Note sur le chapitre : Voilà déjà un chapitre plus raisonnable niveau longueur (ouais, je sais que ça fait que 2 pages en plus, mais petit à petit, l'oiseau fait son nid -) ) et dont le contenu demande une préparation à la lecture particulière. Matériel : un ordinateur, des yeux(ça aide pas seulement à lire…), des mains, un nez et surtout des mouchoirs ! (Vous avez aussi la possibilité d'enlever les yeux et le nez, ça vous évitera les mouchoirs…) Vous êtes prêts pour lire, allez-y ! (Lola, pense aux bavoirs également :-P)
oOo
Chapitre 2 : L'argent ne fait pas le bonheur
Installée sur son lit, un genou relevé et l'autre jambe reposant dessus, les bras croisés derrière la tête, Tara écoutait la musique qui s'élevait dans sa chambre en battant la mesure du pied, un sourire aux lèvres, les yeux fermés. Tara adorait ces moments de tranquillité mais ne supportait pas le silence : la musique était pour elle une chose bien trop belle pour ne pas en écouter la moindre production, ce qui demandait une écoute de tous les instants.
Elle se dit qu'elle avait eu quelque part beaucoup de chances de tomber sur ses camarades de dortoirs, car celles-ci auraient très bien pu être les pires des philistins et lui sommer plus ou moins gentiment de garder pour elle sa passion. Fort heureusement, cela n'avait pas été le cas, loin s'en faut, et Tara se surprenait parfois à vouloir retourner à Poudlard juste pour ces soirées déchaînées qu'elles passaient à enfiler les variétés de musiques les plus diverses aussi bien moldues que sorcières, en chantant et dansant tout leur soûl dans leur dortoir à l'abri des regards des autres élèves.
Millea avait un timbre de voix plus qu'agréable, Fiona apprenait peu à peu à ressortir n'importe quel air sur sa guitare, Océane avait le sens du rythme et Lily la danse dans le sang. Si Tara pouvait se vanter d'avoir une voix exceptionnelle, les autres filles s'entendaient pour dire que Lily était aussi douée pour la danse qu'elle pour le chant. Aucune musique, aucun genre ne pouvait lui résister, pas même les chansons qualifiées d'indansables, mais sa prédilection allait sans contestation possible vers le rock, une danse qui lui ressemblait bien. Elles avaient passé un nombre incalculable d'heures à observer Océane et Lily créer de nouvelles chorégraphies pour aboutir à des résultats aussi stupéfiants qu'éblouissants. Millea et Fiona – qui à l'origine n'y connaissaient pas grand-chose en musique et danse – avaient fini par apprendre à reconnaître les tempos, à battre la mesure et à faire corps avec la musique sous les directives des trois autres. Des soirées déchaînées, oui, et les autres Gryffondor n'en seraient certainement pas revenus d'apprendre ce qu'elles faisaient d'une partie de leur temps libre.
En ce qui concernait Tara, elle passait l'autre partie entre ses visions et ses déambulations "à caractère social" – comme s'amusait à les appeler Millea – dans le château. L'an dernier, elle avait avec un certain amusement vu qu'elle faisait un peu peur aux premières années, mais comme les autres, ils avaient fini par s'habituer. Elle avait eu la crainte de découvrir parmi ces nouveaux des destins purs négatifs, mais il n'en avait à son soulagement rien été, et même au contraire puisqu'elle avait fait la connaissance d'Ariel Créar, une fillette amusante et curieuse qui semblait toujours s'intéresser à tout. Envoyée dans la maison Serdaigle, elle avait tendance à constamment essayer de résoudre et comprendre les énigmes qui se dressaient devant elle – telles que le mécanisme magique exact qui régissait les escaliers amovibles de l'école, le sortilège, la puissance magique et la volonté qu'il avait fallu à l'adaptation du ciel magique de la Grande Salle, ou encore l'interaction provoquée par les sortilèges de furoncles et de rire lorsqu'un élève de Gryffondor et un autre de Serpentard s'étaient battus et s'étaient retrouvés à l'infirmerie avec des tas de petites bouches hilares sur le corps.
Il y avait aussi Prytan Jones, envoyé également à Serdaigle, un garçon plutôt discret mais pourtant chaleureux et toujours prêt à aider. Et enfin André Lovegood, à Poufsouffle, plein de vie, discoureur remarquable malgré son jeune âge et présentant un attrait étrange à tous les faits magiques qu'on prétendait légendes, affabulations ou absurdités. Ils n'étaient pas les seuls évidemment, mais ceux-là lui étaient particulièrement sympathiques.
Et puis il y avait Severus. La dernière fois qu'ils s'étaient vus – autrement dit sur le quai au départ du Poudlard Express, à la fin de l'année, lorsque Tara lui avait sauté au cou en lui déposant un baiser sur la joue pour lui dire au revoir – le Serpentard semblait la fuir toujours autant qu'avant et il en était de même pour son mépris apparent. Apparent car Tara le sentait bien céder de plus en plus sous ses avances lorsqu'ils étaient seul à seul. Elle avait cru avoir à subir plus de résistance qu'il ne lui en opposait mais la jeune fille avait compris qu'elle s'y était prise au bon moment. Aurait-elle dû attendre quelques mois de plus avant de le poursuivre qu'elle aurait rencontré plus de difficultés.
Tara appréciait énormément son cousin, et pas parce qu'elle savait maintenant qu'ils étaient de la même famille, mais parce qu'il était de la même trempe que Steeve Wiovar. Un peu perdu dans un univers et des pensées qui ne lui ressemblaient pas, il montrait aux autres une apparente sécheresse et un mépris constant qui dissimulaient une profonde blessure. Blessé mais droit et fier, avançant toujours à la recherche de réponses. Plus tard, elle se serait certainement heurtée à une lassitude vis-à-vis de cette recherche, une fatigue qui aurait conduit Severus à simplement suivre le mouvement, alors il lui avait fallu le faire bouger.
En cela, de manière plutôt négative il fallait bien l'admettre, les garçons de Gryffondor l'aidaient inconsciemment. En fin d'année, la tension entre eux et le Serpentard – et plus particulièrement entre James et Severus – s'était considérablement accrue. Au départ, Tara avait voulu intervenir dans ces bagarres stupides et immatures, mais deux raisons l'en avaient empêchées. La première résidait en ce qu'elle n'avait pas la possibilité, en tant que Tara délurée, de faire une véritable morale aux garçons, elle ne pouvait qu'intervenir brusquement, lorsqu'elle arrivait alors qu'une dispute s'entamait, comme si de rien n'était, sa présence les empêchant systématiquement l'utilisation de sorts. Elle aurait pu, il était vrai, abandonner un instant son rôle pour les remettre à leur place, mais elle ne le devait pas, sous aucun prétexte. Trop de choses étaient en jeu dans le simple fait du personnage qu'elle interprétait. Si on commençait à la prendre au sérieux, il y avait un risque que ses absences ne passent plus pour quelques délires de plus. Par ailleurs, elle savait pouvoir compter sur Lily pour rabrouer leurs comparses de temps à autres. La seconde raison venait de ce que, même si c'était dur à admettre, cette confrontation pouvait être bénéfique à Severus dans la mesure où il devait affronter des personnes aux idées claires sur ce en quoi elles croyaient, contrairement à lui, ce qui avait une chance de le faire réfléchir.
Et puis il y avait autre chose dans cet affrontement entre James et Severus. Si tout le monde semblait persuadé que James avait été le premier à provoquer le Serpentard, Tara avait l'étrange impression que la tension était née du fait de Severus. Elle n'aurait su dire exactement pourquoi, mais les regards de haine pure que lançait Severus à James étaient bien trop intenses pour n'être qu'en réponse à une brimade quelconque, et ceux de James, à l'inverse, n'apparaissaient toujours que comme une réponse au regard de l'autre.
Pour comprendre cela, Tara se doutait qu'il lui aurait fallu en savoir plus sur Iron Rogue, ce qui n'était pas donné vu que sa mère elle-même avait finalement abandonné l'idée d'entrer plus en contact avec son frère, bien qu'elle approuvât Tara dans sa démarche d'approche de son cousin.
L'adolescente imaginait aisément sa mère au sous-sol, enfermée dans son laboratoire, à concocter des potions dont elle seule avait le secret. Elroa Lawill n'était pas du genre à taire ses manipulations par simple tradition, mais s'il était bien une chose que les confectionneurs – et tout bon maître des potions – connaissaient, c'était l'unicité d'une manipulation dans la création de certaines potions de niveau supérieur.
Roger Bacon, un alchimiste du treizième siècle, avait par exemple découvert la recette d'une potion de protection permettant à la personne qui en buvait d'être immunisée contre certains sorts. De son vivant, il fut le seul habilité à préparer ce breuvage de sa conception, bien qu'il en apprit toutes les étapes de création à son apprenti. A la mort du maître, le disciple avait retenté la manipulation et avait fini à l'hôpital en frôlant la mort par liquéfaction de ses organes après avoir bu sa préparation. Malgré les annotations détaillées de Bacon, personne ne parvint jamais à refaire cette potion – dont il restait encore à ce jour une fiole en circulation dans la nature, à la valeur inestimable.
Elroa Lawill, en tant que confectionneuse, était de la même trempe pour la préparation des potions. Pour certaines de ses créations, elle avait bien accepté de montrer les étapes de fabrications à certains – et même un autre confectionneur renommé –, personne n'avait jamais réussi à les reproduire à l'exact.
Tara était bien heureuse que sa mère lui ait appris certains rudiments des potions dés son plus jeune âge, mais là où Elroa voyait un art noble et passionnant, sa fille avait découvert un divertissement des plus attrayant et amusant. Elle possédait des aptitudes non négligeables en la matière, ce qui était normal pour quelqu'un ayant baigné dans l'univers des potions dés sa naissance, mais Elroa Lawill avait toujours su que Tara n'en ferait pas son métier.
S'étirant avec un bâillement, elle posa son regard sur la pendule de sa chambre et sauta instantanément au bas du avec un sourire. Sa mère n'allait plus tarder à prendre sa pause. Elle descendit dans la cuisine où trois chouettes postales attendaient patiemment sur le rebord de la fenêtre. Tara les débarrassa de leurs lettres et leur donna à chacune à manger avant de les laisser repartir.
Le premier courrier venait de Fiona, le second contenait une revue de l'agence de voyage Mundus Portus et la dernière lettre ne portait que le patronyme de Tara. Elle ouvrit cette dernière en premier et parcourut rapidement les quelques lignes écrites avant de sourire en hochant la tête, puis elle ouvrit celle de son amie.
Salut Tara !
J'espère que tes vacances se passent bien, même si je ne me fais pas vraiment de soucis pour toi à ce niveau. Je suis en France depuis trois jours et on a toujours eu un temps magnifique. Nous sommes installés non loin de Biarritz, dans le sud-ouest, chez une amie à mon père qui tient un gîte sorcier, mais nous avons aussi été du côté de Dunkerque, de Strasbourg et de Clermont-Ferrand. C'est vraiment génial, on a pris plein de photos que je vous montrerai à la rentrée.
Demain, on va à Paris et j'ai vraiment hâte d'y être ! Maman y a fait ses études et elle m'en a tellement parlé que j'ai l'impression que je connais déjà parfaitement la capitale. On va sûrement aller à la Tour Eiffel, au Louvre, à Notre-dame de Paris, etc… Ce sont des bâtiments moldus, je t'en parlerai mieux quand on se reverra. Papa est plus intéressé par le salon magique des expositions et les Folies-Sorcières (Je ne sais pas exactement ce que c'est, je crois qu'on y donne des spectacles mais maman a l'air récalcitrante à s'y rendre.)
C'est amusant parce que j'ai rencontré des personnes de Poudlard alors que je ne savais même pas qu'ils venaient là. Par exemple, j'ai retrouvé dans le gîte où on loge Eleanore et Kenneth Tarkey, son frère qui est à Poufsouffle (tu m'expliques pourquoi je te dis ça alors que tu connais tout le monde ?). Je ne connaissais pas vraiment le frère d'Eleanore jusqu'alors mais c'est vraiment un type sympa. Ils vont venir avec nous à Paris demain, c'est plutôt cool, je sens qu'on va bien s'amuser.
Mais tu ne devineras jamais qui j'ai vu au terminal des portoloins de Londres. Le professeur Carvi ! J'ai voulu aller le saluer et le présenter à papa et maman mais alors le professeur Fitevil est arrivé et ils sont ressortis du terminal. C'est plutôt bizarre, y'a plein de personnes à l'école qui disent qu'il y a anguille sous roche entre ces deux-là, mais ça semblait plutôt tendu entre eux. En tout cas, je peux t'assurer que ça fait plaisir de voir le plus beau prof du collège avant de partir en vacances (si maman voit cette lettre, elle va pousser de hauts cris, je le sens, et Millea va être morte de jalousie… Je crois que je vais la faire enrager avec ça.)
Eleanore m'appelle, on va à la plage avec son frère cet après-midi, pendant que les parents vont dans un musée quelconque. Hem ! Tu savais que Kenneth était assez musclé ? Pas trop hein, mais juste… Je sais pas ce que je raconte, moi, mais je crois… que je commence vraiment à l'apprécier. Arrête de sourire comme ça ! Je te vois d'ici !
Bon, j'y vais, l'avantage avec le soleil qu'on a, c'est que je peux faire passer mes rougissements pour des coups de soleil.
Bisous !
Fiona
PS : Au fait, vous partez bien dans une semaine avec ta mère, c'est ça ? Tu crois qu'on pourra se voir ? L'Espagne, ce n'est pas loin de Biarritz après tout, on pourrait passer une journée ensemble peut-être, vu qu'on reste deux semaines avec mes parents.
Tara eut un sourire amusé au passage parlant de Kenneth et replia la lettre en se demandant si ces deux-là allaient se mettre ensemble pour la rentrée. Connaissant le garçon, elle était persuadée qu'ils feraient un très joli petit couple.
La porte de la cuisine s'ouvrit et elle tourna la tête vers sa mère avant de hausser un sourcil interrogateur. La femme avait sur les joues de magnifiques étoiles rose fluo phosphorescentes qui bougeaient dans tous les sens et n'étaient certainement pas là volontairement. Elroa capta le regard de sa fille et grimaça.
- Même les plus grands de ce monde font des erreurs, déclara-t-elle solennellement.
- Ça te va bien au teint, assura sa fille en rigolant.
- Je ferai l'antidote tout à l'heure. Pour le moment, j'ai faim !
Elle sortit des cookies d'un placard et les mit sur la table en attrapant la documentation de l'agence de voyage.
- Toujours aussi rapides à ce que je vois, ironisa-t-elle. C'est étrange comme cela va plus vite lorsqu'il s'agit de payer les réservations.
- En parlant de ça. C'est bien du côté de Séville particulièrement qu'on va aller, n'est-ce pas ? Ce ne serait pas là, par le plus grand des hasards, qu'habite Pócima Proveedor, le plus célèbre botaniste espagnol du monde de la magie ?
- Ah bon ? Vraiment ? demanda vaguement sa mère en feuilletant le magazine de voyage.
Elle leva les yeux vers Tara et rencontra son regard moqueur.
- D'accord, j'avoue tout, se résigna-t-elle dans un grognement, je suis une acharnée du travail.
- Perfectionniste, je dirai plutôt, corrigea sa fille.
- On n'est jamais mieux servi que par soi-même, confirma Elroa. Il est toujours préférable de cueillir soi-même ses ingrédients. La méthode de coupe est très importante. En plus, je vais bientôt être en rupture de stock de racine d'olivier du diable.
L'apothicaire qu'était Mlle Lawill avait à travers le monde de nombreux fournisseurs, parmi les meilleurs que comptait le monde magique. Il était cependant rare qu'elle se contente de passer commande et d'attendre le colis des ingrédients. Elle effectuait de constants déplacements à travers le monde pour elle-même recueillir ses plantes, organes et tout autre élément selon ses propres méthodes afin de se garantir une qualité optimale, surtout lorsqu'il s'agissait d'ingrédients pour son usage personnel ou d'une commande particulière pour un client. En plus de l'élaboration de ses potions, cela lui demandait énormément de temps et elle avait de la chance d'être aussi résistante compte tenu de l'énergie qu'elle dépensait chaque jour – surtout que, lorsque Tara était là, elle lui accordait le plus de temps possible.
Il y avait eu une période difficile lorsque Elroa s'était fait mordre par un loup-garou, le jour où elle avait eu besoin de récolter des plans sauvages à la pleine lune. En plus du choc psychologique que cela représentait, la fatigue physique dans les premiers temps l'avait obligée à ralentir son activité. Fort heureusement, elle avait fini par retrouver ses forces d'antan et seuls les jours précédant et suivant la pleine lune restaient encore difficiles. Il n'y avait pas eu vraiment de répercussion sur la clientèle de la boutique lorsque certains avaient découvert sa nouvelle condition. Certes, les clients avaient pour la plupart perdu leur ton poli et chaleureux, mais Elroa Lawill restait malgré tout l'une des meilleurs apothicaires du monde et sa qualité de confectionneuse jouait en sa faveur.
- Dans ce cas, je pourrais rester une journée à Biarritz avec Fiona. Tu en profiteras pour récolter tes ingrédients et finir tout ce que tu as à faire, comme ça il nous restera tout notre temps pour profiter l'une de l'autre après.
Sa mère la regarda et sembla hésiter. Du fait de son travail indépendant, elle ne pouvait se permettre trop de vacances, et depuis que Tara était à Poudlard, elle s'arrangeait pour en prendre quelques jours à Noël et deux semaines au grand maximum en été. Elles profitaient toujours pleinement de ces jours pour être ensemble, mais cette année Proveedor ne pouvait la recevoir qu'à cette période, et elle avait d'autres obligations en Angleterre par la suite pour pouvoir décaler les vacances.
- Tu as raison, finit-elle par dire. J'irai le tout premier jour, comme ça je te déposerai immédiatement au gîte où se trouvent les Distort. Je ferai tout ce que j'ai à faire puis je reviendrai en soirée et nous passerons la nuit là-bas avant de nous rendre dans le sud.
- Une organisation parfaite, la taquina sa fille. J'ai hâte de découvrir la méditerranée, ajouta-t-elle d'un air rêveur. L'eau doit être si chaude en comparaison avec l'Atlantique…
- Ne t'inquiète pas pour ça, nous allons profiter au maximum de ces vacances : lézarder sur les plages et faire les boutiques la journée et aller nous amuser le soir. Il paraît que les espagnols sont très forts pour faire la fête.
- Alors j'ai trouvé mon pays d'adoption ! s'exclama Tara en riant.
- Tu es sortie aujourd'hui ? demanda sa mère.
L'adolescente secoua la tête.
- J'avais besoin de me reposer, mais je dois retrouver quelqu'un tout à l'heure, un ami que je n'ai plus vu depuis un petit moment.
- Dans ce cas amuse-toi bien, mais n'oublie pas d'être rentrée avant sept heures.
- Et toi ménage-toi, ajouta Tara en la regardant avec inquiétude. La pleine lune est après demain.
- Et dans six jours nous partons pour l'Espagne, termina sa mère avec un clin d'œil. Ne t'en fais pas pour moi ma chérie, ta mère est très résistante.
Une demi heure plus tard, l'adolescente se retrouvait au Chaudron baveur grâce à la poudre de Cheminette, vêtue d'habits moldus. Elle salua le tenancier et quelques clients avec enthousiasme puis sortit du côté moldu et prit le bus pour se rendre jusqu'à Trafalgar Square, où elle s'assit au bord d'une des fontaines en battant des pieds et chantonnant doucement. Elle resta ainsi plusieurs minutes avant qu'une main ne se pose sur son épaule.
- Salut Steeve ! dit-elle en se retournant avec un grand sourire. Comment vas-tu ?
Le garçon d'une quinzaine d'année qui se trouvait près d'elle lui rendit son sourire en hochant la tête.
- Pas trop mal, répondit-il. Ma situation est en train de s'améliorer et j'ai trouvé un logement fixe récemment : pas cher, sommaire mais juste ce qu'il me faut. Je suis livreur en ce moment, le patron ne pose pas trop de questions et ça m'arrange. Encore heureux que je fasse plus que mon âge, ajouta-t-il en grimaçant.
- L'essentiel, c'est que tu trouves tes marques dans le monde moldu, mais tu n'es pas un Serpentard pour rien après tout, remarqua Tara avec un sourire malicieux. Je suis heureuse de voir que tu vas bien mais ça m'étonne quand même que tu sois resté à Londres.
- Ils sont tous persuadés que je suis parti loin, je doute qu'ils songent à chercher par ici, d'autant plus dans le monde moldu, et puis la ville est grande. Tu sais, sans tes informations et ton aide, je me serai fait prendre au bout de quelques jours. Je ne vois pas comment j'aurai pu disparaître chez les Moldus sans rien connaître d'eux. Il y a même encore des choses qui me surprennent.
Tara hocha la tête et observa l'ancien Serpentard. Elle ne l'avait plus vu depuis un an et demi, depuis qu'il avait tout quitté, et n'avait jamais reçu de ses nouvelles, sauf récemment, lorsqu'il lui avait envoyé une lettre pour lui donner un rendez-vous qu'il avait confirmé par la lettre anonyme reçue plus tôt.
Elle le trouvait changé, et pas seulement d'un point de vue physique. Comme il le disait lui-même, il faisait plus que son âge – ce qui était déjà le cas à Poudlard – et on lui aurait facilement donné dix-huit ans. Il paraissait assez fatigué et plus mince qu'auparavant, preuve qu'il avait dû se démener ces derniers mois, mais parallèlement, il émanait aussi de lui une certaine force physique. Il était loin d'être maigre et on devait y réfléchir à deux fois avant de le provoquer. Mais surtout, il semblait plus ouvert et causant. Le taciturne Steeve Wiovar avait dû pour survivre devenir plus sociable qu'il ne l'avait été avant. Il restait malgré tout au fond de ses yeux une certaine distance et une froideur typiquement Serpentard qui lui donnaient un air ténébreux. Il avait su tirer son épingle du jeu dans ce monde qu'il ne connaissait pourtant que très peu.
Avant son départ, peu après lui avoir offert la sphère révélatrice, Tara l'avait trouvé seul dans une classe qu'on n'utilisait jamais et s'était installée face à lui avant de parler du monde Moldu. Elle n'était évidemment pas une spécialiste mais elle en connaissait malgré tout plus que la plupart de ses condisciples au sang pur, entre autre grâce à sa passion pour la musique et les multiples excursions dans le Londres moldu de disquaire en disquaire. Elle avait ainsi monologué pendant deux longues heures sans se lasser, Steeve Wiovar n'intervenant jamais, puis l'avait laissé après avoir déposé face à lui une série de papiers parmi lesquels des cartes routières et une de Londres ainsi que des parchemins où elle avait noté plusieurs informations sur le monde Moldu. Une semaine plus tard, lors des vacances de Noël, Steeve Wiovar avait disparu sans laisser de traces.
- Tu as pu faire certaines connaissances, j'imagine ?
- Récemment surtout, un collègue du boulot. Pour être franc, ce type est une bonne opportunité, il a certains projets qui m'intéressent. Il a une tante qui habite à Toulon, dans le sud de la France, et il compte s'y rendre le jour où il aura assez économisé. C'est un passionné du continent et il ne rêve que de soleil. Je ne sais pas trop pourquoi mais il m'a à la bonne et il m'a demandé si ça m'intéressait. C'est une chance pour moi. Quitter l'Angleterre est encore la meilleure des assurances à partir de maintenant.
- Et tu voulais me dire au revoir ? demanda Tara en haussant un sourcil amusé.
- Pas vraiment, non. Ça fait un moment que j'y réfléchis en fait. Tu sais bien que je me fiche pas mal de la guerre qui s'annonce dans notre monde, mais je me fiche un peu moins de toi ou même de Dorie. Non que je me sois attaché à elle mais je la respecte et je me doute que ça ne doit pas être facile pour elle à Serpentard, même en ce qui concerne Rogue. En plus, j'ai une dette envers toi, même si tu t'obstines à me soutenir que non. Je sais, de source sûre, qu'il y a un allié de ce Voldemort à Poudlard.
L'adolescente cligna plusieurs fois des yeux puis fronça légèrement les sourcils.
- Comment cela se pourrait-il ?
- Tout le corps professoral actuel était là du temps de Dippet. C'est lui qui les a choisi, accepté ou refusé, et il faut que tu saches que ce directeur n'était pas très regardant. J'ignore totalement qui est cet allié, mais je sais qui ça n'est pas, à savoir Flitwick et McGonagall. Ces deux-là sont blancs comme neige : ils ont trop risqué à l'époque de Grindelwald pour pouvoir être impliqué dans des affaires de magie noire. Personnellement, je t'avoue que je soupçonne assez Achear et Fitevil. Le premier parce que sa nomination en temps que directeur adjoint à l'époque de Dippet est assez étrange, il aurait été plus logique de voir Dumbledore à ce poste, et Fitevil pour son attitude. J'ignore ce qu'il en est aujourd'hui, mais quand j'étais encore à Poudlard, elle agissait bizarrement, et je l'ai un jour surprise en grande conversation avec une personne par l'intermédiaire d'un réveliroir. Je n'ai pas entendu ce qu'ils se disaient mais elle a eu une réaction assez brutale lorsqu'elle a vu que j'étais là.
- Tu as vu la personne avec qui elle parlait ?
- Non, je n'ai pas eu le temps. Si je te dis ça, c'est que tu es la seule personne du monde magique envers laquelle j'ai une confiance absolue, même s'il m'arrive parfois de m'en demander la raison.
- Te connaissant, tu ne te provoqueras pas de méningite à trop y réfléchir.
- En effet, ce sont tes affaires, pas les mienne... Je vais y aller maintenant, je dois être au travail dans une demi heure. Ah, une dernière chose, tu le fais ou pas, c'est comme tu veux, mais j'aimerai que tu essaies de rapprocher Dorie et Kelly Smith, elle est en seconde année à Serpentard, je crois qu'elle a un frère…
- Précéns Smith, troisième année à Poufsouffle, confirma Tara. Pourquoi veux-tu cela ?
- Dorie est trop fière pour le reconnaître mais il lui faut quelqu'un auprès d'elle, et je me souviens que Smith est assez différente de nos condisciples.
- Je m'occuperai de cela alors. Merci pour tout Steeve, et bonne chance.
- C'est à moi de te remercier. Adieu Tara, je regrette juste de ne pas pouvoir comprendre qui tu es réellement. Prends garde à toi, quelque chose me dit que tu en as plus besoin que moi.
Tara le regarda s'éloigner, perdue dans ses pensées. Un traître à Poudlard… Derrière cette information, il y en avait une autre, plus dangereuse : Voldemort s'intéressait à l'école, il voulait quelque chose qui s'y trouvait, ou peut-être l'école en elle-même ? En observant Dumbledore, l'adolescente s'était laissée dire qu'il en savait plus qu'il ne le disait sur ce Voldemort, mais quoi… Elle poussa un soupir las, se disant que son satané pouvoir l'avait fait grandir bien trop vite à son goût, ses préoccupations n'étant pas vraiment celles d'une gamine de treize ans. Au fond, elle avait besoin d'être aussi délurée à l'école, pour pouvoir être enfant, au moins en apparence, pour y croire encore un peu.
Elle secoua la tête pour rejeter ses sombres pensées. Hors de question de se laisser aller, à croire qu'elle vivait malheureuse ! Et puis c'était sa philosophie : avancer en souriant ou en pleurant, on était de toute manière forcé de le faire, alors autant sourire. En attendant, il allait falloir parler à Dumbledore de ce traître…
o
Tara avait pris place sur le rebord de la fenêtre, les genoux repliés, ses bras les entourant et sa tête reposant dessus. Elle fixait d'un air rêveur la pleine lune qui rayonnait dans le ciel nocturne, se souvenant qu'à une époque, elle adorait la contempler ainsi des heures durant, mais aujourd'hui elle ne pouvait jamais rester trop longtemps face à l'astre lunaire.
Depuis son accident, sa mère avait développé une phobie de la pleine lune somme toute naturelle, mais après quelques temps, elle s'était inquiétée de savoir si elle avait transmis cette peur à sa fille, ce qu'elle ne désirait par-dessus tout pas. Tara, par ailleurs, l'avait rassurée sur ce point. Même si la pleine lune la remplissait de peine vis-à-vis de sa mère, elle n'en avait pas peur et continuait à la contempler de temps à autres. Et puis, même si elle ne le lui avait pas dit, Tara avait l'impression qu'elle se devait de "respecter" la lune lorsque celle-ci était pleine. C'était pour elle une façon de montrer qu'elle acceptait la lycanthropie de sa mère, qu'elle l'aimait quoi qu'il lui arrive et quoi qu'elle devienne.
La nuit était calme et silencieuse. A l'étage au-dessus, M. et Mme Stealthily s'étaient endormis depuis un moment maintenant et elle devait songer à en faire autant. Comme d'habitude, elle souhaita silencieusement à sa mère une nuit plus calme que les précédentes pleines lunes et alla se glisser sous ses draps.
Forêt sombre, lieu maudit Dans la tombe perd la vie Un jeu d'ombre le prédit En incombe son envie… Une complainte sinistre… Dans son sommeil, Tara se retourne avec une inspiration tremblante, les traits de son visage contractés… Un éclair scinde la nuit ; S'en prend au plus démuni Dans l'air suinte l'ennui Ils recherchent les punis…La respiration de l'adolescente se fait plus rapide et sifflante, elle veut sortir de ce rêve, de cette forêt sordide où le chant funèbre s'élève. Elle déteste cet éclair qu'elle vient de voir, elle veut stopper ce bruit sec et assourdissant qui vient de fendre les lugubres paroles… Cet éclair tue le silence Un bruit, un cri, une fin Celle de la dernière danse Ils ont assouvi leur faim… La lune pleine et brillante se met à suinter d'un sang opaque qui s'écoule jusqu'au sol et parcoure en rigoles le sol de la forêt, se dirigeant vers Tara, incapable du moindre mouvement.
L'adolescente se réveilla en sursaut, une main plaquée contre son cœur qui la faisait souffrir à force de battre si vite. Une sueur froide s'écoulait sur tout son corps, mais elle n'y réfléchit pas longtemps. Rejetant dans un mouvement de panique les draps qui la recouvraient, elle se précipita hors de sa chambre après avoir, par réflexe, attrapé sa baguette et dévala les escaliers jusqu'au sous-sol. Elle arriva devant une porte en bois et annula le sort de silence qui y était apposé, mais elle eut beau tendre l'oreille, il n'y avait pas le moindre bruit de l'autre côté.
Perdue, hésitante, elle fit quelques pas en arrière, tournant la tête de droite à gauche dans l'espoir de trouver quelqu'un, mais il n'y avait personne, alors elle finit par de nouveau pointer sa baguette sur la porte et, tremblante, lança le sortilège d'ouverture. La lourde porte grinça dans ses gonds lorsqu'elle la poussa doucement, mais il n'y avait toujours pas le moindre bruit dans la pièce sombre.
- Lumos !
La voix tremblante de l'enfant fit vaciller la lueur qu'elle venait de faire apparaître mais la lumière était suffisante pour y voir clair : des murs nus, pas le moindre mobilier, une pièce au plafond bas vide, entièrement vide… Elle y pénétra en sentant son angoisse augmenter. Où pouvait-elle être ? La porte était fermée, comme d'habitude, et… Son regard accrocha soudain la trappe au plafond, qui menait dans la remise adjacente, grande ouverte…
Avec appréhension, elle leva les bras et sauta pour s'agripper au rebord et se hisser dans la remise. La porte était ouverte elle aussi et des traces dans la terre indiquaient que quelque chose en était sorti. Le loup-garou s'était échappé ce soir.
Un moment immobile, les jambes de Tara se mirent brusquement en mouvement et elle courut en direction de la forêt, le cœur battant, incapable de réfléchir aux conséquences de son acte, sachant seulement qu'elle se devait de retrouver sa mère.
Ses pieds nus martelaient le sol, les pierres coupantes sur le chemin lui blessant la plante des pieds et les orties lui lacérant les chevilles, mais elle n'y prenait pas garde, elle ne pouvait y penser. Comment la trappe pouvait-elle être ouverte ? Elle était toujours fermée, toujours ! Et ils vérifiaient à chaque fois qu'elle était scellée comme il fallait, alors qui avait bien pu l'ouvrir ? Et pourquoi ?
Sans qu'elle s'en rende compte, des larmes commencèrent à glisser sur ses joues. Elle avait peur pour sa mère, si elle ne se dépêchait pas, quelque chose d'horrible allait se produire, elle le savait. Ses muscles la brûlaient, ses pieds lui faisaient souffrir le martyr, mais peu importait, elle ne pouvait ni s'arrêter, ni ralentir, elle devait la retrouver, elle devait…
Sa course stoppa nette comme un rugissement terrifiant retentissait quelque part devant elle. Elle resta un moment figée puis reprit sa course jusqu'à s'appuyer contre un tronc d'arbre, le souffle court, avec devant elle, à quelques mètres, le loup-garou.
Celui-ci ne l'avait pas vue, il gardait ses yeux fixés sur une chose que ne pouvait voir Tara d'où elle était. La jeune fille sortit sa baguette et la pointa sur sa mère en inspirant profondément. Elle n'aurait droit qu'à une chan…
CLAC !
Un bruit sec et assourdissant qui se répercute sur les arbres de la forêt, un éclat d'argent sous la lune étincelante, un glapissement, un bruit sourd, rouge…
Le loup-garou tomba au sol, une marre de sang commença à s'étendre autour de lui et il reprit peu à peu forme humaine. Tara resta figée sur place, le visage pétrifié dans une expression d'horreur, elle ne put que rester spectatrice de la scène qui s'ensuivit.
Deux hommes se rapprochèrent du corps de la femme et l'un d'eux, qui tenait un fusil, se pencha sur elle.
- Une femme ! s'exclama-t-il d'un ton triomphant en levant un visage moqueur à son compagnon.
Le second chasseur grogna et haussa les épaules.
- Ouais, bon, d'accord, t'avais raison !
Il sortit un calepin et nota quelque chose dessus.
- T'as du bol, grommela-t-il, c'est rare les femmes loups-garous. J'espère que je pourrais en avoir un jour.
- Faut y croire mon vieux, tu auras cette chance un jour toi aussi.
Il attrapa une flasque dans sa poche et la lança à l'autre avant de s'en prendre une pour lui.
- Je bois à ma performance, déclara-t-il d'un air narquois. Il n'existe pas de chasseur de loup-garou plus adroit que moi dans tout le comté !
- N'empêche, la prochaine fois, utilise les balles traitées. La fourrure de loup-garou, c'est une mine d'or et tu le sais très bien.
- Ouais, ouais, répondit l'autre avec un geste vague de la main. Mais le dépeçage, c'est pas ma tasse de thé. Et puis j'avais envie de voir sa tête. Y'a pas d'intérêt quand c'est un homme, mais une femme…
Le sourire qui lui vint aux lèvres avait quelque chose de malsain et le second homme frissonna.
- T'es un malade, camarade, soupira-t-il. Allez viens, cette chasse m'a donné la dalle.
Ils s'éloignèrent sans se soucier du corps en riant d'une quelconque blague et le silence retomba sur la forêt. Un silence de mort…
La vision de Tara se résumait au corps de sa mère, elle ne pouvait rien voir autour. Titubante, elle se dirigea en trébuchant vers elle et s'arrêta juste à côté pour se laisser tomber à genoux dans le sang que la terre absorbait à petite gorgée, comme se délectant du meurtre qui venait d'avoir lieu. L'air égaré, elle se pencha sur sa mère et lui attrapa doucement les épaules pour la secouer. Au fur et à mesure, ses mouvements se faisaient plus violents et elle finit par secouer le corps avec une force effrayante, des larmes recommençant à couler sur ses joues. Agrippant toujours les épaules de sa mère, elle laissa retomber son front sur sa poitrine.
- Réveille-toi, murmura-t-elle. Réveille-toi maman… Maman réveille-toi, faut retourner au sous-sol, c'est dangereux de rester dehors. Mam…
Sa voix s'étrangla dans sa gorge et elle poussa un gémissement déchirant alors que ses mains se serraient avec tellement de force sur les épaules qu'un craquement sinistre se fit entendre, mais elle ne s'en rendit pas compte, ses pleurs lui occultant tous ses sens.
- Me laisse pas ! hurla-t-elle en un cri de désespoir. Reste avec moi maman ! Je t'en supplie ! T'en vas pas ! Maman ! Tu peux pas me laisser ! T'as pas le droit ! T'as pas le droit !
Mais sous l'adolescente, la femme resta inerte, et alors qu'elle la secouait de nouveau, elle ne paraissait qu'une poupée désarticulée au visage pâle et aux yeux vides, des yeux qui avaient perdus leur éclat, ternes et morts… morts… morte… Elle était…
Tara poussa un nouveau hurlement et serra sa mère contre elle de toutes ses forces, se refusant à la lâcher, cherchant à rejeter de toutes ses forces le mot honni, mais celui-ci martelait son esprit avec un plaisir vicieux, se jouant des sentiments de l'enfant.
Le temps s'écoula, à la fois lent et trop rapide. Lorsque la fille se décida à relever la tête, l'astre lunaire avait presque terminé sa course dans le ciel. L'esprit vide, complètement perdue, elle se releva en chancelant et reprit le chemin inverse, l'air hagard, incapable d'associer deux idées entre elles. Il lui fallut bien plus longtemps pour rentrer chez elle, le soleil s'était déjà levé quand elle pénétra dans la maison.
Elle monta jusqu'à sa chambre et constata, en passant devant un miroir, qu'elle était couverte de sang séché. Un moment, elle resta sans rien faire, simplement à se regarder, la bouche à demi-ouverte, les yeux vides. Mécaniquement, ses mains bougèrent pour la déshabiller et elle brûla d'un mouvement de baguette ses vêtements, descendant les cendres dans la cheminée. Elle se lança à elle-même un sort de nettoyage et passa une autre chemise de nuit avant de se coucher, s'allongeant sur le dos, toujours la même expression vide sur le visage.
Tout ce qu'elle venait de faire, elle n'en avait pas eu conscience, pas plus qu'elle ne se rendait compte que, sous le choc, sa main s'était resserrée sur sa baguette et qu'elle ne pouvait plus la lâcher. Fatiguée autant mentalement que physiquement, elle s'endormit sans même s'en rendre compte et, étrangement, passa une nuit sans le moindre rêve, bien qu'elle fut courte.
Le lendemain devrait rester à jamais une énigme pour elle. Elle s'était réveillée deux heures plus tard et avait entendu, en bas, Mme Stealthily en train de préparer le petit déjeuner alors qu'une odeur de café montait jusque dans sa chambre. Les événements de la nuit précédente lui revinrent clairement en mémoire et elle étouffa un sanglot dans son oreiller. Elle pleura pendant une dizaine de minutes sans pouvoir se contrôler et resta dans cette position pour réfléchir. Elle ne voulait pas qu'on sache qu'elle s'était trouvée là lors de… lorsque c'était arrivé. Personne ne devait jamais le savoir, c'était… primordial.
Elle resta toute la mâtinée ainsi, sans bouger, tendant l'oreille pour se focaliser sur ce qu'elle entendait et rien d'autre. Il ne fallut pas longtemps pour qu'une certaine agitation règne en bas, M. Stealthily ayant sans doute découvert la disparition d'Elroa. Des heures passèrent, durant lesquelles elle entendit parfois la porte de sa chambre s'ouvrir discrètement pour s'assurer qu'elle dormait toujours.
Puis il y avait eu l'arrivée de quelqu'un, un cri étouffé de Mme Stealthily et ses sanglots, une conversation aux voix rauques et désolées. Vers midi, quelqu'un était finalement monté réveiller Tara, elle ne se souvenait pas qui, pas plus qu'elle ne savait qui lui avait annoncé la mort de sa mère, peut-être les Stealthily, peut-être quelqu'un d'autre… Elle était restée muette un moment puis avait dénié avec force avant de s'enfuir dans sa chambre, où elle s'était enfermée. Le soleil brillait fortement dans le ciel, si beau, si chaud, un sourire était né sur les lèvres de Tara avant que sa vue ne se brouille et qu'elle s'évanouisse.
Les jours qui avaient suivis restaient flous dans l'esprit de la jeune fille. Elle s'était enfermée dans un mutisme persistant et ne sortait pas de sa chambre. Mme Stealthily lui amenait ses repas et tentait de lui parler sans parvenir à rien, puis elle finissait par lui dire que tout allait s'arranger et la laissait seule. Mais c'était faux…
Rien ne s'arrangerait. Sa mère ne pourrait pas guérir de ce mal ultime, elle ne pourrait jamais plus la voir sourire ou entendre sa voix. Elle avait oublié comment elle était, douce ou un peu sèche ? Aiguë ou grave ? Elle ne le savait plus, même en se concentrant, et il en était de même pour son visage. Celui-ci restait flou dans son esprit, elle ne parvenait plus exactement à se rappeler ses traits, ses souvenirs lui glissaient entre les doigts comme du sable fin, mais elle se refusait à regarder des photos, elle voulait se souvenir par elle-même, elle ne voulait pas d'une image provenant d'un bout de papier.
Le quatrième jour, la porte de sa chambre s'ouvrit sur Albus Dumbledore, mais elle ne le remarqua pas immédiatement, gardant ses yeux baissés, le regard dans le vide, toujours vêtue de sa chemise de nuit.
- Bonjour Tara, dit-il d'une voix douce et chaleureuse en restant debout, à l'entrée de la chambre. Est-ce que je peux entrer ?
Il ne reçut aucune réponse et elle n'eut même aucun mouvement qui aurait pu laisser penser qu'elle avait remarqué sa présence, aussi s'approcha-t-il de lui-même pour s'asseoir au bord de son lit.
- Je suis désolé de ne pas avoir pu venir avant mais j'avais à faire avec ce qui s'est passé.
Tara entendait et comprenait parfaitement ce que disait le vieux sorcier, mais elle ne voulait pas qu'il s'attarde sur le sujet. Déjà, elle sentait un poids revenir en son cœur.
- On sait qu'elle n'a pas souffert, poursuivit le sorcier. Elle a été tuée sur le coup, elle n'a pas eu le temps de souffrir. Tara, je sais que c'est dur, qu'il te faudra du temps pour t'en remettre, mais tu dois vivre pour elle, tu entends ? Ta mère aurait voulu que tu vives deux fois plus qu'avant, pour vivre à travers toi, tu ne crois pas ?
L'adolescente ne répondit pas, ne bougea pas, elle savait cela, elle le savait très bien, mais ça restait malgré tout difficile. Il y avait un si grand vide en elle maintenant.
- J'ai froid, souffla-t-elle en resserrant ses bras autour de ses genoux. J'ai très froid…
Le vieux sorcier baissa les yeux vers ses pieds nus et hocha la tête avant de sortir sa baguette et de l'agiter doucement. De grosses chaussettes de laine bleu clair apparurent alors aux pieds de Tara et elle redressa la tête pour les observer d'un air un peu perdu.
- Elles avaient rétrécis à cause d'un sortilège et je ne savais justement pas à qui les offrir, remarqua-t-il en souriant malicieusement.
Elle fixa encore un moment les chaussettes en clignant plusieurs fois des yeux puis tourna le regard vers Dumbledore, qui la regardait maintenant avec bienveillance. Le poids sur son cœur se fit alors si pressant que ses yeux se remplirent de larmes et elle s'accrocha au cou du sorcier en sanglotant avant de se laisser aller à pleurer vraiment.
- Elle me manque, gémit-elle, elle me manque tellement !
- Je sais Tara, je sais, murmura le sorcier en caressant doucement ses cheveux et en la serrant contre lui. Écoute, je sais que tu n'as pas la tête à ça, mais tu te retrouves maintenant livrée à toi-même et on ne peut pas vraiment demander à ton père ou ton grand-père de s'occuper de toi. J'ai fait une demande de tutelle qui a été acceptée par le ministère.
Elle le regarda avec des yeux brillants de larmes et en reniflant, prenant des inspirations saccadées.
- Vous… Je suis votre filleule ? demanda-t-elle.
Le vieux sorcier hocha la tête.
- C'est cela, à partir de maintenant, je suis ton responsable légal, du moins si tu le souhaites évidemment. Mais il faut que tu saches que je ne pourrais pas te garder avec moi et les Stealthily n'en ont pas les moyens, même si cela leur aurait certainement fait plaisir. Si tu acceptes, je te présenterai demain à des gens de mes amis qui sauront s'occuper de toi comme il faudra. Il s'agit d'un couple qui est malheureusement dans l'incapacité d'avoir des enfants, ils seront ravis de t'accueillir si tu le veux bien. Ce sont des personnes de confiance que nous pouvons mettre au courant pour ton don sans crainte.
Un peu perdue, Tara commençait à avoir du mal à comprendre ce que tout cela pouvait impliquer, ce que cela signifiait, mais elle avait confiance en Dumbledore.
- Je… ne sais pas encore, souffla-t-elle. C'est… rapide…
- Je m'en rends compte, et je ne veux pas te brusquer, mais il est important que tu reprennes ta vie en main le plus vite possible. Il n'est pas bon de s'oublier dans les tourments de l'âme. Les morts nous enseignent la vie, parce qu'en partant, ils espèrent que nous restions bien plus longtemps qu'eux ici.
Tara hocha lentement la tête en reniflant.
- Maman aime… aimait me voir rire, mais… elle ne me verra plus jamais. Elle aimait m'entendre lui raconter mes journées, mais elle ne m'entendra plus. Elle aimait caresser mes cheveux, mais elle ne me touchera plus… J'étais… entière… parce qu'elle était là. Parce que… elle me faisait sentir que j'existais. Je sais bien… qu'elle voudrait que je vive… non pas deux fois plus mais dix, vingt, cent fois plus… Je le ferai, souffla-t-elle, je le ferai très bientôt mais… pas maintenant…
Dumbledore lui adressa un sourire triste.
- Tu as le droit de te laisser aller un peu, lui dit-il. Demain, je te présenterai à Thélias et Léda Meadowes, je suis persuadé que tout se passera bien.
- Je vous fais confiance, mais… je voudrais… éviter qu'ils sachent… pour mon don.
- Tu as le temps d'y réfléchir, il serait préférable…
- Non, le coupa-t-elle en retrouvant un peu d'assurance. S'il vous plaît…
- Très bien, comme tu veux, soupira Dumbledore. Je vais te laisser maintenant, je te recommande d'aller voir les Stealthily aujourd'hui. Ils se sont beaucoup inquiétés pour toi.
- Oui, je m'en doute… Je suis désolée.
- Tu n'as pas à l'être.
Il lui sourit avec douceur et se leva. Au moment où il sortait de la pièce, la voix de Tara s'éleva encore.
- Merci pour les chaussettes, j'ai moins froid…
(A suivre…)
VIVE LES CHAUSSETTES ! (ben ouais, fallait bien que je finisse par les placer celles-là, ce sont qd même des personnages importants, non ? :-P)
Rqe : Y'a déjà pas mal de futurs parents qui sont apparus dans le récit, déjà en couple ou non, vous les avez repérés ou non ? Si y'en a que ça amuse de faire des suppositions… -)
oOo
IMPORTANT (pour ts les lecteurs) VERY VERY VERY !
Comment dire cela avec toute la diplomatie qui me sied si bien ? Je n'aurai pas accès à Internet le week-end prochain… Ouais, c'est bien de dire comme ça. Euh…Vous voulez une traduction ? « Plus dur là, je sors le bouclier, attendez… » En clair (vive le décodeur !), ça signifie que rien de neuf avant dans 2 semaines, soit le week-end des 12 et 13 mars. Pas la peine de râler, à part si qq'un veut me payer le téléphone dans mon studio, je suis preneuse ^^ Allez, faîtes pas cette tête, je reviendrai avec 2 chapitres si vous êtes gentils, et p'êt' un OS (enfin, si vous m'avez pas oubliée :-S lol) Bonnes deux semaines à tous ! (Et on n'oublie pas : gentils…)
°O°
RAR :
LN : « J'vais m'faire taper moi… » LN, t'es là ? Euh… Comment dire ça simplement ? Hem ! Ma foi, t'as bien dû t'en rendre compte « tiens, le rouge te va bien au teint, tu sais ça ? » Ben… Effectivement, y'a pas l'OS « AIE-EUH ! MAIS CA FAIT MAL EUH ! T.T » Mais c'est pô ma faute ! La fac, les cours, et tout et tout, tu vois ? … Mais tu sais, il est en prépa, si, si, juré, y'a déjà deux pages d'écrites ! « Crie pas comme ça, je sais que deux pages, ça suffit pas… :-S » Alors… euh… Pour la prochaine fois ? « Moi aussi j'ai arrêté de compter le nbre de fois où j'ai dit ça ^^ Allez LN, désespère pas ! »
« Je vais encore me faire taper… » J'suis un ch'ti peu naze, moi. Pas dormi de la nuit dernière, anni, fiesta, rigolade, bref, j'suis pas en état de faire les RAR, mais vos reviews m'ont fait très très très très plaisir. Merci à Nouna (Prem's ! ^^), Milady2, Mimichang, RazielTepes, Ilys, , Lyly-potter et Audery. Encore pardon de ne pas vous répondre individuellement et à la prochaine !
Hermy73 : C'est la première fois que tu reviews, alors je vais quand même prendre le temps de te répondre -) Je suis heureuse de voir que tu apprécies autant mes écrits et que tu aimes mon univers sur les Maraudeurs. Ma foi, j'essaie de rester à la hauteur de vos attentes et ça fait plaisir de voir que j'y arrive « On croise les doigts pour que ça continue lol » Je ne sais pas encore si j'écrirai après les tomes, mais on a encore le temps je pense « hélas… mdr ! » et puis ça dépendra si j'ai encore des choses à raconter -) Pour le moment, je vais déjà aller jusqu'à mon huitième volet post-Poudlard, et on verra bien -) Sinon, mes chapitres arrivent généralement dans la nuit de dimanche à lundi, quand j'ai le net et quand j'ai pas pris trop de retard :-S Merci pour ta review et en espérant ne jamais te décevoir !
