Disclaimer : Tout est à JKR, lieux, personnages -sauf certains que vous reconnaîtrez aisément- créatures, etc... je ne tire aucun bénéfice de cette histoire, si ce n'est celui du plaisir que je prends à écrire et faire partager ce que j'écris... Bonne lecture.
Chapitre 7
La Belle et le Dragon
Au milieu du parc, les pieds nus dans l'herbe douce, dans la lumière éclatante d'un après midi d'août, Hermione, en chemise blanche dansait. Ses cheveux flottaient dans son dos et elle s'élevait lentement. Elle tendait les mains vers lui comme pour l'inviter à la suive.
- Mais tu n'es pas obligé de venir, Ron ! disait-elle en riant.
Du fond de l'horizon, un point noir fonçait droit sur elle. Ron voulait crier mais aucun son ne sortait de sa gorge. Le point se rapprochait et il s'aperçut qu'il s'agissait d'un dragon. Un gigantesque dragon, aux grandes ailes déployées, la gueule ouverte. Ron tendit la main vers son balai :
- Accio balai !
Il ne bougea pas. Il restait allongé au sol, immobile. Et Hermione lui criait :
- Il faut que tu révises tes sortilèges de lévitation, Ron…
Elle montait. Elle montait toujours. Elle n'était plus qu'un point blanc, elle aussi. Et soudain, ce fut la chute. Elle n'en finissait pas de tomber. Ron appelait son balai, mais il ne bougeait toujours pas. Le dragon plongea vers Hermione et Ron vit que Charlie le chevauchait.
- J'arrive Hermione, criait-il. Je suis le meilleur attrapeur de toute l'histoire de Poudlard !
Le dragon passa sous la jeune fille qui tomba dans les bras de Charlie.
- Ho Charlie ! s'écria-t-elle. Tu es le plus gentil des Weasley !
Le dragon flottait à quelques pieds du sol. Hermione lui tendait la main :
- Allez Ron, fais un petit effort. Je suis sûre que tu pourrais y arriver, si tu te donnais un peu plus de mal…
- Laisse tomber, mon Hermione chérie, il n'arrivera jamais à rien, se mit à ricaner Charlie. Le petit Ron à sa maman a peur de se faire mal…
- Moi non plus ma grand-mère ne veut pas que monte sur un balai, dit alors Neville.
Ron ouvrit les yeux :
- Qu'est-ce que Neville fiche ici ? s'exclama-t-il.
Il reconnut Ginny qui lui prit les mains et le serra contre elle. Mrs Pomfresh la repoussa doucement :
- Du calme ! Laisse-le respirer.
Ron se tourna de tous côtés :
- Hermione ?
Il la vit, couchée à quelques lits de lui, dans une chemise propre et blanche. Elle reposait, les bras le long du corps, sur le drap immaculé.
Il se laissa retomber sur son oreiller, épuisé. Des bandages entouraient sa poitrine et il sentait l'odeur des cataplasmes de Mrs Pomfresh.
- Hum ! fit celle-ci, depuis le pied du lit, le visage sévère. Une foulure à la cheville, deux côtes fêlées, et je passe sur les contusions, les plaies et les diverses ecchymoses. Dois-je vous rappeler que l'année scolaire n'a pas encore commencé, Mr Weasley.
Ron mit la main sur son côté. Il avait dû se fêler les côtes lors du choc contre le mur du couloir. Ou bien lors de sa chute dans la forêt interdite. C'était pour cela qu'il avait si mal et qu'Hermione lui paraissait si lourde. Ses mains ne portaient plus de traces de blessures. Il n'avait plus mal à la cheville, ni dans les côtes. Il se rendit compte qu'il était torse nu et ses pieds dépassaient au bout du lit. Il remonta le drap sur lui jusqu'au menton. Il se réjouit d'avoir la peau du visage verte, car ainsi Mrs Pomfresh ne le verrait pas rougir.
- J'ai vu beaucoup de choses étranges durant ma longue carrière à Poudlard, continuait celle-ci, et je dois dire que les Weasley y étaient souvent pour quelque chose ! Mais ça –et elle désignait Hermione endormie- ça dépasse toutes mes compétences ! Qu'est-ce que vous avez fait ?
- Je… je sais pas… bredouilla Ron.
- Ronald Weasley ! gronda Madame Pomfresh. Vous ne me ferez jamais croire que vous ignorez ce qui s'est passé !
Ron dut pourtant admettre pour lui-même qu'il ignorait en fait ce qui était réellement arrivé. Mais bien sûr personne ne voudrait le croire, pas plus qu'on ne voudrait croire qu'il avait terrassé quatre araignées d'un coup ! Il glissa un peu plus sous le drap sous le regard sévère de Mrs Pomfresh.
- Pom-pom ! Si Ron dit qu'il ignore ce qui s'est passé, c'est qu'il l'ignore !
La voix de Dumbledore ne calma pas les angoisses de Ron, malgré sa douceur habituelle. Car Dumbledore était là et Hermione n'avait pas repris conscience. Il était sur le point d'interroger le directeur sur le sortilège qui emprisonnait Hermione lorsque la porte s'ouvrit violement et Harry surgit dans l'infirmerie.
- Ron ! cria-t-il depuis le pas de la porte.
Il s'arrêta, figé devant la pâleur d'Hermione. Il la crut morte, puis il se raisonna. Dumbledore était là. Il allait tout arranger, n'est-ce pas. Il lança un regard implorant à Ron. Il s'approcha de lui. Apparemment Mrs Pomfresh s'était déjà occupée de ses blessures.
- Tu vas bien ? demanda-t-il.
- Moi oui, répondit sourdement Ron.
- Que s'est-il passé ?
Le visage de Ron s'assombrit. Combien de fois lui faudrait-il répéter qu'il n'en savait rien ?
- Allons ! Allons ! Laissons ce jeune homme se reposer ! dit Dumbledore.
- Mais pour Hermione ! cria presque Ron. Vous n'allez rien faire ?
Il y eut un silence. Harry et Ginny fixaient Dumbledore du même regard anxieux que celui de Ron.
- Je ne peux rien pour elle, répondit Dumbledore.
- Il faut faire venir un conjureur de sorts de Ste Mangouste, dit Ginny.
Dumbledore lui sourit et tapota son épaule gentiment. A ce moment, le professeur Rogue entra, le visage soucieux.
- Professeur, dit-il en refermant la porte. Je n'ai rien trouvé. Je…
Il s'interrompit en voyant Ron éveillé, Ginny et Harry au pied de son lit.
- Ha ! Mr Weasley est-il en état de nous raconter ce qui est arrivé, que nous trouvions une solution à ce désagréable incident.
- Severus, fit Dumbledore, un sourire bienveillant aux lèvres.
Harry sentit sa gorge se serrer. Rogue manquait-il à ce point de cœur qu'il pouvait plaisanter sur un sujet aussi douloureux. Ron sentit, lui, ses joues brûler et il sut qu'il devenait vert foncé. Il entreprit de raconter comment il avait suivit Hermione dans les couloirs des sous-sol, comment ils avaient atteint cet endroit empesté de magie, comment il avait voulu l'empêcher d'approcher trop près de… de quoi, il ne le savait, mais ce qu'il savait c'est que cela irradiait la peur et la puissance. Il avait vu se déclencher le sortilège et au fur et à mesure qu'il parlait il comprenait que le couloir était piégé et qu'ils avaient foncé droit dans un guet-apens.
- Qu'y avait-il au bout du couloir ? demanda-t-il à Dumbledore. Hermione s'en doutait, mais elle n'a rien voulu me dire.
- Elle a lancé un sort ? voulut savoir Rogue sans faire attention à sa question.
- Non ! Elle n'est pas aussi stupide que cela ! se mit en colère Ron. Elle s'est approchée trop près, et elle a déclenché le sortilège de défense, réfléchit-il tout haut. C'était… c'était une imprudence.
- Une imprudence qui aurait pu lui coûter la vie ! riposta Rogue, rouge d'exaspération. Elle devrait être morte !
- Elle a été protégée ! grinça Ron.
Il ne voulait pas discuter avec Rogue. Il ne voulait pas l'entendre déblatérer sur Hermione.
- Comment a-t-elle été protégée, s'intéressa Dumbledore.
- Hé bien… je crois que j'ai…
Ron refit le geste : il leva sa baguette et dit "protego"…
- Qu'est-ce que j'aurais pu faire d'autre ?
Rogue le regardait d'un air dubitatif.
- Est-ce tout ? Ensuite ?
- Ensuite, rien ! s'énerva Ron. Je me suis réveillé avec une bosse derrière la tête et mal partout. Hermione était évanouie et… elle ne s'est toujours pas réveillée. J'ai fait le chemin inverse, mais bien sûr, je me suis perdu et nous sommes tombés dans la Forêt Interdite. Il y avait toutes sortes de choses répugnantes qui nous suivaient et je ne sais pas comment j'ai fait pour la porter jusqu'au château. C'est tout ce que je sais, c'est tout ce dont je me souviens. Et maintenant dites-moi quand elle va revenir à elle que je l'étrangle de mes propres mains à cause de sa fichue curiosité et de cette manie de ne jamais rien dire de ce qu'elle a derrière la tête !
Mrs Pomfresh mit sa main sur son front et fit "chhhhtt". Dumbledore sourit à Ron.
- Ce n'est pas possible, reprenait pourtant Rogue. Vous devriez tous les deux… je suis allé jusqu'à… jusqu'où vous dites être allés. La magie qui se trouve là est si puissante qu'un sort de cette intensité aurait dû vous tuer tous les deux…
- Je vous l'ai dit : "protego", grogna Ron.
Mais Rogue secouait la tête.
- Voyons, Severus, intervint Dumbledore toujours souriant. Il me semble que vous accordez bien peu de crédit aux capacités de ce jeune homme. Et vous savez comme moi qu'il est des circonstances qui décuplent les pouvoirs.
- En tout cas, conclut Rogue, ce cas-là –et il montra Hermione de la tête- dépasse mes compétences comme les vôtres. Nous devons nous préparer au pire.
Ron leva des yeux désespérés vers le Directeur.
- Pour l'instant, nous avons plus urgent à faire, vous le savez.
- Mais, balbutia Harry éberlué par l'attitude de Dumbledore. Et Hermione ?
- Tout ce dont elle a besoin, pour le moment, c'est de chaleur et de beaucoup d'amour.
- Dois-je faire prévenir le Professeur McGonagall pour qu'elle contacte ses parents ? demanda froidement Rogue.
- Nous n'en sommes pas encore là, Severus, lui sourit Dumbledore. Dites donc à Remus de laisser monter son chat.
Rogue quitta la salle et l'atmosphère sembla aussitôt moins fraîche à Ron. Dumbledore lui tapota le poignet. Il s'attarda devant le corps gisant d'Hermione.
- Elle est glacée, Pom-pom, remarqua-t-il. Veillez à la garder au chaud.
Il se tourna vers les trois jeunes gens silencieux.
- N'oubliez pas, beaucoup d'amour. Je reviendrai. Harry, ne te laisse pas distraire. Et toi, Ron tu serais rentré bien plus vite si tu avais utilisé un sortilège de locomotion.
Il tourna les talons et disparut dans le couloir. Ginny se pencha vers son frère :
- C'est vrai, ça ? Pourquoi ne l'as-tu pas fait léviter au lieu de la porter tout le temps ?
Ron ouvrit en même temps les yeux et la bouche :
- J'y ai pas pensé ! avoua-t-il.
Et il se sentit si stupide.
Ginny, et Harry chuchotaient au chevet de Hermione. Pattenrond était couché sur son cœur, Harry tenait sa main droite et Ginny sa main gauche. Ron avait le regard tourné vers l'extérieur, mais il ne voyait ni le parc dans la lumière crue de l'après midi, ni le lac qui brillait au loin. Il avait expliqué cent fois au moins ce qui était arrivé depuis le moment où le sortilège les avait frappés. Harry avait raconté plusieurs fois aussi comment lui et Remus avaient suivi Pattenrond jusqu'au conduit en pente. Le chat avait glissé dans le boyau tandis que Remus avait saisi Harry et le ramenait vers le château.
- Ils sont dans la Forêt Interdite, avait-il dit tandis qu'ils suivaient les empreintes fluorescentes.
Il avait l'intention de retrouver Rogue et de se porter à leur secours. Ils avaient rejoint le professeur de Potions, qui avait confirmé qu'un sort d'une puissance extrême avait été lancé dans les soubassements du château. Ils étaient remontés en hâte et avaient croisé Mrs Pomfresh qui montait les corps de Ron et Hermione à l'infirmerie. Harry les avait vu flotter, les vêtements déchirés, blessés, sans connaissance. Les visages de Rogue et Remus étaient inquiets et Mrs Pomfresh était grave. Ensuite, elle avait mis tout le monde hors de l'infirmerie et avait examiné les jeunes gens. Elle avait soigné Ron et Dumbledore s'était penché sur le cas d'Hermione. Le Directeur avait écouté Rogue faire son rapport dans le secret de son bureau en haut de sa tour interdite. Et rien ! Rien ! Il n'avait rien fait pour elle. Beaucoup d'amour et d'attention, s'était-il contenté de dire. Ils l'entouraient depuis deux jours et elle n'avait pas bougé un cil. Même la beuglante que Mrs Weasley avait envoyée à son fils ne l'avait pas réveillée. Il avait toujours dans la tête les paroles du vieux Centaure. Il avait eu tort : il était sorti de la Forêt, sans l'aide de personne. Il aurait tort pour Hermione aussi. Il le fallait. Parce qu'il ne pouvait se résoudre à envisager une année à Poudlard sans elle. Il frissonna. Il n'avait pas dormi depuis deux nuits. Ils s'étaient relayés au chevet d'Hermione, mais même dans le dortoir de Gryffondor, seul tandis que Harry veillait sur elle, il n'avait pu trouver le sommeil. Il sentit Pattenrond qui se frottait à ses jambes et il baissa les yeux vers lui. Le chat émit une petite plainte interrogative. Il n'eut pas le cœur de le chasser. Il le prit dans ses bras, comme Hermione faisait, et caressa sa tête, entre les deux yeux. Qu'est-ce que Dumbledore attendait d'eux ? Qu'est-ce que le Centaure entendait lorsqu'il prétendait qu'il n'était pas prêt à faire ce qu'il fallait pour qu'elle revienne. Il savait que dans son dos, Harry et Ginny chuchotaient sur lui. Ils s'étaient interrogés sur ce qu'Hermione cherchait dans les profondeurs de Poudlard. Ils s'attendaient sans doute à ce qu'il leur réponde. Il les avait envoyé sur les roses. Et Ginny avait prononcé le mot de "dragon".
- Tu écoutes trop les histoires stupides des jumeaux, avait rétorqué Ron. Qu'est-ce que Dumbledore ferait d'un dragon dans une école ?
- Sans doute, avait répondu Ginny sans conviction. Surtout, que ferait Dumbledore d'un dragon endormi ?
- Endormi ? avait répété Ron. Qui te dit qu'il serait endormi ?
- Oui, s'était enhardi Ginny. A cause de la devise de l'école, et ce n'était pas un sortilège d'endormissement qui a touché Hermione ?
- Parce que s'il se réveillait, bonjour les dégâts ! répartit Ron de méchante humeur.
Après tout qu'est-ce qu'on s'embêtait à se poser des questions ? Quand Hermione se réveillerait, elle aurait toutes les réponses. Ginny lui jeta un regard de compassion qui ne lui échappa guère. Quant à Harry, il remonta ses lunettes sur son nez et s'exclama :
- Bien sûr ! Les dragons gardent des trésors !
- Heu… fit Ron en fronçant les sourcils. Pas toujours. Mais en effet qui oserait s'aventurer en un lieu où séjourne un dragon ? A part Charlie, bien entendu…
Ginny serra un peu plus la main d'Hermione dans la sienne et se pencha au-dessus d'elle, vers Harry.
- Tu veux dire… mais ce n'est qu'une légende ! Comment un dragon pourrait-il garder Poudlard !
- Surtout s'il est endormi ! railla Ron.
- Dumbledore doit le savoir, murmura Harry. Il connaît bien les dragons. N'a-t-il pas trouvé les propriétés de leur sang. A propos, tu les connais Ron ?
- Elles étaient au programme de cette année ? demanda le jeune Weasley sur un ton ironique. Non ? alors Hermione doit les connaître. Réveillons-là et elle nous en fera aimablement part.
Harry et Ginny avaient alors cessé de parler de dragon devant lui.
Ron quitta la fenêtre et se planta devant le lit aux draps blancs. Il lâcha Pattenrond qui s'étendit à la place qui était devenue la sienne depuis deux jours : en travers de la poitrine d'Hermione, les pattes autour de son cou, et sa tête sur son épaule.
- Mais pourquoi Dumbledore ne fait-il rien ! s'écria Ron, un sanglot au fond de la gorge.
Harry échangea un regard avec Ginny. Il avait bien une petite idée, mais il savait qu'elle ne plairait pas à Ron. Elle ne lui plaisait pas d'ailleurs outre mesure à lui non plus. Cependant, il savait au fond de lui que si Dumbledore ne faisait rien pour Hermione, c'est qu'il ne pouvait rien faire.
- Dumbledore n'est pas tout-puissant, risqua-t-il sans lever les yeux sur son ami.
- Ce n'est pas vrai ! cria Ron. Il n'a qu'à faire venir son phénix, et il l'éveillerait ! Il t'a bien sauvé de la mort !
Harry se leva et s'approcha de lui : "Si c'était aussi simple, il l'aurait déjà fait". Il mit sa main sur son bras. Ron le repoussa et quitta l'infirmerie. Il croisa Rusard qui lui jeta un regard mauvais. Il l'entendit murmurer que si le Professeur Ombrage était restée directrice de Poudlard, tout ceci ne serait pas arrivé. Ron se rendit à la bibliothèque, parce qu'il savait qu'on ne le chercherait pas là. Il s'assit à la place qu'affectionnait Hermione quand elle les traînait dans ces lieux. Il croisa les bras sur la table et posa son front dessus.
- Bonjour, Ron…
Ron leva la tête vivement.
- Ho ! Comment allez-vous, Sir Nicholas ?
- Mieux que vous, Ron…
Le fantôme avait l'air grave. Il flottait au travers de la table en bois, les bras croisés sur sa poitrine.
- Il est difficile de perdre ceux qu'on aime, n'est-ce pas. C'est pourtant une expérience à laquelle on ne peut échapper, hélas…
- Hermione n'est pas encore… morte ! s'écria Ron avec horreur.
- Alors pourquoi la pleurez-vous ?
- Mais je ne pleure pas ! brava Ron.
Il battit plusieurs fois des cils pour chasser les larmes qui venaient toutes seules.
- En tout cas, vous ne faites rien pour trouver un moyen de la sortir de ce sommeil de sortilège…
Le jeune homme eut un hoquet :
- Moi ? Mais qu'est-ce que je pourrais bien faire, alors que Dumbledore ne peut rien pour elle ?
Le fantôme hocha la tête, ce qui eut pour effet de la faire légèrement vaciller car elle ne tenait guère que par un lambeau de chair. Il la remit d'aplomb, tandis que Ron retenait une grimace de dégoût.
- Je suis désolé, Sir Nicholas, dit-il, mais je n'aime vraiment pas lorsque vous faites cela !
- Croyez-vous que j'apprécie moi-même ? J'aimerai autant la porter sous mon bras, comme tout décapité qui se respecte !
Ron détourna les yeux. Nick-Quasi-Sans-Tête eut un sourire narquois.
- Vous n'avez vous-même pas très bonne mine, mon garçon. Vous avez le teint verdâtre si je ne m'abuse…
- Je sais, soupira lugubrement Ron. Normalement cela devait disparaître il y a trois jours mais…
Il haussa les épaules. Quelle importance qu'il eût le teint vert. Il eut volontiers gardé cette couleur toute l'année si cela avait pu ramener Hermione.
- Retournez auprès de vos amis, conseilla Sir Nicholas. Ils ont besoin de vous.
Ron soupira.
- Qui a besoin de quelqu'un comme moi ?
Nick sourit encore une fois.
- N'oubliez pas ce que vous a dit Dumbledore. Il dit parfois de drôles de choses, mais il ne parle jamais pour ne rien dire.
Le fantôme passa au travers de la table et disparut par le plancher.
Ron décida de remonter à l'infirmerie. Il en avait assez d'être seul et la conversation des fantômes ne lui apportait aucune consolation. Ginny tenait les deux mains d'Hermione et Harry avait pris sa place à la fenêtre.
- Je suis désolé, dit Ron.
Harry lui fit signe que ce n'était rien. Ron s'assit au chevet d'Hermione et prit sa main glacée dans les siennes. Les couvertures ne la réchauffaient plus. Son visage blême paraissait exsangue.
- J'ai vu un Centaure dans la forêt interdite, commença-t-il à voix basse.
Harry se rapprocha et Ginny tendit l'oreille.
- Il a dit qu'elle allait mourir.
- Non, assura Harry. Ils sont en train de chercher un moyen.
Il essayait de se convaincre lui-même. Ron ne l'écoutait pas :
- Elle va s'éteindre si nous ne faisons rien.
Ginny toussota, comme pour s'empêcher de prendre la parole. Harry leva les yeux vers elle, avec un peu d'espoir. Il l'encouragea du regard.
- Hermione… c'est un peu idiot ce que je vais dire… mais c'est une idée que j'ai dans la tête depuis que je l'ai vue comme ça, étendue là…
- Quoi ? la pressa son frère.
- Hé bien, elle me racontait souvent des histoires de moldus… des comptes défaits, elle appelle cela.
Ron tourna la tête vers Harry :
- Tu connais ?
Harry acquiesça tout en réfléchissant.
- Des Contes de Fées, corrigea-t-il machinalement. Tu penses à la Belle au Bois Dormant ?
Ron reporta son attention sur Hermione. Qu'est-ce qu'il racontait ?
- Je crois… c'est l'histoire d'une princesse ensorcelée qui dort pendant cent ans…
- Hermione ne tiendra pas cent ans ! s'exclama Ron, angoissé.
- Chut ! fit impérativement Ginny. Tais-toi, j'essaie de me souvenir…
- Et qui est réveillée de son sommeil de sortilège par le baiser d'un prince ! termina Harry.
Ron lâcha la main d'Hermione et se leva d'un bond.
- Quoi ? s'écria-t-il. Mais c'est stupide !
- Je sais, grimaça Ginny. Mais, rappelez vous ce que Dumbledore a dit : beaucoup d'amour…
- Mais c'est stupide ! répéta Ron.
- On ne risque rien à essayer, dit Harry.
- Mais ce ne sont que des histoires de moldus ! Cela n'a aucun sens ! se récria Ron une fois de plus.
- JE-SAIS ! lui cria Ginny. Mais moi au moins j'essaie de chercher quelque chose !
- Très bien ! fit Ron. Embrasse-la la première, ensuite toi Harry ! Et puis appelons Charlie, Bill et les jumeaux ! Et n'oublions pas Neville tant qu'on y est ! Heureusement qu'elle n'a pas beaucoup d'amis ! On aura vite fait le tour de la question. Mais on l'embrasse tous en même temps, ou l'un après l'autre? Sur la joue ? au milieu du front ? C'est précisé, dans ton histoire débile de moldus débiles ?
- En fait… commença Ginny.
Elle regarda Harry et son frère, avec appréhension.
- Je pensais à un vrai baiser d'amour…
Harry fixait Ginny avec stupeur. Ron ne respirait plus. Un étau enserrait sa gorge.
- Tu veux faire venir…?
Harry lança un regard inquiet à Ron et ne termina pas sa phrase.
- Non ! s'écria Ron.
Il était tellement pâle qu'il ne paraissait presque plus vert.
- De toutes façons, qui te dit qu'il viendrait ? lança-t-il avec désespoir.
- Pour elle, il viendra, assura Ginny.
Ron leur tourna le dos.
- C'est ridicule ! C'est ridicule !
Il s'éloigna, haussant les épaules, et il sembla à Harry qu'il pleurait. Ginny observait son frère, un peu de crainte au fond des yeux. Harry contempla un moment Hermione inconsciente. C'était une idée digne de Luna Lovegood. Dans d'autres circonstances, il aurait éclaté de rire. Mais il s'agissait d'Hermione, et il ne se sentait pas le droit de négliger une seule éventualité. Il se tourna à nouveau vers Ginny. Il n'aurait jamais cru que cette idée viendrait d'elle.
- Tu es sûre ? demanda-t-il en confirmation.
Ginny hocha la tête tristement :
- Oui, Harry, je crains que nous n'ayons d'autre alternative que d'appeler Viktor Krum…
