Titre : Alter Ego

Auteur : Ruth Dedallime

Disclaimer : les personnages sont la propriété exclusive de Saki Hiwatari, à l'exception du personnage de Tsutsuji Asutaresha qui n'appartient qu'à moi !

Rating : PG -13

Résumé : Tsutsuji, la nouvelle scientifique, ne fait visiblement aucun effort pour s'intégrer au personnel de la base. Son indifférence n'a d'égale que sa mauvaise réputation ou son caractère exécrable ! Mais, est-elle si indifférente ?


Tortures

Les sonorités du piano avaient envahi le Salon de Musique. Le regard ailleurs, la bouche entrouverte, les cheveux noirs virevoltant, Tsutsuji jouait. C'était toujours un spectacle étonnant… Mais Mokuren ne voyait rien de tout cela. Elle n'entendait que les notes cristallines, qui résonnaient le long des murs circulaires de la pièce. Ses yeux s'écarquillèrent de douleur et de tristesse mêlées.

Le bruit d'une chaise tombant brutalement sur le sol fit sursauter Tsutsuji, instantanément dégrisée. Elle se tourna vers la kitchess, qui était étrangement pâle.
"Je suis désolée, Tsutsuji… Je suis vraiment désolée. C'est juste que cette musique… Je ne peux pas ! bredouilla Mokuren, à la limite des larmes.
- Ne t'excuse pas, Mokuren. Tu n'es pas forcée d'aimer. Ce n'est qu'un air de ragtime après tout… Le jazz, tu sais… C'est vraiment un genre particulier ! Ecoute, je vais te jouer du classique, d'accord ?
- Non. Non. Tu ne comprends pas ! Je ne peux pas supporter ta musique.
- Mais enfin, tu n'as presque rien entendu ! … Tiens, je suis sûre que tu apprécieras Mozart… Tu verras, c'est tellement beau !"

Sans attendre l'assentiment de Mokuren, Tsutsuji laissa courir ses doigts sur le piano, interprétant une Fantaisie en Ré Mineur de Mozart.
"Tu ne peux pas comprendre…" murmura tout doucement Mokuren comme pour elle-même.
Et sans attendre, elle quitta précipitamment la pièce. Tsutsuji s'interrompit et hésita une seconde. Puis, décidée à tirer au clair cette étrange attitude, partit à la poursuite de Mokuren, sans même prendre la peine de refermer le couvercle de son piano.

A cause du délai d'ouverture de la porte du sas, la kitchess n'avait pas pu prendre beaucoup d'avance. Tsutsuji la rattrapa rapidement au détour du couloir et la retint par le bras :
"Attends, Mokuren ! … Ecoute, si ma musique ne te plait pas, je peux te proposer autre chose : je t'ai souvent entendu chanter sur l'étoile principale et tu as un grand talent… Alors, je me disais que je pourrais peut-être t'accompagner. Tu chantes ce que tu veux et je te suivrais, ok ?
- Tu me demandes l'impossible, Tsutsuji.
- Mais qu'est-ce que tu as, à la fin ?
- Tsutsuji !" retentit une voix mécontente.

Les deux jeunes femmes se tournèrent et aperçurent Hiiragi qui venait vers elles. Tsutsuji marmonna un juron.
"Arrête de harceler Mokuren, ordonna-t-il. Elle n'a peut-être simplement pas envie de chanter si loin de l'étoile principale…"
Tsuji lança un regard noir à son ami, mais elle n'insista pas malgré la colère qui bouillait en elle. Elle détestait quand Hiiragi lui parlait sur ce ton, surtout devant témoin. Elle eut un reniflement dédaigneux et repartit en direction du Salon de Musique. Quelques instants plus tard, elle avait repris son récital, mais son jeu était devenu sensiblement plus impétueux.
"On peut toujours deviner son humeur quand elle joue… remarqua doucement Hiiragi. Ne lui en veux pas, s'il te plaît. La musique c'est toute son existence !
- Ce n'est pas sa faute… Elle n'a rien fait de mal… C'est moi qui… C'est ma faute ! dit-elle enfin aux bords des larmes.
- J'ai entendu votre conversation Mokuren, et il m'a semblé au contraire…
- Je l'ai blessée… Elle voulait que je… Excuse-moi de me mettre dans un état pareil… articula péniblement la kitchess avant de prendre la fuite.
- Attends, Mokuren !" lança vainement Hiiragi.

Il la regarda partir, les sourcils froncés, mais sans insister davantage, puis il rejoignit Tsutsuji. Cette dernière martelait rageusement les touches de son piano. Il referma soigneusement les portes du sas, releva la chaise de Mokuren et s'y assit sereinement. Tsutsuji jouait souvent pour lui et il aimait ces moments de pure délectation qui lui rappelait leur existence tranquille sur l'étoile principale. Sous le regard placide de son ami, le jeu de Tsutsuji s'apaisa progressivement et retrouva bientôt toute sa plénitude. Elle entama magistralement un Impromptu de Schubert, morceau que Ragi préférait à tous les autres.

Un rai de lumière s'aventura sur le visage fin de Tsutsuji, révélant la rêverie méditative de son regard et une douceur rare chez elle. Les notes moururent délicatement sous ses doigts et elle posa des yeux plus brillants que d'habitude sur son ami. Hiiragi faisait toujours semblant d'apprécier le rock pour lui faire plaisir, mais elle savait fort bien que ses préférences allaient plutôt vers la musique classique. C'était pour lui qu'elle interprétait ses plus belles Fugues de Bach ou Ballades de Chopin.

Un instant passa, puis le sourire de la pianiste s'évanouit comme neige au soleil :
"Pourquoi es-tu intervenu dans ma discussion avec Mokuren ? Bon sang, Ragi, ça ne te regardait en rien !
- Excuse-moi, mais je suis responsable du bon fonctionnement de cette base. Quand une des personnes se trouvant sous mes ordres se sent mal, je suis seul juge du comportement à avoir à son égard.
- Bla-bla-bla ! … Ne te défile pas Ragi !
- Je te sens vexée… commença-t-il.
- Sans blagues !
- … par la réaction de Mokuren ! compléta-t-il.
- Absolument pas ! Elle est tout à fait libre de ne pas apprécier ma musique...
- Et ça ne te fait rien ?"

La question resta en suspens. Tsutsuji se leva lentement et s'étira comme un chat. Hiiragi attendit patiemment.
"Ca ne me fait rien ? répéta-t-elle enfin. … Si, je suppose que je suis blessée dans mon amour-propre d'artiste… Je pensais que elle, qui a passé de longues années à ne faire que chanter, comprendrait la musique de KK… Mais visiblement, je me suis trompée ! Sans importance ! … Ouh, c'est l'heure de dîner ! Tu viens Ragi ?"

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Mokuren était recroquevillée sur son lit. Elle n'y pouvait rien… Non, vraiment, elle n'y pouvait rien ! Pourquoi n'avait-elle pas su expliquer à Tsutsuji ? … Ou juste lui dire qu'elle aimait sa musique… Qu'elle la trouvait sublime ! … Elle avait blessé les sentiments de la pianiste, elle le sentait… Mais elle n'avait pas pu supporter l'épreuve… Comment aurait-elle pu rester là, à écouter ces merveilles, en restant passive, en ignorant l'appel du chant ? … Elle savait pourtant bien en venant ici qu'elle ne pourrait pas chanter librement comme au Paradis ! … Mais comment pourrait-elle expliquer ça à Tsutsuji ? … Lui expliquer que cette musique la mettait à l'agonie ! … Par Saarjalim ! … C'était si beau ! Digne du chant des végétaux ! … Il lui semblait même que les plantes avaient pu les inspirer… Ces terriens seraient-ils capables d'entendre leurs chants, finalement ?

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Se sentant encore confuse de son comportement de la veille, la kitchess, dès le lendemain, vint d'elle-même discuter avec Tsutsuji. Elle l'arrêta à la fin du petit-déjeuner, alors que Tsutsuji allait rejoindre ses quartiers :
"Tsutsuji… Euh… Ecoute… Tu sais pour hier…
- Inutile Mokuren, j'ai très bien compris, tu sais ! Et je ne suis pas vexée… Enfin presque pas ! ajouta-t-elle avec honnêteté et un joli sourire.
- Je… Je voulais juste m'excuser… Et te dire que tu joues vraiment très bien !
- Vraiment ? Ce n'est pas l'impression que j'avais hier !
- Ecoute-moi… S'il te plaît ! Je suis désolée… Ta musique m'a juste rappelée le Paradis où j'ai grandi et qui…
- Mais ce que j'ai joué n'avait rien à voir avec la Kisanade ! l'interrompit Tsutsuji.
- Tu connais la Kisanade ?"

Le visage de Mokuren s'était brusquement éclairé.
"Je suis musicologue, Mokuren. J'ai maintes fois assisté aux fêtes officielles et je connais certains chants des kitchess. De toutes façons, il n'y a rien d'autre à étudier, là-bas ! ajouta Tsutsuji, avec un reste de rancune dans la voix.
- Que veux-tu dire par là ? répondit Mokuren, plus surprise que froissée.
- Je pense, ne t'en déplaise, que l'existence même des kitchess a empêché la naissance de grands mouvements musicaux sur Shia !
- Je ne vois pas le rapport !
- Vous ne trouvez votre inspiration que dans le chant des plantes ! Il est le seul digne de votre oreille… Mais la plupart des gens ne le comprenne pas, alors comment veux-tu qu'ils créent quoi que ce soit ?"
Mokuren ne comprenait pas la véhémence soudaine de Tsutsuji.
"Alors, selon toi, c'est la faute des kitchess, dit-elle calmement sans se mettre en colère. Tu penses que nous monopolisons toutes les énergies créatrices et empêchons les autres de créer ?
- Si, comme les terriens, personne ne pouvait entendre le chant des plantes, nous serions bien forcés de trouver d'autres sources d'inspiration en nous-mêmes !
- Pour être aussi aveugle qu'eux aux beautés de leur planète ? Non merci ! … Les terriens ne veulent rien entendre, ils méprisent l'environnement qui pourtant leur permet de vivre au quotidien !
- S'ils sont aussi sourds et aveugles que tu le prétends, alors explique-moi comment ils ont pu créer de si belles œuvres ? … Et je ne parle pas que de la musique !"

Mokuren ne répondit pas. Avouer qu'elle ne savait pas d'où les terriens tiraient leur inspiration serait admettre les arguments de Tsutsuji.
"Tu reconnais donc que tu aimes la musique de KK ?" insinua Tsutsuji devant son silence.

La kitchess resta muette. Elle refusait de révéler que cette musique la mettait à l'agonie. "J'ai librement choisi de venir sur cette base. J'ai même bataillé ferme pour y parvenir ! Je dois maintenant assumer mes décisions. Je l'ai promis à Maude ! Si j'expliquais à Tsutsuji, elle hésiterait alors à jouer et j'en serais responsable… Je ne veux pas interférer dans sa vie. Elle est si passionnée… Comme je l'envie de pouvoir jouer et chanter librement ! "

"Mokuren ?" insista Tsutsuji l'air préoccupé.
Mokuren prit sur elle et lui fit son plus large sourire :
"Tout va bien. Je reviendrais t'écouter. Je te le promets si ça peut te faire plaisir…"
Un véritable sourire, peut-être le premier que Mokuren voyait sur le visage de Tsutsuji, éclaira la physionomie de cette dernière.
"Rien ne me ferait plus plaisir ! Je te jouerais ce que tu voudras… A plus tard, Mokuren !" cria-t-elle en s'éloignant, sur un dernier lumineux sourire.

Mokuren regarda Tsutsuji, avec un léger amusement involontaire. Mais quand la mince silhouette disparut au détour du couloir, un grand poids tomba brusquement sur son cœur : "Qu'ai-je fait ? … Saarjalim ! Qu'ai-je promis ?" se lamenta la kitchess, longtemps après le départ de Tsutsuji.

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Les jours passaient. Mokuren essayait de faire des efforts et elle parvenait maintenant à rester cinq petites minutes dans le Salon de Musique. La pianiste lui lançait alors des regards perçants, à la fois ravis et curieux… "Mokuren se comporte bien étrangement…" pensait-elle souvent. "Qu'est-ce qui peut bien… Oh ! Et puis, après tout, qu'est-ce que ça peut me faire ? Cela ne me regarde pas ! Elle est là et c'est ce qui compte !" Et elle repoussait le problème avec désinvolture.

Quand Tsutsuji jouait du piano, la kitchess avait tant envie de l'accompagner au chant qu'elle était en définitive forcée de quitter la pièce, le cœur broyé. Et les magnifiques morceaux, au lieu d'apaiser son tourment, ne faisaient que la torturer davantage ; supplice intérieur qu'elle camouflait du mieux qu'elle pouvait.
Malheureusement, Tsutsuji ne se rendait pas compte du combat intérieur que vivait Mokuren et n'avait de cesse que de propager la "bonne parole", telle la prosélyte de l'Art qu'elle croyait être. Elle jouait de plus en plus souvent et essayait de faire venir les autres scientifiques à un de ces "récitals".

Elle comptait secrètement sur la présence de Gyokuran et Shukaïdo pour pousser la kitchess à chanter. Elle avait récemment surpris une conversation entre ces derniers, où ils se remémoraient un chant de Mokuren quand ils avaient découvert un autel à Saarjalim dans la base. Depuis ils étaient littéralement béats devant elle et n'avaient de cesse que de l'encourager à recommencer.

Car malgré son détachement, sa désinvolture et toutes ses dénégations, Tsutsuji aimait les chants des kitchess et elle conservait toujours l'espoir secret qu'un jour, elle l'accompagnerait. Aussi marquait-elle d'une pierre blanche chacune des apparitions de Mokuren dans le Salon de Musique.

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"Que vas-tu nous interpréter, Tsutsuji ? demanda Shusuran, qui avait une légère préférence pour le jazz.
- Je pensais à une Sonate de Schubert, quelques Nocturnes de Mozart, un Prélude de Rachmaninov, un Opus de Brahms, deux-trois standards de jazz et peut-être une œuvre de Ravel ou de Fauré… Je verrais.
- Ou est Mokuren ? demanda Shukaïdo, qui venait d'entrer en compagnie de Hiiragi.
- Elle avait un dossier urgent à terminer !" répondit vivement Tsutsuji.

Hormis Ragi, tout le monde ignorait la répugnance que Mokuren éprouvait pour la musique de KK et Tsutsuji n'avait aucune envie d'éclairer leur lanterne.
Gyokuran et Enju arrivèrent peu après, en bavardant amicalement. Puis ce fut le tour de Shion, sans se départir de son habituelle froideur. Il n'aimait pas Tsutsuji et ne s'intéressait guère aux créations pathétiques des habitants de KK, mais il était curieux d'entendre à nouveau le son de la merveille technologique qu'était son piano.

Tsutsuji se mit au piano et attendit patiemment que tous soient installés. Elle effleura délicatement les touches, puis leva les yeux vers sa partition et sur un soupir, commença son récital. Le temps s'était comme figé. Pas un ne pipait mot. Enju avait fermé les yeux. Ragi -qui pourtant avait maintes fois entendu joué la jeune femme- avait le regard perdu au plafond. Les autres avaient des sourires enchantés ou éberlués sur les lèvres. Quant à Shion, il faisait visiblement d'énormes efforts pour maintenir un semblant d'indifférence.

"Bravo Tsutsuji ! lança Shusuran à la fin du concert. C'était exceptionnel…
- Oui, très beau…
- Le second morceau m'a vraiment ému…
- Moi aussi !
- Et le dernier ?
- Superbe !
- Contente que ça vous ait plu ! intervint Tsutsuji. Puis, irritée malgré elle par l'absence de Mokuren, elle lâcha d'une voix sèche : Bon, allez, tout le monde dehors !"

Shion fut le premier à disparaître. Il était le seul d'ailleurs à n'avoir formuler aucun commentaire. Il fut rapidement suivi par les autres, à l'exception d'Hiiragi.
"Toujours aussi aimable ! grinça Gyokuran.
- Je finis par penser que ma mère avait raison : cette fille est tout simplement caractérielle ! fit Shusuran.
- Quoi qu'on puisse dire d'elle, remarqua Shukaïdo, on ne peut cependant nier son grand talent de musicienne…
- Si seulement, elle se contentait de jouer ce genre de morceaux… et qu'elle mettait un peu de coté le Rock'n'Roll !" ajouta Shusuran, en entendant Tsuji se déchaîner sur son piano sur un rythme endiablé, en poussant des cris.

Ils tendirent l'oreille.
"Ecoute-moi ça, Ragi ! s'enthousiasmait la pianiste.
- Et c'est reparti… soupira Gyokuran.
- En fait, où est Mokuren ? demanda Enju.
- Tsutsuji nous a dit tout à l'heure qu'elle avait du travail. Je pensais qu'elle nous rejoindrait, mais… Elle ne vient presque jamais ici ! remarqua Shu, en désignant le Salon de musique. Je me demande bien pourquoi. Elle qui aime tant chanter.
- C'est vrai que c'est curieux ! admit Enju.
- J'aimerais bien qu'elle accompagne les morceaux de Tsutsuji… Sa voix est tellement divine ! fit Gyokuran, d'un voix pénétrée.
- Oui, ce serait fabuleux !" renchérit Shu, les yeux brillants.

Shusuran fronça les sourcils et entraîna vivement Enju. Elle n'appréciait guère que les conversations dérivent vers la kitchess.


Salut Lied, mon unique revieweuse de PSME !

Merci pour ton petit message d'encouragement.

Je te rassure tout de suite, Tsutsuji n'a aucunement l'intention de séparer Shion et Mokuren. Dans l'ensemble, elle interagit assez peu avec les autres scientifiques (sauf Ragi, bien entendu ;-)).
Au niveau du caractère, je dirais qu'elle tient de Shion, de Shusuran et de Mokuren. Je suis vraiment très heureuse qu'elle te plaise ; je l'aime bien aussi, même si souvent elle est insupportable !

J'ai créé ce personnage en fait pour mettre en valeur le personnage de Hiiragi/Daïsuke, qui est mon personnage favori de PSME et qui est très sous-estimé. Voilà le pourquoi de cette fanfic…

Il y aura une séquelle sur Terre qui est déjà bien avancée.

Merci encore pour ta review

Biz

Ruth (complètement égarée dans son dédale…)

Laissez-moi vos revieeeeeeeeeeeeeews !