2 - Un tas de Naruto
(Naruto)
Après ça je me suis dépêché de rentrer parce que je me sentais pas bien du tout ; rigolez pas, c'était super désagréable. Le pire c'était la sensation brûlante qui me couvait au fond de la gorge et semblait venir directement de mon cœur ; ouais, c'était comme du sang chaud qui menaçait de me sortir par les narines, excusez l'expression mais c'est vraiment pas un truc que je vous recommande. En plus de ça j'avais un sacré mal de tête ; j'étais pas au meilleur de ma forme, quoi.
Rien ne m'attendait pourtant j'ai jamais été autant pressé de revenir à mon chez moi. Notez que j'ai pas eu beaucoup de pot parce que précisément quand je longeais le terrain synthétique un truc brillant a fendu l'air juste au niveau de mon ventre ; comme vous pensez je me suis arrêté net avant de me retourner.
Le type me regardait mais différemment de tout à l'heure. Ses yeux étaient plus vides ; pleins au contraire de sentiments et j'ai pas su définir lesquels tellement j'étais cloué par la surprise. J'ai à peine eu le temps de faire le point sur lui qu'il avait disparu, réapparu à côté de moi et balancé son pied vers ma tempe ; heureusement mes jambes m'ont lâché pile à ce moment et je suis tombé.
Bon, pour bien que vous me preniez pas pour un nul ni rien, faut comprendre que plus grand chose répondait à mes ordres ; ni mes bras ni mes jambes, en tout cas. Avec la vision un cran en dessous de la normale, je me suis secoué ; pas question de rester là. Luttant contre un brouillard douloureux, je me suis relevé et j'ai cherché des yeux le type. Quand je l'ai retrouvé, il bougeait pas. Sur son visage y avait comme un petit sourire qui m'a pas plu du tout, le sourire narquois de quelqu'un satisfait de sa personne. Merde, qu'est-ce que je peux détester ce sourire.
Une sorte de colère a commencé à enfler au cœur du brouillard qu'il y avait dans ma tête. Une colère terrible tellement elle était réelle. Je voyais plus rien sauf ce petit péteux, droit devant moi, avec ces mèches de cheveux tantôt bleus tantôt noires, sa figure de doué. Il avait pas quitté son sourire et s'est élancé vers moi.
J'avais pas beaucoup de choix. J'ai positionné mes mains et réquisitionné toutes mes forces pour la création d'un clone. Créer un clone, c'est à peu près la seule leçon que j'ai retenue. Mais, à la place du clone miteux que j'attendais, une demi-douzaine est apparue… Une demi-douzaine de têtes blondes et étonnées. Prêtes à réceptionner un sale prétentieux.
Le type a marqué une pause en l'air, soudainement pensif. Peut-être qu'il avait prévu ça, en fait, je sais pas, parce qu'il a porté ses mains à ses lèvres et craché une tonnelle de feu qui a brûlé la plupart de mes clones, le freinant de même ; il s'est ensuite réceptionné sans peine. Je me suis attendu à un pincement au cœur mais non, ça me faisait aucun effet de perdre tout un tas de Naruto. C'est là que Sakura-chan a débarqué en courant, suivie de quelques personnes.
Sasuke-kun ! Elle a crié, et le mot s'est insinué dans mon crâne jusqu'à mon cerveau.
Le type lui a lancé un regard que même un clébard crasseux aurait pas mérité et puis il s'est évaporé sur les toits. Je l'aurais bien suivi pour lui faire boulotter ces mots de dégueulasse, surtout que Sakura avait l'air toute triste, mais c'était pas facile, rapport à mes pieds qui disaient en avoir fait assez pour la journée. J'ai baissé les yeux et j'ai vu que le kunai avait déchiré mon T-shirt et comme ça me démangeait pas mal j'ai gratté. Y avait un truc, là, sous la peau, qui…
Sakura-chan, c'est qui, ce guignol ?
Elle évita mon regard. Elle tenait pas la forme, ça crevait les yeux. J'ai pas insisté, ça aurait fait que la mettre plus mal à l'aise et, si vous voulez savoir, je l'aimais bien, moi. Ou du moins je la détestais pas. Elle, par contre, elle me portait pas dans son cœur. Ca se voyait quand elle me parlait, parfois, une inflexion dans la voix, un timbre particulier.
Une impression bizarre m'a extirpé de la torpeur et j'ai pris conscience de tous les yeux rivés sur moi. Ca m'arrivait si souvent que j'avais perdu l'habitude de le remarquer. En apparence c'était comme si personne me connaissait, mais quand je sortais de mes pensées, ils étaient tous là, à me regarder. Il y avait cette femme, là, d'un village lointain, avec la peau si blanche qu'elle en devenait presque translucide, avec comme des vagues dessus qui refluaient autour de son cou, clapotaient sur son poignet et lui léchaient le front quand elle réfléchissait. Les autres j'ai pas pu les voir parce qu'un régiment de question s'est invité ; c'est dingue comme on peut cogiter alors même qu'on croit être en train de faire autre chose.
Bon, la première, vous la devinez ; je suis pas comme ça, normalement, j'ai pas beaucoup de chakra, même pas assez pour invoquer un clone potable. Ca me flotte autour depuis tout petit, cette inaptitude, comme un nuage désastreux. Y a les doués et les autres. J'ai toujours fait parti des seconds. J'ai redoublé. J'ai toujours été qu'un imbécile.
Un gosse seul et même pas assez fort pour s'en sortir à la force de ses mains.
