CHAPITRE VII - LA TERRIBLE MALADIE D'HEDWIGE

Chaque fois que Harry s'était fâché, il l'avait toujours regretté. Et cette fois-ci, encore plus que les autres. C'était vraiment idiot. Mais qu'est-ce qui lui avait pris, pensait-il. Depuis quand prenait-il la défense des Dursley? Il avait insulté deux adultes, l'un professeur et l'autre qui avait l'air d'un assassin. Il devait être très malade ou très stupide. Il comprenait maintenant pourquoi Dobby, son ami l'elfe de maison, avait l'habitude de se frapper la tête sur les murs ou de se coincer les oreilles dans les portes de four quand il déplaisait à ses maîtres.

- Ils ne m'ont jamais aimé. Pourquoi est-ce que j'ai pris leur défense? Et puis, je les déteste.

Cette sympathie aussi spontanée que brève qu'il avait ressentie pour les Dursley quelques heures plus tôt avait disparu dès qu'il avait franchi la porte de la maison de son voisin.

Il était 3h00 du matin et il ne dormait toujours pas. Il regardait le plafond de sa chambre et s'apitoyait du fait qu'il n'avait même pas vu ses amis. Que devaient-il penser de lui? Il s'imaginait très bien Dimitri et Lupin discutant de son « cas » en s'offrant un dernier verre avant d'aller se coucher. Mais pire encore, il craignait la réaction de ses amis.

Tel qu'il connaissait Hermione, elle n'avait sûrement pas ri. Elle était toujours sérieuse et se préoccuperait plutôt des raisons qui l'avaient poussé à agir ainsi. Elle chercherait probablement dans ses livres s'il existait des antidotes pour de jeunes sorciers colériques et complètement idiots et lui prodigueraient mille conseils.

Ron, quant à lui, enverrait certainement un hibou à son père pour connaître son opinion, surtout si des Moldus étaient en cause. Son père adorait les Moldus. Peut-être comprendrait-il la soudaine pitié de Harry pour les Dursley. Mais comment aurait-il pu le comprendre alors que lui-même n'y comprenait rien. Ils devaient être très inquiets à propos de Harry. En fait, non, ils ne devaient pas s'inquiéter du tout pour la simple raison qu'ils devaient dormir en ce moment-même, ce qui était beaucoup plus logique.

Dans quelques semaines, il commencerait l'école et il n'allait pas revoir Lupin de toute l'année, à moins bien sûr que sa vie ne soit en danger et qu'il soit appelé à Poudlard par Dumbledore. Quant à son gardien… À cette seule pensée, son cœur se serra. Des souvenirs trop récents menaçaient de refaire surface et il n'avait vraiment pas envie de penser à cela.

Malgré la joie qui l'avait envahi alors qu'il était avec ses amis et Dimitri cet après-midi, il voyait le début des classes arriver avec appréhension. Il ne voulait pas retourner à l'école sans son parrain. Sirius avait été le seul lien qui l'unissait encore à ses parents. En plus, il avait été son ami. Il avait besoin de la présence d'un adulte, mais ce Gardien n'était pas… il était trop…dur, trop aigri. Harry doutait qu'il fut un jour son ami. Il n'était même pas certain de le vouloir. Il n'était même pas drôle.

Harry s'assit soudainement dans son lit et jeta un regard vers la cage d'Hedwige, sa seule alliée ici. Elle était encore vide. Décidément, elle aussi fuyait la maison. Mais où était-elle donc? Elle les avait suivis dans la journée jusqu'à ce que Dimitri le trouve avec les Dursley sur le bord de la route, puis les avait ensuite quittés.

Il ferma les yeux et, en quelques secondes, sombra dans un sommeil profond et réparateur.

Il rêvait. Il en avait la certitude. Les vêtements qu'il portait étaient aussi surprenants. Ils étaient faits de mailles de métal et étaient bien trop lourds pour un jeune maigrichon comme lui. Contrairement aux vieilles cottes grises qu'il avait déjà vues dans ses livres scolaires, celle-ci était étincelante, comme si on venait de la polir.

Son corps ne lui obéissait plus. Comme la dernière fois, ses pieds, fixés au plancher, refusaient de bouger.

Ses yeux verts, maintenant fixés sur l'homme à l'autre bout de la pièce, étaient terrifiés. Il remarqua alors que malgré l'absence de ses lunettes, il voyait très bien. Un détail cependant. Ils étaient vêtus de la même manière. Quand enfin, il croisa le regard de l'homme en armure, il sut qu'ils s'étaient déjà connus auparavant.

- Qui…qui…

Incapable de parler, Harry sentait que sa tête allait éclater. Il devait faire des efforts considérables pour ne bouger que les lèvres. Il avait l'impression que tout se passait dans sa tête. Et celle-ci lui faisait affreusement mal, plus particulièrement sa cicatrice, qu'il sentait brûler sur son front. Il avait déjà constaté que cette douleur était présage de malheurs. La dernière fois que cela lui était arrivé, Voldemort avait tenté de posséder son esprit.

- Bonjour Harry, c'est une grande joie pour moi de te rencontrer enfin.

Il fut surpris par l'accent étrange de cet homme. Sa voix était éraillée, sèche et visiblement habituée au commandement. Son expression était farouche et ne laissait guère place à la sympathie. Harry était pétrifié. Il ne voulait pas être là, il voulait s'éveiller. Il voulait voir Sirius. Même la présence des Dursley l'aurait rassuré. Mais plus il essayait de crier et plus sa tête lui faisait mal. La douleur était insoutenable.

- N'aie pas peur Harry, je ne te veux aucun mal. Ne résiste pas et écoute-moi. Tes yeux me disent que tu as peur, mais je suis ici pour te protéger et t'apprendre.

Harry cru qu'il devenait fou et que ce chevalier en armure l'était probablement autant que lui.

- Non Harry, je ne suis pas fou… ni « cinglé », dit-il avec une interrogation dans la voix… enfin, je pense.

Harry, rouge de honte d'avoir été démasqué, se demandait si cet homme avait la faculté de lire dans ses pensées.

- Ne crains rien Harry, je peux effectivement lire dans tes pensées parce que tu rêves. Si nous étions réellement face à face, je serais aussi démuni que toi. La raison pour laquelle tu ne peux me parler en ce moment, c'est que tu me cherches Harry. Quand tu m'auras trouvé, nous pourrons enfin nous comprendre. Mais tu dois me trouver Harry, mon passé et ton avenir en dépendent.

Comme il tentait une nouvelle fois d'articuler un son, Harry se sentit alors glisser dans un trou noir, vers l'arrière, comme si on l'avait capturé par les pieds, ses bras tendus vers l'avant, vers le chevalier. Il eut le temps d'entendre encore une fois la voix à l'accent étranger et rauque lui crier : « Trouve-moi Harry ! »

Finalement, tout se passa mieux que Harry n'aurait pu l'espérer. Il avait reçu la permission, presque acquise au péril de sa vie, d'aller voir son Gardien tous les jours, pourvu qu'il s'assure que « Sir Dimitri Marshenko» n'ait pas à se plaindre de lui. De plus, il avait promis sans rechigner, sinon c'était le refus assuré, d'essayer de faire inviter de nouveau les Dursley par leur voisin. Grâce au sortilège qu'il leur avait infligés, les Dursley n'avaient aucun souvenir de la fin dramatique du dîner.

Dimitri n'avait jamais reparlé de la crise de colère de Harry lors de sa première visite et Hermione et Ron ne semblaient pas être au courant, ce dont il était très reconnaissant envers le Gardien.

Cette journée-là, une semaine avant le début des classes, ils étaient tous assis sur la terrasse arrière et devisaient joyeusement. En fait, tous sauf Dimitri. L'expression morose de Dimitri n'avait pas varié depuis plusieurs jours. Selon Hermione, qui avait également remarqué ses changements brusques d'humeur, il était passé de la colère à une totale absence d'expression, puis redevenait glacial. Lupin était absent pour quelques jours, appelé par Dumbledore semblait-il. Dimitri n'en avait pas dit plus. Il leur avait aussi appris qu'il allait les accompagner à l'école cette année et laisserait la maison à Lupin.

- C'est la seule façon de veiller sur toi Harry. C'est ma mission, tu es mon « client ». De toute façon, c'est un ordre de Dumbledore ajouta Dimitri serein, et quand Dumbledore « demande » quelque chose, il le fait de façon si convaincante, qu'on a l'impression de lui faire une faveur. De toute façon, j'ai hâte de voir l'école où Sirius a étudié, ajouta-t-il.

En voyant l'expression se figer sur les trois visages, et plus particulièrement celle de Harry, son visage se durcit encore plus, si cela était possible.

- Dites-moi monsieur Marshenko…commença Hermione en jetant un regard de biais à Harry.

- Dimitri.

- Euh, monsieur Dimitri, continua-t-elle, rougissante, vous, heu… vous ferez quoi à Poudlard? Je présume que vous ne vous cacherez pas dans une grotte ou quelque chose comme ça, ajouta-t-elle en réalisant tout à coup qu'elle venait de commettre une bévue, ou dans la Forêt interdite. Harry s'était figé sur sa chaise, le regard soudain absent.

- Écoute Harry, je sais que c'est difficile, mais tu sais…

Harry la regarda d'un air dégoûté, comme s'il voyait en elle le plus gros cafard de Poudlard. Les yeux de Hermione s'embuèrent brusquement.

- Non, tu ne sais pas, répondit-il froidement. En fait, tu ne sais rien du tout.

Comme il se levait brusquement, une main d'acier l'arrêta net. D'un seul regard, le Gardien lui intima de se rasseoir. Son regard était noir comme l'ébène. Harry le défia quelques secondes, puis sans un mot, il reprit sa place, son poignet était douloureux.

- Je serai libre. En fait, je crois que Dumbledore a des plans pour moi, mais il doit d'abord aplanir quelques petites difficultés.

- Je présume qu'il essaiera de faire de vous notre nouveau professeur de Défense contre les forces du mal et que le professeur Rogue n'est pas content, demanda Hermione d'un ton trop innocent pour l'être vraiment. Il a toujours de la difficulté à en trouver un. Et l'année dernière, si vous voulez mon avis…

Dimitri la regarda avec un demi-sourire.

- On m'avait bien averti que tu étais très intelligente Hermione. Les membres de l'Ordre pensent le plus grand bien de toi et je constate qu'ils ont raison.

- Ce n'est pas de l'intelligence supérieure, répondit-elle rougissante, mais de la pure logique.

- Et moi, ils ont dit quelque chose à propos de moi? demanda avidement Ron.

Dimitri le regarda un instant sans rien dire et Harry eu l'impression que Ron ne désirait peut-être pas obtenir de réponse finalement. La question demeura sans réponse.

- Pour tous les élèves, et pour vous aussi, je serai un nouveau professeur. Jamais personne ne devra prononcer le nom de Gardien dans l'enceinte de Poudlard. Pas même vous. Et toi Harry plus que les autres. Tu seras soumis à une formation particulière pour empêcher Voldemort de reprendre contact avec toi.

Harry se redressa brusquement sur sa chaise.

- L'occlumencie? Vous allez m'enseigner l'occlumencie? demanda-t-il. La dernière fois, ça n'a pas marché. Je doute que…

- La dernière fois, le professeur qui te l'a enseigné était trop émotif pour pouvoir parfaire cette formation.

- Rogue? Trop émotif? Vous plaisantez je pense, rétorqua un Ron incrédule.

- Ai-je l'air de plaisanter? demanda froidement Dimitri.

- Euh! non, bien sûr, répondit-il, alors que deux plaques rouges apparaissaient soudainement ses joues.

- Vous devez absolument me promettre de ne jamais rien dire. Puis-je vous faire confiance à tous les trois? Dumbledore m'a assuré que vous étiez très fiables, mais si cela n'est pas possible…

- Bien sûr que vous pouvez nous faire confiance, rétorqua Hermione indignée.

- Vous avez parlé de Rogue comme si vous le connaissiez? demanda Harry

À ces mots, Dimitri demeura silencieux, puis : « Oui, je le connais… En fait, je le connaissais… très bien même. Mais on m'a dit qu'il a changé depuis la dernière fois que je l'ai vu. »

- Ah? Et vous l'avez vu quand la dernière fois? demanda Harry.

- Ça, ça ne te regarde pas, répondit le Gardien.

- Mais si vous l'avez connu avant, quand il était Mangemort, vous n'avez pas peur qu'il vous dénonce? demanda Ron? Quoi? demanda-t-il quand il vit l'expression de ses copain, quoi? C'est bien quand il était Mangemort que vous l'avez connu non?

- Oui, répondit Dimitri d'un ton soudainement las, oui, c'était avant. Et Severus ne me dénoncera pas puisqu'il fait lui-même partie de l'Ordre maintenant. Dumbledore a suffisamment confiance en lui pour que mes sentiments personnels n'entrent pas en cause. Dumbledore est un partisan de la deuxième chance… à moins que… ajouta-il pour lui-même.

- À moins que quoi? demanda Harry.

- Rien, oublie ça, ça m'a échappé. J'en fais mon affaire. Bon, ça suffit maintenant, coupa-t-il brusquement, ça vous dirait une balade en moto jusqu'à Londres?

D'un seul mouvement, les trois amis bondirent de leur chaise et entrèrent dans la maison, toute pensée morose disparue. Ils étaient bavards et surexcités. Dimitri se félicita de cette idée qui arrivait juste à point. Ces trois jeunes réunis formaient une équipe redoutable et ils avaient presque réussi à le faire parler.

- Hermione, tu veux embarquer derrière moi cette fois-ci? demanda Dimitri d'une voix enjôleuse alors qu'ils étaient tous à côté du bolide, fin prêts.

Décidément, Harry en avait plus qu'assez des visages rougissants dès que son Gardien posait les yeux sur la gent féminine. Hermione s'apprêtait déjà à accepter, les yeux rayonnants, mais :

- Je ne pourrais pas embarquer moi, plutôt que toi? Les filles ça a toujours peur, demanda brusquement Ron plus sombre que jamais.

- Mais non, je n'ai pas peur, qu'est-ce que tu crois? J'en ai vu d'autres tu sais, rétorqua Hermione les sourcils froncés. Chez Hermione, les sourcils froncés étaient toujours mauvais signe.

- Tu ne connais rien aux motos de toute façon, s'insurgea Ron, tes cheveux vont tous se mêler et on devra encore attendre que tu les démêles quand nous serons à Londres.

- Fiche-moi la paix, répondit la jeune fille, cette fois avec une réelle colère. Je vais les attacher mes cheveux, s'ils te dérangent tant que ça.

- NON, cria Ron cette fois, c'est mon tour.

- Ça suffit. La voie était glaciale. Ron, tu embarques avec Harry et Hermione, tu t'accroches derrière moi. Vous changerez vos places au retour Ron, ajouta le Gardien un peu moins froidement. D'accord?

Harry, qui avait gardé le silence jusque là, se demandait si Ron réalisait à quel point il se rendait ridicule. En voyant l'humiliation que trahissaient ses traits et la rougeur habituelle qui l'accompagnait, Harry fut certain qu'il allait refuser de les accompagner. Il semblait furieux.

Finalement, ils prirent tous place sur la moto et s'engagèrent sur la voie, le moteur vrombissant de plus belle en passant devant les Dursley. Harry eut le temps de voir un rideau s'écarter de la fenêtre et sourit en lui-même.

- Ça, c'est la vraie vie, pensa-t-il.

Ils se promenèrent tout l'après-midi dans les rues de Londres, et arrêtèrent pour boire quelque chose. Heureusement, Hermione avait de l'argent moldu sur elle. Elle commanda pour eux un cola, mais comme Ron n'avait jamais goûté quelque chose de ce genre, Harry et Hermione se tordirent de rire quand Ron s'étouffa et que les bulles remontèrent dans son nez. Ils étaient tellement hilares que pendant un court instant, un éclair d'humour traversa le regard du Gardien.

Ils furent de retour dans Privet Drive vers l'heure du dîner et Harry s'inquiéta un peu de la réaction des Dursley face à son absence prolongée. Ils ne s'inquiéteraient pas, bien sûr, mais verraient d'un mauvais œil cette faveur accordée bien malgré eux à Harry alors que Dudley n'avait pas été invité. En fait, il l'avait été, mais Dudley, au grand dam de ses parents, et au grand bonheur de Harry, ne voulait établir aucune relation avec ce voisin. Il préférait sa télévision, son garde-manger ou la visite de ses propres amis. Et dans ces moments-là, Harry préférait être ailleurs. L'avantage, c'est que maintenant Dudley évitait Harry le plus possible et demeurait dans sa chambre avec eux, en s'assurant que le contenu du garde-manger leur soit accessible.

Avant de le quitter, Harry s'approcha de son Gardien.

- Dites, euh, Dimitri, … vous savez … euh…

- Oui, que veux-tu ?

Ses deux amis s'approchèrent.

- C'est que… vous savez, mon oncle et ma tante euh… en échange de la permission qu'ils m'ont donné pour venir ici tous les jours… Dieu que c'était gênant songea-t-il perdant courage en voyant le regard de Dimitri s'assombrir dangeureusement.

- Harry veut vous demander si son oncle et sa tante peuvent être ré-invités. Ils lui ont demandé de vous le suggérer discrètement, continua Hermione.

- Ils sont vraiment incroyables ces gens-là songea Dimitri tout haut. Dis-moi Hermione, toi qui viens d'une famille de Moldus, sont-ils tous comme ça?

- Bien sûr que non. Mes parents ne sont pas comme ça. Mais il y en a… Nous avons des voisins qui dépassent parfois les bornes. L'autre jour justement, ils ont profité de l'absence de mes parents pour emprunter notre tondeuse à gazon. Papa a toutes les misères du monde à la récupérer maintenant. Vous savez, si je n'avais pas si peur d'être exclue de l'école…

- On devrait demander à Dobby, répondit Harry en riant.

- Dobby? demanda Dimitri brusquement, il me semble que ce nom me dit quelque chose.

- Ou leur envoyer quelques gnomes de notre jardin pour les aider à tondre ta pelouse, rajouta Ron, lui aussi hilare, enfin.

- Dobby c'est un elfe de maison qui travaille maintenant à Poudlard, expliqua Hermione. Harry l'a libéré des Malefoy il y a quatre ans et…

- Tu as libéré un elfe de maison, vraiment? Celui des Malefoy? Tu m'impressionnes, ajouta-t-il narquois. Bien fait pour eux. Enfin, pour en revenir à ton oncle et ta tante Harry, je n'ai ni le désir ni le temps de les recevoir avant le début des classes. J'ai beaucoup à faire avant notre départ et j'attends toujours des instructions de Dumbledore. Je ne vous accompagnerai pas dans le train, mais je vous retrouverai là-bas. Je ne serai jamais bien loin, ajouta-t-il, mystérieux.

En rentrant, Harry constata avec plaisir que sa chouette était rentrée.

- Enfin, Hedwige, tu es revenue. Tu ne rapportes rien aujourd'hui? Que veux-tu faire de tous ces branchages.

Harry s'appliqua quelques minutes à la dégager, ce dont Hedwige lui fut extrêmement reconnaissante. Chaque fois qu'elle lui pinçait le bras ou le doigt, Harry avait l'impression qu'elle lui donnait un baiser. Il remarqua tout à coup qu'en plus de brindilles, elle rapportait aussi de la mousse et quelque chose qui ne semblait pas très net, quelque chose de gluant, comme de la bouillie de souris.

- Beurk! Mais qu'est-ce que c'est que ça?

Hedwige disposa toute cette pagaille dans le fond de sa cage en petit tas, rajouta quelques brindilles par-ci, par-là puis remonta sur sa mangeoire, but avidement de l'eau et ne bougea plus.

- Décidément Hedwige, tu n'es plus la même depuis quelque temps. Mais elle ne l'entendit pas, elle dormait déjà.

Harry commençait sérieusement à s'inquiéter du comportement étrange de sa chouette. Dès notre arrivée à l'école, je la ferai examiner par Hagrid. Elle semblait fatiguée et chaque fois qu'elle revenait à sa cage, elle s'endormait plusieurs jours d'affilée puis repartait. Et voilà qu'elle rapportait des brindilles. C'était à n'y rien comprendre.

Harry descendit peu après pour le dîner et c'était une chance qu'il ait déjeuné chez son voisin, parce que la mixture que lui servit sa tante ressemblait étrangement à celle d'Hedwige. Il déclara ne pas avoir faim et se contenta d'un morceau de fromage et de pain. Dès la vaisselle terminée, il remonta dans sa chambre.

Pendant quelques instants, il fut tenté d'ouvrir l'un des livres que ses amis lui avaient envoyés pour son anniversaire, mais finalement se ravisa.

Tap. Tap.

Un bruit sec éveilla Harry au milieu de la nuit. Il s'assit dans son lit et mis ses lunettes sur son nez. Il écouta quelques instants pour savoir d'où provenait le bruit. Il jeta un coup d'œil à Hedwige, mais elle dormait toujours perchée dans sa cage, la tête sous son aile.

Tap. Tap.

La fenêtre. Le bruit venait de la fenêtre. Harry s'y dirigea et se pencha par-dessus… et reçu un caillou sur la tête.

- Aïe! Mais qu'est-ce que…

Protégé de son bras, il se pencha plus avant au-dessus du châssis.

- MONSIEUR HARRY POTTER! ICI, EN BAS! MONSIEUR, ICI, ICI! cria une voix reconnaissable entre toutes. Deux balles de tennis scintillantes trouaient la nuit. Il les reconnut aussitôt.

- Dobby? C'est toi Dobby? chuchota Harry.

- OUI MONSIEUR, C'EST BIEN DOBBY. DOBBY NE VOULAIT PAS VOUS DÉRANGER, MAIS EST-CE QUE DOBBY PEUT MONTER MONSIEUR, cria-t-il de sa voix la plus aiguë.

Quelques lumières commencèrent à s'allumer dans le voisinage et, paniqué à l'idée que des Moldus puissent voir un elfe de maison traîner dans le jardin de son oncle, Harry descendit les marches à toute vitesse, ouvrit la porte et courut dans le jardin agripper Dobby en lui plaquant la main sur la bouche et en le traînant dans sa chambre, le plus silencieusement et le plus rapidement possible.

Il savait déjà que le malheur était sur sa tête quand il aperçut son oncle Vernon, en haut de l'escalier, un fusil pointé sur lui.

- Qu'est-ce que c'est que ça? demanda son oncle d'une voix sourde et menaçante.

- Euh! Je l'ai trouvé dans le jardin. C'est… c'est euh… une poupée.

- Une poupée, vraiment? rétorqua-t-il. Elle est affreuse cette poupée que tu as trouvée dans mon jardin au milieu de la nuit.

Le ton avait monté d'un cran, et à ce moment, la tante Pétunia et le cousin Dudley accoururent, empêtré dans leur robe de chambre enfilée à la hâte.

- Que se passe-t-il Vernon? Quel est tout ce bruit? s'enquit-elle inquiète.

- Ma chérie, je te présente la poupée de Harry, rétorqua son mari.

- Une poupée? Mais… mais… elle est vivante.

Ce qui était tout à fait juste.

Harry entendit comme une détonation. La tante de Harry venait de réaliser qu'une créature tout à fait vivante se tenait au bout du bras de Harry. Le cri qu'elle poussa dépassa en décibels le passage d'un avion, d'un train et d'un troupeau d'éléphants.

- PÉTUNIA, cria son oncle encore plus fort, ARRÊTE DE CRIER COMME ÇA, complètement paniqué lui aussi tout à coup.

- Mais non, Dobby ne vous veut aucun mal, essaya d'expliquer Harry.

- PARCE QUE CETTE CHOSE A UN NOM? tempêta l'oncle moustachu.

- Je vais l'emmener avec moi dans ma chambre, il ne vous dérangera plus.

- IL N'EN EST PAS QUESTION, TU VAS SORTIR CETTE CHOSE DE CHEZ MOI.

- Mais enfin… tenta de répliquer Harry.

Au moment où l'oncle Vernon levait à nouveau son fusil, un claquement se fit entendre et tout se figea sur place, comme si le temps était arrêté.

- Monsieur Harry Potter n'en voudra pas à Dobby n'est-ce pas si Dobby a calmé un peu les choses?

- Que leur as-tu fait Dobby? Qu'est-ce que tu as encore fait?

- Mais rien monsieur Harry, ils sont tout simplement stupéfixés. Quand Dobby repartira tout à l'heure, ils seront de retour dans leur lit et demain matin, ils ne se souviendront plus de rien, monsieur.

- Vas-tu enfin me dire pourquoi tu es ici Dobby? Tu n'as pas encore l'intention de m'empêcher d'aller à l'école cette année? Parce que si c'est le cas, tu n'as pas à t'inquiéter, il y a …

- Non, monsieur Harry, Dobby n'est pas ici pour vous monsieur, Dobby est ici pour votre chouette monsieur.

- Hedwige? Tu es venu voir Hedwige? Mais pourquoi?

- Ah, monsieur Harry, c'est bien ce que Dobby pensait. Vous n'avez pas vu les signes. Un grand événement se prépare et vous n'avez rien vu.

- Mais de quoi parles-tu Dobby? Tu es venu pour Hedwige? Qu'est-ce qu'elle a Hedwige, qu'est-ce que tu vas lui faire?

- Venez avec moi monsieur Harry Potter. Nous allons nous occuper de votre chouette.

Harry monta les escaliers derrière Dobby, mais en passant devant les Dursley, il ne pu s'empêcher de s'inquiéter un peu.

- Dis Dobby, tu es sûr qu'il n'y a pas de problème à les laisser là?

- Ne vous en faites pas monsieur, Dobby reviendra un peu plus tard tout réparer. Allons venez monsieur Harry, nous avons des choses à faire.

- Euh! Quelles choses à faire Dobby?

- Monsieur n'a vraiment rien vu n'est-ce pas? Monsieur Harry Potter, le grand et courageux sorcier est aussi aveugle qu'une taupe.

- Mais enfin Dobby, qu'est-ce qui se passe? Je sais que Hedwige était un peu étrange ces derniers temps et j'avais l'intention de la faire examiner, mais...

- Ah, mais monsieur Harry, à ce moment là, ce ne sera plus nécessaire, répondit Dobby comme ils entraient tous les deux dans la chambre de Harry.

- Que veux-tu dire Dobby, pourquoi ce ne sera plus nécessaire? De quoi parles-tu?

Dobby ne répondit pas tout de suite. Il se pencha sur la cage de Hedwige et la contempla quelques secondes. Ces secondes s'étirèrent en minutes, puis la patience de Harry fut mise à rude épreuve lorsque Dobby commença à réciter des incantations accompagnées d'une série de rituels complètement idiots, selon Harry. Il ressemblait à ces enfants Moldus qui font de la fausse magie pour jouer.

Soudain, Hedwige sortit sa tête de sous son aile, les étira le plus qu'elle le pu, considérant l'exiguité de la cage, et poussa un cri, bref, mais étrange, puis elle descendit de son perchoir et alla s'étendre sur les branchages qu'elle avait installés dans le fond de sa cage.

- Qu'est-ce que…

- Ah? Je crois que nous y sommes l'interrompit Dobby.

- Nous y sommes où? Quoi? demanda stupidement Harry.

- Dobby pense que ce sera pour bientôt monsieur Harry Potter. Tout va bien monsieur, Hedwige a pris bien soin d'elle.

- Mais enfin Dobby, tu peux me dire qu'est-ce qui se passe? Harry commençait vraiment à s'impatienter.

- Monsieur Harry Potter n'a pas remarqué le comportement étrange de sa chouette dernièrement?

- Euh, et bien oui, justement, ce soir par exemple elle est revenue avec tous ces branchages et une espèce de sorte de mélange écoeurant grisâtre. Tu crois que c'est normal toi? s'inquiéta Harry.

- Tout à fait normal, répondit Dobby avec son sourire fendu jusqu'à ses oreilles en forme de chauve-souris. Très normal pour une chouette qui va pondre son premier œuf.

- QUOI? s'écria Harry le souffle coupé.

Pendant les quelques minutes qui suivirent, Dobby prodigua à Hedwige des soins aussi étranges qu'absurdes. Harry le vit changer son eau, puis changer encore quelques minutes plus tard. Il y ajouta un colorant bleu qui transforma l'eau en une mixture éclatante. À l'odeur, on aurait dit du vin. Puis il sortit une petite brosse de son chandail difforme et brossa les ailes et le dos de la chouette. Le plus étrange, c'est que Hedwige se laissait faire, comme si tout cela était parfaitement normal.

- Euh! Dobby, tu as besoin d'aide? chuchota Harry.

Dobby ne prit même pas la peine de répondre.

Puis tout fut fini. Hedwige se redressa sur ses pattes et ils purent voir l'œuf immaculé qu'elle protégeait de son corps.

- Hedwige! Tu as un œuf s'exclama Harry émerveillé. Tu ne m'avais pas dit que tu étais enceinte.

- Monsieur Harry est heureux? C'est votre premier bébé n'est-ce pas?

- Oui, répondit Harry tout joyeux, c'est notre premier, euh! Enfin, dit Harry rougissant, c'est SON premier bébé. Mais dis-moi Dobby, pourquoi devais-tu assister à sa première ponte? Les oiseaux pondent des œufs tous les jours non?

- Bien sûr, mais dans le cas de votre chouette, c'est inhabituel. Peut-être ne saviez vous pas monsieur Harry que Hedwige est la seule chouette femelle de tout le monde magique. Monsieur Harry n'avait pas remarqué que la volière de Poudlard n'est composée que d'oiseaux mâles?

- Tu veux rire? Hedwige est la seule femelle? Ah, bien Hedwige, tu as eu le choix dis donc!

- Et c'est d'autant plus étonnant, monsieur Harry, que Hedwige est la seule chouette à avoir pondu en captivité. Elle a tenu à pondre ici même, parce qu'elle a reçu instructions de ne pas vous quitter des yeux.

- Mais pourquoi?

- Ah, monsieur Harry, de bien terribles choses se passent présentement, vous vous doutez bien, mais ce n'est pas à moi de vous le dire, ajouta Dobby. Dobby entend des choses monsieur et Dobby a appris beaucoup de choses qui vous concernent, mais Dobby n'a pas le droit de parler monsieur, Dobby est fidèle à son employeur monsieur. Mais Dobby sait aussi qu'un Gardien a été envoyé à votre intention et c'est une bonne chose.

Dobby fit apparaître un parchemin et avec son doigt devenu vert, traça sur le papier quelques instructions.

- Voilà, monsieur Harry Potter, Dobby a écrit ici quelques soins à donner à votre chouette monsieur. Vous ne devez absolument pas laisser approcher les hiboux mâles monsieur, car ils voudront s'emparer de l'œuf. Cet œuf est très important monsieur Harry puisque cet œuf est le premier à naître de deux parents magiques monsieur, et cette chouette aura de grands pouvoirs. Et elle sera vôtre monsieur.

- Mais Dobby, je pars pour l'école bientôt. Je devrai emporter l'œuf avec moi n'est-ce pas?

- Bien sûr, monsieur, il ne faut pas séparer la mère de l'enfant. Vous devrez le protéger comme s'il était le vôtre monsieur, à tout prix.

Puis d'un claquement de doigts, il disparut, laissant Harry avec une jeune mère et son bébé. Il les contempla quelques secondes puis se souvint que son oncle, sa tante et son cousin étaient stupéfixés sur le palier de l'escalier. Il accourut, mais tout semblait en ordre, il entendait même son oncle ronfler dans sa chambre.