Disclamer : Le monde d'HP appartient à Rowling mais je dois dire, haem, en tout modestie, lol, que j'en ai rajouté une sacrée couche par dessus. (clin d'œil à Angie Black)

Bonjour mes chères lectrices !!!! (C'est à dire Angie, Ryannon, Pauline et Léna, lol ) Je suis contente d'être parmi vous ce soir pour vous présenter la suiiiiiiiite !!!! lol Pardonnez-moi, j'ai eu 6 heures de dissertations philosophiques, c dur de s'en remettre….

Rewiew / Réponse à Angie Black : Pour tout te dire Angie, quand j'ai décidé d'écrire une Roguefiction, je me suis appuyée sur un livre que j'avais essayé d'écrire en seconde. J'ai repris certains personnages dont j'ai changé l'âge ou le sexe… (et surtout les noms). Mais au final, je dois dire que c'est devenu complètement différent de ce livre, et cette histoire a su prendre son envol sans reposer dessus. Quand aux néréides, ce ne sont pas les nymphes les plus connues de l'antiquité, je les connais uniquement parce que je suis une mordue de mythologie. Par contre, j'ai donné une vision très personnelle d'elle, ainsi que des naïades que j'ai définies comme des monstres marins alors qu'en fait ce sont de très belles nymphettes. Je ne pense pas que les néréides aient des ailes en réalité. J'ai pris leur nom parce qu'il me plaisait et puis basta ! Je les ai remodelées. Je n'ai pas mon dico sous la main mais si vous voulez, dans les prochains chapitres, je ferai un rapide tour d'horizon sur leur véritable apparence et leur vrai pouvoir. Je suis contente que la présentation de la section 4 t'ait plue.

C/ Je t'aime…

Le scandale était remonté jusqu'au bureau du directeur. Rogue entra dans l'infirmerie, chargée de Joyce dans les bras, suivi de Caïn. Ils furent rapidement rejoints par Dumbledore.

- Je ne la reconnais plus ! S'écria Rogue tandis que Pomfresh prenait le pouls de la jeune fille. Elle devient complètement folle !

Caïn l'interrompit d'une voix terne :

- Professeur, je sais lire sur les lèvres, et j'aurai honte à votre place de ce que vous lui avez dit.

Rogue pointa son nez sur celui du jeune homme en plissant ses yeux noirs :

- Je ne crois pas vous avoir demandé votre avis Headcliff.

- …Vous êtes en train de perdre Néréis, professeur.

Dumbledore s'interposa doucement. Caïn gardait une mine monotone et le ton de sa voix ne démentait pas son état soporifique.

- Caïn, dit-il avec patience, expliquez-vous.

Le jeune homme posa son regard sur Joyce, on y lisait une incroyable tendresse :

- Quelque chose est en train de remonter en elle.

- Quoi donc ? s'impatienta Rogue.

Caïn pencha la tête vers lui d'un air endormi :

- C'est à Néréis de le dire, pas à moi…

Chaque fois qu'il regardait cet élève, Rogue ressentait une étrange envie de… bâiller : le flegme de Caïn était communicatif. Pomfresh traversait la pièce de long en large pour concocter une boisson à base de vitamines :

- Surmenage, Surmenage, râlait-elle, vous allez nous les tuer, ces élèves, Severus !

- Comment ça ? S'étonna Rogue avec colère.

- Ce n'est pas un hasard si elle s'est évanouie juste après votre cours ! Qu'est-ce que vous avez fait, encore, comme misère ?

Rogue préféra ne pas répondre : il pourrait y avoir des morts.

Rei arriva à son tour, elle dévisagea Rogue un instant, puis marmonna :

- Toujours d'aussi bonne humeur…

Et elle prit la main non gantée de sa petite sœur dans le creux de la sienne.

- Votre sœur, commença à reprocher Rogue…

Mais il s'arrêta net : la présence de Caïn et de l'infirmière le gênait. Le directeur ordonna avec courtoisie qu'on les laisse seuls. Mme Pomfresh sortit en pestant. Mais Caïn n'avait pas remué un cil.

- Vous n'avez pas entendu, Headcliff ? s'énerva Rogue.

- Caïn peut rester, déclara calmement Rei, il sait déjà tout.

Rogue décroisa les bras :

- Tout ?

- Oui, murmura humblement le jeune homme à l'égard de Rogue, j'ai eu l'occasion durant mon enfance d'entendre la chanson du rouge-gorge : Néréis et l'Ecarlate parlaient beaucoup de vous, autrefois.

- Ça n'a pas changé, ricana Madurei.

Rogue leva les yeux au ciel de déconvenue avant de gronder :

- Votre sœur a fait fort aujourd'hui ! J'ai bien cru qu'elle allait parler du Seigneur des ténèbres devant toute la classe…

- Mais elle ne l'a pas fait, visiblement, siffla Rei en serrant les dents.

Elle se redressa juste devant lui pour mieux faire jouer les reflets colériques de ses iris furieux.

- Savez-vous, souffla Rogue, un rictus mauvais sur le visage, qu'elle a osé s'immiscer dans une conversation entre moi et lui ?

- Non, fit lentement Rei, je ne le savais pas…

- Et ce matin, l'Ecarlate s'est encore manifestée.

- Fascinant… A-t-elle dit si elle comptait nous rendre une petite visite ?

Exaspéré par les réponses détachées de Rei, Rogue lui tourna le dos avec brusquerie. Dumbledore jugea bon d'intervenir :

- Severus, quand Melle Happer se réveillera, vous ne lui reparlerez pas de cela …

- Comment ?! S'écria celui-ci.

- Vous m'avez bien entendu : je vous l'interdis formellement. Elle a eu assez d'émotion pour aujourd'hui.

- Albus, dit Madurei, j'essaierai, moi, de la dissuader d'essayer d'espionner Jédusor…

- Lady Madurei…

- Ne vous inquiétez pas, je lui en parlerai que demain, et je ne la gronderai pas…

Elle eut un geste dédaigneux vers Rogue :

- Et contrairement à certains, je me contenterai de la sermonner avec douceur.

- Vous avez un problème, Madurei ? grogna Rogue.

- Oui, vieux chameau (elle planta sa figure devant la sienne), il faudra beaucoup plus que votre petit coup de force de ce matin pour vous débarrasser de moi !

Autrement dit : elle ne lui en voulait pas pour ce qu'il lui avait dit et n'était pas disposée à laisser tomber. Un brin de lassitude envahit Rogue : ce n'était pas comme cela, en effet, qu'il l'éloignerait de lui. Son visage se ferma et resta insondable, il salua le directeur et prit congé d'un pas martial.

- La situation est grave, annonça le directeur après le départ de Rogue, nous ne pouvons pas laisser Néréis faire n'importe quoi…

- Je sais, acquiesça Madurei, je lui ferai entendre raison…


Faire entendre raison à Néréis… le 24 juin dernier. Madurei accompagnée de Néréis et de Caïn se rendait dans les réserves de son père pour ajouter quelque goutte de potion d'amnésie au polynectar.

- Au fait, précisa Madurei, il faudra que tu prennes même le nom de « Joyce » le temps de traverser la frontière.

- Cela ne me dérange pas de le garder ensuite.

Madurei marqua une hésitation perplexe.

- Oui, soupira Néréis, « Néréis » la néréide, je trouve cela ridicule. Je veux un prénom normal, pour être une enfant normale. Appelez-moi « Joyce »…

- Et pour le nom de famille ?

- Nous trouverons en temps voulu.

Des sanglots retentirent derrière elle : l'Ecarlate suivait leurs pas en pleurant le départ de sa jumelle comme l'aurait fait une veuve éplorée.

- Silence ! Cria Rei exaspérée par cette réaction.

Ils touchaient au but quand Sir Frédéric apparut pour leur barrer la route. Visiblement, il avait bu :

- Espèce de monstre, gémit-il en dévisageant sa fille aînée, tu peux emporter cette garce de Néréis… Mais qui crois-tu tromper ? Je sais que tu ne le fais pas par bonté d'âme !

Madurei retroussa ses lèvres et s'apprêta à dégainer son épée.

- Espèce de monstre, répéta son père, personne ne pourra jamais t'aimer ! Tu as abandonné tes deux petites sœurs et tu prétends aujourd'hui avoir des droits sur elles ?!

- Parfaitement, père, renchérit l'Ecarlate, vous avez raison ! Elle nous a abandonnées !

- Nous l'avions mérité, susurra Néréis.

- Grande sœur ! geignit l'Ecarlate à l'égard de sa jumelle.

Titubant, Sir Frédéric faillit s'empaler tout seul sur la lame que Madurei tenait face à lui. Il fit mine de vouloir vomir, l'assistance recula, dégoûtée, puis il redressa son visage verdâtre :

- Qui est ce garçon ?

- Caïn, murmura Rei, c'est comme s'il faisait parti de la famille maintenant.

Et elle se retourna donc vers le jeune homme :

- Bienvenue chez les monstres, mon garçon !

- Merci, souffla-t-il.

Mais il ouvrit aussitôt de grands yeux :

- Néréis a disparu !

Ils regardèrent tous frénétiquement de part et d'autre d'eux. Mais où était-elle allée ? L'Ecarlate sembla avoir une illumination :

- Ho non ! La FAUX !

Comme si elle avait reçu une décharge électrique, Madurei bondit dans la direction inverse. Caïn partit en courant à sa suite, talonné par une Ecarlate accablée par l'angoisse. Ils couraient, couraient, comme des fous, traversèrent des sous-sols, puis une salle d'eau qui noyait leur cheville, et déboulèrent sur une pièce donnant sur ce qui semblait être les racines d'un arbre. Néréis était à terre, gémissante sur le sol terreux. Caïn remarqua alors le tatouage qu'elle portait sur la main : un cercle où se lovait un éclair comme un serpent, entouré de signe… Et cette étrange marque semblait fumer…

- Qu'as-tu fait ? S'écria Rei, tu n'as quand même pas absorbée la Faux ?

Néréis se replia sur elle-même sous le joug de la douleur en répondant un « oui » plaintif…

- C'est moi… haleta-t-elle, c'est moi qui supporterais ce… fardeau…

Rei la toisa glacialement : visiblement, cette initiative de sa petite sœur la gênait au plus haut point : elle aurait préféré s'occuper elle-même de cette arme terrible. L'Ecarlate semblait avoir la nausée et resta accroupie sur le seuil.

- Caïn… déclara Rei à vois basse de sorte que l'Ecarlate ne puisse pas entendre, je crains que tu ne doives faire ta rentrée à Poudlard tout seul… Néréis te rejoindra quand je lui aurais appris à manipuler cette Faux.

Néréis se traîna aux pieds de sa grande sœur mais celle-ci ne prit même pas la peine de la relever :

- Je ne peux rien pour toi en ce qui concerne la souffrance… Tu vas devoir la maîtriser, pauvre idiote ! Maintenant que tu as signé le pacte avec cette arme, c'est entre toi et elle ! Les prochains mois vont être atrocement dur…


- Et merde ! Hurla Rogue en renversant un bocal.

C'était de pire en pire… Joyce avait changé : le voyait-elle vraiment comme un nouveau bourreau dont elle pouvait se distraire ? « Il est des victimes qui se passionnent pour leur bourreau » avait dit Dumbledore. Comme si Rogue avait envie de lui servir de substitut de père ! Comme s'il y avait dans sa vie une place pour une femme et une enfant ! Comme s'il pouvait les protéger toutes les deux : Rei et Néréis !

Ne plus s'en occuper : c'est cela. Quand il essayait de raisonner Joyce Happer, il obtenait exactement l'effet inverse. Dèsle lendemain, il l'ignorerait, elle devrait se calmer d'elle-même. Mais Madurei ?

On toqua.

- Entrez, gronda Rogue en espérant que ce ne soit ni l'une, ni l'autre.

Il fut exaucé : Caïn se faufila à l'intérieur dans une démarche nonchalante. Mais Rogue n'avait pas spécialement envie de le voir lui non plus.

- Bonsoir professeur, dit-il respectueusement en s'inclinant. Je venais pour m'excuser : mon audace est impardonnable mais j'étais fou d'inquiétude pour Néréis.

Fou d'inquiétude ? Rogue l'aurait surtout cru sur le point de s'endormir !

- Et bien, lança le professeur en se détournant, tâchez de combattre vos « violentes » émotions à l'avenir.

- Seriez-vous en train de me railler?

« Est-ce que je dois vraiment répondre à cette question ? » Se demanda Rogue. Non, ce serait trop facile…

Caïn l'observa intensément :

- Depuis le temps que j'entendais parler de vous : en début d'année, je n'ai cessé de vous épier… Celui qui est, selon l'expression de Néréis, « revenu des ténèbres ».

L'attention du jeune homme était pesante, Rogue avait l'impression d'être relégué au rang d'idole, ce qui le fâcha :

- Ne parlez pas ainsi, vous êtes ridicule !

Mais il réalisa que finalement, Caïn pouvait lui être utile :

- Vous connaissez Néréis et sa sœur depuis longtemps ?

- J'ai rencontré Lady Madurei il y a fort longtemps, bien avant la renaissance du Monstre aux Yeux Rouges, mais je connais Néréis depuis toujours… Le jour de ma naissance, elle fut enfermée dans une tour. Et aussi loin que je me souvienne, j'ai toujours vécu aux pieds de cet édifice d'ivoire…

- Mais vous ne l'aviez jamais vue…

- J'entendais tout d'elle ! Dit soudainement Caïn avec une ferveur qui lui était inhabituelle, j'ai à ma connaissance ses secrets les plus intimes !

- Ha… Et…

- Pardonnez, professeur, mais je n'en divulguerai aucun, je n'ai pas envie qu'elle me répudie.

Rogue dut faire appel à tout son bon sens pour se maîtriser : ce petit imbécile l'appâtait pour ensuite lui refuser toute information !

- Mais vous voulez l'aider, n'est-ce pas, Headcliff ? Est-ce que par hasard, vous sauriez quelle est la faiblesse de Néréis ?

Caïn cligna des yeux en affichant un visage indécis :

- Sa faiblesse ? Mais voyons, professeur, vous en faîte parti.

- Qu'est-ce que…

- Vous, l'Ecarlate et lady Madurei… Et je dois l'admettre (ses yeux gris s'assombrirent) : je suis un peu jaloux. Moi, je n'ai pas un tel pouvoir sur son âme !

Et le jeune homme fit volte-face pour quitter le bureau avec une lenteur précipitée.


« Je cours, je cours, je cours, mais il ne se retourne pas ! » Madurei se réveilla encore en sueur. Ses cauchemars ne cesseront donc jamais ? Un coup, elle est à Londres, poursuivant l'ombre de Rogue… L'instant d'après elle observe Néréis dansant avec un masque aux yeux rouges. Et puis son père lui enfonce une hache dans le dos… Et puis la marque des ténèbres flamboie sur le bras de Rogue…

« Oublie ! » s'ordonnait-elle, « oublie ! » Mais toutes les errances de ses dernières années remontèrent d'un bloc dans sa mémoire. Elle avait refusé d'entrer à Poudlard et entreprit seule de faire son éducation : elle avait pénétré dans les milieux les plus hostiles de la magie noire, traîné avec ses adeptes les plus sombres. Elle avait vécu de contre-bande et d'arts occultes. Elle rassemblait par exemple les ingrédients dont les mages noirs avaient besoin, mais qu'ils craignaient d'aller quérir eux-mêmes, comme les cœurs de dragons. Plus le danger encouru était grand, plus les prix flambaient : Madurei n'hésitait pas à risquer sa vie. En outre, elle apprit à contrôler les flots par sa voix, et elle s'aventurait souvent au fond des mers en quête du trésor d'un galion espagnol coulé il y a de cela quelques siècles.

Mages noirs et marins chevronnés appartenant au monde de la sorcellerie l'avait surnommée la Vierge Noire, jeu de mot avec la célèbre araignée la « veuve noire »… Peut-être aussi par le fait qu'elle portait toujours la même robe de cuir noir, luisante et inégalement découpée mais de façon élégante, une robe toujours impeccable que rien ne souillait jamais. Qu'elle revienne d'une bataille, ou qu'elle sorte de l'océan, elle était toujours d'une propreté exemplaire, jamais mouillée, jamais tâchée. Ses longs cheveux noirs s'éparpillaient sans cesse autour d'elle en petites danses saccadées en lui conférant un air hautain.

Les hommes la méprisaient plus qu'ils ne la désiraient : elle croyait tout savoir et les jugeait tous indignes de sa personne. L'orgueilleuse Madurei paraissait bien incapable d'aimer.

- Mais ce n'est pas une méchante fille pourtant, avait dit une marchande de gri-gri.

Elle se nommait Hilde Nomberk, et habitait Londres depuis 40 ans… Le soir où Madurei était arrivée dans la capitale, cette vieille dame l'avait trouvée agenouillée sur le sol boueux, murmurant ce qui lui sembla être un poème… La vision de cette enfant perdue lui avait soulevé le cœur, et elle avait tenté de l'appeler. Mais Rei, méfiante, s'était sauvée en courant. Quelques jours après, le mari de Hilde était sauvé de la noyade par un étrange ange des mers. Hilde, cracmol de son état, appartenant au monde des sorciers du côté de sa mère, nourrissait quelques croyances païennes à l'égard des ondes. Elle avait donc confectionné elle-même une robe noire en cuir pour, à la nuit tombée, la déposer en offrande sur le quai. Quelle ne fut pas sa surprise le lendemain lorsqu'elle croisa la jeune fille qu'elle avait trouvé accablée dans la boue, portant sa robe et lui montrant un sourire plein de gratitude ! C'était bien sûr cette robe que Rei avait gardé depuis.

Rei sursauta : cela au moins c'était un bon souvenir ! Elle avait trop grandi depuis pour remettre cette robe mais elle la gardait bien précieusement pour l'offrir à Néréis un de ces jours. Elle n'avait jamais adressé la parole à cette Hilde, leurs rencontres étaient toujours muettes mais leur silence était éloquent. Mais un jour, presque 11 ans après, la vieille femme était morte de cause naturelle, son mari la précéda de quelques mois. Rei avait assisté à l'enterrement, et elle était la seule : le couple n'avait pas eu d'enfant. Elle songea alors avec tristesse qu'elle espérait de ne pas subir un sort aussi pitoyable : mourir seule, dans un monde où il n'y aura plus aucune trace de votre passage…

Pourquoi Rei s'était-elle un tant soit peu attachée à cette étrangère ? Peut-être à cause de la naïveté de cette femme lorsqu'elle l'avait vue déposer cette robe en sacrifice aux esprits de la mer. Peut-être aussi parce qu'elle était encore faible à cause de la mort de Salana, et que son cœur savait encore battre pour les choses simples…

Et puis, la rencontre avec cette femme lui avait redonné un peu de courage : elle s'était rendue à Poudlard quelques temps après. On approchait alors du premier septembre, Rogue allait faire sa première rentrée en tant que professeur. Rei se posa sur la tour la moins haute et avait vue sur une cour cernée par des petits platanes.

Et il était en bas, Rei aurait reconnu sa silhouette entre mille. Rogue discutait avec un vieillard à la robe violette et la barbe abondante. Elle se pencha bien malgré elle par-dessus le vide pour mieux le contempler, elle ne se redressa que lorsqu'elle sentit qu'elle perdait l'équilibre. Rogue salua l'homme et entra à l'intérieur. Madurei se pinça les lèvres de déception, mais elle n'osait descendre, quelque chose comme la colère lui piquait le cœur, elle n'avait pas envie de le voir ! Il ne fallait pas qu'elle le voie ! Elle se sentait encore trop faible.

- Bonjour ! Lança le vieil homme en levant la tête.

Rei fit un pas en arrière en crispant une main, comme si elle était en garde.

- Je me nomme Dumbledore, directeur de ce lieu, et vous, jeune néréide ?

Rei s'aperçut alors qu'elle avait oublié de fermer ses ailes…

- Vous ne répondez pas ? Continua-t-il en souriant, mais je crois savoir qui vous êtes. De nombreuses rumeurs accourent du nord. J'ai entendu dire que « lady Madurei, fille de Sir Frédéric et de Kylia la néréide, a fui sa patrie depuis quelques mois sans donner signe de vie… » Bien sûr, personne ne connaît cette Madurei par ici, et donc cette nouvelle n'est restée qu'un bruit qui court sans grande importance mais elle a retenu mon attention.

- Vous attentiez ma venue, constata-t-elle alors.

- C'est exact, je savais que vous viendriez ici, dans ce château que votre ancêtre a contribué à bâtir. Les portes de Poudlard vous sont ouvertes si vous le souhaitez.

- Ce serait un grand honneur, mais non merci.

- Serait-ce à cause du professeur Rogue ?

Elle se rembrunit et répliqua d'une voix sèche :

- Que voulez-vous dire ?

- Serait-ce à cause de son passé vous ne lui faîtes peut-être pas confiance ?

Son cœur battit fortement dans sa poitrine mais elle n'en laissa rien paraître :

- Non, pas du tout : je sais qu'il a changé de camp et lui accorde toute ma confiance. Seulement, je n'ai pas le caractère adéquat pour suivre une scolarité entre quatre murs : je préfère apprendre sur le terrain.

Dumbledore acquiesça. Il brandit sa baguette magique, fit apparaître un petit cercle vert qu'il lui lança prestement. Madurei attrapa l'objet au vol : c'était un bracelet aux pierres émeraudes.

- C'est pour vous, assura-t-il, un petit héritage de Serpentard. Dîtes : « Infinita in me videat ! » (Que l'abîme regarde en moi !).

Rei répéta la phrase : le bijou se mit à étinceler et se métamorphosa sous ses yeux en une épée aiguisée.

- Il se mute en l'arme la plus adaptée à son propriétaire, expliqua le directeur.

- Merci… J'en aurai besoin, quand Jédusor reviendra… Car il reviendra, vous le savez ?

Un éclair d'abattement traversa les prunelles cachées sous les verres en demi-lune, il fit à nouveau « oui » de la tête.

- Je reviendrai, déclara Madurei en prenant son envol à la verticale, je reviendrai quand il sera de retour… Et pour mieux sceller notre alliance, je vous confierai celles qui me sont à présent les plus chères à mes yeux : Joyce et Néréis !

Une pointe d'amertume et de mensonge perça dans sa voix quand elle évoqua ses deux sœurs…


Rei arpentait encore les couloirs de Poudlard, sujette à cette insomnie qui l'accablait depuis quelques jours. Elle en avait plus qu'assez de faire le bilan de sa vie à travers ces souvenirs. Elle préférerait oublier et se concentrait sur le présent.

Quand elle entendit ses bruits de pas, elle les reconnut aussitôt. Rei ferma les yeux, respira un grand coup puis se retourna vers Rogue. Mais il la dépassa sans rien dire.

- On m'évite, lança-t-elle à demi en colère, on craint la menace du maître ?

Il pivota dans sa direction, mais il ne paraissait pas furieux, seulement très, très, très calculateur. Ce qui n'était pas mieux.

- Que vous a-t-il dit exactement ? demanda Madurei dont la curiosité n'avait cessé de s'accroître depuis la veille. Qu'a-t-il compris ?

- Le Seigneur des ténèbres…

- Ne l'appelez pas comme ça, vous êtes ridicule !

- … m'a seulement testé, poursuivit Rogue comme s'il n'entendait pas.

« Je veux sentir son aura vaciller, je veux qu'elle souffre à en crever…. Brises-y le cœur pour moi ! » C'était cela que voulait Voldemort…

Les sourcils de Rei se froncèrent :

- Vous aussi alors vous grossissez les rangs de ces lâches qui ne l'évoquent qu'à travers ses surnoms ? Le « Seigneur des ténèbres », je trouve cela beaucoup trop élogieux.

- Néréis a presque dit la même chose, rétorqua-t-il, elle a de qui tenir. Mais vous ne savez rien de rien, Madurei.

- Détaillez donc.

- Vous ne savez rien. Vous ne l'avez pas encore affronté de face… Vous ne pourrez jamais saisir toute l'horreur qu'on ressent face à lui. Un sentiment de vide, de dégoût et de fascination à la fois !

- Hé bien, apprenez-moi.

Il l'observa toujours d'un air aussi réfléchi :

- Fermez les yeux, ordonna-t-il doucement.

Elle resta perplexe mais n'obtempéra pas encore, Rogue la fixa avec plus d'insistance.

Rei se tenait immobile face à lui, faisant mirer ses larges yeux sous la clarté des flambeaux. Ses cheveux ne luisaient même pas, ne formant qu'une masse opaque. Noirs comme de l'encre, un noir trop profond, semblable aux ténèbres de ses yeux à lui. Il s'avança, elle ne bougea pas. N'osant pas la toucher directement, il dessina les courbes de sa figure dans le vide à seulement quelques millimètres de son visage. Chaque fois qu'il désirait la frôler, il lui semblait le faire pour la première fois. En guise de réponse, elle inclina légèrement sa tête en arrière, comme si elle s'apprêtait à s'abreuver auprès d'une cascade. Ses yeux se fermèrent, joignant ses cils en une fine ligne de roseaux sombres.

Un brin de chaleur tout d'abord se posa sur sa bouche, un frôlement fragile comme l'envol du papillon, leurs lèvres se mêlaient avec une exquise lenteur. Ce n'est que lorsqu'elle glissa ses mains autour de son cou que Rogue approfondit son baiser. Il l'enlaça lentement.

« Je t'aime… » Pensa-t-il, « et c'est justement parce que je t'aime que je dois y mettre un terme. » Et il l'embrassait toujours, humant le parfum langoureux de ses cheveux défaits.

Lui dire qu'elle ne l'intéressait pas assez finalement ? Qu'elle n'était qu'un jeu ? Elle ne le croirait pas.

Lui dire qu'il n'avait pas de temps à perdre à lécher leurs blessures respectives ? Ce serait plus plausible mais elle chercherait à en savoir plus.

Il la repoussa avec douceur et la retint par les épaules :

- Je suis désolé, Madurei…

Ses mains se détachèrent complètement d'elle, il recula d'un pas :

- Mais nous ne sommes pas sûrs de survivre à cette guerre… Pour vous comme pour moi, le plus important est d'abattre…

Pour la première fois, il osa prononcer ce nom :

- …Voldemort. Vous seriez plus un poids qu'autre chose pour moi. Et je serai la même chose pour vous… Occupez vous de Néréis, ne soyez pas, comme vous me l'avez déjà dit, « égoïste », puisque vous avez « des devoirs envers elle »… Et ne m'ennuyez plus.

Il avait trouvé les mots et le ton juste. En effet, la colère ne pouvait qu'inciter Madurei à le poursuivre encore et encore. Mais en lui parlant aussi sincèrement et avec autant de sérieux, il avait réussi à l'atteindre là où ça faisait mal : si elle essayait de riposter, elle irait contre son devoir… Elle respira profondément pour accuser le coup et soutint fermement son regard.

- Je… comprends… parfaitement, dit-elle lentement d'un ton neutre.

Elle le dépassa sans le regarder et marcha tout droit.


Perchée du haut de sa beauté, qui pourrait croire que Madurei souffre ? Son visage de statue, sévère et digne trompe tous ceux qui la croisent… Sauf sa sœur évidemment. Joyce, qui faisait un tour avec sa demi-tente d'invisibilité parce qu'elle ne parvenait pas non plus à dormir, avait aperçu Madurei, et la petite en avait mal comme si c'était de son cœur dont il s'agissait. Elle ressentait un vacillement dans l'aura de sa grande sœur. Et bizarrement, une autre aura, plus menaçante, plus vile, quelque part au nord, bien au-delà de Poudlard, semblait traduire un ravissement total :

- Tu es content, enfoiré ! Jédusor ! murmura Joyce en tombant à genoux.

Elle croisait les bras sur sa poitrine, aussi furieuse que déçue.

- Tout fout le camp dans ce monde pourri ! Comment pourrai-je aimer un monde où tu es là ?! Salaud !

« J'avais peur au début… Je n'arrivai pas à accepter l'amour que Rei portait à Rogue. Je craignais qu'elle ne se détache de moi, qu'elle aille faire sa vie ailleurs en me laissant derrière. Mais depuis, j'ai accueilli cette idée avec joie… Alors pourquoi faut-il que tu gâches tout ?! »