Doloris
Par Maria Ferrari
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Base : Harry Potter tomes 1 à 5
Disclaimer : Les personnages de Harry Potter ne m'appartiennent pas, ils sont la propriété de J.K. Rowling . Je ne tire aucun profit financier de leur utilisation.
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—Epilogue—
Les arbres, dans leur symphonie de couleurs, tranchaient avec le gris opaque du ciel, les feuilles automnales craquaient sous leurs pas, des flaques d'eau d'une pluie récente jalonnaient le chemin. Le temps était frais et humide ; Molly resserra son châle.
« C'est tout de même joli d'avoir tant d'arbres que ça forme un bois autour de sa maison, remarqua-t-elle. Ce doit être reposant de vivre dans un tel cadre. Dommage que l'intérieur de la maison soit si sombre, ça ferait un endroit vraiment très agréable. »
La vie était douce depuis quelques mois, depuis qu'Harry avait vaincu Voldemort, mettant fin aux menaces planant au-dessus du monde sorcier. Les jours qui avaient suivi s'étaient écoulés dans une saine euphorie, puis la vie normale avait repris son cours. D'une certaine manière, c'était comme si Voldemort n'avait jamais existé ; Arthur s'en étonnait souvent.
Ils débouchèrent sur une cour. Au centre se trouvait une fontaine : une jeune femme à moitié dénudée versait de l'eau cristalline dans un bassin de trois mètres de diamètre ; un manoir imposant se dressait derrière.
Arthur saisit le marteau et frappa trois coups. La porte s'ouvrit quelques secondes après et un Drago aux joues rosies d'avoir couru leur imposa le silence d'un doigt sec placé à la verticale devant sa bouche. Il avait dû descendre de sa chambre située à l'étage, dévaler les escaliers et traverser les couloirs le plus vite qu'il pouvait.
« Il se repose, il ne faut pas le déranger, murmura-t-il, catégorique.
— Ils ne me dérangent pas, détrompa Lucius du haut de l'escalier, trop content de pouvoir échapper provisoirement au joug tyrannique de son fils.
— Tu devais te reposer ! » s'exclama Drago, la voix lourde de reproches. Depuis la fin de l'année scolaire dernière, il s'était érigé en infirmier de son père, et sa sévérité dans ce rôle était à la hauteur de son inquiétude. Il faisait sa dernière année d'étude obligatoire par correspondance pour pouvoir surveiller son père : Voldemort était mort mais cela ne changeait rien à ce que son père avait subi et aux séquelles qu'il endurait, et il ne faisait pas toujours attention à lui.
Quand Drago avait annoncé à ses parents sa décision de suivre ses cours au manoir, Narcissa avait gardé le silence, encourageant son fils par son mutisme, Lucius, quant à lui, était totalement contre et le lui avait fait savoir : effectuer par correspondance l'année des examens principaux pouvait se révéler périlleux, il n'était pas question que son fils prenne ce risque insensé.
Ce que Lucius avait omis de préciser, c'est que son refus était principalement motivé par le fait qu'il aurait adoré se débarrasser de Drago au moins durant le temps de ses études ; celui-ci n'avait de cesse de le rappeler à l'ordre, ce qu'il trouvait non seulement contraignant mais aussi quelque peu humiliant.
Drago s'était montré intraitable ; il avait pris de l'assurance et ne craignait plus son père ; il était de toute façon beaucoup trop inquiet pour lâcher le morceau. Lucius, affaibli par sa maladie, s'était vu obligé de donner son accord.
Au fond de lui, il était satisfait que Drago se sente tant concerné par sa santé, cela démontrait qu'il tenait à lui, et l'affection de son fils lui importait beaucoup ; et même s'il ne l'avouait pas, il trouvait agréable qu'on s'occupe de lui. Cependant, dans le cas présent, c'était un peu trop : son fils en devenait geôlier.
« Je vous ai fait un gâteau au chocolat, vous m'en direz des nouvelles ! déclara Molly pour décrisper Drago et changer de sujet.
— Il ne fallait pas vous donner cette peine », remercia Lucius en acceptant le présent d'un sourire. La diversion de Molly ne fit pas perdre une once de sévérité au regard de Drago ; Lucius fit mine de l'ignorer. « Allons-nous asseoir », les invita-t-il en indiquant le salon d'un geste ample.
Ils le suivirent. Les meubles, nombreux, étaient cossus et certains avaient sûrement été créés sur mesure pour le manoir à voir la façon dont ils se nichaient parfaitement dans les recoins biscornus ; les tableaux s'alignaient sur les murs, des fleurs fraîches ornaient la table basse – Narcissa avait passé de longue date un accord avec la fleuriste pour qu'elle apporte un bouquet différent chaque matin ; elle aimait que sa maison soit en permanence fleurie, cela donnait une touche de fraîcheur et d'élégance.
« Tu nous sers à boire, Drago ? »
Il n'y avait plus d'elfes de maison depuis leur libération générale suite aux accords signés entre les différentes espèces à la fin de la guerre. Les représentants sorciers étant de fort belle humeur dans ces instants joyeux et Dobby ayant été le seul elfe de maison à se présenter à ces accords – ses propositions étant ce qu'on peut imaginer –, les elfes de maison avaient tous été déclarés libres et il avait été décidé qu'ils méritaient vêtements, salaire et bon traitement. Beaucoup d'elfes de maison s'étaient retrouvés à la rue – la majorité des sorciers refusant de les payer – ; d'autres – plus rares – étaient partis de leur plein gré ; certains n'étaient pas partis et n'avaient pas été renvoyés, ils se retrouvaient donc rémunérés par leurs maîtres (désormais nommés "employeurs", officiellement tout au moins) et accueillaient pour la plupart leur paie avec effroi. Leur reconversion s'effectuait malgré tout et ils s'habituaient bon gré mal gré à cette nouvelle vie ; une partie d'entre eux, qui grossissait de jour en jour, reconnaissait que leur nouvelle situation avait plus d'attraits que la précédente.
Lucius avait embauché du personnel pour remédier au départ de Lali et Totu qui avaient tous deux décidé de découvrir le monde (il avait toujours été persuadé que la fréquentation de Dobby pendant de longues années avait été nocive à ses autres elfes). Ses domestiques ne logeaient pas au manoir et n'étaient présents qu'une partie de la journée ; Lucius tenait à s'assurer une intimité dans sa maladie.
Drago adressa un coup d'œil méchant à son père et s'exécuta de mauvaise grâce. Il s'accroupit à côté d'un meuble, en sortit une bouteille et deux verres qu'il alla poser sur la table basse ; il les remplit à moitié. Son père s'abstint de lui faire remarquer qu'il avait oublié de lui prendre un verre sachant très bien que lorsque Severus avait dit "boire très peu d'alcool", son fils avait entendu "ne plus boire d'alcool du tout" ; il faudrait d'ailleurs qu'il songe à remédier à cette surdité légère et sélective, surtout que Merlin savait qu'il buvait de toute façon très peu !
C'était tout de même malheureux de se faire dicter son attitude par son propre fils ! Lui qui avait tellement d'autorité sur lui auparavant, voilà que depuis peu la situation se trouvait totalement inversée.
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Ils parlèrent beaucoup. Lucius s'intéressait aux dragons de Charlie, aux résultats de Ginny et Ron à Poudlard, à la bonne rentabilité du magasin de farces et attrapes des jumeaux ; Molly s'inquiétait des résultats de Drago, réussissait-il de la même façon par correspondance qu'à Poudlard ? Au grand dam de Lucius – qui aurait pu profiter de notes inférieures à son niveau habituel pour renvoyer son fils en pension –, la réponse était oui. En fait, il réussissait même mieux ; Lucius avait la nette impression que Drago avait mis les bouchées doubles afin de ne lui donner aucun prétexte pour se débarrasser de lui.
« Severus a avancé dans ses recherches ? demanda Arthur.
— Il a trouvé un remède qui permet d'espacer un peu les crises. Cela marche un peu ; c'est assez moyen.
— Cela aurait une efficacité optimale si tu te reposais plus, intervint Drago qui n'avait pas desserré les lèvres depuis l'épisode du gâteau. Le Professeur Rogue l'a dit ! » ajouta-t-il rageusement, la parole de Severus Rogue représentant le meilleur des arguments à ses yeux. Arthur eut un sourire amusé : Lucius faisait semblant de rien mais devait être très gêné que son fils lui fasse des remarques devant lui et Molly, même s'il avait mis de l'eau dans son vin et que les Weasley faisaient un peu partie de la famille à présent.
Pour être exact, il fallait plutôt dire que Lucius faisait partie de la famille Weasley ; c'était venu naturellement suite à ce fameux jour où il avait voulu mettre fin aux siens. Arthur était devenu un père de substitution sans que ni lui, ni Lucius ne le disent à haute voix ; cela se sentait par des petites attentions, par des inquiétudes, par ce que lui confiait Lucius qu'il ne lui aurait pas dit auparavant.
Au fond de lui, Arthur était un peu vexé de tenir ce rôle : il n'avait que quatre ans de plus que lui ! Cela ne le vieillissait-il pas ? Et puis, il fallait bien le dire, un reste de désir sommeillait toujours en lui et tenir le rôle de père dans ces conditions ne lui convenait pas tout à fait – bien que, par égard pour sa femme, il n'aurait pu tenir le rôle que son corps souhaitait.
Il était jaloux quand il pensait aux amants que Lucius ne devait pas manquer d'avoir (lorsqu'il échappait à la surveillance de son fils) ; il avait toutefois appris à vivre avec ce désir sans se sentir trop coupable.
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Avant de partir, Arthur parcourut le dos de Lucius d'une main caressante. Drago, Molly et Lucius voyaient tous dans ce geste un réconfort paternel pour les crises passées et à venir ; Arthur était le seul à savoir toute l'intimité et le désir qu'il refoulait dedans.
La vie était ainsi faite.
—Fin—
Et voilà qui clôture cette fic, j'espère que cette fin ne vous a pas trop déçus, personnellement j'aime plutôt l'idée d'un amour non réciproque et tu… merci de faire une petite review avant de vous en aller.
