Chapitre 7 : Le chapeau dans la cuvette

Tout le monde à présent était à table et mangeait de bon cœur. La plupart des membres de l'Ordre avaient travaillé le matin même et étaient rentrés, penauds, manger. Certains étaient si fatigués qu'ils se prenaient les pieds dans les portes. Harry était assis entre Ron et Hermione, et était, ma foi, satisfait de ce placement. À part un petit problème de taille : il était assis dans « le coin des jeunes », et du fait, en face de Anne-Marie. La dite Anne-Marie n'était toujours pas contente de son placement et criait à la personne qui était en face d'elle, c'est-à-dire Harry, qu'elle n'aurait jamais dû être là et qu'elle réclamait un autre placement sur-le-champ. Harry, Ron, et Hermione, réclamèrent donc à Aurore trois paires de bouchons d'oreilles. Quand Aurore fut revenue, elle ne tenait pas trois paires, mais douze paires, car Ron, Harry et Hermione ne devaient apparemment pas être les seuls. En effet, Aurore était placée à la gauche d'Anne-Marie et en avait, je cite, « ras le pompon de tenir le bavoir d'Anne-Marie et en plus de supporter ses gamineries ». Heureusement, les bons petits plats mitonnés par les elfes permettaient à Harry de supporter un tel tapage mais alors qu'il redemandait un peu de saumon avec des bonnes pâtes aux herbes provençales, sa cicatrice le brûlait si fort, que non seulement il renversa son assiette pleine de pâtes, qu'il frappa sans faire exprès Mrs. Weasley qui le servait, mais en plus, il renversa complètement sa chaise et se retrouva par terre. Tout le monde se tut, même Anne-Marie, alerté par cette cacophonie et par les cris de douleur de Mrs. Weasley qui se prenait le bras. Lupin dit fort :

« Que s'est-il passé, Harry ?

AIE, aaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaaïe, aïe, aïe, aïe. » Harry s'allongea, la tête entre ses deux mains, hurlant de douleur. Mais sa tête sombra vite dans le néant imposé par une vision vite apparue…

« Harry ? Harry ? » Soudain, Harry sentit une longue giclée d'eau froide qui s'abattit, telle un raz-de-marée, sur son visage engourdi.

« Tu y vas fort, Anne-Marie, gronda Chaussette.

Tu veux peut-être que je le mette de la poudre de poil à gratter ? » Harry ouvrit les yeux. Catherine était penchée sur lui, en train de tapoter son visage, Anne-Marie, seau à la main, lui faisait presque du bouche à bouche. En tout cas, tout le monde le regardait avec des yeux ronds.

« Tu n'as peut-être plus faim, Harry ! Tu veux peut-être te reposer, maintenant ?

Oui, c'est que je vais faire, je crois...

Bon, ben, va dans ta chambre…

Je peux peut-être le porter ? » demanda Maugrey. Catherine se retourna.

« Je ne crois pas. Vous vous perdriez là-dedans.

Oui, c'est ça, chuchota Tonks. Pour qu'il le renverse dans les escaliers en voyant un tableau remuer.

Non, reprit Catherine, je crois que c'est plutôt Lupin qui va aller le porter.

D'accord. » Tout le monde reprit sa place. Harry se sentait fatigué… Il s'endormit.

Pendant ce temps-là, une nouvelle bien étrange avait semé la panique au château. Mr. Weasley tendit la Gazette des Sorciers à Catherine. L'article faisait la une.

UNE EXPLOSION DE TOILETTES EN ÉGYTPE

En effet, l'hôtel Carlton 6 étoiles au Caire a subitement été victime de ce que les Moldus appellent un nouveau genre de terrorisme : un attentat aux toilettes. Notre correspondant, Seamus Lavoisette, était en vacances là-bas et se trouvait justement sur les lieux et, vu les circonstances, il est important que le monde sorcier anglophone s'en inquiète.

L'hôtel Carlton est un hôtel on ne peut plus tranquille. Une clientèle richissime, des hôtes aux petits oignons de leur clientèle, bref, cet hôtel n'avait jamais connu de problèmes avant. Hier matin, à 11 h 30, les gens allaient au souk de la grande place, quand soudain, un immense bruit s'est répandu dans la ville. Les paysans, effarés, tournaient la tête. On entendait des cris, plutôt de répugnance qu'autre chose. Seamus Lavoisette, achetant une escalope de chameau, s'est affolé quand il a entendu la sirène stridente de la police. Il s'est donc rendu sur le lieu de l'explosion. Il raconte :

« Une partie de l'hôtel Carlton a été soufflée. Les Moldus criaient, couraient dans tous les sens. Ce qui m'a surpris, c'était que les gens ne criaient pas de douleur, mais de dégoût. En effet, personne ne s'est fait blessé, ce qui est extrêmement rare alors que les bâtiments ont été détruits. En réalité, ils étaient tous couverts de matières fécales. Ça sentait le crottin humain à des centaines de mètres à la ronde. Les gens se précipitaient sur les points d'eau les plus proches pour se laver. J'ai alors demandé à un Egyptien si une explosion de fosses septiques s'était produite, apparemment oui. J'ai alors tenté d'interroger sur le vif des clients de l'hôtel. L'explosion s'est produite dans les toilettes masculines, d'où les urinoirs renversés dans la rue. Un égyptien d'une quarantaine d'année, je l'appellerai Halid B., me raconta : " J'attendais tranquillement dans les toilettes car toutes les cabines étaient pleines. Tout à coup, je vis sortir un Anglais d'une soixante-dizaine d'années, me disant avec un air joyeux : « Elle est belle la journée ? ». Il tenait un bout de bois effilé et longuement sculpté dans la main. Je me trouvais cela bizarre et me demandais si c'était une mini-canne. Puis, alors que j'étais dans sa cabine, je vis un chapeau d'une forme bizarre, tout noir. On eût dit un bonnet de nuit sans pompon. Lorsque je fis marcher la chasse d'eau, j'entendis un grand vacarme. J'ouvris la porte et m'enfuis à toute vitesse, et dis aux autres de faire de même. " Le pauvre Halid, il était encore choqué. »

Maintenant, ce qui est fortement inquiétant d'après Seamus Lavoisette, c'est que certains pensent avoir reconnu le bois d'if du « bout de bois ». Pire, ce serait un sorcier. Pire encore, il est de l'âge de Celui-dont-on-ne-doit-pas-prononcer-le-nom. La police égyptienne dresse actuellement un portrait-robot, tous les sorciers ayant récemment vu cet homme sont priés de se rendre le plus rapidement possible au bureau de la Gazette.

« Mais, c'est mon père ! beugla Catherine, éberluée. Sa baguette est en bois d'if et il devait revenir ici d'Afrique en passant par Le Caire ! » Sa capeline rose fluo, qu'elle venait de se mettre, lui tomba sur les yeux. Enervée et embarrassée telle un Ministre de la Magie affairé, elle souffla doucement sur sa main.

« Je le lui avais dit ! quand il est revenu tout crotté en ayant réussi à fabriquer des papiers de toilette bouseurs ! Je lui avais dit : « Fais attention, Papa, ne fais pas des bêtises pareilles, tu pourrais avoir de graves ennuis ». Et comme d'habitude, ça sera moi qui l'excuserai devant tout le monde ! Ah mon père c'est un vrai idiot, pas vrai Alastor ? dit-elle en regardant fixement Maugrey.

Heu…Hein ?

Si, si… C'est vous qui lui aviez soi-disant appris à faire un détecteur de mage noir à la bouse de dragon. Vous aviez scandé à tout le monde : un Scrutoscope avec seulement des ingrédients naturels ! Vous parlez d'ingrédients naturels ! Vous lui avez refilé des idées à la noix de coco ! Oh, il faut que j'y aille. » Catherine se leva de son fauteuil pourpre extrêmement rembourré. Sans elle qui s'énervait, on aurait dit un enterrement tellement un des silences les plus totaux s'y tenait lieu. Elle reprit machinalement son manteau.

« Quel bon dîner ! dit Ron en se tenant le ventre.

La tarte à la mélasse était excellente, dit Harry en se léchant les commissures. J'en ai repris cinq parts, je crois bien…

Les deux lourdaux, il serait peut-être temps de se coucher… sermonna Hermionne d'un ton maternel qui était familier à Harry.

Déjà ? Il n'est pas encore trois heures du matin, bailla Ron.

Bon, moi, il faut que j'aille dormir, reprit Harry.

Si c'est ce que tu appelles dormir, répondit Ron d'un sourire narquois.

A demain ! » Harry se dirigea vers son tableau. Une fois dans sa chambre, il se déshabilla et se coucha.

Harry était maintenant debout, devant le couloir qui menait à sa « suite », les yeux collés, et disait des mots machinalement :

« Pas par là… Un peu plus à gauche… » On aurait dit un aveugle qui tâtait pour savoir où aller. Mais soudain, il se trouva devant Aurore :

« Ah, c'est maintenant que tu m'aperçois ! s'emporta-t-elle. Ça fait une heure au moins que tu fais du bruit !

Comment ça ? bailla Harry d'une voix léthargique.

Parfaitement ! Moi qui suis au-dessus, j'entends du bruit ! Et pas qu'un peu ! Façon ma petite sœur ! Comment tu fais, tu as amené un tam-tam d'Afrique ou quoi ? » Aurore était en nuisette normale, mais Harry eut une envie irrésistible de lui prendre les seins, et c'est ce qu'il fit.

« Mais c'est un cinglé, mais C'EST UN CINGLE ! » hurla-t-elle en prenant les jambes à son cou. Harry se frotta les yeux en rendant compte de l'énorme bêtise, pour ne pas dire de mots grossiers, qu'il venait de faire.