Rouge Cicatrice, ou le Secret du Manoir Hanté

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Finalement on s'est assit sur un banc isolé vers l'est du parc, jambes croisés, j'ai regardé le feu d'artifice illuminer la nuit, attendant que mon compagnon ouvre enfin la bouche... Pas que je sois un grand fan de ce genre de choses, mais ici... c'est un peu l'attraction principale. Et puis disons-le franchement, les artificiers font un bon boulot ! Tout en regardant distraitement les couleurs envahir la nuit, j'ai sorti mon tabac et j'ai préparé une cigarette dans un silence dérangeant. Je ne suis pas homme à apprécier le silence, peut-être es-ce pour ça que je braille autant ?

- Tu ne devrais pas, c'est mauvais pour la santé... »
- Bah, c'est pas aujourd'hui que je vais m'arrêter ! »
- T'as raison, on ne sait même pas si on s'en sortira tous vivants... »
- Autant en profiter alors... On continue notre ballade ? »
- Si tu veux... »

Autant marcher... J'insupporte cette situation, pourquoi me faire sortir de ma chambre si c'est pour se terrer dans un silence incommodent. Je n'ai rien à lui dire, vous me direz, comme souvent ! On a fait le tour du parc s'en s'échanger plus de mots, je ne me sentais pas de tenir une conversation, et puis avec lui, je ne sais pas, je n'arrive pas à être naturel, je n'arrive même pas à sortir une banalité. On a regardé les gens s'amuser, les enfants rire, les couples s'embrasser... Ça fait du bien... Voir des gens normaux, dans un cadre normal. Ça change des hôtels bons marchés et des coupes gorges remplis de monstres...
Nos pas nous ont mené vers un truc se nommant Round Square... Ben voyons un carré rond. Je savais que Dio n'avait pas toute sa tête, mais alors là ! Chapeau ! Je ne peux m'empêcher de rire nerveusement, qu'es-ce que c'est que ce truc ? La jeune femme à l'entrée de l'attraction nous fait signe d'approcher, je préfère esquiver...

- Haha, je suis trop vieux pour ce genre d'attraction mademoiselle ! »
- Oh voyons, il n'y a pas d'age ! »
- Nan... ça ira ! »
- Faites plaisir à votre... fils ? »
- Mon fils ? Hein ? »
- Il y a une jolie vu de là haut, vous verrez vous ne serrez pas déçu ! Alors vous montez ? La prochaine cabine, ne devrait pas tarder... »
- Allez papa Cid, on y va... »

Cette demoiselle a besoin de lunettes, assurément. Oui, Vincent a cette androgénéité qui fait qu'on ignore au premier coup d'œil l'age qu'il a. Mais de là à le prendre pour mon fils... Je suis pas si vieux que ça quand même ! Mon fils ? Je refuse, je suis pas encore quinquagénaire ! En plus, on a vraiment pas de ressemblance physique, c'est même tout mon contraire. Vincent a dégrafé sa cape puis m'a souri, c'est la première fois que je vois son visage en entier, il est plutôt... beau... ouai, c'est un beau garçon ! Mon regard glisse sur ses lèvres étirées, il semble se jouer de la jeune femme qui vient de rougir à cette apparition. Son regard rouge pétille puis me transperce, il semblerait qu'il ait envie de monter là dedans ! Pas que ça me tente, m'enfin si ça lui fait plaisir...

- Vous avez là un bel... am... enfin, peu importe... »

La jeune femme s'est mise à rougir lorsque Vincent lui a fait un baise-main. Quel gentleman, je ne soupçonnais pas cela de sa part. C'est en effet surprenant, le connaissant, mais d'un autre côté, il serait dommage qu'il continue à vivre dans le passé, soit sa femme est morte, mais il jouit d'une longévité qu'il lui faudrait combler d'une quelconque présence... C'est du gâchis de vivre reclus comme il le fait alors qu'il est quasiment capable de vivre comme un humain.

- Merci pour le compliment mademoiselle...»

Il s'est retourné sans s'occuper outre mesure de la jeune femme puis m'a attrapé par la main, je me suis un peu reculé n'ayant finalement aucune envie de m'enfermer dans une cabine minuscule avec Vincent ! Je n'ai jamais aimé les attractions, même gosse, ce n'était pas aujourd'hui que j'allais monter dans un manège surtout avec lui ! De quoi on allait parler, qu'es-ce qu'on ferait pendant l'attraction ? Je soupire observant ses yeux rouges qui m'appellent silencieusement. Je me suis senti soudainement faible, comme s'il m'avait hypnotisé et sans rien faire, je me suis laissé attiré vers lui d'une simple traction...

- Allez papa, on y va ! »

Je me suis mis à rougir moi aussi, le peu de volonté qui me restait, a essayé de me dégager de sa main, mais bizarrement... j'ai abandonné... Depuis quand le vieux ronchon que je suis, se laisse guider de la sorte ? Je suis un Capitaine, un chef, j'ordonne et on me suit, c'est bien la première fois, oui la première fois que je me laisse dicter mes actes par autre chose que la destiné. Je soupçonnai quelques sortilèges dans ce regard rouge qu'il tend de temps à autre.
La cabine peut contenir deux personnes, pas plus... Cette attraction est étrange... elle a un relent romantique qui me déplait fortement. Je m'assois sur l'espèce de banquette en soupirant, la créature qui m'accompagne vient de s'installer en face de moi avec ce visage d'outre-tombe. Vincent peut passer d'un extrême à l'autre en un clignement de paupières, c'est assez déstabilisant. Bon... et bien, la porte vient de se refermer et nous voilà coupé du monde... Mais, bon dieu, qu'es-ce que je vais bien lui dire ? Pourquoi moi ? De tout le groupe il aurait pu faire meilleur choix ! Pourquoi pas Yuffie ? Elle semble nourrir une sorte de fanatisme pour Vincent. C'est discret, mais j'ai bien vu ses yeux émerveillés lorsqu'il se tourne vers elle. Ha ! La jeunesse ! D'un autre côté, il aurait bien l'age d'être son père...

- On croirait un truc romantique... Et puis encore une chose, ne me rappelle plus jamais, JAMAIS papa Cid, d'accord ! C'est hors de question ! »

Papa... je fais une allergie à ce mot. Si à mon age je n'ai pas de gosses, malgré les demandes détournées de Shera, c'est que je n'en veux pas et que je n'en aurais jamais ! Je n'ai aucune fibre paternelle, en fait, je déteste les enfants ! Vincent a détourné le visage, comme si il ne m'avait pas entendu, son regard s'est posé sur le hublot en face de lui et un petit oui est sorti de ses lèvres... Finalement, j'ai gueulé, à croire que je ne sais m'exprimer autrement, que par la colère. Mais quelque part, je donnerais tout pour être loin d'ici. J'ai tourné les yeux en direction du hublot opposé, sans essayer de m'excuser, après tout, le mal et fait. Je pense que je vais profiter de ce énième silence pour me rouler une clope, de toute façon, il n'y a rien d'autre à faire ici à part fumer et patienter !
Ce silence a duré plus de dix minutes... Comment je le sais ? C'est la troisième cigarette que j'allume, un vrai pompier ! C'est comme ça quand je sais pas quoi faire ou quand je suis stressé et là le baromètre de stresse est à plus de 100. Je regarde vaguement les lumières du parc, de si haut le spectacle me parait magnifique, un simple changement d'angle de vue et même un parc d'attraction peut paraître féerique. Et c'est moi qui vient de penser à ce mot, on aura tout vu... Une main se pose sur mon genou, apparemment Vincent vient de ce décider me faire part de ce qui le tracasse. C'est avec soulagement que je quitte le spectacle des yeux pour me tourner vers lui. Quelque chose n'est pas naturel dans sa façon d'être et surtout dans la façon qu'il a de me regarder à la dérobée... baromètre de stress à 150, Capitaine on a un problème !

- Qu'es-ce qu'il y a ? »

Il n'a rien dit, je l'ai vu se rapprocher de moi silencieusement. Chaque mouvement qu'il effectue semble mesuré et tellement inhabituel. Lorsque ses yeux ont enfin fait face aux miens, j'ai détourné le visage tandis que le sien s'est plongé dans mon cou. Je me suis retrouvé paralysé, je n'ai rien dit, rien fait, j'ai attendu qu'il daigne enfin dire quelque chose... Du genre... qu'es-ce qui lui prenait tout à coup ou pourquoi il agissait tout à coup bizarrement ? Ou mieux, pourquoi il me glaçait le sang avec cette proximité terrifiante. Mais le silence a emplie la cabine. Sa respiration est lente et profonde, sa main vient d'enserrer mon bras, damned, mon baromètre de stress a fait un piqué sur les 200, pendant cette attente qui m'a semblé durer une éternité. Attendre n'est pas mon fort, surtout quand une sorte d'angoisse me prend à la gorge. Son souffle est maintenant quasi inexistant, je me demande bien ce qui lui arrive. Il ne semblait pas plus mystérieux que d'habitude ces derniers temps, alors ? Qu'y a-t-il de si important pour que le brun taciturne du groupe requiert ma présence en cette soirée forte incommodante ? Vincent semble enfin bouger, mais au lieu de prendre la parole et de m'éclairer sur toute cette mascarade, il s'installe sur la banquette tout contre moi puis détourne son regard vers le hublot dans un silence qui me terrifie.

J'ai dû fumer une demie douzaine de clopes, essayant de ne pas me formaliser plus que ça de cette manière d'être tactile qui ne lui correspond pas. Heureusement que c'est bien aéré, sinon on voguerait dans une fumée bleutée.

- Cid... »

J'ai lâché ma cigarette de surprise, pour un peu, il m'aurait bien fait faire un arrêt cardiaque. Je ne m'attendais plus à ce qu'il dessert les dents du restant de l'attraction. Machinalement, je me tourne vers lui, me retrouvant à quelques centimètres de son visage. Quelque chose me stupéfait, on dirait que ses yeux sont devenus translucides, oui un rouge translucide qui me saigne le cœur à blanc.

- Hein ? Qu'es-ce qu'il y a ? »

Ce regard a quelque chose de dérangeant. Déjà, un regard rouge c'est pas spécialement des plus réconfortant, mais avec cette teinte livide, excusez-moi, ça ne me met pas du tout à l'aise ! Surtout quand ce regard ne donne qu'une impression, Vincent semble sur le point de s'effondrer en sanglot... Et ça croyez-moi sur parole ça donne des sueurs froides ! Sa tête s'est posée sur mon épaule puis son bras s'est agrippé au mien. Baromètre de stress à plus de 300, c'est carrément la terreur qui me tenaille là ! Mais qu'es-ce qui se passe bon dieu ? Une déprime ? Manquerait plus que ça ! Es-ce que j'ai la tête d'un psy ?

- Cid, ça te dérange si je reste comme ça ? »

Genre ? Genre pas du tout, prend tes aises, tu vois bien que j'adore ça ! Quelle question stupide ! Étrangement j'ai gardé cette remarque pour moi, je n'ai pas ouvert la bouche, je n'ai pas répondu. Peut-être que quelque part je me soucis de l'impact que ça aurait pu avoir sur lui. Ou peut-être que je n'avais pas envie de ronchonner pour une fois. Pour une nuit... Rien qu'une nuit avant les batailles qui scelleront la fin de ce monde... Aurait-il besoin d'une épaule pour le soutenir ? Aurait-il peur d'y laisser la vie ou quelque chose d'inaccompli ? Pour ne pas en douter il se dressera devant son pêcher... est-il vraiment sûr d'être le père de Sephiroth ? En tout cas, il est le fils de la femme qu'il a aimé, peut-être se sent-il coupable de la fin du monde... Vincent a toujours tendance à croire que tous les maux de monde sont la cause de son existence... tss..
C'est le blanc complet, c'est la première fois que je ressens ça. J'ai passé ma vie sur et avec des machines, le comportement humain me dépasse... Sa main a touché ma joue et a ramené ma tête en sa direction. J'espère que cette fois, il va me parler... Nos regards se sont croisés, j'ai eut un pressentiment incongru, comme si... En tout cas je ne m'attendais pas à ce que, Vincent pose ses lèvres sur les miennes dans un chaste baiser. Damned ! J'ai essayé de le repousser, c'est plus de la panique qu'un réflexe ! Imaginez, même Shera ne m'avait jamais fait un plan pareil ! Mes mains ont rencontré une résistance presque brutale, il semble évident que mon camarade n'est pas du tout disposé à me laisser glisser hors de son emprise. Mais bon sang, il... il... il est en train de m'embrasser ! Il aurait pu me demander mon avis ? Il...
Plus le gtemps de penser à tout ça, il y avait plus urgent, tout à coup poussé par une pulsion auto défensive, je me suis levé d'un bond en le repoussant violemment et surtout en hurlant des jurons dignes de ce nom !

- Haaaaaaaaaa merde ! Saloperie ! Merde, merde, merde et remerde, Nom d'une biquette à ressort ! »
- Excuse-moi... »

Vincent s'est retourné en silence serrant sa cape entre ses bras, so regard tout à cou fuyant vient de tomber cotre le sol. Vu comme ça, on croirait presque un enfant que l'on vient de gronder... je viens de faire une nouvelle boulette... pourtant je n'en avais pas après lui, là... Nan ce n'est pas contre lui que je peste, bien que j'en aurais le droit... En tout cas je suis soulagé que ce baiser vienne de prendre fin.

- Raaaah ! »

Je me suis baissé, attrapant le mégot que j'avais laissé tomber quelques minutes plus tôt. Le dit mégot s'était imposé à mon souvenir de la façon la plus brûlante qu'il soit. On ne joue pas avec le feu, surtout avec celui d'un mégot, croyez moi, je ferais attention la prochaine fois, car ma cuisse en portera un mordant souvenir. Bordel !

- C'est pas pour toi que j'ai râlé, c'est juste que ma clope était en train de me brûler... Au fait... Qu'es-ce qui te prend tout d'un coup ? Me dit pas que... t'es... amoureux de moi... ça me ferait bien rire ! J'arrive pas à comprendre, t'es le genre de mec toujours ailleurs. Je veux dire, je ne t'ai jamais vu être comment dire... humain... Non pas que j'insinue que t'es un monstre, hein ? Juste que... »
- T'as le droit de le dire, t'as vu en quoi je me transforme quand je mets en colère... J'ai plus rien d'humain ! Hojo a fait de moi, un vrai monstre ! J'aurai dû rester dans mon musée des horreurs... »

Sa voix m'a parut étrangement brisée, ça m'a laissé un peu confus... Je ne voulais pas dire cela, je ne le pensais même pas ! Cette fois-ci, c'est mes baromètres de stupidité et de je m'en veux à mort qui sont passés en état critique. Un petit sourire étire mes lèvres et je me rassois à ses côtés, essayant de réparer mes erreurs, ça va être dur.

- Excuse-moi, ce n'est pas ce que je voulais dire... »

Ses yeux sont embués de larmes et m'apellent muettement. Je ne suis pas quelu'un d'insensible, loin de là. Cette détresse dans son regard m'interpelle à tel point que je le prends dans mes bras. Je ne sais pas pourquoi j'ai fait ça... peut-être, par ce que c'est son seul souhait, être réconforté par quelqu'un... Mes mains carressent sa chevelure sombre tandis que je regarde le sol se rapprocher de nous. On va pouvoir enfin sortir de cet endroit flippant.
Le corps de Vincent échappe de mes bras, il semble gêné de sa propre réaction. Il y a de quoi, ce n'est pas lui ça. Un rapide merci sort de ses lèvres. Son regard me fuit désormais, j'attrape sa main, comme pour lui signifier que je ne lui en tiendrai pas rigueur. Qu'importe, chacun ses moments de faiblesse. Un sourire glisse sur mes lèvres. Un rictus glisse sur les siennes. On se regarde depuis un moment, main dans la main... c'est limite clichet comme truc !
Son corps se meut, il est maintenant assis sur mes cuisses. Ses mains glissent contre mon visage. Je ne m'en offusque plus vraiment, d'ailleurs j'ignore pourquoi. J'ai les bras en croix posés sur le dossier de la banquette et je regarde cet homme, découvrant une facette de lui que je ne connais pas... Un nouveau baiser voit le jour mais avant qu'on l'est calculé, la cabine s'est stoppée et la jeune femme avait ouvert cette satanée porte, arrêtant là l'élan de Vincent. La pauvre fille ne sait plus où se mettre, je la comprends. Je n'aimerais pas à avoir à surprendre deux hommes dans cette situation, moi non plus.