Départ peu apprécié
- Au Japon ? Mais je suis très bien ici, moi !
La réaction du petit frère, prévisible et prévue, souleva tout de même un soupir collectif.
- Désolée frérot de t'imposer ça comme ça, mais t'as pas trop le choix.
Et puis quoi encore ? Pourquoi il irait se noyer sur cet îlot, alors qu'il avait ses repères ici, entre sa famille imposante, ses amis déconneurs et son énorme succès auprès de la gente féminine chinoise ? Il ne lui restait plus qu'à entamer la discussion.
- D'abord, j'ai une copine, et je veux pas la perde !
Elles qui lui reprochaient d'être infidèle, elles ne pourraient contrer cet argument sans s'opposer à leur propre principe !
- Ta copine, tu l'as pas largué il y a deux jours ?
Mince, il avait oublié ce détail… Comment parvenait-elle à s'y retrouver parmi toutes les filles qui lui tournaient autour, alors que lui-même perdait le compte ?
- Peut-être, mais… je tiens à mes potes, moi !
Eux, pas question de les larguer. Ils étaient unis comme les doigts d'une main, inséparables, pour la vie, pour la mort.
A chaque sortie, à chaque déconnade, à chaque coup foireux, à chaque délire, ils étaient présents, sans se soucier des risques qu'ils prenaient. Et des risques, ils en prenaient.
Surtout eux, en fait. Ils n'étaient pas aussi doués que lui pour éviter les ennuis et les punitions. Tout le monde ne s'appelle pas Li.
- Tes potes, ça leur ferait beaucoup de bien que tu disparaisses ! Avec tous les ennuis que tu leurs attires à force de les entraîner dans les pires histoires, leurs parents seront soulagés.
Ils retrouveront peut-être le droit chemin.
Qu'est-ce qui leur prenait, tout à coup, à lui faire la morale ainsi en lui reprochant son comportement ? S'il était devenu ainsi, c'était entièrement de leur faute.
Elles avaient décidé de s'occuper de son éducation après le décès de leur mère, qu'elles l'assument !
Blême de colère, il se leva de son fauteuil et posa un regard menaçant sur ses sœurs, réunies autour de lui.
- Et voilà que le petit frangin s'énerve, il va y avoir de la casse…
- Je vous interdis de me critiquer ! Et je n'irai pas au Japon !
Se retournant, il quitta le salon en claquant la porte, monta les escaliers trois par trois, et alla s'enfermer dans sa chambre.
- A ton tour de jouer, Huaren.
Shaolan était allongé sur son lit depuis un bon quart d'heure. Son portable vibrait à intervalles réguliers, enregistrant les messages qu'il recevait, sans qu'il y prête attention.
Sans doute des filles qui avaient appris qu'il était de nouveau célibataire, et qui voulaient tenter leur chance.
Si la petite Ayu se trouvait parmi le lot, il se laisserait peut-être tenter. Elle était mignonne, bien que réservée.
A moins qu'il cède enfin aux avances de Fuemei, une amie directe mais vulgaire, qui lui faisait du rentre-dedans depuis un bon moment.
Mais à quoi bon, s'il devait quitter Hong Kong ?
- Je n'irai pas…, grommela-t-il entre ses dents, lorsque quelques légers coups portés à sa porte le tirèrent de ses pensées.
- Dehors !
- Allons Shao-kun, tu vas pas me faire la tête, tout de même ?
- Mot de passe ?
- Le prof Zhuang cache sa calvitie sous une perruque.
- J'arrive.
Soupirant, il se leva et alla déverrouiller la porte avant de retourner sur son lit, où il se mit à lire ses messages reçus.
Huaren entra, fit tourner la clef derrière elle, et alla s'asseoir sur un fauteuil, attendant que son frère prenne la parole.
- Finalement, ce sera Fuemei. Ayu-chan ne s'est pas proposée.
- Fuemei ? Je l'aime pas trop, cette fille. Bien trop arrogante.
- J'aurais préféré Ayu, mais comme elle ne donne pas signe de vie…
- Et pourquoi pas Sakura ?
De surprise, Shaolan lâcha son portable, qui alla rebondir sur le matelas. Sakura… il n'avait plus entendu ce nom depuis deux ans. Soudain, tout devint clair.
- C'est à cause d'elle que je dois retourner au Japon ?
Huaren se contenta de hocher la tête, laissant son frère digérer la nouvelle.
- Ça y est, elle a des soucis avec les cartes qu'elle s'est appropriée, et elle appelle Shaolan le grand à la rescousse ?
Surprise, Huaren fronça les sourcils. En revenant en Chine, Shaolan éprouvait un amour débordant pour la jeune maîtresse, et aucune pointe de jalousie d'avoir dû renoncer aux cartes de Clow. D'où lui venait cette soudaine rancune ?
Décidant de
ne pas approfondir le sujet, elle demanda :
- Ça te dirait
pas de t'exercer à la magie de manière plus active ?
- Pas spécialement.
- Je vois… mais tu sais, depuis ton retour, certaines choses ont changées au Japon. Il parait qu'on trouve des canons à chaque coin de rue, et de nombreux mannequins prétendent venir de Tomoéda.
- Sérieux ? Dans ce cas, je fais mes valises !
C'était lâche.
Elle était la seule des sœurs à avoir un tant soit peu d'influence sur Shaolan, et elle avait dû se servir de cette faiblesse pour le convaincre à partir.
Mais elle n'avait pas le choix, le devoir obligeait la famille Li à envoyer le plus puissant de leur magicien pour aider la maîtresse des cartes…
