Auteur : Flojiro La Grande ! #lance un regard noir aux bishou morts de rire#
Titre : Fukushuu no tsubasa. ("Les ailes de la vengeance" Oui ça fait terriblement cliché en français, huhu...)
Genre : Angts. Très très angst même... Death-fic (effective pour certains, détournée pour d'autres... Vous comprendrez plus tard...). Yaoi (mais pas tout de suite...). UA à mort aussi.
Couples : Pour le moment aucun mais vous aurez assez vite du Kou/Doku si tout se passe bien...
Disclamer : Ils vivent dans mes placards, pillent mon frigo, détruisent allégrement les ressorts de mon canapé-lit... Mais même avec tout ça j'ai pas encore réussi à en obtenir l'acte de propriété... ¬¬
Les "quelques" mots jap apparaissants dans le texte (définitions très grossières, ils sonnent bien au milieu c'est tout ce qui compte...) :
Kyoumon : sutra.
Urusai : La ferme ! Tais-toi ! Ta gueule ! (selon le contexte)
Iie : non.
Yamete : Silence ! Tais-toi !
Mate : Attend.
Onii-chan : Grand-frère (mode affectueux).
Haha-ue : Mère.
Onegai : S'il te plait.
Yamero : Assez !
Masaka : Impossible...
Toushin Taishi : Prince des Dieux Guerriers en VF.
Youki : Pouvoirs spirituels. Magie quoi, pour simplifier...
Kekai : Barrière magique.
Dernière chose : Avant de commencer je vous rappelle que les auteuses sadiques sont classées en tant qu'espèce protégée ! #exhibe fièrement le certificat officiel, preuve de ce qu'elle avance... et le lâche avec un kyatement alors qu'il s'enflamme dans sa main# Oo
Kou : #souffle sur son doigt façon western# Niark !
sSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSs
Fukushuu no tsubasa.
Part 1 : Shi / Death.
sSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSsSs
"Kou ?"
Une main se pose sur son épaule. Il tressaille, surpris.
"T'as l'air inquiet. À quoi tu penses ?"
Une voix grave, pleine de sollicitude. Elle résonne étrangement, comme dans un rêve. Tout comme la sienne lorsqu'il répond :
"Cette mission. Il n'y a jamais eu de kyoumon là où elle nous a envoyé. Et les youkai qui nous ont tendu cette embuscade étaient trop bien renseignés..."
"Un piège ? Mais pourquoi ? Ils n'étaient ni assez nombreux ni assez forts pour nous tuer."
"Nous retenir. Nous éloigner."
Il presse le pas dans les couloirs déserts. Sombre pressentiment.
Et soudain elle est là, juste devant eux. Sa tunique claire est tachée de sang. Et elle se précipite vers lui.
"Kougaiji-sama !"
Elle s'effondre à demi dans ses bras, en larmes.
"Gomen ! Gomen nasai, Kougaiji-sama ! Je n'ai rien pu faire... Encore une fois... Pardonnez-moi ! Pardonnez-moi..." (1)
"Yaone !" Sa voix est plus dure qu'il ne le souhaiterait. Parce qu'il sait... Il sait... "Ririn !"
"Il... Il l'a emmené... J'ai essayé de la protéger ! Je..."
Elle tremble contre lui. Il perçoit l'odeur de son sang.
Il la repousse presque violemment. La secoue par les épaules. Il a peur. Trop peur de comprendre. Peur de ce qu'il sait alors qu'il ignore d'où cette connaissance lui vient.
"Où ? Où ?"
"La salle du trône. L'ultime phase de réveil. C'est ce qu'il a dit..."
C'est trop tard tu sais ? Elle est morte. Ririn...
Iie ! Iie !
Ses mains se crispent sur les fines épaules.
"Yaone ! Vas nous attendre dans tes appartements ! Enferme-toi, soigne-toi et attends qu'on vienne t'y rejoindre !"
"Mais... Kougaiji-sama..."
"C'est un ordre !"
C'est peine perdue. Elle aussi est déjà morte...
Urusai !
Il court à présent. Vite. Très vite. Et pourtant, pas assez... Sa gorge lui fait mal. Son cœur aussi. Parce qu'il sait...
Et il y a un écho se fondant dans le bruit de sa course. Derrière lui. Comme toujours. Une respiration rauque qui s'harmonise à la sienne. Toujours...
Et lui... Lui...
Iie ! Yamete ! Yamete !
La salle de résurrection. Toujours le même spectacle macabre. Ces machines obscènes autour du corps de ce terrible youkai qui était son père.
Mais ce jour-là, un détail de plus ajoute à l'horreur ambiante. Un long sarcophage translucide empli d'un épais liquide verdâtre. D'un genre qu'il ne connaît que trop bien pour l'avoir expérimenté lui-même...
Il ne prête pas attention au rire triomphant qui s'élève. Pas plus qu'aux trois silhouettes dressées au bout de la plate-forme. Ses yeux sont rivés sur cette cuve dans laquelle baigne un petit corps auréolé de cheveux roux.
"Ririn !"
Le rire, à nouveau.
"Tu arrives trop tard, pitoyable petit prince..."
Il perçoit vaguement un mouvement du coin de l'œil. Un sourd bourdonnement envahit la pièce. Comme les lents battements de cœur de quelque improbable monstre. Un remous parcourt le liquide épais. Deux yeux d'émeraude s'ouvrent soudain, tandis qu'un cri silencieux déforme le visage habituellement rieur. Deux mains frêles se plaquent sur les parois du tube et le regard affolé rencontre le sien. Il devine plus qu'il n'entend le changement du cri.
- Onii-chan !
"Ririn !"
Ses muscles se tendent. Il s'apprête à bondir. À libérer sa sœur.
Inutile. Futile. Elle est déjà morte.
URUSAI !
Une main se pose sur son épaule. Le retient.
"Kou ! Mate !"
Avertissement. Incrédulité. Désarroi. Il y a tout cela dans la voix basse qu'il connaît bien, et plus encore dans le regard qu'il croise en se retournant violemment, s'arrachant du même coup à l'étreinte de son homme d'arme. Tant de choses qu'il pensait ne jamais trouver là...
"Ton garde du corps a plus de jugeote que toi, petit prince. Il serait dommage qu'elle meurt si peu de temps après avoir retrouvé la liberté, nee, Kougaiji..."
Que tu l'écoutes ou pas, c'est ce qui est arrivé de toute façon...
Il se tourne lentement. Incrédule. Pourtant, encore une fois, une partie de lui sait... Ce qui n'empêche pas son cœur de bondir douloureusement contre sa poitrine. Sa respiration de se bloquer dans sa gorge. Il ne peut croire ce qu'il voit, tout en sachant qu'il l'a déjà vu...
Elle est debout là, dans une longue robe blanche fanée par le temps. Son sourire est douloureux. Des larmes brillent dans son regard violet. Ce regard si semblable au sien... Un murmure rauque brise le silence irréel. Le sien ?
"Ha... Haha-ue..."
Ses pupilles dilatées au point d'en paraître presque arrondies ne peuvent se détacher d'elle... Une main aux courtes griffes brillant d'un vermeille menaçant est posée sur sa gorge pâle. Elle a l'air fragile. Tellement plus que dans son souvenir. Il ne peut pas y croire. Ne veut pas y croire ! Parce que son rêve le plus cher est en train de tourner au cauchemar...
"Kou...gai...ji..."
Sa voix est brisée. Basse. Déshabituée depuis trop longtemps de franchir ces lèvres pâles. Pourtant... Pourtant oui, c'est la sienne. Ces mêmes intonations qui résonnent depuis des siècles dans sa mémoire.
"Haha-ue..."
Il fait un pas vers elle. Plus rien n'existe autour d'eux. Rien...
- Onii-chan !
Un sursaut violent le tire à demi de son état d'hébétude. Que..?
Rien. Seulement une autre morte...
Yamete ! Yamete !
Ses yeux se portent de nouveau sur la cuve. S'agrandissent d'horreur. Le corps de l'enfant semble se vider lentement de toute substance vitale. Ses yeux verts suppliants, douloureux, toujours rivés sur lui, dévorent la moitié d'un visage aux traits atrocement émaciés.
- Onii... chan...
Les lèvres exsangues esquissent à peine ces mots qu'il entend pourtant résonner dans son esprit. Comme cette fois là... Elle l'appelle à l'aide.
Un rire froid.
"Hé bien, ne fais pas cette tête, Kougaiji. Le sang de l'impitoyable Gyumao ne coule-t-il pas dans tes veines ? Elle ne fait qu'accomplir son devoir filial. Elle va sacrifier sa vie pour permettre à son père de renaître. Et toi, tu vas accepter cela comme le fils dévoué que tu es. N'est-ce pas, Kougaiji..?"
Il devine les griffes laquées se resserrer subtilement autour du cou gracile. Le hoquet de douleur qu'elles y étranglent.
Iie. Iie. Par pitié. Pas ça. Je ne peux pas ! Je ne peux pas !
Il tremble de tout son corps, tous ses sens à vifs. Il sent la douleur irradiant de ses paumes dans lesquelles ses griffes pénètrent de plus en plus profondément. Il entend avec une netteté effrayante les gouttes de son propre sang, coulant lentement de ses poings étroitement serrés, entrer en contact avec le sol de pierre. Et il ressent la chaleur de la main de Doku, toujours posée sur son épaule. Mais ce n'est pas le ferme réconfort habituel qui en émane... Crispée. Tremblante. Son ange gardien est impuissant... Autant que lui... Perdu...
Je ne peux pas choisir !
À quoi bon choisir entre deux cadavres ?
Urusai... Onegai... Onegai...
Mais les suppliques ne briseront pas ce cycle infernal. Ne mettront pas fin à ce cauchemar éveillé. Il le sait. Il sait...
À peine quelques secondes qui s'égrènent comme des siècles. Quelques secondes... avant que le corps juvénile désormais si dramatiquement frêle ne se cambre atrocement. Macabre parodie de jouissance. Obscène. Alors que toute la vie débordante qui avait animé sa sœur se tarit. Tout simplement. En quelques secondes...
"IIE ! RIRIIINNNNN !"
Ce n'est pas son cri. Lui ne peut que grimacer sous les courtes griffes lui labourant inconsciemment l'épaule. Que regarder ce corps momifié autour duquel flottent ironiquement d'éclatants cheveux roux. Détourner enfin les yeux... pour plonger dans un regard dont les prunelles aux teintes de crépuscule ne croisent un bref instant les siennes que pour souligner davantage la blancheur soudaine du globe oculaire alors qu'elles se révulsent brusquement.
Rouge. Sa bouche, entrouverte comme lorsqu'elle l'embrassait, enfant.
Rouges, ces lèvres qui s'étirent en un sourire jouissif.
Rouge, sa gorge déchiquetée sur laquelle il avait tant de fois reposé sa joue.
Rouges, ces griffes au verni impeccable noyé sous un flot de sang.
Deux regards. Vert. Violet. Fixes. Accusateurs. Il les sent tous deux peser sur lui. Il ne peut détourner le sien. Pas plus qu'il ne peut faire un geste. Un cauchemar.
La douleur quitte son épaule, les griffes s'y desserrent. La chaleur s'en va aussi. Son seul point d'ancrage. Son seul allié. Il a envie de hurler. Encore une fois, il sait ce qui a va arriver. Sans réellement le savoir...
Bien sûr que tu sais... Lui aussi va mourir.
I..ie.. Iie ! Lui est trop fort pour mourir...
Regarde... Regarde-le... une dernière fois...
Il ne mourra pas ! Pas lui ! Pas...
"Dokuuuuu ! Yamerooooo !"
Sa voix blesse ses propres oreilles. Rauque. Brisée. Affolée..? Son garde du corps s'immobilise, à quelques pas de lui, son corps tremblant de fureur encore tendu vers l'estrade. Et il lui semble que l'oeil, encastré dans la garde du sabre lui lance un long regard de colère, juste avant que les yeux bruns de son possesseur ne croisent les siens. Il y a des larmes sur les joues de Dokugakuji. Et bien trop de choses dans son regard...
"Kou ?"
Dis au revoir...
URUSAI !
Il s'apprête... à quoi au juste ? Se rapprocher de lui ? Bondir sur elle ? Mais toute velléité d'action est soudain stoppée par... le silence. Un silence de mort. Ecrasant. Etouffant. Douloureusement perceptible dans cette salle qui depuis qu'il la connaît a toujours résonné du fracas du travail des machines de résurrection. Elles ont... stoppé ? Une voix aux accents traînants secoue l'immobilité irréelle de l'instant.
"Ma reine, votre très estimé conjoint vient de revenir à la vie."
Une courbette à la limite de l'insolence, imitée aussitôt par un lapin en peluche paraissant davantage excité que son maître par la nouvelle. Lui semble annoncer le plus naturellement du monde que le repas est servi. Ou que le spectacle commence...
Et lui... lui connaît d'avance les textes de cette pièce macabre. Quelques secondes avant qu'ils ne soient débités. Suffisamment pour en souffrir deux fois. Pas assez pour en changer la moindre réplique.
Le sol tremble, soudain. Une brève secousse qui manque l'envoyer à terre tant il a baissé sa garde. Anesthésié. Une seconde. Une troisième, beaucoup plus proche, beaucoup plus forte, ébranlant les fondations même de la salle. De la poussière et des gravats se détachent du plafond, seule partie de cet endroit que le métal n'ait pas recouvert. Cinq, six ? Il a perdu le compte mais elles gagnent en violence à chaque itération. Il a de plus en plus de mal à rester debout. Et puis, soudain, une douleur fulgurante contre sa tempe, son épaule. Un cri lointain.
"Koooouuuuu !"
Ne te réjoui pas : c'est loin d'être terminé, tu le sais bien...
U...ru...sai... que tout cela... cesse...
Il est couché à terre lorsqu'il s'éveille. Il a perdu conscience alors ? Son regard flou se pose sur un bloc de pierre ensanglanté, à quelques centimètres de son visage. Son bras gauche est comme engourdi et sa tête le lance douloureusement. Il y porte la main. Ramène devant son visage ses doigts poisseux d'un liquide écarlate. Il les contemple de longs instants, hébété, avant de secouer brusquement cette torpeur abrutissante. Pas le moment ! Combien de temps a-t-il perdu ainsi ? Il se redresse sur un coude, grimaçant sous la vague de douleur irradiant soudainement de son épaule. Pas longtemps, apparemment... La salle est à présent secouée d'un tremblement continu. Devant lui, Doku tente de se relever, pour le rejoindre sûrement. Il croise son regard, y lit un affolement semblable à celui qui agite son propre cœur. Un profond soulagement lorsqu'il se pose sur le sien. De la détermination aussi.
Non... Non, ne bouge pas ! Reste où tu es ! Ne fais rien ! Attends... attends...
Attendre quoi ? La mort viendra de toute manière, autant qu'il l'affronte en face...
Iie...
"IIEEEEE !"
Son cri de détresse se perd dans l'explosion retentissante. Ses oreilles bourdonnent tellement qu'il ne s'aperçoit pas immédiatement que le séisme a cessé. Et ça n'a brutalement plus aucune importance face à la vague de pouvoir déferlant soudain. Manquant le renvoyer dans l'inconscience tant cette puissance irradie de noirceur. Et tant elle lui est familière.
"Masaka..."
Un chuchotement. Une prière. Enfantine. Dérisoire.
Hoooo si...
Un rire fou, intarissable, dont les échos percent ses tympans plus encore que l'explosion précédente. Et une voix trop bien connue. Une voix honnie, aux accents de triomphe hystérique.
"Enfin ! Enfin ! Mon tendre Gyumao, mon époux chéri ! Enfin, te revoilà à mes côtés ! Après cinq cents années d'attente ! Enfin !"
Il parvient à se relever à demi, un genou en terre, son bras gauche pendant à son côté, le sang s'écoulant lentement le long de sa peau nue pour venir dégoutter sur le sol froid. Il les contemple. Elle, ses bras passés autour de sa taille, son visage enfouie au creux de son épaule. Tremblante. D'une joie malsaine. Lui... Il est bien plus grand que Doku. Autant que dans ses souvenirs. Comme si rien n'avait changé. Comme s'il n'était encore qu'un enfant dans son ombre. Son corps puissant est à peine recouvert d'un court pagne laissant visibles les blessures atroces infligées lors de son combat contre le Toushin Taishi. Il détaille son visage, sous le casque orné d'immenses cornes bovines qu'elle lui a laissé jusque dans son sarcophage d'acier. Sûrement parce que trop intimement lié à la terreur superstitieuse qu'inspire le démon taureau pour que quiconque songe à l'en séparer, même dans la mort... Une fascination morbide le fait se concentrer davantage sur la partie manquante de ces traits jadis familiers. Une pulpe écoeurante d'os brisés et de chairs putréfiées remplace la droite de ce visage que l'enfant qu'il était contemplait avec un mélange d'admiration, de peur, de haine... et de tant d'autres choses. A présent... il retient sa nausée devant le spectacle de ce cadavre animé d'une vie qui en a coûté tellement d'autres.
Le monstre qui avait été son père contemple d'un œil vague ce monde dans lequel il vient d'être ramené. Son bras se referme distraitement sur la taille de la femme lovée contre lui. Comme pour y chercher un appui. Une réalité tangible dans le brouillard mortuaire devant encore planer sur ses pensées. Ses souvenirs. Elle pousse un petit soupir ravi. Lève une main qu'elle pose avec une tendresse outrancière sur la joue intacte. Force son visage à se pencher vers elle. Remue ses lèvres à quelques pouces des siennes. Une voix lourde de désir.
"Mon seigneur. Mon époux. J'ai tant attendu cet instant ! À présent... À présent que je t'ai ramené auprès de moi... Oui... à présent tu vas tout me donner n'est ce pas ? Tout m'offrir..."
Ce dernier mot s'étire. Traînant murmure d'invite alors qu'elle pose sa bouche sur celle du plus puissant des youkai. Et le prince se détourne. Ecoeuré par cette parodie de séduction, dans le cadre morbide de cette pièce dévastée, empestant la mort et la destruction. Son regard accroche la silhouette vêtue de blanc, à quelques mètres devant lui.
Doku...
Son garde du corps lui tourne le dos, manifestement fasciné par ce qui se passe sur l'estrade surélevée. Il ne peut voir son expression. Mais il la devine aux tremblements parcourant son corps puissant : le dégoût, la peur, la rage peut-être aussi... Et puis un mouvement attire brusquement son attention vers eux, à nouveau. Ils ne sont plus enlacés. Ce qui a été Gyumao est agenouillé, tenant entre ses bras un corps frêle, nimbé d'une robe de la blancheur d'un suaire. Un violent sursaut parcourt son corps douloureux. Une atroce souffrance s'enfonçant comme une lame chauffée à blanc à l'intérieur de sa poitrine. Il est debout avant même d'avoir eu conscience de bouger.
Haha-ue !
"Ne la touche pas !"
Il s'immobilise. Incrédule. Ce n'est pas lui qui vient de hurler ces mots d'une voix tremblante de rage. Il relève la tête en même temps que la chose qui fut son père. Tous deux contemplent la reine Gyokumen, debout au-dessus de son époux, les poings serrés de part et d'autre de son corps frémissant de haine, ses yeux irradiant d'une jalousie inhumaine. Une jalousie dont il prend à cet instant seulement la mesure pleine et entière. Elle n'aurait jamais laissé sa mère vivre... Il en est plus que certain à présent. Comme si ça changeait quoi que ce soit de le savoir... Sa voix, dont elle essaie de retenir les pointes d'hystérie sous une froideur dédaigneuse, s'élève à nouveau.
"Elle n'est plus rien pour toi... rien ! C'est à moi que tu dois tout à présent !"
Mais il semble ne plus l'écouter, son œil unique de nouveau fixé sur le cadavre qu'il serre entre ses bras. Ses lèvres craquelées s'entrouvrent. Bougent plusieurs fois avant qu'un vague son ne s'en échappe. Une voix caverneuse. Enrouée par les siècles.
Ra... Raset...
C'est un véritable cri de rage qu'elle pousse cette fois. Et qui ne semble pas plus le toucher que tout le reste. Elle mord violemment ses lèvres corail, arrachant ses yeux au spectacle de l'homme qu'elle a ramené d'entre les morts en train de serrer contre lui le corps de sa rivale. Son regard parcourt quelques instants la salle avant de croiser le sien. Ses pupilles s'arrondissent un instant de surprise. Elle l'avait oublié ? Et, soudain, elle semble reprendre son emprise sur elle-même. Un sourire serpente lentement sur ses lèvres, sur lesquelles sa langue vient essuyer le sang avec une lascivité écœurante. Et elle s'approche de l'être qu'elle a recréé. S'agenouille à ses côtés. Passe tendrement un bras autour de ses épaules tout en rapprochant sa bouche de son oreille. Et, tout ce temps, ses yeux brillants d'une lueur inquiétante n'ont pas quitté les siens. Pas plus que son sourire satisfait n'a quitté ses lèvres. Elle murmure, suffisamment fort pour être sûre qu'il entende, lui aussi.
"Mon amour, écoute-moi. Ecoute celle qui t'a rendu à ce monde. N'oublie pas... n'oublie jamais : tu revis par mon sang..."
Deux tressaillements. Son père relevant sur elle un œil empreint d'une soudaine... reconnaissance ? Lui, immobile, le violet de ses yeux assombri par une compréhension tout aussi brusque. Son sang...
Ririn...
Son regard, dans lequel danse à présent une ironie satisfaite, est toujours vissé sur le sien. Et elle parle, de nouveau.
"Tu ne peux que réaliser tous mes désirs... Lié par ma chair... Tu ne peux que prendre pour vérité tout ce que je te dirai... N'est-ce pas, mon époux ? Mon roi..."
Il hoche lentement la tête. Et lui, qui les regarde, sent un goût amer envahir sa gorge. Il connaît cette scène. Que trop bien. Une marionnette... Et elle lui accorde un sourire obscène, tandis que sa main caresse lascivement le corps puissant. Et son murmure rauque reprend, toujours plus près de l'oreille pointue qu'elle caresse de temps en temps de sa langue.
"Oui, tu me donneras tout. Mais avant cela... veux-tu la venger ? Ta précieuse Première Épouse ? Savoir qui est son meurtrier ?"
Il voit l'œil unique du monstre briller soudainement à ce mot qui semble le ramener à la vie davantage que toutes les machines créées par Nii. Venger. La soif de sang... Il la voit presque ramener de l'au-delà la conscience de cet être avide de violence qu'était son père. Elle n'a même pas besoin de détourner son regard pour savoir. Elle sent le corps frémir sous sa main, se mord légèrement la lèvre en accentuant sa caresse. Il devrait... bondir. Là. Maintenant. La tuer ! Effacer du monde des vivants cette créature écoeurante de perversité. Mais tout se passe vite. Bien trop vite. Malgré cette impression de secondes s'étirant à l'infinie. Comme s'il regardait la scène à travers un kaléidoscope déformant le temps. Cauchemar. Trop réel. Et le murmure, à nouveau. Et le regard brillant d'anticipation plongé plus que jamais dans le sien.
"Oui. Tu vas le tuer. Lui qui n'a jamais mérité de vivre. D'être la chair de ta chair. Le sang de ton sang. Lui qui aurait du marcher dans tes traces. A mes côtés. Devenir l'un des youkai les plus redoutés de Togenkyo. Cet être pitoyable, dénué de tout ce qui fait ta force. Tue-le avant qu'il ne fasse honte à ton règne renaissant. Tue cet enfant indigne de fouler ce sol sur lequel tu reposes enfin tes pas. Le meurtrier de sa propre mère. Tue... ton fils !"
Ce n'est pas une surprise. Ça ne devrait pas l'être. Pourtant il reste cloué sur place. La respiration bloquée dans sa poitrine oppressée. Elle... elle l'accuse d'avoir...
"KISAMAAAA !"
La voix puissante traverse comme un coup de tonnerre son cerveau embrumé. Doku... Il... l'avait presque oublié...
Ne t'en fais pas : la mort ne l'a pas oublié, elle...
URUSAI !
Il voit la silhouette de son père se redresser. Menaçante. Emplissant la salle d'un soudain flux de youki. Auquel se mêlent intimement les effluves glacés de la mort. Il est plus puissant encore que dans son souvenir. Trop puissant. Il vacille sous cette force à l'état brut. Une seule fois auparavant il a ressenti une telle impression. Et cette fois là il a frôlé la mort. Le Seiten Taisei. La dernière image qu'il avait emporté avant de sombrer dans les ténèbres. Mais alors la lumière l'avait rappelé. (2)
La lumière... Il est debout devant lui. Il lui tourne toujours le dos, mais il sent toute sa détermination dans la tension de ses larges épaules, l'angle menaçant de son sabre. Décidé plus que jamais à remplir son serment informulé. À le protéger. À...
À mourir...
Il ne prête pas attention à la voix narquoise. Sa propre voix ? Pas de temps pour les questions ! Agir ! Agir malgré cette partie de lui qui sait parfaitement que c'est inutile. Que toute cette scène est déjà jouée... Qu'il est trop tard. Bien trop tard. Ses paumes se placent en vis-à-vis. Peut importe la douleur qui lui lacère l'épaule. Les mots de pouvoir franchissent ses lèvres. Protéger. Le protéger. Au moins lui. Ne pas le perdre. Doku...
Un clignement de paupière. Un battement de cœur. Et il se dresse au-dessus de son garde du corps. Le dominant de toute sa puissance. Son sabre immense, prolongement même de son pouvoir démesuré, s'abat en un arc mortel... Et bute sur le kekai de protection qu'il vient d'invoquer. Des flammes s'élèvent entre la lame et la barrière rougeoyante tandis que s'affrontent deux volontés. La force brute du père contre la magie du fils. Quelques secondes... Avant que son bouclier ne vole en éclats. Réduit à néant par cette force que redoutaient même les dieux. La lame courbe continue sa course comme si rien ne l'avait entravée. Seul l'angle semble avoir légèrement dévié. Plus haut ? Qu'importe...
Le sabre ivoirin se dresse en une protection dérisoire. A peine un battement de cil avant qu'il ne se brise. Que le sang ne jaillisse. Que le corps vêtu de blanc ne soit propulsé en arrière comme un fétu de paille sous le souffle d'un ouragan. Le temps semble s'arrêter. Suspendu. Jusqu'à ce qu'un atroce craquement rompe le silence surnaturel qui lui semble avoir duré des heures. Alors qu'il contemple le corps de Doku, s'affaissant lentement le long du mur qu'il vient de heurter de plein fouet. Ses yeux restent fixés sur ce visage dont il devine les moindres traits malgré le sang s'écoulant de la plaie béante le parcourant.
Iie Iie Iie Iie Iie Iie...
Pas d'autres pensées que cette litanie lancinante. Rien. Il sent le monstre approcher. Son aura le précédant. Ramenant sa conscience à son premier niveau. L'instinct de survie. Un réflexe le fait bondir en arrière évitant la lourde lame empoissée de sang. Son sang ! La rage. Soudaine. Pure. Incontrôlable. Elle déferle en lui, emplissant totalement le vide de son esprit. La douleur n'a plus aucune importance alors qu'entre ses mains apparaît le portail dimensionnel. Il n'entend même pas la litanie magique qu'il prononce. Ne se rend pas compte qu'il ne l'a jamais dévidée aussi rapidement. Ni hurlée avec autant de désespoir. Engokuki jaillit. Flamboyant. Animé de toute la furie de son invocateur. Rendu à demi fou par sa détresse. Il se jette contre la chose qu'il lui désigne comme ennemi. Feu contre sabre. Démon de l'enfer contre monstre d'aucun monde.
Aucune notion de temps dans cet affrontement. Il est Engokuki. Sa puissance dévastatrice. Son feu purificateur. Son combat dantesque est le sien. Plus rien d'autre n'existe.
Et soudain, la douleur. Brutale. Violente. Alors que son corps épuisé par l'incantation s'effondre au sol. Un vacarme de pierre pulvérisée. Un rugissement lointain. Engokuki ? Il ne comprend pas. Ne cherche pas à comprendre. Tout ce qu'il veut savoir c'est s'il a réussi. Même s'il connaît déjà la réponse...
Son torse se redresse lentement. Ses yeux vagues cherchent à focaliser sur l'extérieur. S'arrêtent sur une large lame à la pointe fichée dans le sol. Le métal a des reflets écarlates fluctuants. Comme chauffé à blanc. Son regard en remonte lentement le fil. Pour contempler avec une détresse teintée de fatalisme le puissant youkai qui s'appuie de tout son poids sur l'arme, ses mains croisées sur son pommeau, lui adressant un sourire carnassier malgré sa respiration encore laborieuse. Cette grimace relève atrocement la partie défigurée du visage penché vers lui. Rien d'autre dans son unique œil, qu'un désir insatiable de sang et de souffrance. Il se demande, un instant, si cette chose l'a reconnu comme étant son fils. Et si cela changerait quoi que ce soit... Et de nouveau se dresse la lame en long croissant de lune. Implacable. Il est presque soulagé. Parce que, c'est la fin, n'est-ce pas...
Non, pas tout à fait... Fais un effort. Rappelle-toi. Il manque quelque chose... Un cadavre de plus...
"KOUGAIJI-SAMA !"
Le sabre s'abat. Le sang chaud éclabousse son visage. Un corps frêle, pratiquement tranché en deux, tombe devant son regard. Suivi d'une cascade de cheveux soyeux sur lesquels la lumière crue des néons accroche des reflets bleutés. Son regard écarquillé reste fasciné par deux yeux ambrés le contemplant fixement. Vides.
Iie...
Iie...
"IIEEEEEE !"
Il est debout. De nouveau. Et le désespoir fait jaillir la moindre parcelle de pouvoir de son corps épuisé. La flamme rugissante s'élance vers le meurtrier à la lame tâchée du sang des siens. Un cri bestial, une odeur écoeurante de chair brûlée.
Il ne distingue plus rien. Il s'effondre, à nouveau. Mais ce n'est pas le sol cette fois qui accueille son corps vidé d'énergie. L'acier brûlant. S'enfonçant à travers sa poitrine. Labourant sa chair.
Ho, je ne te l'ai pas dit ? Tu es mort toi aussi...
Ses paupières s'ouvrent violemment sous la douleur. Un flot de sang jaillit de sa gorge. Il en perçoit le goût douceâtre avec un acuité surnaturelle, alors que son regard soudain étonnamment clair se lève une dernière fois vers son bourreau. Il imagine sûrement la brève étincelle dans son œil sombre juste avant qu'un rictus hideux ne déforme encore cette face ravagée. Et qu'un mouvement brusque ne libère son corps de l'étreinte mortelle de la lame. Eclair de souffrance. Jaillissement écarlate. Et un rire. Un long rire triomphant qui l'accompagne vers les ténèbres.
Elle a gagné...
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(1) Non d'abord, le "encore une fois", ce n'est pas de la mauvaise foi d'antifan de Yaone caractérisée ! Elle s'est déjà fait piquer Ririn par Nii à l'époque du brainwash de Kou ! Na ! #tire sa langue bifide#
(2) Allusion à l'épisode du brainwash/débrainwash du petit prince aux oreilles en pointe. En résumé pour ceux qui n'ont pas lu les scanlations ou vu les épisodes de Reload : après le combat contre le Seiten Taisei (Grand Saint du Ciel Pur, en VF, si je me souvient bien) Doku est forcé de confier Kou aux soins de Nii et ce dernier en profite pour lui laver le cerveau. Il reste un long moment dans cet état, obéissant aux moindres ordres de la pouffe en chef, jusqu'à ce que Doku (Et Yaone, d'accord, d'accord... pppfff...) ne lui jurent une nouvelle fois de toujours le suivre... A cet instant il "voit la lumière" et retrouve sa véritable personnalité. (Et il faut voir en quelles circonstantces, nyyyaaah ! ) Hum... Fin, du blabla, désolée !
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Nooonnnn ne me lynchez pas ! Sinon je pourrais jamais loader la suite... niark ! Parce que voui, il y a une suite ! Et vi, vous avez bien lu le résumé : c'est un Kou/Doku ! Donc, pas de panique, il y a des ressorts scénaristiques de la mort qui vont faire que tout ça n'est pas aussi tragique que ça en l'air... du moins pour certains... #sifflote innocemment#
Gojyo : "Ressorts scénaristiques de la mort"... Rien que ça..?
Oui, je sais, c'est faible pour désigner toute l'étendue de mon talent, mais il n'est pas de mots assez forts pour ça de toute façon...
Gojyo : ... Ben voyons... ¬¬
Doku : Kou ? Tu essayes de faire quoi avec l'épée de ton père ?
Kou : Mettre un terme à la vie d'un parasite qui se nourrit de la souffrance de malheureux personnages innocents et ne lui appartenant même pas...
Doku : Je suis totalement d'accord avec cette idée, ceci dit... Si tu utilisais une arme un peu plus adaptée... Genre plus petite que toi et dont tu arriverais à soulever la pointe... #ébouriffage moqueur#
Gojyo : #mord de rire# Une arme plus petite que lui ? Difficile à trouver ça... #air d'intenses réflexions# ... #tilt!# ... #va fouiller dans les affaires d'Hakkai et revient avec une aiguille à tricoter# Bon, ça reste encore un peu long mais ça devrait faire l'affaire...
Kou : #incante avec une veine digne de Sanzo pulsant sur la tempe#
Doku : ... #prie pour ce qu'il lui reste de famille#
Gojyo : #file sans demander son reste, son aiguille à tricoter sous le bras#
Hakkai : #arrive tout sourire avec la seconde aiguille... et se prend un Engokuki de mauvais poil en pleine face avant d'avoir compris ce qui lui arrivait# ... X.x ... Ano... Je voulais juste savoir si vous n'aviez pas par hasard aperçu une aiguille comme celle-là ? J'en ai besoin pour tricoter un bonnet à pompon à Gojyo... #éteint les flammes sur ses vêtements d'un air parfaitement naturel#
Doku : #pointe l'endroit vers lequel s'est sauvé son frangin avec un grand sourire# Ça explique pourquoi il voulait se débarrasser de l'aiguille... O.o Kooouuuu ! Arrête avec ce sabre, tu vas vraiment te faire mal...
#autrice regardant s'ébattre tout ce petit monde en mangeant ses pop-corn, bien installée au sommet du bouton "submit review"#
