CHASSE-CROISE

CHAPITRE 01 : Grande Mélancolie, Appel de Détresse?

Il y a des éléments que l'on ne peut expliquer, même aux gens que l'on aime. Sauront-ils accepter nos décisions pour autant?

Le temps passe vite lorsque l'on est heureux et ce fut le cas pour Hermione Granger. Elle avait vécu à Poudlard les meilleures années de sa vie. L'achèvement de ses études allait mettre fin à ce bonheur insouciant. La roue tourne et chacun de nous doit grandir. Un an, cela était court mais suffisant, elle profiterait de ce lieu magique, elle en graverait chaque pierre, chaque instant dans son cœur. Elle quitterait cette école, l'esprit chargé de bons souvenirs.

Hermione vivait chez ses parents à l'est de Londres, à Southend on Sea, dans une maison hors de la ville, près de la mer. C'était un petit cottage que ses parents et elle occupaient durant les vacances. Elle adorait cet endroit où, depuis sa chambre, elle pouvait voir la mer par temps clair. Elle aimait sentir le vent du large apporter ses embruns jusqu'à elle.

Au début de l'été, Hermione avait invité ses deux meilleurs amis Ronald Weasley et Harry Potter. Ils avaient passé la journée à visiter les environs à dos de cheval. Elle avait bien ri quand Ron avait poussé un cri de terreur lors de sa première rencontre avec Poussicat, une vieille jument trop affectueuse. Il s'était fort heureusement très vite habitué à l'animal.

En fin d'après midi, ils avaient fait halte sur une petite parcelle d'herbe tendre, à la lisière d'un petit bois. Là, ils avaient laissé brouter les chevaux tandis qu'ils avaient pris place pour goûter. Ils avaient discuté mais surtout beaucoup ri. La journée avait été trop courte au goût d'Hermione qui avait versé quelques larmes discrètes à leur départ.

Les journées se firent longues après ça. Hermione devint mélancolique, à moins que leur départ n'ait accentué cet état? Elle se levait le matin, s'habillait et allait s'asseoir près de la fenêtre de sa chambre, un livre ouvert entre les mains. Ce comportement n'aurait pas inquiété ses parents si sa mère ne s'était aperçue, un après-midi, que sa fille restait des heures ainsi sans bouger d'un millimètre.

Madame Granger, troublée par ce comportement plus qu'inquiétant, se mit à observer sa fille plus attentivement. Hermione s'asseyait le matin à la fenêtre et passait sa journée, le regard perdu dans le vague sans prêter attention à son livre. Elle ne descendait que quelques minutes à l'heure des repas pour faire acte de présence mais sa mère avait bien remarqué que sa fille ne faisait que picorer les plats délicieux qu'elle lui mijotait, espérant l'inciter à manger un peu plus. Qu'arrivait-il à sa petite fille?

La seule activité physique d'Hermione était de sortir dans la soirée pour faire une longue promenade sur le dos de Pervenche. La jument semblait être sa seul confidente.

Cette alimentation au compte-goutte effraya particulièrement madame Granger. Sa fille dépérissait de jour en jour. Effrayée, elle en parla enfin à son époux et, d'un commun accord, ils décidèrent d'agir : sa santé était en jeu.

Impuissant face à la détresse muette de leur fille, ils contactèrent un médecin craquemol spécialisé dans les maladies des sorciers. Il leur démontra, à grand renfort de cas identiques, qu'il ne s'agissait là que d'un petit coup de déprime passager mais qu'il serait probablement préférable que la jeune fille change d'air. Le contre coup d'un effort trop intense. Leur fille potassait trop.

Ce fut avec beaucoup de mal que les Granger se décidèrent à envoyer leur fille passer le reste des vacances loin d'eux. Le meilleur choix était les cousins de monsieur Granger, un couple sympathique dont les deux enfants avaient été les camarades de jeu d'Hermione.

Éloigner leur fille était la seule bonne chose à faire. Là-bas, elle serait entourée de gens de son âge. Mélinda Granger était de deux ans son aînée et son frère, Kévin Granger, avait quant à lui trois ans de plus qu'Hermione. A leur contact, elle serait forcée de s'ouvrir. Et puis elle ne serait plus aussi seule.

Enfants, ils formaient un trio diabolique dont les farces étaient connus de tous au village qu'ils habitaient à l'époque. Hermione était la plus jeune et suivait sans trop réfléchir ses aînés. Ils en avaient fait des bêtises ensemble! Ils s'étaient toujours sentis solidaire les uns des autre.

Hermione n'était pas que leur cousine, elle était comme une sœur pour les deux jeunes enfants. A cette époque, ils étaient persuadés qu'ils vivraient et grandiraient ensemble mais les aléas de la vie les avaient séparés. Durant cette enfance heureuse, Hermione avait été gâtée et choyée.

Hermione arriva à la gare de Londres par une chaude journée d'Été. La gare était agitée par un flux continu de vacanciers. Hermione venait de faire trois fois le tour du grand hall central sans avoir trouvé trace de sa cousine. Un peu fatiguée par le voyage, elle convint que le meilleur endroit pour attendre Mélinda était encore de se placer devant la gare.

Cela faisait une dizaine de minutes que le train d'Hermione était arrivé dans la gare. Hermione connaissait bien sa cousine et cela ne l'avait pas vraiment étonnée de ne pas l'avoir trouvée à son arrivée. Mélinda avait un véritable don pour aider et soigner les gens, mais elle n'avait aucune notion du temps. "Elle serait bien capable d'arriver en retard à son propre enterrement!" avait un jour lancé son oncle.

Un crissement de pneu au coin de la rue la tira de sa rêverie. Hermione reconnut sans mal sa cousine au volant de la petite voiture qui arrivait à toute allure.

Hermione ferma les yeux, Mélinda venait de faire une embardée pour éviter un piéton imprudent et vint stopper sa machine infernale juste devant elle. En tout cas, si ses études de médecine s'avéraient infructueuses, la jeune femme pourrait toujours s'enrôler comme pilote de course.

La conductrice enleva ses lunettes de soleil et laissa place à deux perles azur. Depuis sa vitre baissée, elle lança un "Hello cousine!" plein de gaieté puis ajouta :

— Tu ferais bien de te dépêcher de monter. Je suis déjà en retard.

Elle lui fit un clin d'œil complice auquel Hermione répondit par un pâle sourire. Elle jeta son sac à l'arrière et s'installa coté passager. La grande rouquine fit vrombir le moteur et partit en trombe ne laissant de son passage qu'un nuage de fumée.

Dans la voiture Mélinda engagea la conversation pour prendre des nouvelles de son oncle et de sa tante :

— Alors, petite poulette, comment vont tes parents?

— Très bien.

— Et toi? Tu m'as l'air pâlichonne? T'as plus que la peau sur les os! Ma tante ne te donne pas à manger?

— Je vais très bien, merci!

— Mensonge!

Hermione avait sursauté. Sa cousine avait toujours su quand elle lui mentait.

— Ca ne va pas la tête?

Elle avait oublié le caractère versatile de Mélinda. Cela lui permettait de toujours surprendre les gens. Un atout dans la vie.

— Mais ça ne sera bientôt plus le cas parce qu'avec moi tu va t'éclater ma fille! C'est une promesse de Mélinda Katrine Granger et tout le monde sait que mes promesses se réalisent toujours, dit-elle avec un clin d'œil espiègle à sa cousine. Ma petite, on va d'ailleurs commencer dès ce soir en sortant en boîte avec des potes à moi.

— Mais je sais pas si...

Essayer de contredire Mélinda revenait à s'épuiser inutilement donc Hermione abandonna bien vite cette idée.

— Te te te! Pas de "mais" avec moi! Tu vas voir je vais te relooker parce que ton look…

Un doigt sur le menton, la tête tournée vers son passager. Son esprit calculant l'ouvrage à abattre et reprit :

— Attention, j'ai rien contre ton look! Mais il fait trop fillette de bonne famille, ajouta-t-elle en gloussant.

— Milly, c'est pas très gentil de ta part! Mais regardes la route bon sang! Et tes deux mains sur le volant s'il te plait! Je viens pour que tu me remontes le moral et toi tu descends en flèche mon look qui, soit dit en passant, vaut largement le tien! Je serais toi je la ramènerais pas!

La grande rouquine tout en nerf ne portait en effet qu'un large T-shirt noir à l'effigie d'un grand groupe de Métal, une paire de jeans délavée et de vieilles baskets.

— D'accord, un point partout! On va finalement pouvoir faire quelque chose de toi. Mais sache que, pour ton information, moi j'ai une excuse : j'ai choppé les premiers trucs que j'ai trouvés en me levant, répondit elle, souriante. Tu sais te défendre maintenant, petite cousine.

Hermione sourit et ne put s'empêcher de penser qu'elle devait beaucoup à Drago Malefoy. Toutes ces années à Poudlard l'avaient littéralement immunisée contre les insultes et autres moqueries. Elle n'hésitait même plus à répondre à ce jeune blanc bec quand il allait trop loin dans ses attaques continuelles sur ses origines moldues.

Un brusque crissement de frein dans une allée tranquille apprit à Hermione qu'elles étaient arrivées.

— Au fait, Hermione, on sera seuls pendant quelques jours : mes parents ne rentreront que le week-end prochain. Alors fais pas attention au désordre. Kévin doit être à son boulot, il nous accompagnera peut-être ce soir.

Le frère de Mélinda travaillait dans un restaurant au centre-ville et vivait encore chez ses parents en attendant de se trouver un appartement dans ses moyens. Hermione aimait bien Kévin, elle le considérait un peu comme le grand frère qu'elle n'avait jamais eu. Kévin et Milly adoraient Hermione depuis leur enfance. Quand ils étaient enfants, ils la traînaient partout sur leurs traces. Aux souvenirs de leurs innombrables bêtises, Hermione en avait encore le sourire aux lèvres. Dire qu'à cette époque elle passait le plus clair de son temps et de ses vacances avec eux! Mais depuis qu'elle était entrée à Poudlard elle s'était éloignée d'une partie de sa famille.

Mélinda avait pris sur son épaule le sac d'Hermione et tirait celle-ci à l'intérieur de la maison.

— On a toujours ta chambre tu sais, Hermione, dit Milly, un sourire triste aux lèvres. Tu nous as manqué. Nos vacances n'ont jamais été aussi drôles qu'avec toi, Hermione! Tu te souviens comment maman nous appelait?

Hermione sourit à l'évocation du passé et répondit, nostalgique :

— Le trio infernal!

— Oui, c'est bien ça, gloussa Mélinda en ouvrant la porte de la chambre d'Hermione. Regarde tout est à sa place… même le vieux poster de ce groupe de boys bandes auquel tu t'étais attachée durant ton dernier été avec nous! Maman a essayé de le jeter quand tu as cessé de nous rendre visite mais Kévin et moi on l'a tellement chambrée qu'elle a fini par céder. Je me rappelle encore du fou rire qu'on a donné à papa en lui racontant toute l'histoire. Il en avait les larmes aux yeux.

— Tu m'étonnes! Quand vous êtes ensemble, toi et Kévin, plus rien ne vous arrête!

Mélinda regarda la jeune fille dans les yeux.

— Tu nous as vraiment manqué, Hermione. Ne nous laisse plus sans nouvelles aussi longtemps, sinon Kévin et moi on ira te chercher dans ta super école qui te fait oublier ta famille!

— C'est promis, alors calme-toi.

— Oh, tu sais que je t'adore toi, lança Milly en enlaçant de toutes ses forces Hermione.

— Milly... Tu m'étouffes!!!!

Mélinda relâcha son étreinte et regarda Hermione.

— La petite cousine était-elle de verre?

— Arrête, Milly : c'est toi qui est bien plus forte qu'avant!

— Oui, c'est peut-être vrai vu que j'ai continué le judo. Maintenant j'enseigne aux plus petits tous les mercredis après-midi! C'est génial!

'Pauvres gosses, pensa Hermione. Elle doit les épuiser.'

— AH! Tu as vu l'heure, Hermione? Il faut nous préparer!

— C'est que je n'avais pas prévu qu'on sortirait, commença Hermione, un peu gênée.

— Pas de problème, j'ai des fringues à revendre!

Pourquoi avait-elle posé la question? Une fille normale a toujours des tonnes d'habits. Était-elle normale?

En quelques heures, Mélinda avait fait des merveilles sur Hermione. Milly avait décidé que les cheveux lisses lui iraient mieux. Du coup, les cheveux d'Hermione étaient passés entre les mains expertes de la cousine et ils tombaient maintenant aussi raides que des baguettes chinoises jusqu'au creux de ses reins. Elle avait essayé d'accentuer le maquillage d'Hermione mais celle-ci avait vivement protesté, forçant Milly à lui faire un maquillage très léger. La tenue elle aussi était très simple : un haut noir en "V" assez échancré et à manches courtes, une jupe noire et les bottes de Milly peaufinaient le look plus classe d'Hermione.

Mélinda était elle aussi très élégante avec sa robe noire à paillettes fendue sur le côté et ses chaussures à talons hauts. Elle était en train de terminer de se maquiller quand elles entendirent la porte d'entrée claquer.

— Ce doit être Kévin. Va le voir Hermione, je suis sûre qu'il ne va pas te reconnaître! Dis-lui de se grouiller s'il veut venir avec nous!

— Ok, chef! déclara Hermione.

En descendant l'escalier, elle tomba sur un jeune homme d'à peu près son âge qui n'était sûrement pas son cousin!

— Bonjour! Tu es certainement Mélinda, la soeur de Kévin. Je suis un copain du boulot. Il m'a proposé de sortir avec vous ce soir. Il est allé chercher quelque chose à grignoter dans la cuisine. Voilà, je crois que j'ai tout dit! termina le charmant jeune homme.

Hermione sourit.

— Désolée, je ne suis pas Mélinda!

— Oh!

— Je suis Hermione, la cousine de Kévin. Et toi?

— Oh, moi c'est Willy… euh… je veux dire William.

— Enchantée de faire ta connaissance, William. Allons rejoindre mon cousin. Cela fait longtemps que je ne l'ai vu.

De la cuisine leur parvint la voix de Kévin qui demanda :

— Avec qui tu discutes, Will?

— Avec moi, dit Hermione, dans l'encadrement de la porte de la cuisine.

— Je te connais pas. T'es une amie de Milly? demanda le jeune homme avant de croquer dans son sandwich, un mélange écoeurant de bacon, d'oeuf au plat, de fromage et bien entendu de moutard et de beurre de cacahouète était son ingrédient secret.

— Honte sur toi, Kévin! Tu ne reconnais même pas ta cousine Hermione quand tu l'as sous les yeux.

Il déglutit.

— Hermione? c'est bien toi?

— Ben oui, nigaud!

Il posa son sandwich sur la table et se précipita sur Hermione, l'enlaçant violemment à la taille pour pouvoir la faire tourner autour de lui en criant :

— Ma petite Hermione, t'es enfin revenue! Dire que je t'es pas reconnue!

— Eh oui, j'ai fait du bon boulot! déclara Milly dans l'embrasure de la porte.

Et se tournant vers Will :

— Enchantée, mec. Je suis la merveilleuse soeur de Kévin.

— La modestie de t'étouffe pas petite soeur.

— Moi c'est William, un copain.

— Bon, maintenant que les présentations sont faites on bouge, sinon Mona va m'étrangler!

— Encore avec cette cruche!

— Milly tu avais promis!

— Je sais mais avoue qu'elle n'a pas inventé l'eau chaude ta copine!

La soirée n'avait pas encore commencé que Hermione sentait bien qu'elle s'amusait déjà. Leurs chamailleries finissaient toujours en crise de fou rire.

Assise dans le mini van de son cousin, entre Will et la fameuse Mona Withfill qui n'arrêtait pas de parler.

Un vrai moulin à paroles, cette fille!

A côté d'elle, le sourire de Will s'agrandit compatissant.

Elle secoua la tête.

Non

Impossible, il n'a pas pu m'entendre.

C'était déjà dur pour un sorcier de réaliser cet exploit, alors pour un humain, c'était mission impossible!

Elle lui sourit. Il était vraiment mignon. Ses yeux étaient bleus gris mais si fascinants qu'on aurait pu si noyer.

Eh, ma petite! T'es là pour t'amuser par pour tomber sous le charme d'un gars que tu reverras plus après cette nuit!

Will sembla plus distant puis se décida à parler :

— Alors, tu viens d'où?

— D'une petite maison dans la banlieue nord de Londres. Et toi?

— Oh, de partout et de nulle part. Je voyage beaucoup et je trouve des petits jobs le temps que je reste dans la ville.

— Oh…

Hermione en resta muette. Elle était impressionnée. C'était ce qu'elle aurait voulu faire après sa dernière année à Poudlard, avant d'entamer son cursus universitaire de magie appliquée aux relations sorciers/moldus. En plus, elle voulait réfléchir car elle n'était même plus sûre de vouloir prendre cette option.

Elle pouvait faire tout ce qu'elle voulait mais que voulait elle faire?

— Tu n'as pas l'air emballée mais je t'assure que c'est super!

Et comme s'il avait lu dans ses pensés encore une fois, il ajouta :

— Ça m'a permis de réfléchir à ce que je voulais vraiment faire de ma vie. Même mon père à approuver… après m'avoir fait une scène. Je pense que si lui à accepter que je puisse faire une pause dans mes études, tous les autres parents pourront accepter la décision de leurs enfants.

— Il est si dur que ça, ton père?

— Tu peux pas imaginer! Il veut que je prenne sa succession dans l'entreprise familiale après mes études, alors que moi je ne sais pas ce que je veux faire!

Il eut un sourire triste. Ses yeux se voilèrent, comme emplis de tristes pensées.

— Et tu faisais des études de quoi? lança Hermione, pour le sortir de sa morosité.

Il parut embarrassé :

— Euh… j'aurais dû entrer en septième année, il y a deux ans. Ma petite année sabbatique dure un peu.

Hermione sourit. Avait-elle rêvé ou venait-il de rougir en disant cela?

La tête de Kévin passa tout à coup devant elle en agitant les bras :

— Houhou! Hermione! on est arrivé! Arrête de rêver!

— Oh, j'arrive!

Hermione se leva et découvrit que tout le monde la regardait. Ils étaient déjà tous hors de la voiture.

Hermione n'avait rien remarqué.

Vraiment étrange.

A Suivre...