités circulaires, les wagons semblaient dessiner une barrière, un liquide rouge en suintait, brillant comme du cristal.

- Magnifique, murmura-t-elle un peu abrutie.

Elle devinait au ciel qui s'assombrissait de plus en plus qu'une tempête se préparait. Déjà une lourde brume s'abattait sur les lieux, dissimulant les wagons sentant le cadavre. Où allait ? Où se cachait ?

- Rei ! Rei ! Hurla-t-elle, Ro…

Elle allait crier « Rogue » mais quelque chose la retint, une petite voix dans sa tête qui la raillait : « ce ne serait pas malin, pas du tout. »

- Korée ! Lupin truc bidule chouette ! L'autre avec son œil magique… Répondez-moi, quoi ! Le chien, pssss ! Le chien !

La solitude se fit de plus en plus oppressante, semblant donner la réplique au brouillard.

- On se calme, ma petite, tu vois bien qu'il n'y a personne…

Joyce vit volte-face, une Silhouette noire était là, un homme sous une cagoule.

- Le maître souhaiterait te…

Mais la jeune fille avait dégainé sa baguette :

- Inferno !

Le Mangemort bondit sur le côté, évitant les flammes de justesse, il pointa à son tour sa baguette :

- Endoloris !

Roulant à terre, elle avait esquivé elle aussi. Ses tempes battaient en tambour au rythme irrégulier. La peur la tenait, captives entre ses ongles d'ébènes, Joyce ne voulait pas mourir, elle ne voulait pas tuer non plus… mais à choisir…

- Avada Kedavra, rugit-elle.

Mais sa baguette trembla au bout de ses doigts gantés, les paroles d'Ollivanders lui revinrent en tête, bizarrement, comme si c'était le plus important dans un moment comme celui-ci :

« Quand je vous imagine, vous, tenant cette baguette, un long frisson d'horreur me parcoure l'échine, j'y ressens l'inceste… » Joyce avait compris, trop tard. Une pulsation partit de l'extrémité de la baguette et remonta dans sa main, puis dans son bras, déchirant sa chair. Comme il pouvait arriver des accidents en cas de consanguinité, la baguette s'était retournée contre cette propriétaire qui lui ressemblait trop. Elle lui échappa des mains et glissa quelques mètres plus loin. Vite ! Un rapide inventaire des dégâts : bras droit ensanglanté, mais pas hors d'usage.

Cependant le dommage le plus grave était la réaction du Mangemort : il avait entendu qu'elle cherchait à lui lancer le sort mortel et semblait à présent disposer à en faire de même. Bien qu'elle n'avait rien à craindre de l'Avada, Joyce redoutait qu'il n'essayât de la carboniser comme elle avait tenté de le faire. « Il y a mille façons de tuer quelqu'un » retentit la voix de Rei dans son esprit, comme lorsque cette dernière l'entraînait, « Ne l'oublie jamais Néréis, ce n'est pas parce que tu as un don spécial que tu es invincible… »

- Thanatois ! Glapit son adversaire.

C'était un sort de désossement, Joyce n'eut le temps que d'un clin d'oeil pour se décider : sa faux apparut, lacérant son gant, elle la saisit de son autre main, se rua en avant. La baguette ennemie brilla, le sort en gicla, Joyce était devant lui…


- Silencio ! Cria Rogue.

Une autre naïade fut contrainte au silence : il fallait coûte que coûte les empêcher de chanter s'ils ne voulaient pas tous boire la grande tasse. En désespoir de cause, les créatures se faufilaient sur le rivage en traçant de grands sillages. Maugrey en immobilisa plusieurs mais elle se remettait trop facilement des sorts d'immobilisation. Lupin éprouvait de sincères regrets à l'idée que la pleine lune soit déjà passée. Il résistait avec peine aux asseaux de ces monstres marins. L'un d'eux l'avait encerclé avec sa queue de serpent et il aperçut trop tard les dents fondre sur lui. Mais alors qu'il s'apprêtait à subir le coup, la bête tomba lourdement sur le sol : Rei était sur son dos, tenant une épée plantée droite dans son échine :

- Vous la sortez d'où cette épée, Madurei ? S'enquit Lupin avec soulagement.

La jeune femme sourit narquoisement, étreignant la garde de son arme avec un sentiment de triomphe. Une naïade, passant non loin d'elle, poussa des crissements rauques de serpents. Rei, qui était fourche-langue, comprit avec aisance :

- Sale traîtresse !


C'était une drôle d'impression… Son crâne s'était fendu comme du beurre, ce n'était plus qu'une demi carcasse accompagnée de sa sœur siamoise qui gisait sur le sol. La faux dégoulinait de sang : Joyce avait tranché le Mangemort juste à temps. Du dégoût en même temps que du soulagement emplissait les muqueuses de sa bouche. Elle voulait cracher, vomir, essuyer ce sang. Elle s'abandonna sur ses genoux, désemparée. A ce moment-là, elle réalisa qu'elle aurait très bien pu tenter de lui jeter l'Avada à nouveau au lieu de le tuer d'une façon aussi… sale… Et elle eut encore plus envie de vomir.

-Hé bien, mon enfant, c'est la première fois que tu tues quelqu'un ?

Joyce leva ses yeux dévastés par de nouveaux sentiments sur celle qui lui parlait.

- Non… répondit-elle comme fascinée.

Elle la reconnaissait, c'était la Mangemort qu'elle avait bousculé un soir à Londres. Celle-ci ne parut pas attristée par la mort de son partenaire.

- Je m'appelle Bellatrix Lestrange, (sa voix était anormalement aiguë, comme si elle imitait le timbre d'une petite fille), notre seigneur sera mécontent, tu viens de salir ses pavés.

- Quels pavés ?

- Ces pavés-ci !

La Mangemort trempa voluptueusement ses doigts dans le sang encore frais :

- Mais il n'est pas trop tard, tu peux toujours demander grâce. N'hésite pas, ce sera bientôt l'heure des comptes : toute nouvelle recrue sera une bénédiction !

Hé bien Néréis, résonna encore une fois la voix de son père, ne penses-tu pas qu'à suivre quelqu'un, autant que ce soit le vainqueur ?

- … Non, gémit Joyce, non…

- … Tu as eu besoin de réfléchir, ne put s'empêcher de remarquer Bellatrix, tu n'es pas sure de toi, avoue.

- Non !

Joyce se releva, elle avait l'air d'une malade échappée d'un asile psychiatrique. Son regard bouillait, ses lèvres pendaient, et plus que tout : elle semblait enragée.

- Ne dîtes pas ça, glapit-elle, ne parlez pas comme ça de moi ! N'offensez pas la mémoire de Néréis ! Tuez-moi, battez-moi s'il le faut ! Mais ne me regardez pas comme si j'étais sur le point de vous tomber dans les bras !

En plus, en plus… Ce type qu'ils suivent, Néréis, cet homme c'est…

- Un Sang-de-bourbe ! Vous obéissez à un Sang-de-bourbe !

Bellatrix s'étrangla. Incapable de parler correctement, elle bafouilla mille interjections de morts contre son interlocutrice. Sa baguette se levait, allait jeter le sortilège Doloris. Mais un cercle vert se dessina bientôt sous les pieds de Joyce. Elle ne tenait pourtant plus sa faux. En fait, elle n'en avait pas besoin pour lancer l'Avada Kedavra, ce sort coulait à même dans ses veines. Ce sort pouvait lui traverser la peau à tout moment, selon sa volonté, selon son envie.

Bellatrix recula instinctivement devant l'avancée de la nuée verte

- Il ne tient qu'à moi, hurla Joyce à s'en déchirer la gorge, de remplir toute cette plate-forme du sort mortel ! Dis-le, dis-le à ton maître ! Casse-toi ! Casse-toi !

La Mangemort s'évanouit dans le brouillard. L'adolescente arrêta le sort, réintégra sa faux, tomba à terre et se balança d'avant en arrière en sanglotant :

- Casse-toi… Casse-toi…


Il leur semblait que les naïades s'écoulaient en flots infinis ! Il en y avait toujours plus, encore et encore ! Leurs attaques se firent plus sauvages. Les sorciers durent employés des moyens plus radicaux. Rei, cernée pendant un instant par cinq des créatures, envoya même le sortilège doloris en rafale (exactement comme Joyce pouvait le faire avec le sort mortel). On avait déjà envoyé des sorts mortels ou terriblement douloureux mais les naïades n'acceptaient pas encore la défaite. Comme il s'était rendu compte que ces bêtes ne s'attaquaient pas aux animaux, Sirius avait repris sa forme d'Animagus pour plonger dans l'eau et gagner l'île de métal, dans le but de retrouver Joyce, la survivante. Si survivante il y avait.

Enfin, la donne sembla s'inverser. Peut-être la lassitude avait gagné les naïades : certaines commencèrent à reculer. Rogue acheva l'une d'entre elle qui essayait néanmoins de lui arracher un membre. Erreur fatale ! Il ne savait pas que sa mère attendait derrière : la plus grosse des naïades bondit alors dans un hurlement frénétique, elle sembla heurter le ciel pendant un instant et se rabattit sur la terre dans un immense fracas. Elle déploya largement sa gueule : un pic de lumière argentée y apparut et elle crachat une boule de glace.

- Attention ! Hurla Rei, ça va exploser !

Effectivement, à peine la boule avait-elle touché de la matière solide, en l'occurrence le sol car Rogue avait réussi à esquiver, qu'elle avait éclaté en meurtrissant la terre. Il se remit péniblement debout mais un énorme rocher soufflé par l'explosion lui coinça une jambe. Au-dessus, trônant sur sa queue de serpent, la créature réitéra sa tentative : une sphère lumineuse fonça à nouveau droit sur lui. Il ferma les yeux, serra les dents, un craquement se fit entendre : Rei, placée en bouclier devant lui, avait reçu l'impact en pleine poitrine…