Chapitre 2 : Souffrance.


Duo se réveilla immédiatement.

Depuis que Heero avait tiré sur Réléna, il n'était pas tranquille. Il ne la sentait pas cette « mission », vraiment pas. Heero était déjà en soit un type bizarre, mais là il se demandait vraiment ce qui lui avait prit de tirer sur la petite princesse… Pas qu'il conteste son geste, mais ça lui semblait un peu tard pour régler cette vieille histoire de « témoin gênant ».

Il s'était dit que ça n'était pas son problème, après tout…

Alors pourquoi s'était-il réveillé, le cœur battant, inquiet pour son coéquipier ?

Pourquoi le moindre bruit l'avait-il tenu en éveil toute la nuit ?

… 'tain, il se s'était sentit vraiment con. Dire qu'il se faisait du mouron pour ce type.

Ce mec était increvable, il n'avait pas de raisons de s'en faire…

Pourtant, Duo se leva en vitesse et alla dans l'entrée, essayant de ne pas avoir l'air trop pressé tout de même. Il y trouva Heero, debout, se tenant tout droit, à la limite de la raideur, les yeux cachés derrière ses éternels cheveux en pétard, l'empêchant de voir clairement son visage.

- « Heero…

- …

- Hey, tu vas bien ?

- …

- … J'allume la lumière…

- NON ! »

Le cri jaillit, et le temps que Duo réalise que Heero avait hurlé comme un enfant, un enfant désespéré aux sanglots coincés dans la gorge, il se retrouva avec son coéquipier dans les bras.


J'ai tiré.

J'ai tiré en fermant les yeux.

J'ai fermé les yeux pour ne pas me voir la tuer.

J'ai osé la regarder à nouveau.

Elle était toujours assise à côté de moi, immobile. Elle n'était pas tombée.

Sur son visage, un doux sourire, et elle, belle, toujours plus belle, toujours plus rayonnante.

Son sourire a découvert ses dents blanches, exagérément étiré sa bouche, transformé son sourire en grimace, l'a rendu diabolique. Elle n'était pas morte. Je l'avais manqué. J'avais tiré à côté.

Je n'avais pas pu.

Et elle le savait, j'en suis sûr. Elle le savait que j'allais tirer à côté.

Que je ne pourrais pas la tuer après ça, elle le savait.

Elle le savait …


- « Heero, Heero, HEERO, HEERO ! »

Duo giflait le japonais, il le secouait, il l'engueulait, il hurlait :

- « Heero, merde, réveille-toi, BORDEL HEERO ! »

Il continuait de le gifler, il avait envie de le frapper encore plus fort, pour que cet idiot réagisse, se réveille, il avait peur, qu'est-ce qu'il avait fait… ?!

- « Heero ! Réveille-toi vieux, allez qu'est-ce que tu me fais, tu veux que je me foute de toi, le soldat parfait qui s'évanouit sur moi, hey man, réveille-toi, Heero… »


De la vengeance, elle s'était vengée.

Elle l'avait réduit à rien, elle avait fait de lui un gosse, et il avait envie de pleurer, de s'écrouler, de lui demander pardon en se traînant derrière elle, il avait envie qu'elle se penche sur lui pour l'embrasser, sécher ses larmes, le serrer contre lui et lui dire que tout était fini, qu'il avait été bête mais que ça passerait, qu'elle l'aimait comme avant, que…

Mais la femme le regardait, les yeux brillants de sa victoire ; elle était heureuse, oh oui, elle était encore vivante, car il n'avait pas pu,il n'avait pas voulu la tuer, il était coupable, trop coupable pour la tuer elle, il partageait sa douleur, oh comme elle était heureuse, c'était pour son bien, elle l'aimait même plus qu'avant, elle l'aimait passionnément, elle l'aimait presque autant qu'elle le haïssait !

Maintenant, ce n'était plus juste le monde entier qui le voyait comme un monstre, c'était elle aussi.

Elle…


- « Heero… »

Le brun ne se réveillait toujours pas, et Duo commençait à être désespéré, il ne savait pas quoi faire. Honteux, il serra un peu plus l'adolescent contre lui et commença à se balancer d'avant en arrière, comme pour se rassurer lui-même. Ca n'était pas fini, son pouls battait encore, même s'il était faible, il allait se réveiller bientôt, il…

Une main s'accrocha à son T-shirt et un sanglot s'étouffa contre sa poitrine.

Duo relâcha immédiatement son étreinte et baissa la tête pour voir le visage de son coéquipier.

- « Hee… ro ? »

Il ne le reconnu pas.

Il ne connaissait pas ces yeux perdus, il ne connaissait pas ces larmes, il ne connaissait pas ces sanglots, non, ça devait être un mauvais rêve… Heero avait toujours été le plus fort des cinq pilotes, c'était impossible, c'était le soldat parfait, la personne la plus inexpressive qu'il ait jamais vu, la plus droite, obéissante, celle qui ne craquait jamais, jamais… Et surtout pas face à lui.

- « Oh my… Qu'est-ce qui t'arrive ? »

Heero ne répondit pas, il cala sa tête dans le creux de son épaule, agrippa encore plus fermement le T-shirt de Duo. Encore plus perdu, le châtain referma machinalement ses bras autour du japonais, il sentait son corps tout entier trembler contre lui… Ca ne ressemblait pas au Japonais.

Il choisit alors de changer sa position. De sa main gauche, il tint la tête du garçon contre son épaule et lui caressa les cheveux doucement, comme on le fait avec un enfant. Puis il se mit à créer des cercles réconfortants sur son dos avec la paume de sa main droite. Il se demanda si ce n'était pas trop familier et si le « soldat parfait » n'allait pas se poser des questions, mais au bout de quelques minutes il pu constater que ses gestes avaient calmés son coéquipier. Il avait cessé de pleurer, même si ses tremblements eux ne cessaient pas, encore moins sa respiration saccadée. Mais il lui semblait que Heero s'était tout de même un peu détendu.

Alors il tenta de comprendre.

- « Heero, chuchota-t-il au creux de son oreille, raconte-moi, qu'est-ce qui te met dans cet état ? … Avant que tu partes, je… n'ai pas osé dire quoi que ce soit, mais ce que je voulais te demander, c'était… De me raconter pourquoi tu t'étais sentit obligé de faire ça… Tu peux… Tu peux me parler, Heero…

- …

- … Heero, je t'en prie…

- …

- Heero…"

Duo eut brusquement envie de craquer lui aussi. Il se sentait inutile, il n'arrivait même pas à l'aider, il ne savait pas comment l'aider, il…

- « Je suis un monstre. »

Duo en resta sans voix.

- « Qu'est-ce que…

- Je suis un être monstrueux, qui n'a vécu que du meurtre. Pour ça, je n'ai pas le droit de ressentir, je me tais, j'écoute, j'obéis, je ne dois que tuer, c'est comme ça, c'est la mission, c'est ma vie… »

La voix qui parlait contre son épaule ne ressemblait pas à celle qu'il avait l'habitude d'entendre. Elle était tremblait, était cassée, elle était très basse.

- « Je devrais crever, comme les autres soldats sur un champ de bataille, et tuer d'autres soldats, parce que c'est la guerre, même s'il y a des gosses, des innocents, des chiens, des gens sans défense. Mais elle… je… pas elle, je n'avais pas le droit je sais, mais le soldat lui pensait que c'était normal, juste, maintenant que je l'ai trop approchée elle est un monstre elle aussi, j'engendre des monstres ou je tue, un démon… Je suis un démon, un… un… Un démon ! Je… »

Pendant dix bonnes minutes, Heero monologua, il cracha tout dans un énorme désordre, il fit sortir tout ce qui lui tenaillait la poitrine, il délira presque, il hurla quelquefois, « DEMON, DEMON ! » et il se calmait, puis il parlait à nouveau…

Duo le laissa parler, se força pour ne pas l'interrompre, essaya de le calmer en le serrant contre lui, mais Heero se débattait, griffait son dos, puis chuchotait dans son oreille, et Duo se mordait les lèvres, pour ne pas craquer, pour ne pas lui dire qu'il n'en pouvait plus, qu'il en avait assez de l'entendre bégayer et dire des bêtises, que lui ne le voyait pas comme un démon, que lui le voulait de nouveau comme avant, quand tout était finalement si simple.

Soudain, Heero se tut et se mit à mordre le cou du châtain, comme s'il en avait besoin pour calmer sa propre douleur. Duo sursauta de surprise, mais n'osa pas l'en empêcher. Le comportement de son coéquipier était si étrange qu'il ne savait absolument pas quoi faire sauf tenter de le rassurer en le tenant contre lui. Puis le Japonais reprit son délire, pour stopper à nouveau, mordre plus fort sa peau, et il se remit à monologuer, s'arrêta encore, haletant, soufflant sur la zone rougie par ses dents, puis chuchota en sanglotant à son coéquipier qu'il était un démon…

Duo eut envie de le gifler pour le faire revenir à la raison. Il lui fit lever le visage pour lui montrer à quel point il était en colère contre lui, pour ce qu'il disait. Pour lui dire d'arrêter. Mais il resta la bouche ouverte, la gorge sèche, il ne savait pas quoi dire en vérité, il ne savait pas quoi faire, et puis il avait si chaud, quelque part, c'était la faute des dents de Heero contre sa peau… Il réalisa brusquement que le brun était dans une sorte de transe et qu'il n'arrivait pas le moins du monde à la contrôler. Avec ça, il était bien. Il savait encore moins quoi faire.

Heero était silencieux à présent, il le regardait sans vraiment le voir, les yeux encore un peu rougis et la bouche entrouverte. Son visage était si proche du sien que le châtain sentait son souffle chaud sur ses lèvres. A cet instant, Duo se dit qu'il avait perdu la tête lui aussi. Parce qu'à le voir dans cette position, son corps pressé contre le sien, sa bouche si proche, il ressentit du désir pour lui. Duo déglutit avec difficulté. Il avait toujours été intrigué par son coéquipier, mais il n'avait jamais ressenti de désir pour Heero. Pourquoi maintenant, pourquoi alors que c'était complètement déplacé ? …

Cela faisait à présent une bonne minute que le châtain fixait le visage du brun et que ce dernier ne bougeait pas, visiblement perdu. Duo ne savait toujours pas quoi faire. Finalement, ce fut Heero qui bougea le premier. Il se pressa un peu plus contre Duo, semblant ne pas réaliser ce qu'il faisant, comme s'il cherchait du réconfort ; et il reprit son monologue. Duo mit alors ses questions de côté et laissa son corps agir. Ses lèvres s'emparèrent de celles du brun, toujours perdu dans son délire, le firent taire, le mordirent à leur tour, tantôt avec colère, tantôt avec douceur.

Quand il sentit les poings de son coéquipier crispés sur son T-shirt, Duo s'écarta du brun et s'excusa immédiatement, honteux. Heero ne se fâcha pas. Il l'observa encore de cet air ahuri, puis il se lécha ses lèvres rougies sans sembler comprendre quoi que ce soit. Finalement, il se remit à parler, sa tête à nouveau contre son épaule. Duo choisit de le laisser aller sans rien faire.

Peu de temps après, Heero s'arrêta brusquement. Avant que son coéquipier ne puisse réagir, il s'appuya tout contre lui et s'endormit comme une masse.

Duo le porta jusqu'à la chambre, tremblant à son tour, puis le posa doucement sur son lit. C'est alors seulement qu'il vit la jambe ensanglantée du brun. Duo eut envie de lui hurler dessus et de se mettre des claques pour ne pas l'avoir vu plus tôt. Mais qu'est-ce qu'il avait foutu ?! Il n'avait pas tout compris dans son délire, sinon que Réléna était toujours bien en vie, belle mais diabolique à cause de lui – Heero avait vraiment pété un plomb - qu'il s'en voulait terriblement et que si elle n'avait pas pu crever, c'était à son tour. Ca lui semblait encore trop flou pour comprendre quoi que ce soit, mais il se promit que si c'était bien la petite princesse avait mis son coéquipier dans cet état, il ferait en sorte d'avoir des explications.

Alors qu'il nettoyait et bandait la blessure, il comprit que ce qui s'était passé ces deux derniers jours avait changé Heero à jamais. Et que ça n'allait sûrement pas se finir comme ça.

Il était inquiet. Il ne s'expliquait pas vraiment sa soudaine compassion pour le Japonais, sa colère envers la princesse, encore moins son baiser, mais quoi qu'il en soit, il ne pouvait pas laisser les choses en l'état. Il se sentait impliqué lui aussi maintenant, et ça allait changer.

Il avait déjà sauvé Heero une fois. Il recommencerait si c'était nécessaire. Qu'il le veuille ou non, il ne le lâcherait plus maintenant, soldat parfait au caractère de cochon et têtu comme une mule ou non, il s'en foutait. Il avait pleuré contre lui, il l'avait serré contre lui, il lui avait donné envie de pleurer, il lui avait donné chaud, il l'avait ému. C'était trop tard, il ne le lâcherait plus. Et pour être sûr que son coéquipier ne s'enfuit pendant son sommeil, Duo s'assit au bord du lit pour le veiller.

I'm with you.


Heero ouvrit douloureusement les yeux.

Il avait mal à la tête… Ca cognait, c'était assommant. Et qu'est-ce qu'il avait chaud !

Il étouffait.

Heero se redressa lentement pour ne pas aggraver son mal de crâne et tenta de faire le point sur son état. Il regarda instinctivement le réveil qui indiquait midi. MIDI ?! Il soupira. Ca commençait bien… Il sentit alors une main agripper son débardeur et un souffle chaud respirer à côté de lui.

- « 'ro ? »

Le japonais s'arrêta net de respirer.

Duo. Dormant à côté de lui.

- « Qu'est-ce que tu fais dans mon lit, Maxwell ?!, dit-t-il en le fixant froidement"

Il se dégagea aussitôt de son encombrant coéquipier, se leva en hâte, titubant dans la pièce à cause de sa tête qui tournait et d'une vive douleur qui s'était réveillée dans sa jambe.

Et tous les évènements de la veille lui revinrent d'un coup.

Il fut assaillit par des images et des bouts de phrases, il voyait Réléna, Réléna avec deux visages, il voyait Duo au bord des larmes, il se revoyait hurlant et pleurant, il hurlait, Démons !! Démons !!, il voyait Duo le bercer comme un enfant… Il avait chaud, il transpirait. Il se souvenait de sa peur, de sa honte, il se souvenait de l'étreinte de Duo, il se souvenait de son baiser, il se souvenait de sa blessure… Il avait si chaud. Trop, c'était trop d'un coup.

Il vacilla encore, étourdit par tous ces sentiments. Il allait encore tomber.

Encore plus bas, toujours plus bas. Il avait si honte, honte d'être faible.

Mais il ne tomba pas. Duo se tenait au-dessus de lui, il le tenait fermement, une main sous la nuque, l'autre contre son dos.

- « Tu es vraiment têtu. Quand on est blessé et mal réveillé, on ne sort pas du lit. Crois-en mon expérience. »

Il aida son coéquipier à se redresser et commença à râler sur son « humeur de chien ».

Heero ne répondit rien. Trop de choses étaient embrouillées dans sa tête, trop de choses lui encombraient l'esprit.

- « Heero.

- …

- Oh my, oh my…,soupira Duo.

- …

- … Ok… je reviens tout de suite. »

Heero ne réagit pas. Il essayait de remettre de l'ordre dans son esprit.

Quand Duo revint avec un plateau de petit déjeuner, Heero le regardait fixement.

Non, en fait, il regardait fixement la porte. Comme s'il voulait s'échapper.

A ce moment, il fut presque certain que le pilote 01 avait déjà une idée derrière la tête.

- « Tu te sens mieux ?

- … »

Duo soupira encore. Une vraie tombe ce mec…

Il posa le plateau sur la table de chevet, fit asseoir Heero sur le lit, et dit :

- « Avale ça, tu te sentira mieux.

- …

Ca te coûterait tant que ça de me remercier ?

- … Je ne t'ai rien demandé.

- Je me fais du soucis pour toi, figure toi.

- Je ne t'ai rien demandé, répéta Heero.

- Arrête avec ça. Quelque chose s'est passé hier soir, j'ai cru que tu étais devenu dingue, tu te débattais, tu hurlais, j'ai eu peur pour toi.

- Peur pour moi ? Et le Japonais éclata de rire.

- Arrête ça… Oui, j'ai eu peur, et je m'inquiète toujours…

- C'est pour ça que tu t'es octroyé le droit de dormir avec moi ? Je n'ai pas besoin de ta compassion, Maxwell. »

Le châtain ne répondit rien. Puis il se mit à sourire.

C'était un triste sourire, pensa Heero.

- « Je ne sais pas ce qui s'est passé avec Réléna hier soir, mais tu n'étais pas dans ton état normal. Je me suis inquiété toute la soirée, mais je ne t'ai rien demandé, je me disais que tu réagirais comme tu le fais maintenant, après tout, tu détestes qu'on se mêle de tes affaires. Mais hier, quand tu es rentrée, tu… Tu étais complètement perdu, c'est toi qui t'es jeté sur moi, comme on s'accroche à une bouée de sauvetage. Tu avais peur, tu étais hystérique, Heero il me semble normal que je m'inquiète à ton sujet. Sinon je ne serais qu'un sale type insensible. »

Heero ne trouva rien à rétorquer. Il avait soudain à nouveau envie de se blottir contre lui, de retourner dans cette étreinte rassurante qui l'avait apaisée hier soir.

Mais c'était trop tard maintenant. Il s'était mis entièrement à nu devant lui, il avait pleuré – et à cette pensée, il serra les dents – il avait agit en gamin, tout ça pour cette fille, tout ça pour Réléna – non, elle l'avait dit elle-même, elle n'était plus Réléna…

Il ne recommencerait plus. Duo devait oublier qu'il avait agit en enfant la nuit dernière, plus jamais il ne laissera cela arriver, plus jamais. Duo n'avait pas à agir ainsi avec lui, il n'avait plus besoin de s'inquiéter pour lui, cette fois-ci il allait y mettre un terme, à n'importe quel prix. Il avait faillit à son devoir de soldat hier. Il était allé trop loin pour reculer de toute façon.

Cette fois, il la tuerait pour de bon.

Il s'assurerait qu'elle meure sur le coup.

Peut-être qu'il avait eu tort au départ, mais la femme qui l'avait terrorisée hier n'était plus la princesse de la paix, elle était un femme cruelle et malsaine.

Un danger. Elle était un danger pour lui, elle devait mourir.

Après, il aurait tout le temps de se lamenter et de regretter d'avoir tiré sur Réléna la première fois. De toute façon, il était déjà au fond du gouffre. Le soldat était là pour le moment. Et hier il y avait eu Duo. Pour l'instant, il pouvait tenir. Pour l'instant il devait la tuer.

Pour l'après… Qui vivra verra.

Mais il ne regretterait jamais d'avoir tiré sur la Réléna qui lui avait fait face hier soir. Jamais.

- « Heero ? Tu es sûr que tu te sens mieux ? »

Le japonais sursauta.

Plongé dans ses pensées, il en avait presque oublié Duo, assit à côté de lui sur son lit.

Il frissonna quand ce dernier lui passa la main sur le front pour prendre sa température.

- « Tu as de la fièvre, Heero.

- …

- Tu devrais prendre un bain chaud après avoir mangé.

- Hn…

- Quand tu auras fini je te nettoierai ta blessure.

- Hai… »


Heero était à nouveau allongé sur son lit.

Il était à demi nu, tout juste vêtu d'un caleçon.

La douche lui avait fait un bien fou, il se serait presque endormi de bien-être sous l'eau chaude.

Mais ça n'était rien comparé à maintenant.

Duo était penché sur lui, en train de lui nettoyer sa blessure.

Ses mains étaient douces, rassurantes.

Pour la première fois de sa vie, quelqu'un s'occupait de lui avec douceur, quelqu'un prenait soin de lui. C'était nouveau, c'était si agréable…

S'ils n'étaient pas en guerre…

S'ils n'étaient pas en guerre il aurait aimé s'ouvrir à Duo. Partager quelque chose avec lui.

S'ils n'étaient pas en guerre, il aurait voulu qu'il s'occupe de lui comme ça.

Il se demandait comment Duo réagirait s'il lui disait qu'il avait envie de l'embrasser.

Il avait entendu dire qu'un baiser, c'était une preuve de tendresse, d'amour. De complicité aussi, les couples qui s'embrassent vivent des tas de choses ensemble, ils partagent.

Est-ce que ça valait aussi pour remercier quelqu'un ? Pour montrer sa reconnaissance, montrer qu'il aurait aimé le partage si tout avait été différent ? Même si ça n'était pas de l'amour ?

Est-ce qu'on pouvait dire tout ça dans un baiser ?

Hier soir, Duo l'avait embrassé. Il l'avait mordu, il y avait de l'excitation et de l'attraction à l'état brut, presque de la violence dans ce baiser. Ca n'était pas un baiser comme ceux que les amoureux se donnent.

Est-ce qu'on pouvait s'embrasser différemment ?

Sans que le stéréotype de « l'amour » ne se cache derrière ?

Il avait toujours envie de l'embrasser.

Même encore plus fort qu'avant.

Il était curieux, il voulait savoir.

Pourquoi était-il si curieux ? Lui-même doutait de la réponse. Il pressentait que s'il voulait lui donner un baiser, c'était maintenant, parce qu'après, après…

Après il y avait Réléna, Réléna et son rire, Réléna et la mort.

Duo était étranger à tout ça, il était celui qui cherchait à nouer contact, à partager.

- « Duo… »

Il avait prononcé son nom sans vraiment s'en rendre compte.

L'intéressé leva la tête.

- « J'ai presque fini. »

Heero grogna. Duo leva les yeux au ciel.

- « Oui, oui, j'ai compris, je finis, je finis… »

Il se hâta, finit de bander sa jambe blessée et sourit au Japonais.

- « Duo, arrête de te faire du souci pour moi.

- Impossible, Hee-chan.

- … Hee-chan ?, releva Heero, abasourdi. »

Il s'approcha de son coéquipier, colla sa joue contre la sienne, souffla dans son oreille tout en caressant ses cheveux.

- « Qu… Qu'est-ce que tu fais ? Hee… »

Son nom se perdit dans sa gorge.

Heero l'embrassa doucement, avec timidité, c'était presque tendre.

Sa main s'était perdue dans ses longs cheveux, elle le faisait frissonner.

Sa langue s'insinua dans sa bouche, caressa son palais, lentement, doucement…

Merci…

Le baiser prit fin aussi soudainement qu'il avait commencé.

Duo n'avait pas répondu ; les joues en feu, il ne comprenait pas.

Jamais on ne l'avait embrassé comme ça.

Tant de sentiments en même temps, tant de choses.

- « Duo…

- Je…

- Je voulais… Je voulais juste te remercier, et… Je voulais savoir ce que ça faisait… ce que ça aurait pu être si… on n'avait pas été 02 et 01.

- Hee-chan…

- C'est Heero, Duo… Ca ne change rien à ce que nous sommes et la façon dont nous travaillons ensemble… Ca ne veut rien dire de particulier, c'était juste… Que je voulais te remercier, parce que j'ai pensé que c'était le moment ou jamais. C'était le moment, mais ça ne veut rien dire de particulier.

- …

- Ca ne change rien entre nous, donc je ne veux pas que tu te mêles de mes affaires. »

Duo se dégagea de lui, ses yeux lançaient des éclairs.

Le brun lui empoigna le bras et le fit revenir à lui.

- « Je vais y retourner, tu ne m'en empêchera pas, et je ne veux pas que tu t'en mêle. Je la tuerai, je le dois. Mais je te suis très reconnaissant de m'avoir aidé et soigné. Je ne veux pas que tu sois mêlé à cette affaire, je ne veux plus que tu me gênes. »

Ses paroles dures, jetées à la figure de Duo, laissèrent le pilote 02 abasourdi.
Il ne savait pas quoi dire, il était… déçu ? Ca faisait… ça faisait presque mal.

Ce moment de faiblesse suffit à Heero.

Il assomma son coéquipier d'un coup sec dans la nuque. Il alla chercher une corde dans ses affaires et lui attacha les mains dans le dos. Plus tard, il sortit de leur appartement, habillé en civil, ressemblant à n'importe quel adolescent. Il était deux heures de l'après-midi.

Prêt.


Heero entra par la porte d'entrée de l'hôpital.

Il adressa un amical « bonjour » à la femme à l'accueil, demanda l'étage pour voir le patient imaginaire de la chambre 128, remercia la jeune femme pour son aide, et prit l'ascenseur tranquillement, comme si de rien n'était, comme s'il était un simple civil.

Il monta au troisième étage, là où il savait que la petite princesse se trouvait.

Mais quand les portes s'ouvrirent, il ne vit que des policiers.

Ils envahissaient tout le couloir, ils surveillaient la porte de la chambre de Réléna. Heero s'en doutait. Aussi les salua-t-il de la tête tout en passant tranquillement devant la porte de Réléna, faisant comme s'il cherchait une autre chambre.

Chose à laquelle il ne s'attendait pas néanmoins, elle était grande ouverte, et on pouvait voir la jeune femme, resplendissante dans sa chemise d'hôpital, assise dans son lit. Elle regardait fixement l'entrée, aussi ses yeux croisèrent-ils tout de suite ceux du terroriste.

Elle lui sourit.

C'était un sourire de complicité: Tu es encore en vie ? Et tu reviens en plus ? Je le savais…

Heero comprit immédiatement qu'elle l'attendait, que c'était la raison pour laquelle elle laissait la porte grande ouverte et qu'elle fixait l'entrée. Encore une fois, elle avait tout prévu, elle avait anticipé ses actions… Ca semblait plus simple que prévu.

Ou peut-être pas… Lui n'était venu que pour faire des repérages dans le but de la tuer le soir même. Mais elle l'invitait publiquement à le tuer maintenant…

Alors Heero sentit son cœur battre plus vite, comme hier soir.

Il réprima comme il pu ce sentiment d'angoisse et lui rendit son sourire.

- « Comment vas-tu, Hiruma ?, lui lança-t-elle depuis sa chambre

Jouant le jeu, il adopta un sourire de circonstance, et lui dit :

- « Très bien, merci. Et vous, votre santé ?

- A merveille ! Et je suis bien entourée !

- Hn…

- Mais ne reste pas planté dans le couloir, entre donc ! Il peut entrer, n'est-ce pas messieurs ? C'est un très bon ami à moi, un camarade de classe, il n'a rien de suspect ! »

Les policiers le regardèrent avec méfiance, mais si la princesse demandait elle-même à le faire entrer… Ils le fouillèrent quand même, et, ne trouvant rien, le laissèrent entrer et s'asseoir à côté de Réléna, sur le lit.

Réléna prit la parole et commença à parler, parler, parler d'elle, de la situation politique, de sa blessure, qu'elle ne se souvenait plus de rien, et bla bla bla…

Elle jouait la comédie à la perfection ; il avait l'impression qu'elle était redevenue comme avant.

Et lui répondait comme il fallait, quand il fallait. Il ne se savait pas si bon acteur.

Puis ils se turent. Chacun se regardait en biais, puis détournait le regard, puis se regardait à nouveau. On aurait dit un jeu d'amoureux. Les policiers les regardaient, amusés.

Ils formaient un beau couple, pensaient-ils.

Oui, dans le mensonge, ils avaient l'air d'un jeune couple d'amoureux.

- « Miss, je… »

Il s'approcha d'elle et lui chuchota une petite phrase à l'oreille, juste assez fort pour que le policier proche de la princesse l'entende : Je voudrais te parler seul…

Elle sourit, et détourna le visage comme si elle rougissait.

- « Messieurs, pourriez-vous nous laisser seuls, je vous prie ? »

Les hommes ne se firent pas prier. Souriant comme s'ils avaient tout compris, ils quittèrent la chambre un sourire moqueur sur les lèvres.

Quand la porte fut refermée, Heero se leva du lit, et son visage poli redevint dur.

- « Tu m'attendais.

- Bien sûr. Je savais que tu allais revenir. J'en étais persuadée. Si tu n'étais pas revenu, cela aurait voulu dire que tu étais mort.

- …

- Tu vas me tuer pour de bon cette fois ?

- Bien sûr.

- Tu n'as pas d'armes.

- Je peux te tuer à mains nues.

- Je peux hurler.

- J'aurai le dessus. Et il ricana.

- En plein jour, sous le nez des policiers ?

- J'ai connu pire.

- Tu es bien prétentieux. Je suis sûre que me tuer maintenant n'était pas ton plan de base… Et puis, hier tu n'as pas su me tuer.

- J'ai été déstabilisé, aujourd'hui je ne te raterai pas.

- Tu sais… Finalement je ne veux pas mourir, dit-elle comme si elle parlait d'un truc banal

- Je m'en contrefous.

- Tu ne veux pas savoir pourquoi je t'ai laissé revenir ?

- Non.

- Je vois. »

La princesse sourit ironiquement et Heero renifla, mécontent.

Il ne savait avait pas ce qu'elle « voyait », mais ça n'était pas son problème.

Il ne la laisserait pas parler comme hier, il ne se ferait plus avoir.

- « Tu as peur, Heero ? »

L'intéressé lui jeta un regard méprisant et s'approcha un peu plus d'elle :

- « C'est fini, Réléna, c'est fini, tu l'as dit toi-même, je t'ai déjà tuée. Considère maintenant que je te libère de ton poids, celui de vivre en te sachant morte par moi, je tue ce substitut de Réléna, je tue le démon qui te hante.

- …

- Sayonara. »


Notes : Il reste un chapitre, l'épilogue. Vous avez aimé, détesté ? Un commentaire m'aiderait vraiment, cette fic devient vraiment de plus en plus space...