La dernière fois

(Mizuko)

Le garçon s'affaissa, très lentement, comme s'il s'asseyait de lui-même et au ralenti ; d'abord ses genoux fléchirent, sa taille, puis ce fut au tour de ses épaules de s'incliner sur le côté et enfin de tout son corps de s'écrouler sur le flanc. Sakura porta une main à sa bouche pour étouffer un cri tandis que je me précipitais auprès de Naruto-kun.

Qu'est-ce qu'il a ? Ca ne va pas recommencer ? Il aurait dû rester plus longtemps à l'hôpital !

Pour tout dire il avait la bouche entrouverte et les paupières qui papillonnaient, comme incapable de se poser même dans une telle situation ; les marques sur ses joues frémirent à mon toucher et je retirais aussitôt ma main. Je soulevais discrètement le T-shirt.

Ca n'a pas l'air grave, mentis-je. Il est juste un peu sonné.

Et, me tournant vers Sakura :

Je ne peux pas rester. Sasuke est peut-être en danger et je ferais mieux d'aller voir.

Il est revenu, c'est l'essentiel !

Il n'est pas mort, c'est déjà ça, corrigeais-je, mais il emporte encore des ennuis.

Vous êtes dure avec lui, dit-elle dans un murmure accusateur.

Il ne trouverait pas juste que je sois tendre. Ce qui est arrivé n'était pas sa faute mais il n'y était pas pour rien non plus, Sakura, tu le sais.

Elle serra les dents et rougit.

Pourtant c'est terminé, maintenant ! Il n'y a pas eu beaucoup de blessés, et aucuns morts de notre côté.

Il y aurait pu en avoir.

Elle se tritura la lèvre et repoussa de la main une mèche de cheveux rose aventureuse.

Je ne peux pas rester, Sensei, je vous en prie…

Tu resteras.

Je pense être capable de m'en occuper, proposa une voix.

Nous nous suspendîmes toutes les deux au milieu de notre rapport de force. Je réfléchis un long instant, beaucoup trop long. Mon regard zigzagua entre la bouille de mon protégé qui s'ignorait comme tel, que je n'avais quasiment pas quitté depuis son réveil, depuis que j'avais commis une grave erreur qui avait failli le tuer, et le visage jeune et nouveau d'un garçon recommandé par une ancienne amie et arrivé récemment en même temps que le cirque itinérant.

Pourquoi pas ? dis-je tout haut.

Il sourit avec lenteur, dans un sourire progressif et paresseux.

Je veillerais sur lui, ne vous inquiétez pas. On se connaît déjà un peu.

Je questionnais Sakura d'un autre regard mais ses yeux étaient trop occupés par Sasuke.

Je me relevais et partais dans la direction où le dernier Uchiha s'était enfui.

Pourvu que Naruto-kun se tienne tranquille, pensais-je. J'avais encore en tête l'image du sceau que je lui avais apposé avec précipitation il y avait de cela une semaine et qu'il était impossible de consolider. Il ne devrait pas ressortir de cette manière ; une forte colère pouvait fragiliser les remparts entre l'esprit du garçon et celui du démon, de même qu'une haine brutale pouvait réduire à néant le sceau. Mais je ne pouvais faire autrement : si Sasuke avait des ennuis, je devais m'assurer qu'ils étaient moindres.

La dernière fois aurait pu être évitée.