Disclaimer : Tout est à JKR, lieux, personnages -sauf certains que vous reconnaîtrez aisément- créatures, etc... je ne tire aucun bénéfice de cette histoire, si ce n'est celui du plaisir que je prends à écrire et faire partager ce que j'écris... Bonne lecture.


Chapitre 17

Une visite à Ste Mangouste

et un Professeur de Défense contre les Forces du Mal.

Les quelques jours qui précédèrent la rentrée passèrent au rythme des nouvelles d'Hermione. Inutile de dire que le moral de Ron suivit les mêmes courbes que la santé de la jeune fille. Autant son état s'améliorait la veille, autant le lendemain elle risquait de sombrer dans le coma. Plusieurs médicomages se tenaient constamment à son chevet, eux-mêmes entourés d'aurors de l'Ordre du Phénix.

Bill se chargeait de donner des nouvelles deux fois par jour, sous peine de se voir attaqué par des dizaines de hiboux. Ron passait son temps à scruter le ciel dans l'espoir d'être le premier à apercevoir les volatiles.

Harry était plus libre de son temps. Il avait fait part de son "rêve" au professeur Rogue et celui-ci avait admis que des renseignements concomitants laissaient en effet présager une évasion imminente. Depuis, il quittait souvent l'école pour de mystérieuses missions. Les leçons s'espaçaient et Harry essayait de passer le plus de temps possible avec Ron. Ce n'était pas facile, lorsque les nouvelles n'étaient pas bonnes. Ron disparaissait pendant de longues heures, jusqu'au courrier suivant. Il avait souvent les yeux rouges et seule la contemplation du jeu d'échec semblait le sortir de ses sombres pensées. Harry remarqua toutefois que son ami avait distraitement glissé la Reine Blanche dans sa poche et qu'il ne l'avait pas remise à sa place la fois suivante. Il s'en inquiéta auprès de Ginny, lors de l'une de ses absences prolongées.

- Dans le placard à balais des vestiaires de Gryffondor.

- Pardon ? fit Harry.

- Tu me demandes où est Ron, je te réponds : dans le placard à balais des vestiaires de Gryffondor ! répéta Ginny.

- Tu l'y as vu ? s'étonna Harry.

- Pas moi, non. J'ai croisé Nick-Quasi-Sans-Tête l'autre jour. Il sortait d'une conversation avec mon frère, dans le placard…

- des vestiaires de Gryffondor ! termina Harry.

Il fallait qu'il trouve Ron. La dernière fois que lui aussi avait eu une conversation avec Sir Nicholas de Mimsy-Porpington, c'était après la mort de Sirius. Il était dans un état proche de l'incohérence à ce moment-là et il craignit qu'il n'en soit de même pour Ron. Il descendit aux vestiaires et ouvrit tous les placards à balais. Il le trouva, sur le banc des vestiaires, le dos tourné à la porte. Il fut sur le point de l'interpeller lorsqu'il s'aperçut qu'il pleurait. Par terre, traînait le dernier message de Bill. "Pas d'amélioration" disait la lettre. Harry renonça à le déranger. Il n'aimerait que son meilleur ami le vît dans cet état. Il ne voulait pas obliger Ron à se mettre en colère après lui. Il revint vers l'école, abattu lui aussi et il croisa Hagrid. Celui-ci le serra contre lui, à la grande surprise de Harry.

- Hum Hum ! fit le géant. Je viens de l'hôpital. Ils ne m'ont pas laissé voir Hermione.

Une grosse larme coula sur la joue barbue du garde chasse. Harry resta un moment avec lui, sans parler, assis sur la chaise dure de sa cabane. Ils se souhaitèrent le bonsoir sans conviction. Ron passa la soirée et la nuit dans le fauteuil devant la cheminée de la salle commune de Gryffondor. Au matin, il sortit la Dame blanche de sa poche et la rangea dans la boite, aux côtés de la Reine Noire. Harry arrêta sa main.

- Nous non plus nous n'avons plus de Reine, dit Ron.

- Non, Ron ! se mit en colère Harry. Nous n'avons pas perdu Hermione encore. Comment peux-tu te résigner ainsi ? Surtout toi ! ajouta-t-il à voix basse.

- Parce que c'est à cause de moi qu'elle est là où elle est ! répondit Ron entre ses dents. Deux fois ! depuis que nous sommes arrivés à Poudlard ! Deux fois, j'ai failli la perdre. Une fois à cause de sa stupidité, une deuxième fois à cause de la mienne. Et… parce que j'ai fait passer mes intérêts avant les nôtres.

- Ce n'étaient pas tes intérêts, c'étaient ceux de Percy.

- Mais je l'ai presque obligée à nous aider…

- Elle est venue de son plein gré.

- Elle voulait que nous allions parler à McGonagall et je n'ai pas voulu !

- Je ne vais pas te faire de reproche à ce sujet, dit Harry sur un ton amer.

Il prit la pièce blanche dans la boite et la remis sur la table, à côté du Roi.

- Et si, quand elle reviendra, elle m'en voulait tellement qu'elle ne voulait plus ni me regarder, ni me parler, reprit Ron à voix basse.

- Elle n'avait pas l'air de t'en vouloir, la dernière fois que je vous ai laissé ensemble, rappela Harry en essayant de sourire. Et puis, qu'est-ce que tu aurais de si important à lui dire ? Lorsque tu t'adresses à elle, tu ne dis que des bêtises, quand ce ne sont pas des méchancetés.

Ron baissa la tête.

- Je sais.

Quelques jours plus tard, Hermione allait mieux. Remus vint chercher Neville, Ron et Ginny pour se rendre à l'hôpital. Le premier pour rendre visite sa grand-mère et à ses parents, le deuxième parce que son frère Percy le réclamait et la troisième parce qu'elle n'entendait pas rester derrière. Harry n'eut pas l'autorisation de sortir de l'école.

Ron faillit refuser d'aller voir Percy. Puis il réfléchit et se dit qu'il pourrait peut-être passer voir Hermione. Il se rendit dans les serres du Professeur Chourave, et avec l'aide de Neville, il choisit des fleurs pour faire un bouquet. Il coiffa ses cheveux avec application et sortit sa robe de sorcier neuve. Il demanda à Ginny de prendre les livres d'Hermione avec elle car Bill dans l'un de ses messages leur faisait part des inquiétudes de la jeune fille quant au début de l'année scolaire. Il suivit Remus Lupin avec impatience et se retint de lui demander de l'emmener sans tarder auprès d'Hermione. Il alla d'abord voir Percy, auprès duquel il trouva sa mère. Il bafouilla une vague excuse sur le destinataire des fleurs qu'il avait à la main. Percy ne le laissa pas s'appesantir sur la question. Il le serra contre lui plusieurs fois, le regard un peu hagard. Puis il le fit s'asseoir près de lui sur le lit et appela également Ginny.

- Merci ! Merci ! Merci ! leur dit-il solennellement en leur serrant les mains. Vous m'avez sauvé la vie. Vous ne m'avez pas laissé tomber, vous au moins.

Ron lança un regard inquiet vers leur mère. Il savait que ni Bill, ni les jumeaux n'étaient venus le voir. Leur père lui avait rendu visite, une seule fois, puis n'était pas revenu.

- Je t'avais averti, Ron. Il ne fallait pas te lier avec ce Potter. Il n'apporte que des ennuis. Vous êtes en danger tous les deux, à cause de lui.

Ron regarda à nouveau sa mère. Elle secoua la tête, d'un air navré.

- Il est venu te chercher aussi, Percy, l'interrompit Ron d'une voix un peu tremblante. C'est grâce à Hermione et Harry que nous t'avons retrouvé…

- Ha oui ! Hermione Granger ! fit Percy en pinçant les lèvres. Elle est ici, on m'a dit. Tu vois où mène l'amitié avec Harry Potter, Ron ! au cimetière !

Ron eut un soubresaut qui surprit Percy et Ginny. Percy se méprit.

- Je te ferai grâce de ce que j'ai subi, Ron, mais crois-moi, il faut que tu renonces à ton amitié pour ce garçon… car Celui-Dont-On-Ne-Prononce-Pas-Le-Nom veut le tuer et peu lui importe que ceux qui sont proches de lui meurent aussi.

- Ha ! fit Ron, la bouche tordue en un rictus amer. Tu admets donc que Tu-Sais-Qui est de retour.

- Je l'ai vu, Ron ! J'ai vu l'ombre de Tu-Sais-Qui dans les yeux de ce type, de ce Pettigrew…

Percy se mit à frissonner, puis à trembler. Ron vit, alors qu'il se mettait à sourire d'un air dément, qu'il lui manquait trois dents sur le devant de la bouche. Il réalisa qu'il ne portait pas ses lunettes. Mrs Weasley donna à son fils une potion pour le calmer et le remit au lit.

- Il ne faut pas que tu retournes auprès de ce Potter, Ron, dit Percy en saisissant la main de son frère. Ou bien la prochaine fois, c'est toi qu'ils viendront chercher…

- Ne fais pas attention à ce qu'il dit, lui chuchota Molly. Il n'est pas tout à fait lui-même.

Ron n'osa parler à sa mère de la lettre qu'il avait reçue l'année précédente.

- Il t'a réclamé depuis qu'il s'est réveillé, continua sa mère. Il s'inquiète beaucoup pour toi et Ginny.

Percy s'endormait sous l'effet de la potion. Ginny resta auprès de lui, sa main dans la sienne. Mrs Weasley caressait le visage de son dernier fils. Elle ne lui trouvait pas bonne mine.

- Personne ne s'inquiète donc de vous, là-bas ? demanda-t-elle.

Ron lui échappa. Il prit les livres et les fleurs et balbutia qu'il allait essayer de voir Hermione. Lorsqu'il referma le rideau de séparation sur sa mère, il se dit qu'il aurait préféré ne pas venir. Puis, il pensa à Hermione et se perdit dans les couloirs. Il arriva devant la porte de la chambre de son amie par hasard. Il frappa et Tonks vint lui ouvrir.

- Bill n'est pas là ? demanda-t-il sans chercher à cacher sa déception.

- Il faudra te contenter de ma présence, répondit Tonks à peine vexée.

Elle le laissa passer. La première chose qu'il vit en entrant dans la chambre, fut la profusion de fleurs de toutes sortes qui encombraient la pièce. Et Hermione dans un fauteuil, vêtue d'une chemise blanche, ses longs cheveux bruns qui tombaient sur ses épaules comme une tache noire et la rendaient encore plus pâle. Elle lui sourit. Ensuite, il vit le courrier sur la table de chevet, et sur le lit et sur la table où les vases se serraient les uns contre les autres. Il regarda le bouquet simple qu'il avait apporté. Tonks le lui prit des mains.

- Regarde, Hermione ! Encore des fleurs ! Tu n'en as pas eu des comme ça ! Il ne doit pas y en avoir en Bulgarie. Je vais chercher un vase.

Elle appela quelqu'un dans le couloir et Ron sentit dans son dos une présence juste avant que Tonks ne referme la porte sur elle.

- Tu as droit à une chambre pour toi toute seule ?

Il se sentit mal à l'aise, au milieu de cette pièce fleurie.

- Ils ont insisté. Pour la sécurité. Ils ouvrent tous les courriers. Analysent toutes les potions. Merci pour les fleurs.

- Ho ! C'est… c'est de la part de Harry, mentit-il.

- Ha !… c'est gentil de sa part.

Sa voix était lente. Elle ne bougeait pas. Son sourire s'était éteint.

- Je t'ai porté tes livres. Bill nous a dit que tu t'ennuyais, alors j'ai pensé qu'un peu de lecture te ferais plaisir… bien sûr j'ignorais que tu en avais autant.

Il essaya de sourire.

- Tout le monde a écrit.

- Qui ? Tout le monde ?

- Neville l'a dit à Luna. Elle m'a envoyé une carte de rétablissement avec des runes sensées porter bonheur. Ginny l'a dit à Dean, qui l'a dit à Seamus, qui l'a dit à Parvati, qui l'a dit à Lavande, qui l'a dit… bref je crois que toute la classe le sait, sans compter les Serdaigle et les Poufsouffle. Tous les membre de l'AD, aussi.

Ron émit un sifflement admiratif.

- Tu n'imaginais pas avoir tant d'amis, Hermione…

Il se traita d'idiot au moment même où il terminait sa phrase.

- Non ! répondit Hermione avec un petit sourire. Je ne sais pas ce qu'on leur a raconté, ils croient que c'est moi qui ai lancé ce sortilège de bloque-jambe et que c'est ce qui a causé sa mort…

Elle n'avait pas prononcé le nom de Bellatrix Lestrange. Elle voulut se lever et n'y parvint qu'avec difficulté. Elle s'approcha lentement, traînant les pieds, au pied du lit où Ron avait déposé ses livres.

- C'est gentil, dit-elle. Je ne voudrais pas prendre trop de retard dans mes études.

Le parfum des fleurs incommodait Ron. Il raclait sa gorge sans arriver à tousser vraiment.

- Tu as l'air d'aller mieux, dit-il enfin.

- Oui, répondit Hermione. C'est un peu agaçant de mettre deux heures pour faire un pas ou un geste, ou pour dire quelque chose qui ne devrait prendre que quelques secondes. Mais je ne peux pas me plaindre, n'est-ce pas… puisque je suis là pour le raconter.

Elle tentait vainement de ramasser les lettres sur les couvertures pour faire une place où ils pourraient s'asseoir tous les deux.

Ron l'aida en deux gestes rapides.

- C'est Tonks, expliqua Hermione. Elle a renversé le tiroir où je les mets.

D'un coup d'œil, Ron reconnut l'écriture de Viktor Krum sur la quinzaine d'enveloppes qu'il tenait à la main. Il les posa vivement sur la table de nuit. Il avait envie de fuir. Elle lui fit signe de s'asseoir. Il obéit.

- Tu as beaucoup de visites ? demanda-t-il.

Elle secoua la tête lentement.

- Mes parents viennent me voir. Ils sont un peu effrayés. Surtout quand ils ont vu Maugrey. L'un des gardiens n'a pas voulu laisser entrer Hagrid. Il a peut-être eu peur qu'il ne cache un mangemort dans son manteau…

Elle se mit à rire, tristement.

- Heureusement, Tonks reste avec moi quand elle est en service. Et Bill, un peu, aussi. Mais je préfère Tonks. Elle est bavarde et rigolote, même si elle est très maladroite. Mais là aussi, je n'ai pas le droit de me plaindre.

Elle regarda ses mains d'un air désolé.

- Et… hum… Viktor Krum ? Il n'est pas venu ? demanda très vite Ron.

- Il voulait venir, quand il a su que j'avais été blessé par… elle. Il n'avait pas de réponse à ses courriers alors il a demandé à Charlie s'il avait de mes nouvelles et Charlie lui a tout dit.

- Mais, il n'est pas venu ? insista Ron, sur un ton qu'il espérait indifférent.

- Je lui ai demandé de ne pas venir.

- Et il a obéi ? Moi, je serais venu quand même. Enfin, je veux dire… si j'avais été à sa place…

- Oui, dit Hermione avec un petit rire. Mais toi, tu n'écoutes jamais ce que je dis…

La porte s'ouvrit sur Tonks et le vase, offrant ainsi à Ron l'occasion d'échapper au regard d'Hermione. La jeune femme manqua renverser la série des pots lorsqu'elle déposa celui qu'elle amenait sur la table. Elle tendit une enveloppe à Hermione.

- Encore une lettre de Bulgarie, dit-elle avec un clin d'œil.

Hermione glissa la lettre dans un tiroir.

- Tu ne la lis pas ? s'étonna Ron.

- Tu sais, dit-elle, une fois qu'une quinzaine de personnes ont mis le nez dans ta correspondance privée, elle perd un peu de son charme…

- Et puis, il dit toujours la même chose ! intervint Tonks qui arrangeait les fleurs de Ron dans le vase.

Hermione leva les yeux au ciel et fit un geste de la main qui signifiait : "Tu vois ce que je veux dire !"

- C'est très gentil, c'est un fait, continuait Tonks. Mais il manque un peu de vocabulaire. Remarque, pour dire ce genre de choses, il n'y a pas trente six mots… A moins d'être poète… Mais il n'est que joueur de Quidditch. Remarque, je n'ai rien contre les joueurs de Quidditch. Surtout quand ils sont aussi célèbres et talentueux que Viktor… oups…désolée Hermione !

Tonks ramassa le vase qu'elle venait de faire tomber sur son courrier. Elle le remit d'aplomb et le remplit d'eau à nouveau d'un coup de baguette. Elle sécha les lettres de la même manière. Ron ouvrait des yeux effarés tandis qu'Hermione répondait avec patience : "Ce n'est pas grave, Tonks."

- Tu as vu Percy ? demanda Hermione. Il va bien ?

Ron haussa les épaules. Il n'avait pas envie de parler de Percy. Il avait rêvé de cette après-midi depuis qu'il savait qu'il devait se rendre à Ste Mangouste. Et cela ne se passait absolument pas comme il l'avait imaginé. Il voulait lui parler de tant de choses, et rien ne venait à son esprit. Tonks qui s'agitait derrière lui le gênait au possible.

- Comment va Pattenrond ? demanda encore Hermione.

- Il s'ennuie de toi, dit Ron. On s'ennuie tous de toi. Mais celui qui s'ennuie le plus, c'est Rusard… Depuis qu'il ne colle plus à tes basques, il erre dans les couloirs et même Peeves fait ce qu'il veut.

- Demain, il m'aura oubliée, soupira Hermione.

Le lendemain, c'était la rentrée. Une rentrée sans elle, songea Ron. Quelque chose d'impensable. Quelque chose d'impossible.

- Tu rentres quand ?

Il s'était juré de ne pas poser cette question.

- Je ne sais pas…

Il se leva comme pour quitter la pièce. Il ne supportait plus cette atmosphère chargée d'exhalaisons sucrées. Elles lui donnaient la nausée. Il sentit dans son dos le dos de Tonks.

- Désolé ! firent-ils en même temps.

Ron se tourna vers la jeune métamorphomage. Il avait l'air au bord des larmes. Et elle douta que ce fût à cause de sa maladresse. On frappa à la porte. Tonks dut aller ouvrir. Ginny la bouscula pour courir à Hermione la serrer dans ses bras. Neville regardait la fille aux cheveux rouges la bouche ouverte. Il se rendit compte que ce n'était pas très poli et lui fit un sourire :

- Bonjour, dit-il. Je suis Neville Londubat.

- Tonks, dit Tonks. Je sais qui tu es. J'ai accompagné ta grand-mère le jour où Bellatrix Lestrange l'a blessée.

Neville s'avança lui aussi vers Hermione. Il la serra contre lui sans un mot. Il s'assit à côté d'elle et lui prit une main tandis que Ginny tenait l'autre.

- Tu vas bien, Hermione ? demanda Neville doucement. Nous avons eu très peur pour toi. Et cet imbécile de Ron qui culpabilisait… Tu as vu les jolies fleurs qu'il t'a apportées. Je l'ai aidé à les choisir, mais c'est uniquement parce qu'il est nul en botanique. Il aurait été capable de t'amener un Filet du Diable ! Ce sont là de bien belles fleurs, Hermione, ajouta-t-il en désignant du geste les bouquets de Krum. Peu communes dans notre pays…

- Elles viennent de Bulgarie, dit Tonks en riant.

Elle se tourna vers la porte quand elle l'entendit claquer. Ron n'était plus là.

- Qu'est-ce que j'ai dit ? s'étonna Tonks.

- Ce n'est pas grave, Tonks… dit Hermione d'une voix lasse, par habitude.

- Alors ? demanda Harry.

- Hermione va bien, répondit Neville.

- Et ta mère ? Elle a aimé les roses ?

Harry interrogeait Neville des yeux. Il montrait Ron du menton, qui avait ouvert la vitre de la salle commune, et se penchait à la fenêtre, comme s'il manquait d'air.

- Ma mère a a-do-ré ! fit Neville, les yeux au ciel, et les mains serrées autour du cou virtuel de Ron.

- Et Percy ?

Harry se tourna vers Ginny, l'air effaré.

- Oh tu sais… Percy… c'est Percy…

Ginny fit une grimace. Elle se prit la tête à deux mains et fit mine de s'arracher les cheveux.

- Mais qu'est-ce qui c'est passé, bon sang ! jura Harry à voix basse.

- Rien ! fit Ginny sur le même ton.

- Mais il ne devait pas aller voir Hermione et lui parler ?

Ginny éclata de rire.

- C'est de mon frère dont tu parles, là !

- De toutes façons, quoi que Harry ait pu dire sur Percy, c'est sûrement vrai !

Ron paraissait respirer plus sereinement.

- C'est l'odeur des hôpitaux qui te dérange ? demanda Harry, un peu interloqué.

- Non, c'est l'odeur des fleurs bulgares… chuchota Ginny à l'oreille de Harry.

Quand ils furent montés dans leur dortoir et qu'il entendit le bruit caractéristique du sommeil de Neville, Harry appela Ron à voix basse.

- Pourquoi tu te conduis toujours comme un imbécile ?

- Parce que j'en suis un, grogna Ron. Fiche-moi la paix, Harry. Je suis en train d'établir un plan infaillible pour éliminer de la planète tous les attrapeurs géniaux et talentueux.

- Attends au moins que nous ayons gagné la coupe, riposta Harry.

Il se tourna, mais avant d'avoir posé la tête sur l'oreiller, Ron était à côté de lui.

- Elle ne lit même pas ses lettres, Harry ! Et elle n'a pas voulu qu'il vienne la voir, alors qu'elle était à l'article de la mort ! Elle ne répond pas à ses courriers non plus. Elle prétend que c'est parce qu'elle n'est pas encore capable de tenir une plume correctement, mais ce n'est pas vrai. J'en suis sûr !

- Pourtant, elle a ses fleurs partout dans sa chambre… murmura Harry qui se redressa. Ecoute-moi bien, Ron. Hermione vient à peine de réaliser qu'elle a échappé à la mort. Et cette mort, elle l'a frôlée, non pas pour moi cette fois, mais pour toi. Et toi, tu n'es même pas capable de lui dire merci de t'avoir aidé. Alors qu'est-ce que ça peut te faire qu'il lui envoie des fleurs, des lettres, ou qu'il vienne en personne lui dire qu'elle doit vivre parce qu'il l'aime. Puisque toi, de toutes façons, tu n'es pas fichu d'en faire autant.

- Bien dit, Harry ! fit Neville depuis son lit.

- Vous n'êtes vraiment pas bien tous les deux ! grommela Ron.

Il retourna sous ses draps.

- En tout cas, soupira Neville, lorsqu'elle reviendra, tu as intérêt à te montrer à la hauteur, Ron. Car il lui faudra un certain temps avant de revenir comme avant. Elle aura besoin de nous, tous, contre ceux qui se réjouiront de voir Hermione Granger, affaiblie et diminuée.

- Je n'ai pas l'intention de la laisser tomber ! s'insurgea Ron.

Il revoyait les gestes gauches et maladroits d'Hermione. Ses pas traînants. Il entendait encore sa voix lente. Et dans son regard quelque chose qui se perdait. Il ne l'avait pas reconnue.

- Vous savez, reprit Neville au bout d'un moment de silence. J'ai pensé à une chose. Quand Pettigrew a lancé son Avada, qu'est-ce que vous faisiez ?

- Ben… fit Ron en réfléchissant. Moi j'étais occupé avec les deux guignols du palier. J'ai rien vu, en fait.

- Je regardais la baguette de Queudver, se souvint Harry. Je n'arrivais pas à me persuader que ce n'était pas sur moi qu'il la levait.

- Ginny a fermé les yeux, annonça Neville. Et elle s'est caché le visage contre mon épaule. Et moi, j'ai fait comme Harry : je ne pouvais pas croire que c'était contre Bellatrix Lestrange qu'il se retournait.

Ron se redressa vivement dans son lit.

- Et Hermione ? demanda-t-il.

- Hermione ? reprit lentement Neville. Elle avait son visage juste en face de celui de cette femme quand je l'ai ramassée. Elle l'a eu tout le temps sous les yeux : quand elle a crié l'Avada contre Harry, quand elle a compris qu'elle allait mourir. Et quand elle est…

Ron l'interrompit d'un juron.

- Je crois, dit Harry qu'elle va avoir besoin de nous plus que tu ne le pensais, Neville.

Le lendemain matin, l'attente commença. L'école avait repris un air familier. Les professeurs commencèrent à affluer dans le courant de la matinée. Mr Rusard se fit un plaisir d'informer les jeunes gens qu'ils devaient se montrer discrets. Eux-mêmes n'avaient aucune envie de se faire remarquer avant le début officiel de l'année scolaire. Ils restèrent dans la salle commune de Gryffondor. Ginny passa pratiquement la journée à changer de dortoir. Elle avait toujours oublié quelque chose.

- Vous croyez que tout le monde sera là ? soupira Neville.

- Tout le monde ne sera pas là, lui répondit Ron sèchement.

- J'espère qu'il n'arrivera rien au Poudlard Express…

Harry avait encore en tête l'intrusion des Détraqueurs dans le train, le Premier septembre de sa rentrée en troisième année.

Il ne se passa rien de notable dans le Poudlard Express. Dumbledore avait largement fait savoir que Harry Potter ne prendrait pas le train, cette année-là, pour rassurer les parents inquiets d'une éventuelle attaque. Pour informer les mangemorts qu'ils n'avaient aucun intérêt à faire courir à leurs enfants un danger inutile.

Harry, Ron, Neville et Ginny furent conduits par Rusard dans la Grande Salle à la nuit tombante. Comme à la potence, grinça Ron dans le dos du concierge. Les Professeurs n'étaient pas encore descendus. Les jeunes gens prirent place à la table des Sixièmes Années de Gryffondor. Ginny se plaça un peu plus loin, vers l'endroit où devaient s'asseoir les Cinquièmes Années. Ron laissa une place vide entre lui et Harry.

- Rapproche-toi, le pria celui-ci.

- C'est la place d'Hermione, dit Ron. Entre nous, personne ne pourra la lui prendre.

- Ron, c'est ridicule…

- C'est ce que Dumbledore a dit : vous garderez la place d'Hermione aussi longtemps que nécessaire…

Harry renonça à lui faire comprendre que le Directeur parlait dans un sens figuré. Neville l'approuva d'un signe de la tête. Enfin, les élèves entrèrent dans un murmure. Les Gryffondor serrèrent tous la main de Harry, Ron et Neville. Certains de leurs plus proches camarades glissèrent quelques "Salut Harry, désolé pour Hermione". Ron était à la torture. Il manqua exploser quand Dean Thomas lui demanda de se pousser pour qu'il puisse prendre place entre lui et Seamus Finnigan.

- La place est prise ! gronda-t-il sourdement.

- Tu rigoles ! Elle est vide. Allez, Ron, pousse toi ! S'il-te-plaît-merci !

- C'est la place d'Hermione !

Harry fit un geste discret à Dean et Ginny agitait les mains, chacun pour faire signe à Dean de laisser tomber. Celui-ci siffla d'agacement.

- Sacré Hermione ! Même quand elle n'est pas là elle fait…

Il n'eut pas le temps de terminer sa phrase. Ron s'était levé. Il dépassait d'une tête son camarade. Harry le retint par la manche de sa robe de sorcier. Il désigna d'un signe de tête, les autres tables qui les regardaient. Ron se rassit. On ne lui demanda plus de se décaler et si quelqu'un en avait eu l'intention, les regards furibonds que lançaient ses yeux bleus l'en auraient dissuadé sur-le-champ.

Les membres de l'AD des autres Maisons vinrent saluer Harry. Les "Désolé pour Hermione" reprirent un moment. Luna Lovegood leur fit un grand signe de la main depuis sa place à la table de Serdaigle. Harry lui répondit avec un grand sourire. Neville lui rendit son coucou de la main. Ron ne s'aperçut même pas de sa présence. Cho Chang passa près de la table des Gryffondor. Elle parut hésiter puis revint sur ses pas. Elle évita le regard d'Harry tandis qu'elle lui disait qu'elle était désolée pour Hermione. Il jeta un œil à la table des Serdaigle, où Marietta se faisait discrète, son visage à présent dépourvu de ces infamants furoncles. Il fut sur le point de répondre à Cho qu'elle mentait. Cependant, il hocha la tête, comme pour la remercier, afin de ne pas forcer Ron à quelque éclat inutile. Harry constata avec plaisir que cela ne lui fit ni chaud ni froid lorsqu'elle s'assit près d'un garçon de sa classe qui l'embrassa discrètement.

- Elle n'est plus avec Michael Corner ? s'étonna Neville.

Dean Thomas, qui avait fini par trouver une place deux personnes plus loin, éclata de rire.

- Vous ne savez donc pas ?

Ron renifla férocement et Dean renonça à faire durer le suspens.

- Il lui a envoyé une boite de bonbon, vers le milieu de l'été. Elle en a mangé la moitié avant de se rendre compte qu'ils l'avaient fait devenir de toutes les couleurs ! Elle est restée quinze jours sans sortir de chez elle !

Ron, Harry et Neville levèrent la tête en même temps.

- Elle lui a envoyé une Beuglante comme lettre de rupture. Il jure ses grands dieux qu'il n'a rien envoyé, elle ne veut rien savoir.

- Elle s'est vite consolée, estima Ron, le sourire retrouvé.

- C'est une attrapeuse ! fit Seamus Finnigan. La plus rapide, après Harry !

Neville cacha son visage dans ses mains pour éclater de rire. Harry se mordit les lèvres et même Ron apprécia la plaisanterie de Seamus.

Harry remarqua que cette année-là les conversations étaient moins vives et moins bruyantes que les années précédentes. Il chercha plusieurs visages qu'il ne trouva pas. Les tables étaient parsemées de places vides, comme celle d'Hermione à sa gauche. Il se tourna imperceptiblement vers la table de Serpentard. Là aussi, des élèves manquaient. Mais pas autant qu'il l'aurait cru. Ou espéré. Malefoy était là, lui. Il sentit son regard se planter dans le sien, frémissant de haine. Harry ne put s'empêcher de sourire. Si Crabbe et Goyle formaient toujours sa garde prétorienne, les rangs de ses fidèles semblaient s'être faits moins importants.

- Je ne vois pas Pansy Parkinson, chuchota Harry à Ron.

- Tu ne sais pas ? recommença Dean Thomas.

- S'il nous dit que les jumeaux ont envoyé une boite de Dragées Arc-en-Ciel à Parkinson, je l'étrangle, murmura Ron entre ses dents.

- Elle est morte !

- Quoi ? s'étrangla Ron.

- Cet été, reprit Dean. Vers la mi-juillet, au Chemin de Traverse.

- Lors de l'attaque des Détraqueurs ? demanda Neville soudain pâle comme un linge.

- Non, lors de l'arrestation de Mangemorts. Vous n'avez pas lu la Gazette ? Il y a eu une bonne dizaine de morts et autant de blessés…

Le silence qui suivit fut glacial. Harry se souvint des paroles de Bill au Chaudron, lorsque Ron avait émis des doutes sur l'utilité de protéger les Serpentard de Voldemort.

Les professeurs commencèrent à arriver à leur table. Bientôt il ne manqua que le Professeur Dumbledore et Hagrid, ainsi, à en juger par la place inoccupée à la droite de Rogue, qu'une autre personne. Neville nota toutefois l'absence de Firenze.

- Il ne faut pas faire peur aux nouveaux ! plaisanta Seamus.

Mais sa plaisanterie tomba à plat. Le brouhaha léger s'agitait un peu. On attendait les premières années, balancés entre la gravité de la situation du monde extérieur et l'excitation d'une nouvelle année. Soudain, Neville pâlit. Il tourna la tête vers Harry, en face de lui, comme pour se cacher des nouveaux arrivants. En compagnie du Directeur, venait un homme assez cocasse. Il était plutôt rondouillard, un peu chauve sous un chapeau aplati comme une galette, dans une robe de sorcier bicolore, très très démodée, même chez les sorciers, comme le fit remarquer Seamus qui avait eu un arrière grand père qui avait porté la pareille. Il y eut quelques rires. Neville rougit violement.

- Hé Ho ! Neville !

Neville fit une grimace douloureuse. Il se recomposa un visage pour se tourner vers l'homme qui arrivait tout sourire vers leur table. Le jeune Londubat se leva :

- Bonjour, Oncle Algie.

Harry eut l'impression de l'entendre déglutir depuis sa place.

- Tiens, Neville ! J'ai retrouvé Trevor ! Dans mes chaussettes !

Et l'Oncle Algie plongea sa main dans une poche de sa large robe. Il en sortit un crapaud qui sauta aussitôt sur la table et de la table sous la table, semant le trouble chez les filles de Gryffondor, avant d'aller briser l'harmonie des Poufsouffle.

- Merci, Oncle Algie, se crut obligé de dire Neville.

L'Oncle Algie souriait aux camarades de son petit-neveu. Il avait l'air d'un vieil homme extrêmement avenant.

- Tu ne me présentes pas à tes amis, Neville ?

Il fixait la cicatrice de Harry.

- Heu… mon grand-oncle Algie, dit Neville.

Comme il ne savait quoi rajouter, il se rassit, décomposé. Algie tendit sa main à Harry.

- Harry Potter, je présume ?

Harry serra sa main ferme.

- Oui, Monsieur.

L'oncle de Neville tendit ensuite sa main à Ron.

- Un Weasley si je ne m'abuse…

Ron jeta un regard hagard à Harry et Neville.

- Ronald Bilius Weasley, oui Monsieur, se présenta-t-il abasourdi

- Bilius ! Oui, bien sûr ! s'exclama Algie. Portez-vous seulement son prénom ou lui ressemblez-vous vraiment de caractère ?

- Il parait que je lui ressemble, mais cela ne m'enchante guère, Monsieur.

- Pourquoi ? C'était un joyeux luron à l'époque de nos études. Et un garçon fort sympathique…

- C'est à cause du Sinistros, Monsieur.

Ron frissonna de terreur. Harry ne put s'empêcher de sourire. Comment un garçon aussi superstitieux que lui avait-il pu s'éprendre d'une fille comme Hermione. Il contempla un instant la chaise vide.

- Il a vu le Sinistros et il est mort dans la journée qui a suivi !

- Et alors ? fit Algie. Vous croyez qu'il serait toujours vivant s'il n'avait pas vu le Sinistros ?

Harry tendit l'oreille. Voilà un discours qui plairait à Hermione.

- Et s'il y avait eu de la brume ? Et s'il avait tourné la tête ailleurs à ce moment ? Et s'il avait été aveugle ? Il serait mort quand même, sans avoir vu le Sinistros…

Ron fit une grimace. Harry baissa la tête. Finalement, il n'était pas certain qu'Hermione apprécie ce professeur de… de quoi ? d'ailleurs. Harry tourna la tête vers la table des professeurs. Il fit un rapide calcul.

- Vous êtes notre nouveau professeur de Défenses Contre les Forces du Mal, Monsieur ?

Neville fit une tête de six pieds de long.

- Ce sera mon titre, en effet.

- Pour toute l'année ? demanda Neville.

- A moins que je ne vois un Sinistros avant, c'est ce qui est prévu, se mit à rire Algie Londubat.

Il donna une claque sur le dos de Neville et repartit vers la table des professeurs, toujours riant.

- Oh ! Bon sang ! fit Neville en tapant le front contre la table.

- Pourquoi dis-tu cela ? fit Seamus. Il a l'air plutôt sympathique.

- Ho ! Il l'est ! assura Neville. Il l'est vraiment. Mais franchement, je n'ai pas très envie de l'entendre me demander en plein cours si j'ai bien pris mon médicament contre les coups de froids ou si la fille qui est assise à coté de moi est ma petite amie !

Ron et Harry compatirent. Dean et Seamus hochèrent la tête, avant d'éclater de rire. Puis le silence se fit tandis que les premières années entraient.