Doloris

Par Maria Ferrari

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Base : Harry Potter tomes 1 à 5

Disclaimer : Les personnages de Harry Potter ne m'appartiennent pas, ils sont la propriété de J.K. Rowling . Je ne tire aucun profit financier de leur utilisation.

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—Chapitre 5—

Armoires et valises grandes ouvertes, Ginny et Ron s'activaient à préparer leurs affaires. Les vacances touchaient à leur fin ; ils prenaient le Poudlard Express le lendemain. Ron était joyeux ; il allait enfin retrouver ses amis et il ne verrait plus Malefoy… le père en tout cas, l'avantage indéniable avec le fils étant qu'il ne vivait pas dans la même maison que lui, ce qui était toujours ça de pris. Ginny était assez contente aussi, sa mère lui avait acheté son fameux haut et elle s'était bien gardée de le porter jusque-là, le réservant pour le trajet dans le Poudlard Express, elle se gargarisait par avance des sifflements admiratifs des garçons sur son passage dans les couloirs du train et des compliments de ses amies.

« Et surtout, vous n'oubliez rien. Surtout toi Ginny, je ne veux pas avoir à t'envoyer par hibou ta brosse à dents, ta chemise de nuit et tout ce que tu avais laissé ici l'année passée. Ron ! N'entasse pas tout n'importe comment ! Tous tes habits vont être froissés ! »

Après avoir ainsi invectivé ses enfants, Molly redescendit en marmonnant tout le mal qu'elle pensait de leurs bagages depuis qu'ils les faisaient eux-mêmes.

Pour ne pas changer une habitude désormais bien établie, Lucius était assis dans le canapé ; il avait finalement trouvé l'endroit où les ressorts étaient le moins fatigués et s'était approprié cette place. Les jambes croisées, il feuilletait un magazine emprunté à Ginny en écoutant Dumbledore d'une oreille distraite. Ce dernier venait tout juste de transplaner et se tenait debout non loin de lui, vêtu d'une robe violette parsemée d'étoiles du plus mauvais goût ; Lucius avait beau en avoir la preuve sous les yeux, il avait tout de même de la peine à croire qu'il en existe pour oser se montrer ainsi accoutré en dehors des jours de carnaval.

« Je risque d'être assez occupé à Poudlard les premiers jours de la rentrée. C'est pour cela que j'ai préféré venir vous voir aujourd'hui », expliquait-il en s'asseyant à ses côtés. Il ôta le magazine des mains de Lucius d'un geste péremptoire – ne tolérant pas qu'il feigne l'indifférence – et le lança sur la table basse ; Lucius s'abstint de protester, la feuille de chou était clairement destinée aux ados coquettes et présentait peu d'intérêt pour lui ; il était en train de vider les fonds de tiroir des lectures, bientôt il attaquerait les romans à l'eau de rose de Madame Weasley. « Il y a des chances pour que Voldemort décide de se manifester bientôt. Jusqu'ici c'était encore les vacances, certains sorciers étaient rendus à l'étranger, dont certains de ses adeptes, poursuivait le directeur.

— Bonjour Albus, salua Molly chaleureusement.

— Ah ! Molly ! Les enfants sont-ils prêts ? » demanda Dumbledore, changeant immédiatement de sujet de conversation. Il se leva pour l'embrasser.

« Presque, répondit Molly.

— Dumbledore, est-ce que Drago a pu acquérir tout son nécessaire ? s'inquiéta soudainement Lucius.

— Oui, Severus s'en est chargé.

— Comment va-t-il ?

— Ma foi, Severus se porte fort bien.

— J'en suis ravi, croyez-le. Cependant, je parlais de mon fils.

— Drago aussi. Désolé qu'il ne puisse pas vous donner de ses nouvelles directement, mais j'ai peur qu'on surveille les hiboux entrants et sortants de Poudlard, je crains surtout qu'on les suive.

— Je le conçois. Vous n'avez pas à vous en excuser.

— J'ai tout de même remarqué que deux hiboux ont été envoyés, le premier par votre fils, le second par votre femme.

— Vous êtes bien informé. Deux hiboux sur une période de presque deux mois, ce n'est pas grand-chose. Il n'y a que vous qui avez dû le remarquer. J'avais demandé de l'argent à Narcissa. Quant à Drago, il a pris l'initiative de m'envoyer un livre afin de m'occuper. »

Livre qui, renseignements pris, s'était avéré écrit par un Moldu. Cela n'enlevait bien sûr rien à la qualité du livre – au grand dam de Lucius –, ce qui serait bon à savoir, c'était comment ce livre s'était retrouvé entre les mains de son fils. L'avait-il lu ? Savait-il qu'il était d'un Moldu ?

« Votre fils se soucie de vous.

— Oui, et bien que je comprenne votre décision – je la comprends d'autant mieux que ma propre sécurité est en jeu – il est regrettable qu'il ne puisse m'adresser des courriers ou des colis, j'aurais aimé qu'il m'envoie d'autres livres, je m'ennuie comme un rat mort ! – Voyez où j'en suis réduit ! s'exclama-t-il en désignant d'un doigt méprisant le magazine. – Sans compter que ses courriers sont à eux seuls une occupation digne de ce nom. Un de ces jours, il faudra que je réunisse toutes les lettres qu'il m'a envoyées et que je les publie dans un recueil. Il a un style intéressant et une langue de vipère comme – malheureusement – plus personne n'en a. Sa prose m'a toujours été distrayante. A la fin de chaque semaine qu'il passe à Poudlard, il m'envoie d'habitude sept ou huit pages d'une écriture serrée.

— Mes enfants ne m'écrivent jamais à moi, remarqua Molly. Sauf pour me réclamer quelque chose qu'ils ont oublié, ajouta-t-elle avec une moue désabusée.

— Ils n'en voient sans doute pas l'utilité et ne sauraient peut-être pas quoi dire. Tout le monde ne regarde pas la vie d'un œil cynique comme le fait Drago pour ensuite la retranscrire sur le papier. Et puis, certaines gens sont plus faites pour l'écriture que d'autres, expliqua Albus.

— Oh, quand il s'agit d'Hermione ou d'Harry, Ron sait très bien écrire ! rétorqua Molly. Vous voulez sûrement avoir une conversation privée comme à chaque fois, je vais donc vous laisser seuls tous les deux. »

Arthur choisit ce moment pour revenir du jardin, un petit bol rempli de fraises à la main. Il salua amicalement Dumbledore, posa le bol sur la table basse et se laissa tomber sur le fauteuil qui lui faisait face.

« Tout est prêt pour accueillir les élèves ? demanda-t-il jovialement.

— Nous sommes fin prêts, comme chaque année.

— Vous avez trouvé un nouveau professeur de défense contre les forces du mal ? »

Lucius eut un ricanement.

« Qui y a-t-il de drôle ? demanda Dumbledore, un sourire indulgent aux lèvres.

— Rien que le nom de cette matière incite au rire. Personne de réfléchi n'intitulerait un cours ainsi. "Les forces du mal" ! C'est pompeux, manichéen et cela emprunte un terme générique de livres pour enfants. » Sur cette parole, il préleva une fraise dans le bol et la croqua.

« Je vois. Vous serez donc heureux d'apprendre que j'ai supprimé cette matière.

— Vous vous y êtes enfin décidé ? demanda Lucius, les sourcils haussés.

— J'y ai été contraint ! Je n'ai trouvé aucun professeur pour l'enseigner cette année. Je l'ai donc supprimée du programme… et comme j'avais une place pour une autre matière, j'ai créé le cours d'initiation aux créatures maléfiques. Je n'ai eu aucune peine à trouver un professeur pour l'enseigner. »

Lucius avait froncé les sourcils à l'énoncé de la nouvelle matière, il s'adossa au canapé, les jambes croisées, prit un genou entre ses mains, tout en ne quittant pas Dumbledore des yeux. Il flairait l'entourloupe.

« Cela consistera en quoi ? s'enquit Arthur naïvement, soucieux de l'éducation de ses bambins.

— On apprendra aux enfants les caractéristiques des créatures maléfiques, leurs points forts, leurs faiblesses et la manière de les combattre.

— N'était-ce pas déjà le principe du cours de Défense contre les Forces du Mal ? demanda Lucius, soupçonneux.

— J'admire votre perspicacité, c'est effectivement exactement la même chose ! » s'exclama Dumbledore, très joyeux. Le blond leva les yeux au ciel. « Ne faites pas cette tête-là, Lucius ! Après tout, la première chose que vous reprochiez à cette matière, c'était le nom qu'on lui avait donné, n'est-ce pas ?

— C'est exact », admit le blond de mauvaise grâce avant d'aller dans la cuisine se servir un verre d'eau.

Arthur suivit Lucius du regard, un léger sourire aux lèvres, les yeux rêveurs. Quand ses yeux revinrent se poser sur Dumbledore, il s'aperçut que celui-ci le toisait sévèrement.

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« Faites vos valises, Lucius », ordonna le Directeur à peine l'aristocrate revenu.

Lucius s'arrêta de boire et le regarda, les yeux grands ouverts.

« Il vaut mieux que vous soyez à Poudlard. C'est plus prudent, compléta Albus.

— Pourquoi cette décision soudaine ? s'étonna Lucius.

— J'ai réfléchi et je préfère que vous soyez à Poudlard. Voldemort apprendra peut-être où vous êtes, mais il ne pourra rien faire contre vous. Et puis, je vous aurai sous la main ainsi, cela sera plus pratique. »

Lucius resta silencieux quelques secondes.

« Bien », lâcha-t-il, laconique, avant de grimper à l'étage, ruinant sans le savoir les espoirs de Ron de ne plus le voir. Il préférait aller à Poudlard que rester au Terrier, au moins ne se ferait-il plus houspillé par Molly quand ses jambes se trouvent dans le passage de son balai et qu'il ne les relève pas assez vite à son goût.

« Vous vous rendez compte de ce que ça implique de l'héberger à Poudlard ? Les élèves vont le voir, certains risquent de mal le prendre. Cela va se savoir. Cela va arriver aux oreilles de Fudge ! déclara Arthur dès que Lucius fut hors de portée de voix.

— Fudge ne me fait pas peur, ce serait plutôt le contraire. Qu'ils essayent de venir à Poudlard pour mettre Lucius en prison alors qu'il est si utile pour notre cause et ils verront ! déclara Albus d'un ton menaçant.

— Tout de même, vous allez vous mettre dans une situation délicate vis-à-vis de tout un tas de monde !

— Ce ne sera pas la première fois. Je sais ce que je fais, Arthur. Il est plus prudent pour tout le monde que Lucius se rende à Poudlard.

— Vous-savez-qui ne peut pas savoir que Lucius est ici. Pourquoi serait-il plus en sécurité à Poudlard ? Cela pourrait au contraire mettre en danger les enfants !

— Voldemort n'attaquera pas Poudlard tant que j'y serai et qu'il se sentira moins fort que moi. Si un jour il présume sa puissance supérieure à la mienne, la présence ou non de Lucius Malefoy en ces murs ne changera rien car il y a déjà Harry à Poudlard. Quant au Terrier, Voldemort pourrait déduire que Lucius se cache là par recoupements.

— Par recoupements ? Mais enfin Albus, vous vous rendez compte le nombre de lieux où Lucius pourrait se cacher ? Ici serait bien le dernier endroit où des gens connaissant nos rapports conflictuels viendraient le chercher.

— Certes, cependant ma décision ne souffre aucune discussion. Il me semble plus prudent pour tout le monde que Lucius ne soit plus au Terrier, à commencer par votre famille.

— Lucius ne leur fera pas de mal et je suis sûr que Voldemort ne saura jamais qu'il est ici.

— Ce n'est pas Voldemort qui fait peser un danger sur votre famille. Quant à Lucius, il en fait effectivement peser un mais d'une autre nature que celui auquel vous songez… et il n'en est pas conscient. Il vaut mieux qu'il s'éloigne du Terrier avant que des choses regrettables se produisent.

— Je ne comprends rien à ce que vous dites.

— Il est sans doute préférable que vous ne soyez jamais amené à le comprendre.

— Il a changé, il ne fera de mal à personne. Et pourquoi serait-il une menace pour ma famille sous mon toit et qu'il ne le serait plus à Poudlard ? J'ai encore deux de mes enfants là-bas !

— Il semblerait que Lucius fasse des ravages sans s'en rendre compte ni le vouloir dans le cœur d'une certaine personne. Et cette personne ne sera pas à Poudlard. Cela évitera donc que sa famille vole en éclats… en espérant que le mal n'est pas déjà fait. »

Arthur resta interdit. Que sous-entendait Dumbledore ? Ce qu'il disait n'avait aucun sens. De qui parlait-il ? Puisque Ron et Ginny se trouveraient toujours sous le même toit, ça ne pouvait être que sa femme ou lui. Lucius ? Des ravages dans le cœur de Molly ? Arthur avait du mal à le croire, cela ne pouvait être ça. Il ne restait donc que lui. Allons donc ! C'était ridicule ! Il n'était absolument pas attiré par Lucius ! Du moins pour ce que Dumbledore en savait ; il n'avait jamais montré le trouble que lui provoquait son invité ?

Et si Dumbledore savait pour les visites matinales qu'il rendait à Lucius ? Non, il ne pouvait pas savoir. Cependant, il semblait savoir beaucoup de choses sur beaucoup de sujets, y compris les plus inattendus, et c'était après l'avoir regardé de façon sévère qu'il avait pris cette brusque décision, c'était en le regardant si durement qu'il avait accentué sur "cette personne", il semblerait donc bien qu'il s'agisse de lui.

« En quoi la présence de Lucius sous mon toit causerait des ravages dans mon cœur ? » interrogea-t-il. Il voulait une réponse claire. C'était vrai qu'il était troublé, mais ce n'était qu'une légère fascination, rien de plus ! Quelque chose d'assez bénin en fait, de routinier, qui lui passerait certainement.

« Je ne vais certainement pas vous aider à trouver la réponse à cette question. Croyez-moi, Arthur, plus loin vous serez de Lucius, mieux votre famille se portera. Votre insistance à vouloir qu'il reste chez vous en témoigne… Y a-t-il un objet ici que je puisse transformer en portoloin ? »