Chapitre 17: midi au Circle Palace.

Les rues de Crystal Valley sont encombrées et la calèche n'avance qu'au pas, permettant à Jilia de faire mieux connaissance avec son accompagnatrice. Yuuli est un peu plus agée qu'elle, douce avec une expression de tristesse résignée au fond des yeux. Une tristesse dont Jilia peut imaginer sans effort la cause, une tristesse que Jilia connaît bien. Les traits du visage de Yuuli font ressurgir un souvenir ancien dans la tête de Jilia.

Jilia: "Excusez-moi si je suis indiscrète, mais n'auriez-vous pas un frère ainé? J'ai deja rencontré quelqu'un qui vous ressemble."
Yuuli répond brievement: "Oui, j'ai un frère. Il s'appelle Nash."

Dans le silence qui suit, Jilia se remémore l'espion de Harmonia qu'elle avait vu dans la tente de son frère cet après-midi-là, Cet après-midi où elle avait aussi caché deux jeunes garçons recherchés par les soldats, cette après-midi où l'un d'entre eux s'etait fait capturer... Jowy. Jilia ferme les eux, refusant de ceder à la mélancolie. La question de Yuuli vient la distraire de ces tristes pensées.
Yuuli: "Desirez-vous vous installer chez vous ou bien rester chez Maitre Sasarai?"

C'est une question délicate pour Jilia. Elle élude.
Jilia: "Il faut que je discute de la situation avec le notaire avant de prendre une décision. La famille Atréides me semble disposée a engager contre moi une bataille juridique pour récupere tout ce qu'ils peuvent. Si je vis dans ma maison, devrais-je être surveillée?"
Yuuli: "Oui, je serais votre gardienne."

C'est plutot un point positif. Yuuli n'est pas une magicienne et par conséquent ne détecte pas les sorts de Jilia, au contraire de Sasarai. Jilia aurait plus le champ libre. D'un autre coté, elle ne pourrait plus voir Sasarai aussi souvent. Et elle doit admettre que ça lui manquerait beaucoup. Plongée dans ses reflexions, Jilia joue nerveusement avec ses doigts sous le regard interrogatif de Yuuli. Pilika tirant de manière répétée sur sa manche parvient à faire revenir l'attention de la jeune Highland sur elle.
Jilia: "Qu'est ce qu'il y a, ma cherie?"
Pilika: "Pilika aimerait habiter dans la maison de Jowy."

C'est dit. Jilia sait qu'elle va ceder a la demande de la petite fille, quoique cela lui en coute. Pour une fois que la petite fille formule un souhait, Jilia va l'exaucer.
Jilia: "Oui, Pilika. Mais tu sais, ce n'est pas la maison de Jowy, c'est la maison de Pilika et Jilia."
Pilika: "Quand il rentrera, ce sera la maison de Jowy."
Jilia caresse doucement les cheveux bruns de la petite sans lui répondre. C'est inutile d'attendre, il ne reviendra plus. Mais elle ne le dit pas. Rien ne pourrait détourner la petite de cet espoir.

Après quelques réunions successives avec le notaire, les avocats, un rendez-vous avec la mairie, un avec le service de la garde et le maitre du personnel du temple, Jilia peut enfin envisager de prendre son repas de midi l'esprit tranquille. Il est deja plus d'une heure, et la faim rend Jilia nerveuse. Elle suit Yuuli dans les couloirs vers le restaurant du personnel du temple, quand une odeur connue fait battre son cœur. L'odeur de Sasarai. En elle-même, Jilia se gronde de se laisser si facilement troubler par le jeune eveque, mais elle le cherche quand même du regard dans la foule. Elle l'entrevoit dans un couloir à gauche, et avant meme de réflechir à ce qu'elle fait, elle prend rapidement le dit-couloir en faussant compagnie à Yuuli et Pilika par l'occasion. Elle n'a même pas besoin de l'appeler, car Sasarai s'arrette et regarde autour de lui avec un air interrogateur. C'est sans doute la Terre qui a signalé la présence de Jilia. Apercevant la jeune femme, il la rejoint d'un pas rapide, le sourire au lèvres. Jilia aime bien les gens souriants.
Sasarai: "Dame Jilia, vous êtes deja revenue?"
Jilia: "Oui, ça s'est réglé assez vite et je suis revenue au temple avec Yuuli. Avez-vous deja déjeuné?"
Sasarai répond avec un petit rire: "Non, je viens juste de finir la montagne de travail que m'a fournie Dame Léna. Puis-je vous inviter à partager mon repas?"
Jilia: "Ce serait avec plaisir."
Et sa réponse est sincère. Oui, vraiment avec plaisir. En revenant vers le restaurant, Jilia voit Yuuli arriver vers elle l'air inquiète, puis se rassurer en voyant Jilia au bras de Sasarai. Pleine de tact, Yuuli prend Pilika par la main et part vers les tables réservées aux sous-officiers, laissant Jilia et Sasarai s'asseoir tous les deux à une autre table.

Après avoir englouti son entrée à toute vitesse avec l'élégance maitrisée d'une reine, Jilia se sent enfin un peu calmée. Mais elle est bien obligée d'admettre que la Faim est une difficulté qu'elle va devoir gérer avec soin si elle ne veut pas avoir de problème. A la Louvière, il y avait toujours de la nourriture prête pour elle à toute heure du jour ou de la nuit, mais ici elle doit se plier aux habitudes du monde des hommes... ou trouver le moyen d'avoir à manger facilement. Jilia sait bien que la faim la fait réagir trop impulsivement. La preuve, elle est en train de déjeuner en tête-à-tête avec Sasarai, sous les regards scandalisés des tous les officiers et prêtres à la morale rigide. Mais le pire d'un certain point de vue, c'est qu'elle ne se sent pas du tout génée, elle. Mais qu'est-ce qui m'arrive? Jilia sait bien la réponse, mais est-elle prête à l'accepter? En face d'elle, les yeux verts clairs la regardent chaleureusement pendant qu'il lui parle de la chorale des prêtres qui donne bientôt un récital.

Jilia: "Vous y chantez? J'aimerais bien venir voir."
Sasarai: "C'est ecouter qu'il faut faire, dame Jilia."

Mais avant que Jilia ait pu savoir quand avait lieu ce récital, deux des eveques viennent interrompre leur conversation en s'asseyant à la même table qu'eux. Exprès. Il y a un moment de silence tendu, et Jilia tranche son steack d'un coup de main rageur, faisant douloureusement crisser le couteau sur l'assiette. Sasarai grince des dents et Jilia ne peut s'empecher de sourire en le voyant. Mais les deux eveques semblent bien décidé à gacher leur repas à deux et l'un d'eux s'addresse à Jilia.
eveque1:" Nous avons appris que vous etiez retourné dans votre ancienne demeure, Dame Jilia. Avez-vous eut des difficultés avec les Atréides?"
Jilia: " Non, il m'ont rendu mon bien et ont vidé les lieux."
eveque1: " Vous allez naturellement retourner vivre la-bas..."
Jilia réalise soudain qu'en retournant vivre la-bas, elle se prive non-seulement de la présence de Sasarai, mais aussi , et surtout, de sa protection. Isolée, elle sera bien plus vulnérable face aux autres eveque. Un peu mal à l'aise, Jilia réalise qu'elle n'a pas encore fait part à Sasarai de sa décision de vivre dans son ancienne maison. Elle avait trop la tête ailleurs.

Jilia répond d'un tout moins assurée qu'elle le voudrait: "Oui, j'ai commencé à m'installer." Elle jette un coup d'œil incertain au jeune homme en face d'elle, mais il a baissé son regard et se concentre sur sa julienne de légumes. Jilia se doute bien qu'elle l'a blessée, mais avec ses deux pots de colle en robe bleue, elle ne peut même pas essayer de se rattraper. Les eveques ayant constaté la tension entre les deux jeunes gens en profitent pour accaparer l'attention de Jilia et la mitraille de questions banales sur elle-même, ses projets, sa petite Pilika...tout en glissant aux milieux du flots de parole quelques questions plus cruciales. Comme celle-ci...
Eveque: " Dame Jilia, savez vous ce qu'est devenu la Rune Bête après la chute de L'Renouille?"