Titre : AlterEgo
Auteur : Ruth Dedallime
Disclaimer : Les personnages et l'univers PSME appartiennent à Saki Hiwatari, sauf le personnage de Tsutsuji Asutaresha qui n'appartient qu'à moi !
Installation
Les premières semaines passèrent sans évènements notables. Mokuren semblait la plus mal à l'aise. Elle répondait toujours de travers quand on lui posait une question et s'enthousiasmait pour des choses aberrantes. Tsutsuji l'accompagnait de temps à autres, mais pas aussi souvent que l'aurait souhaité Hiiragi. Il le regrettait, mais Tsuji n'était pas le genre de personne à se plier à la contrainte. Ce fut donc Gyokuran qui prit Mokuren sous son aile, l'aidant en toutes occasions et tentant de la mettre à l'aise.
Le mystère de la fameuse caisse de Tsutsuji avait été résolue dès le premier jour dans la base lunaire. A peine avaient-ils émergés de leur long sommeil artificiel, que Tsutsuji bousculait déjà tout le monde avec son précieux conteneur. Elle la transporta jusqu'à une pièce reculée, que Ragi lui avait spécialement réservée. C'était une vaste salle ovale séparée du reste de la base par un sas. Là, Tsutsuji ouvrit la caisse avec des gestes d'une infinie douceur et déballa un luxueux piano électronique, d'une technologie si avancée, que les autres scientifiques n'avaient jamais vu son pareil. Shion l'ausculta sous toutes les coutures et, bien qu'il soit avare de compliments, ne put contenir un sifflement d'admiration. Bientôt, les sonorités du piano emplirent les couloirs et ils purent tous constater que le talent de Tsutsuji était à la hauteur de la qualité du piano. Hiiragi posa vite ses conditions et l'obligea à jouer toutes portes et sas hermétiquement fermés pour ne pas perturber -ou tout simplement empêcher- le travail des autres scientifiques.
Chacun prit rapidement ses habitudes. Enju et Shusuran restaient inséparables. Hiiragi travaillait beaucoup dans la salle principale avec Shukaïdo et Gyokuran. Tsutsuji passait la plupart du temps dans sa propre cabine ou dans la salle au piano qu'elle avait pompeusement rebaptisé "Salon de musique". Seule la qualité de la cuisine de Mokuren la poussait à sortir de son antre et elle n'apparaissait guère en dehors des heures des repas. Là, elle engloutissait des quantités effarantes de nourriture sous les regards ahuris de ses collègues. Shion restait à l'écart, comme il l'avait toujours fait, et commençait à pester devant la masse de travail que les autres membres de l'équipe lui imposaient. Etant l'ingénieur de la base, il était le seul capable de réparer les machines, les ordinateurs, et la climatisation qui était en panne. Il s'en prenait souvent à Mokuren qu'il trouvait idiote et dont la moindre phrase lui semblait absurde.
Hiiragi, en tant que leader de l'équipe, ne s'était réellement rapproché de personne. Certes, les cinq mois de préparation de la mission l'avait fait apprécier de tous, mais il tenait avant tout à garder une stricte neutralité, notamment dans les conflits récurrents, qui opposaient Shion à Gyokuran. L'amitié taquine de Tsutsuji semblait largement lui suffire, bien qu'il ait essayé de le dissimuler aux yeux des autres scientifiques. Mais ces derniers n'étaient pas dupes et avaient vite compris que ces deux-là étaient liés comme les doigts de la main et qu'il serait vain de tenter de s'immiscer ! Enju et Shusuran s'interrogeaient même sur une éventuelle histoire amoureuse entre eux, mais aucun fait ne semblait étayer cette théorie. Les deux jeunes femmes avaient vite compris qu'elles ne pouvaient guère s'appuyer sur les allusions à peine voilées de Tsutsuji.
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Ils étaient tous assez curieux de savoir ce que fabriquait Tsutsuji toute la journée dans sa cabine ; en effet, au bout de quelques jours à peine dans la base lunaire, elle avait brusquement cessé de travailler dans la salle commune et s'était cloîtrée dans sa chambre. Bien sûr, Hiiragi lui avait demandé des explications, mais s'il en avait obtenues, il ne les avait pas communiquées au reste de l'équipe. Shusuran avait bien tenté de l'interroger à ce sujet, mais Hiiragi s'était contenté de dire que Tsutsuji venait de faire une découverte d'une grande importance pour elle, bien que sans réel intérêt pour le reste de l'équipe, ni pour leur mission en général.
Quand Gyokuran posa la question directement à Tsutsuji au cours d'un repas, elle s'enflamma et se lança abruptement dans une longue tirade sur un mouvement musical de KK appelé le 'Rock'n'Roll'. Les membres de l'équipe l'écoutèrent, éberlués par son air extatique. En à peine trois minutes, elle avait prononcé plus de mots qu'en plusieurs semaines de sarcasmes ! Elle ne reprit son souffle que dix minutes plus tard, à la fin d'une longue description d'un instrument qu'elle appelait guitare basse et qu'elle avait l'intention de fabriquer elle-même. Elle avala un grand verre d'eau pour réhydrater sa gorge desséchée, puis voulut leur faire écouter un extrait sur-le-champ, mais Hiiragi refusa net :
« Pas question, Tsuji ! Je te rappelle qu'il s'agit d'un projet personnel et que tu ne dois pas négliger tes autres travaux !
- Je ne néglige rien, Chef : j'ai déjà sérieusement étudié les nouveaux aspects de la mode féminine de KK et j'ai obtenu un grand nombre de reproductions d'un mouvement artistique appelé 'Expressionnisme Abstrait' !
- Et… et comment tu as découvert cette musique ? demanda Shusuran.
- J'ai pu capter les ondes dites "radios" de KK, grâce au récepteur d'ondes installé dans ma cabine. Il faut dire que c'est un mouvement musical qui existe depuis une bonne quinzaine d'années et qu'il est largement prédominant. J'ai couplé le récepteur avec un enregistreur, afin de créer une base d'archives audio à mon retour sur l'étoile principale.
- Dis-donc, Hiiragi, pourquoi lui as-tu cédé le récepteur d'ondes portable ? On a tous le droit d'écouter un peu de musique, non ?! fit Shusuran, excédée de ce nouveau privilège.
- Et bien…. Elle me l'a demandé la première… répondit Hiiragi, d'une voix d'abord gênée, puis de plus en plus tranchante. D'ailleurs, cet appareil lui est indispensable pour son travail sur les Arts ! Je te rappelle Shusuran qu'elle travaille exclusivement avec ce récepteur, ce qui nous permet d'avoir à notre libre disposition l'appareil principal, qui est de meilleure qualité et qui suffit largement à toutes nos activités.
- Bien dit ! lança Tsutsuji, sans se départir de son désagréable sourire sardonique.
- Comment diable t'y es-tu pris pour les coupler ? ne put s'empêcher de demander Shion, toujours très professionnel.
- J'ai relié les câbles de sortie du récepteur et d'entrée de l'enregistreur…
- Hein !?! Mais ce n'est pas du tout comme ça qu'il faut s'y prendre !
- L'important est que ça fonctionne ; pas vrai, monsieur l'ingénieur ? En tous cas, c'est comme ça que procèdent les Terriens !
- Ce peuple est vraiment archaïque ! Ils ne connaissent même pas l'existence de…
- Peut-être bien comparé à toi, poussin ! coupa Tsuji. Mais grâce à leurs procédés archaïques, j'ai pu trafiquer une antenne…
- Hein ? De quelle antenne veux-tu parler ?
- De l'antenne que j'ai fabriquée avec des vieux bouts de métal et que j'ai branchée sur le système de réception général d'un coté et à mon récepteur de l'autre !
- Mais, tu es folle ?!? Ton antenne risque de parasiter tout notre système de réception !
- Impossible, ses capacités de réception sont tellement inférieures à celle du système général qu'elle ne risque pas de parasiter quoi que ce soit !
- Je n'en suis pas persuadé… Il faut que tu coupes ton antenne !
- De quoi parlent-ils ? demanda Gyokuran à Shukaïdo, en aparté.
- Je crois que Tsutsuji s'est amusée à brancher des appareils en utilisant des procédés provenant de KK et que ça dérange Shion. »
Hiiragi aurait bien voulu intervenir, en demandant à Shion d'aller regarder par lui-même l'installation de Tsutsuji et d'y apporter les modifications nécessaires, mais il n'osa prendre le parti de son amie. La discussion se poursuivait sur un ton de plus en plus sec :
« Tsutsuji, retire cette antenne ! fit Shion, dont le self-control commençait à battre de l'aile.
- Tu peux toujours me retirer mon antenne, si ça te chante, poussin ! J'en fabriquerais une autre ; ce n'est pas le métal qui manque dans cette base ! J'en arracherais des murs, s'il le faut ! répondit Tsutsuji, en pointant l'un des murs du doigt.
- Vous entendez ça, vous autres ? lança-t-il, en prenant les autres à témoin. Et voilà ce qui se passe quand une femme se mêle de hautes technologies !
- Ah ouais ? Ben, t'as pas intérêt à m'empêcher de faire mon travail, sinon j'ten ferais de la haute technologie, moi !
- Ecoutez… tenta d'intervenir Gyokuran, d'un voix conciliante.
- Toi, mêle-toi de ce qui te regarde ! On t'a pas sonné ! » lui lancèrent Shion et Tsutsuji, d'une même voix colérique.
Ils s'entre-regardèrent une seconde, leurs doigts encore pointés sur Gyoku, puis éclatèrent d'un même fou rire. Shion était à demi-écroulé sur la table, qu'il martelait frénétiquement de son poing. Quant à Tsutsuji, elle se roulait presque par terre de rire. Hiiragi poussa un imperceptible soupir de soulagement. Quand Tsutsuji parvint enfin à reprendre son souffle, elle s'aperçut qu'elle avait le hoquet, ce qui redoubla les rires de Shion.
« Bon, fit Hiiragi, quand ils retrouvèrent leur calme ; je propose que Tsutsuji éteigne son récepteur à heures fixes, pendant une demi-heure, lors de nos communications quotidiennes avec notre système astral : c'est à dire, heure locale, le matin à 8h, l'après-midi à 14h et le soir à 21h. Est-ce que cela vous convient ? »
Ils hochèrent la tête en signe d'acquiescement. De petits sourires éclairaient leurs visages à présent.
« Bien, reprit Hiiragi. Shion, ce serait bien si tu pouvais jeter un coup d'œil à l'installation de Tsutsuji, afin de vérifier qu'elle ne présente pas d'autres problèmes pour la sécurité de la base !
- Eh, j'ai pas que ça à faire ! se rembrunit Shion. J'ai trois ordinateurs à réparer !
- Quand tu auras une minute… »
Shion se leva de table en maugréant et partit vers la salle des machines. Tsutsuji ne s'attarda guère à table elle-même et fila vite vers sa cabine, sans doute vérifier que l'antenne de son récepteur était toujours en place.
« Bon, dit Hiiragi, je crois que le chapitre est clos. Remettons-nous au travail ! »
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La crise était passée, mais l'indépendance tant morale que matérielle dont jouissait Tsutsuji commençait à irriter la plupart des scientifiques de la base. Dès que Hiiragi et son amie avaient tourné les talons, le sujet revenait inévitablement dans les conversations.
« Je la sens pas, cette fille… Elle est trop… comment dire ? … trop désinvolte ! disait Shusuran.
- Oui, rien ne semble jamais l'atteindre ! renchérissait Gyoku. Qu'est-ce que t'en penses Shu ?
- C'est vrai qu'elle est très indépendante…
- Ca confine à l'égoïsme, tu veux dire ! … Elle est d'un sans gène !
- Je me demande d'où cela peut bien lui venir ?
- Hiiragi doit le savoir, non ? Ils ont l'air de bien se connaître tous les deux ! insinua Enju.
- Ne me parle pas de Ragi ! lança Shusuran, d'une voix énervée. Depuis que Tsutsuji est arrivée, il lui passe tous ses caprices ! Y en a plus que pour les quatre volontés de cette demoiselle !
- Notre Ragi est terriblement influençable… dit Enju, avec son doux sourire.
- Peut-être bien… mais il ferait mieux d'écouter quelqu'un d'autre que cette individualiste aux encombrantes lubies !
- Quelque chose m'échappe encore, en ce qui concerne ces deux-là… murmura pour lui-même Shukaïdo.
- Et toi, Shion, t'en penses quoi ? demanda Gyokuran.
- Pff… J'ai bien trop de boulot pour me soucier de cette gonzesse ! jeta Shion, de sa voix froide. Et tu ferais mieux d'en faire autant, Gyoku ! »
La porte se referma sur Shion.
« Faut toujours qu'il fasse son malin, celui-là ! » remarqua Gyokuran.
Voilà pour le troisième chapitre...
S'il vous plaît, laissez-moi une petite review !
Ruth (perdue dans son dédale...)
