YEEH
Chapitre 4 : La fille au chapeau jaune
C'était Hiei qui l'avait remarquée le premier. Ce n'était pas la fille qui avait attiré son attention, mais plutôt le chapeau qu'elle portait.
« On parie qu'au prochain coup de vent il s'envole ? »
Hiei cherchait tous les prétextes pour changer de sujet et cela n'était pas sans énerver Kurama.
« Il s'est envolé, qu'est-ce que je t'avais dit ? »
Le chapeau s'était effectivement envolé loin de la jeune fille, qui ne s'en était pas aperçue et qui ne semblait de toutes façons pas s'en être non plus préoccupé avant. Ce dernier n'intéressait même plus Hiei et, peut-être attristé d'un tel traitement, il se laissait inexorablement porter vers le fleuve. Kurama fut obligé de porte secours à cet étrange chapeau jaune, à la grande joie de Hiei qui profita de ce léger contretemps pour se défiler.
« Hiei, tu ne peux pas toujours t'enfuir. »
Kurama regardait le chapeau comme si celui-ci pouvait lui donner un conseil, mais il se refusa à lui répondre.
« Tu avais vraiment l'intention de te noyer et maintenant tu m'en veux parce que je t'ai sauvé. Tu es comme Hiei, plus je cherche à t'aider, plus tu t'énerves après moi.
Mais peut-être n'as-tu pas entièrement tort, ta propriétaire ne s'est même pas encore rendue compte de ta disparition. »
Kurama rit de lui-même. Maintenant il parlait même avec les chapeaux ! Peut-être Hiei avait-il raison quand il lui disait que rester avec les humains ne lui réussissait pas.
Il rapporta le chapeau à sa propriétaire qui se confondit en remerciements, non, elle n'avait pas remarqué qu'il s'était envolé et il avait été très gentil de le lui rapporter, c'était son chapeau préféré !
Ils se mirent à parler un peu et il découvrit qu'elle n'habitait pas très loin de sa propre maison, qu'ils fréquentaient en outre des écoles voisines et qu'ils avaient même des connaissances en commun ; il était presque incroyable qu'ils ne se soient pas rencontrés avant aujourd'hui. Elle lui dit que même s'ils ne s'étaient jamais rencontrés elle le connaissait de nom et que ses amies seraient vertes si elles avaient su qu'elle était en train de parler avec le fameux Minamino Shuichi.
Ce n'était de toute évidence pas quelqu'un qui se formalisait beaucoup.
Kurama la revit quelques temps plus tard dans le parc, il la salua gentiment et il lui rendit son salut. Cette histoire avançait peu et tout se serait probablement arrêté là si Kurama n'avait pas fini par se rendre compte qu'ils se rencontraient seulement au parc ou plus exactement que chaque fois qu'il allait au parc elle était là. (La jeune fille n'avait suscité en lui qu'une légère sympathie et il ne s'était par conséquent guère préoccupé de ce qu'elle faisait.)
Il commença à passer tous les jours par le parc et tous les jours elle était là ; elle cherchait quelque chose ou quelqu'un. Ceci éveilla de plus en plus sa curiosité de renard, si bien qu'à la fin il lui demanda ce qu'elle cherchait, bien qu'il ne soit pas dans ses habitudes de se mêler des affaires des autres. Elle lui répondit qu'elle cherchait un peintre.
« Un type bizarre, d'âge indéfini, qui se promène avec un petit lapin blanc qui a une tache noire en forme de goutte sur l'oreille droite.
Je l'ai vu un matin ici sur la rive, il était en train de peindre une jeune fille aux yeux rouges, je veux dire, il n'avait pas de modèle, il n'existe pas de filles aux yeux rouges ! C'était probablement une fille qui n'existait que dans son imagination, mais c'était quand même une peinture splendide. J'ai pensé à cette peinture pendant des jours, puis j'ai compris que je devais absolument me faire faire un portrait par ce peintre et depuis je viens toujours le chercher ici dans le parc. Avec ce chapeau, qui, comme tu le sais, est mon préféré. »
« Pourquoi y tiens-tu tellement ? Il était si doué ce peintre ? »
« Il était excellent, mais ce n'était pas tant une question de technique ; il semblait capable de faire sortir et montrer l'âme véritable des choses qu'il peignait.
Je veux une peinture de lui parce que je veux un miroir qui soit capable de réfléchir ma véritable image ! »
A partir de ce jour, Kurama s'arrêta à chaque fois qu'il la voyait pour lui demander des nouvelles de son peintre. Comme il n'y avait jamais rien de nouveau à son sujet, ils finirent par parler aussi d'autres choses.
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« Maintenant elle ne va plus dans le parc chercher le peintre.
Elle préfère probablement désormais se voir reflétée dans les yeux de Kurama. »
Hiei finit la dernière phrase d'un ton sarcastique.
« Je connais le peintre. » lui répondit le démon-chat. « Et surtout le lapin. Crois-moi, la fille a eu bien de la chance de ne plus le rencontrer ! »
« Il aurait mieux valu pour Kurama que lui ne le rencontre plus elle. »
« Pauvre petite, qu'est-ce qu'elle t'a fait ? »
L'autre ne répondit pas et s'assit dans un fauteuil, fâché, réfléchissant à ses propres problèmes. Le chat se mit en boule sur son ventre, en le regardant d'un air interrogatif.
« Tu me donnes chaud, enlève-toi de là ! »
La bestiole obéit en prenant l'air d'une victime, et se réfugia sur le divan ; sur la table basse il y avait un manga et le chat se mit à le feuilleter, il ne savait pas ce qu'il y avait d'écrit mais le dessin lui plaisait.
Hiei s'endormit et commença à faire des rêves confus : il rêva que l'abruti épousait Yukina et qu'ils avaient ensemble une vingtaine de fils qui ressemblaient tous à leur père, puis que le démon-chat l'embrassait de nouveau et que Mukuro se mettait en colère contre lui (à cause du baiser du chat ?), puis il rêva qu'il pleuvait des chapeaux jaunes. Enfin il rêva qu'un certain Sanosuke Sagara ouvrait une quatre-voies en direction de Kyoto, mais la signification de cette partie du rêve lui resta toujours inconnue.
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Le chat finit de lire son manga et regarda autour de lui pour voir s'il trouvait la suite, mais il ne trouva que Hiei qui continuait à dormir.
A ce moment la porte de la maison s'ouvrit et Hiei s'éveilla d'un bond, attrapa le chat et le jeta sous son fauteuil ; il ne voulait pas que Kurama le voie. Le démon-chat n'aimait guère cette habitude qu'avait Hiei de le saisir et de le balancer quelque part.
« Hiei, mais quelle bonne surprise ! » Kurama semblait ravi de le voir. Hiei donna un coup de pied au chat qui essayait de sortir de sous le fauteuil.
« Qu'est-ce que tu as ? »
Le chat réessaya de sortir mais Hiei lui assena un autre coup de pied. Pour la petite histoire, le fauteuil sur lequel était assis Hiei n'avait en dessous qu'une ouverture sur le devant, ce n'était pas le chat qui était stupide. Kurama regardait son ami d'un air perplexe, aujourd'hui son ami était plus étrange qu'à l'accoutumée et de plus…
« Comment se fait-il que tu sentes la vanille et le muguet ? »
Hiei donna un autre coup de pied au chat, mais cette fois pas parce qu'il avait tenté de sortir et il essaya de changer de sujet.
« Qu'est-ce qu'il y a là-dedans ? » Hiei indiqua le gros sac que l'autre tenait à la main. Kurama fit un immense sourire et tira du sac un chapeau jaune ; « le chapeau jaune ! »
« Elle me l'a offert, n'est-elle pas gentille ? »
« Sûrement pas ! Un geste aimable de la part de cette fille ! »
« Hiei, est-il possible que depuis une année qu'elle et moi sortons ensemble tu ne te souviennes toujours pas de son nom ? » Ceci était une phrase désormais habituelle pour Kurama, il semblait que cette chose si simple ne veuille pas entrer dans la tête de Hiei. Kurama était cependant à ce moment trop heureux pour s'en faire et pour comprendre aussi ce qui se cachait derrière la hargne de Hiei pour cette fille, probablement ne s'était-il même pas aperçu que Hiei la supportait mal : les amoureux vivaient dans un monde tout à eux et Kurama ne faisait pas exception.
« Tu as faim ? » C'était presque l'heure du déjeuner.
« Si tu as faim, il y a du poulet dans le frigo ; il faut le réchauffer, mais je ne pense pas que ce soit un problème pour toi. Je ne peux pas rester pour te tenir compagnie, j'ai rendez-vous avec elle. Je prends une douche, je me change et je m'en vais. De toutes façons, fais comme chez toi… Hiei ? Où a-t-il disparu cette fois ? Ces temps-ci il est un peu étrange.
