Tomb Raider : L'Oeil du Monde
Chapitre 1
Ma
chère Lara,
Je
vous remercie grandement d'avoir mis fin aux activités de
Pieter Von Eckhardt pour ramener les Nephilims à la vie. Ils
auraient été une grande menace… pour moi.
Avec
la certitude que nous nous reverrons dans de mauvaises conditions,
bien à vous.
N.
-
Une bien mystérieuse lettre, Miss Croft, n'est-ce pas ?
demanda Winston, son majordome.
- Oui, répondit celle-ci
d'un air distrait, en observant non pas la lettre, mais l'arme
Chirugaï de Kurtis, le mystérieux jeune homme qui l'avait
aidé, ou plutôt l'inverse, elle qui l'avait aidé
à vaincre l'Alchimiste Noir, que combattait depuis bien
longtemps le Lux Veritatis dont Kurtis était le dernier
membre. Mais, il avait disparu, ne laissant qu'une mare de sang et
son « boomerang », tout aussi étrange que son
propriétaire. Etait-il mort ? Elle n'en savait rien, mais
elle en doutait. A Prague, l'arme une fois ramassée, avait
réagi comme une note d'espoir sur le destin de
Kurtis.
Laissant Winston dans le bureau, elle se dirigea vers sa
salle aux trésors, cachée par une porte coulissante,
invisible à l'œil inattentif, pour y ranger l'arme de
celui qui fut un de ses rares amis. Comme à son habitude, elle
fit le tour de la pièce en regardant ses trophées,
symboles d'épreuves difficiles : la dague de Xian, les
fragments du Scion des Atlantes, les statuettes sculptées dans
un météorite, l'Iris… l'Iris, sa toute première
découverte, lorsque Werner Von Croy était son mentor…
Werner, à cette pensée, elle eut un sanglot ; malgré
l'épisode de l'Egypte, dont elle gardait encore de
profondes cicatrices mentales, elle lui avait pardonné après
l'enterrement de ce dernier. Innocentée du crime, Lara put
avoir connaissance du testament, n'ayant aucune famille, Von Croy
lui léguait tout ce qu'il possédait : son industrie
VCI, son appartement de Paris, celui de Londres et de Vienne, sa
ville natale, ses livres… bref tout. Au testament, était
jointe une lettre manuscrite où Werner s'excusait pour tout,
sa haine envers elle suite au Cambodge, et le tragique épisode
égyptien. Il y disait aussi qu'il était fier d'elle
pour ce qu'elle faisait, pour ce qu'elle était. Cette
lettre l'avait particulièrement touché. Si elle avait
su tout cela avant sa mort, peut-être qu'aujourd'hui, il ne
le serait pas, mais il était trop tard. Maintenant, elle s'en
voulait d'avoir été si froide envers lui ces
dernières années.
Ne pouvant s'occuper de VCI,
Lara dut chercher quelqu'un pour la suppléer et continuer
les recherches établies par Werner et son équipe
scientifique.
Elle referma la salle et regagna le bureau. Winston
était parti, sans doute pour vaquer à ses occupations.
Tant mieux, elle voulait être seule. Elle prit sur un meuble le
journal de route de Werner que lui avait confiée Margot
Carvier, une amie de Von Croy et une des dernières victimes du
Monstrum, ou plutôt d'Eckhardt. Les dernières pages
lui avaient été très utiles pour retrouver les
peintures d'Obscura ; les recherches et croquis, parfois sur les
Nephilims, tout y était… mais en tournant les pages, elle
remarqua quelque chose d'étrange : des notes sur l'Iris.
C'était impossible. Le carnet que Werner avait consacré
à l'Iris avait disparu en 1984, lorsqu'il était
suspendu par sa jambe à la plateforme, il était tombé
de sa poche et s'était retrouvé au fond d'un petit
lac. Qu'est-ce que ces recherches faisaient dans son dernier carnet
de route ? En feuilletant le carnet, elle eut sa réponse par
une phrase écrite par Werner :
L'exemplaire que possède
Lara n'est pas UNIQUE. Il n'est qu'UNE MOITIE d'un objet au
pouvoir immense. Quel doit être la puissance de l'artefact
complet quand on sait ce qu'une moitié sait faire.
Mais
que savait faire l'Iris à part tourner éternellement
sur lui-même ? Elle se rappela alors que l'Iris lui avait
permis de se télé porter à un autre étage
de VCI lorsque elle avait été le récupérer
et qu'elle était poursuivie par les gardes de Von Croy. Mais
à part cette utilité, elle n'eut pas le temps de
s'attarder sur les recherches effectuées sur l'Iris.
«
Faudra faire un tour à VCI pour en savoir plus, pensa-t-elle.
Heureusement je ne devrai plus passer par les conduits de
ventilation. »
- Miss Croft, Miss Croft, cria Winston,
venez vite. Quelqu'un desire vous voir.
Lara sortit de son
bureau et se précipita dans le hall d'entrée où
elle vit un homme, grand, maigre, vêtu d'un costume noir. Il
était chauve et ne bénéficiait de l'usage d'un
seul œil, l'autre étant parcouru par deux cicatrices
s'étendant de son front à sa joue.
- Bonjour Miss
Croft, je suis enchanté de faire votre connaissance, dit-il
d'un ton calme et posé, mais contrairement à son
aspect frêle, bien que son visage eut un aspect plus féroce
que le reste de son corps, sa voix était assez grave.
- Moi
de même, Monsieur,… euh Monsieur ?
- Rouzic, Luther
Rouzic, je suis bibliothécaire honoraire aux archives
municipales de Prague et également…
- Oh, le
coupa-t-elle, et que me vaut votre visite monsieur le bibliothécaire
?
- Et également, reprit-il, le gardien de la Galerie des
Trophées.
- Oh, répéta-t-elle, et que me vaut
votre illustre visite, alors que cette histoire est terminée
pour moi ?
- Visite de courtoisie, tout simplement. Je voulais
vous remercier pour avoir enfin supprimer Eckhardt, et ainsi anéantir
le Dormeur.
- Je ne vous ai pourtant pas rencontré dans la
Galerie ?
- C'est parce que je n'y étais pas, ce qui
entre nous est très rare, lui confia-t-il. Mais grâce
vous je ne dois plus la garder et je vais enfin pouvoir vivre
normalement.
- Au fait, est-ce vous qui m'avez envoyé
cette carte de remerciement pour avoir mis fin à la vie
d'Eckhardt ?
- Une carte ? Non, mais les personnes connaissant
Eckhardt sont rares,… surtout après votre intervention,
ajouta-t-il avec une pointe d'amusement dans sa voix grave.
-
Peut-être, mais il doit en rester au moins un : un grand chauve
baraqué.
- Ah oui, Gunderson. En ce qui concerne votre
carte, dit-il en l'observant de son unique œil, je pense pouvoir
dire qu'elle a été rédigée par une
femme.
- Une femme ? La seule que j'ai vu c'était Boaz,
et là où elle est maintenant, elle ne peut plus écrire.
Était-elle la seule femme ?
- Bonne question, la Coterie
était aussi secrète que le Lux Veritatis, mais ne
parlons plus d'eux, je vous en prie, ils font partis du passé.
-
Pas tous, murmura-t-elle en pensant à Kurtis.
- Pardon ?
-
Rien, mentit-elle, il va bientôt faire nuit, j'espère
que vous resterez ?
- C'est proposé si gentiment,… et
comme mon avion ne part que dans deux jours, j'accepte avec joie,
dit-il en souriant, ce qui donna à son visage un aspect plus
horrible.
- Bien, alors dîner à huit heure, Winston
va vous préparer la chambre d'ami au rez-de- chaussée.
Si vous voulez, vous pouvez faire un tour dans ma bibliothèque
privée.
- Avec plaisir, vous devez avoir quelques raretés…
La conversation s'acheva là. Au soir, ils dînèrent
dans le petit salon, et Luther ne cessa de complimenter Winston pour
l'excellent repas qu'il avait préparé. Plus tard,
ils firent un tour dans le jardin, parlant de choses et d'autres,
mais Rouzic remarqua que Lara avait la tête ailleurs :
- Eh
bien, vous pensez encore à Kurtis Trent, lacha-t-il.
- Oui,
avoua-t-elle.
- Vous savez, j'ai connu son père, c'était
un très grand ami, il m'arrive encore de penser à
lui, après tout, c'est humain… surtout quand on sait
comment il a été tué, dit-il en frissonnant.
-
Bonne nuit, Mr Rouzic, dit-elle subitement, pour mettre fin à
cette conversation qui commençait à la mettre mal à
l'aise
Elle s'éloigna, laissant Rouzic seul dans le
jardin.
- Ne vivez dans le passé Lara, lui cria-t-il, ce
n'est pas bon. Non, ce n'est pas bon et pour personne,
ajouta-t-il pour lui-même.
Tout le monde dormait dans le
manoir Croft, il y régnait un silence étrange, comme
dans un tombeau. Mais aux alentours de la propriété, il
y avait une certaine agitation. Cinq personnes s'étaient
rassemblées à l'entrée et semblaient attendre,
c'est alors qu'une dizaine de minutes plus tard, un sixième
homme arriva et annonça que le système de sécurité
était coupé. Ils entrèrent alors par l'entrée
principale qui ne leur offrit aucune résistance et se
déployèrent dans le manoir ne faisant aucun bruit, tel
des fantômes. Pourtant, quelque chose réveilla Rouzic :
il sentait des présences étrangères dans le
domaine. Il se concentra, et quelques instants plus tard, trois
hommes sortirent du manoir en courant, effrayés. Puis deux
autres firent de même. Le dernier résista, il était
plus coriace. Rouzic sortit alors de sa chambre et arpenta les
couloirs à la recherche du sixième homme. Il l'aperçut
enfin, il était là entrain de fouiller quelque chose
sur le mur, comme si il cherchait un objet rare. Mais ce n'était
pas ce qui l'intriguait, non, ce qui l'intriguait, c'était
que la personne était Gunderson, avec son manteau de
militaire. Luther se concentra à nouveau et comme par magie,
Eckhardt venait d'apparaître aux côtés de
Gunderson.
- Alors, tu cherches quelque chose ?
Surpris
d'entendre une voix familière, Gunderson sursauta et tira un
9 mm hors de son manteau.
- Vous ! Ici ! Mais c'est impossible
!
- Pourquoi cela ? Je suis immortel, l'aurais-tu oublié
?
- Mais elle vous a tué, hurla-t-il.
Eckhardt ne dit
rien, mais il approcha sa main gantée vers le visage de
Gunderson. Paniquant, il tira trois coups. Tous passèrent au
travers, mais Eckhart ne bougea pas. Gunderson recula, trébucha
sur une petite table, et parvint à s'enfuir. À ce
moment, Lara arriva, essoufflée mais armes aux poings et vit
Eckhardt entrain de se dissoudre dans l'air. Elle tira deux coups,
mais il ne se passa rien : il avait disparu. Rouzic surgit alors du
couloir.
- Vous l'avez vu ? demanda-t-elle, haletante.
- Qui
donc ?
- Eckhardt ! Il était là ! Je l'ai vu, je
ne suis pas folle.
- Voyons, il est mort. Mais je vous rassure,
vous n'êtes pas folle : c'est moi qui l'ai fait
apparaître pour chasser les intrus.
- Apparaître !
s'exclama-t-elle, incrédule.
- Voyez-vous, les Lux
Veritatis me surnommait 'l'Illusionniste', car j'ai le
pouvoir de faire apparaître aux gens la personne qui les
terrifient.
- Mais qui peut avoir peur d'un mort que personne ne
connaît ?
- Eh bien, malgré sa fidélité
envers son maître, il avait peur de finir comme Muller et Boaz.
Pauvre Gunderson !
- Que faisait-il ici ?
- Je ne sais pas, il
fouillait le mur là.
- Il cherchait ma salle aux trésors,
en conclut-elle, mais pourquoi ?
Que se passait-il ? Pourquoi
voulait-on la voler ? Qui a écrit la mystérieuse carte
? Toutes ces questions se bousculaient dans sa tête. Depuis la
mort de Von Croy, elle semblait perdue dans ses pensées et
maintenant avec tout ces événements qui se produisaient
chez elle, elle ne savait plus où donner de la tête.
Heureusement, le reste du séjour de Luther se passa sans
problèmes. Curieuse, Lara lui demanda comment il avait fait
apparaître Eckhardt, et il lui expliqua tout depuis le début
: son entrée dans l'ordre du Lux Veritatis, son
apprentissage avec son mentor. Il lui apprit que chaque membre de
l'Ordre avait un pouvoir spécial, et il en énuméra
quelques uns (télékinésie, télé
transportation par la pensée,…). Il lui raconta sa mission
d'espionnage de la Coterie, comment il avait infiltré le
Strahov en devenant directeurs des archives, ce qui lui permettait de
garder un œil sur l'avancée de la Coterie dans ses vaines
tentatives d'entrer dans la Galerie des Trophées. Il lui
parla de tout, sauf de Kurtis, sachant que c'était encore un
sujet douloureux pour la jeune femme.
Sur le peu de temps qu'ils
passèrent ensemble, Lara et Luther devinrent de bons amis,
chacun étant étonné par les connaissances de
l'autre. Le moment de la séparation arriva, mais ils se
promirent de se tenir au courant des évènements «
étranges », ce que Lara espérait ne pas voir
arriver.
Au même moment, Gunderson traversait un
couloir sombre, en pensant à ce qui lui arriverait dans
quelques instants : sa mission du manoir Croft avait échoué
et son patron n'en serait pas ravi. Il arriva enfin face à
la double porte qui s'ouvrit, dévoilant une pièce
immense et somptueuse. Son patron était là, assis dans
un fauteuil en cuir noir, auprès d'un feu qui reposait dans
une cheminée aux proportions de la pièce.
- Alors ?
Vous l'avez ?
- Non, et j'en suis profondément
désolé…
- Pas autant que moi. Et vous pensez que
je vais tolérer cela ?
- Je vous en prie, ne me tuez pas,
supplia-t-il.
- Qui m'en empêcherait ? Personne. Pourtant,
contrairement à Eckhardt, je ne tue pas au premier échec,
énonça froidement la voix. Je vais vous charger d'une
autre mission : vous partez pour le Pérou dans quatre heures.
Ne me décevez pas une seconde fois, c'est compris ?
- Je
ne vous décevrai plus Madame, c'est promis.
