- C'est pas que ça nous enchante mais… Commença Hermione embarrassée.
- Mais il va falloir que euh… Poursuivit Ron tout aussi ennuyé.
- Que vous alliez dans le wagon réservé aux préfets, je sais. Acheva Harry avec un sourire amusé, ajoutant pour les déculpabiliser, je n'aimerais pas être à votre place, tous ces discours assommants à ingurgiter… Si vous voyez Malefoy, dites-lui que moins je le vois, mieux je me porteça m'épargnera peutêtre sa visite annuelle. A tout à l'heure !
- Ouaisà tout de suite ! C'est juste histoire de faire acte de présence, on va pas s'attarder crois-nous ! Lui lancèrent les préfets de Gryffondor en s'éloignant.
C'était vrai, il ne les enviait décidément pas. Harry en venait même à se demander comment il avait pu être jaloux, ne serait-ce qu'une seconde, de la nomination de Ron l'année précédente. Il avait suffisamment de soucis en tête sans rajouter ceux-ci, et après tout, il était bien le digne fils de son père, l'élève le moins attaché au règlement intérieur de l'école ça aurait été un comble qu'on lui confit la responsabilité de le faire appliquer !
- Euh… Excuse-moi Harry, tu veux bien commencer à chercher un wagon libre sans moi ? Il faut que je rende à Dean un manuel que je lui ai emprunté pendant les vacances. S'excusa Ginny, sincèrement désolée de le laisser seul.
- Pas de problème. Répondit-il surpris. Je suis content que les choses se passent bien entre vous, mais évite de dire ça à Ron, il va en faire une syncope !
- Oh non non ! Ce n'est pas ce que tu crois, j'ai abandonné l'idée de sortir avec lui. Balbutia Ginny embarrassée.
- Déjà ! Enfin je veux dire, se reprit Harry de peur de l'avoir blessée, il n'a pas euh…
- Voulu ? Oh si si, mais euh… hmm…Enfin, bon, je vais aller lui rendre son livreà plus tard !
Interdit, Harry observa la jeune fille s'éloigner d'un bon pas, puis haussant les épaules, il se mit lui-même en quête de trouver un wagon vacant, tentant d'ignorer les nombreux visages qui se retournaient vers lui à son passage. Bien sur, il savait que ce n'était désormais plus avec hostilité qu'ils le dévisageaient, bien au contraire, mais il en avait vraiment assez que son nom reste au centre des conversations quelque soit le contexte.
Aussi, se fut avec un profond soulagement qu'il arriva à l'avant-dernier wagon. A l'intérieur, une jeune fille seule, comme elle l'était toujours. Ses longs cheveux blonds négligés tombaient devant ses yeux sombres, dont ses sourcils inexistants intensifiaient la grandeurà croire que son champ de vision s'étendait sur 360 degrés ! Ce devait être une expérience embarrassante que d'être dévisagé par Luna Lovegood, car s'était son nom, tant son regard profond semblait pouvoir sonder votre esprit.
- Salut Lunaça ne te dérange pas si je m'assoie ici ?
Elle redressa lentement la tête vers lui, jusque là absorbée dans la lecture de la dernière publication du Chicaneur, magazine de réputation douteuse que dirigeait son père. En dépit des commérages dont son originalité était l'objet, elle était probablement l'une des élèves dont Harry se sentait le plus proche à Poudlard. Il n'irait pas jusqu'à dire qu'ils étaient sur la même longueur d'ondes, loin de là, mais après avoir dépassé les préjugés, il s'était découvert avec elle certains points communs, en premier lieu leur unicité au sein de l'école.
- Salut Harry, comme tu peux le voir, il reste de la place, alors ne te gène pas. Lui répondit-elle d'un air vaguement absent, fixant désormais une mouche qui venait de se poser sur la vitre.
Il la remercia en entreposant ses bagages et la cage d'Hedwige dans la place prévue à cet effet, puis s'asseyant face à elle, il poursuivit, n'ayant aucune envie de rester dans un silence hermétique jusqu'au retour d'Hermione et Ron :
- Comment se sont passées tes vacances ?
- Très bien, mon père a finalement pu organiser cette expédition en Suède avec ses journalistesà la recherche des derniers spécimens de Ronflaks Cornus. Expliqua-t-elle d'une voix rêveuse.
- Formidable… Et alors, vous avez trouvé quelque chose ? Répondit-il d'une voix peu convaincue, sachant que l'existence de ces créatures était une pure fantaisie du Chicaneur.
- A se cogner la tête contre les murs, il ne vient que des bosses ! Déclara-t-elle d'un ton claironnant.
- Ah…
Harry était désormais habitué aux transitions d'une logique toute relative de Luna, celle-ci étant apparemment toujours enfermée dans un monde qui lui était propre… Aussi, sans s'attarder sur ce sujet, auquel d'ailleurs il ne s'intéressait que par pure politesse, il reprit le fil de la 'conversation '.
- De quoi parle cet article ?
- Oh, celui-ci n'a rien d'exceptionnel, un des rédacteurs à réussi à prouver que les Korrigans auraient créer les diabolos pour leur survit en milieu sauvage. Celui sur la carrière ignorée de trapéziste de tu-sais-qui par contre est passionnant ! Tu vois un peu où peut mener une déception artistique ?
- Euh… Oui, c'est troublant. Répondit impassiblement Harry, se demandant intérieurement s'il devait rire ou pleurer du fait que de pareils articles se vendent.
- Et toi, tes vacances ? Relança Luna.
- Certainement moins palpitantes que les tiennes… Soupira Harry d'un ton amer.
- Tu as eu des nouvelles de ton parrain ?
Le jeune homme l'observa pendant un instant, abasourdi, ne sachant s'il s'agissait là d'une blague de particulièrement mauvais goût ou d'une question comme une autre. Mais à en croire son ton léger et sa mine interrogative, elle attendait véritablement une réponse
- Euh… Non, le contraire aurait été… étonnant. Répondit-il simplement, plus affligé qu'en colère face à cette question déplacée.
- Quoi ! Vraiment ? S'exclama-t-elle stupéfaite – ce devait d'ailleurs être la première fois qu'Harry la vit afficher une expression autre que de l'indifférence.
- Pourquoi ça te surprend à ce point ? Continua-t-il complètement désorienté.
- Hmm, je trouvais juste que c'était curieux… Acheva Luna, retournant dans son monde du vague, alors qu'elle se replongeait dans la lecture de l'article sur les Korrigans.
Harry la regarda encore un moment d'un œil interloqué, puis trouva préférable de mettre ça sur le dos d'un de ses délires passagers dont elle seule avait le secret... Ce fut cet instant que choisi Ginny pour revenir, accompagné d'un jeune homme au visage lunaire des plus sympathique, quoique d'une timidité sans commune mesure.
- Devine qui j'ai trouvé dans le couloir à la recherche de Trévor ? Demanda Ginny avec un sourire.
- Le jour où j'arriverai à apprivoiser ce crapaud, ce sera juste après que le professeur Rogue m'ait félicité pour mon dernier devoir. Soupira Neville Londubat en se laissant tomber avec lassitude à côté d'Harry.
- Allons, il fera bien par revenir, comme d'habitude ! Le rassura Harry d'une voix compatissante.
- Salut Luna, tu vas bien ? Reprit Ginny en s'asseyant à côté d'elle.
Elle acquiesça d'un signe de tête sans détacher ses yeux de son journal, puis pointa simplement l'index en direction de la cadette Weasley et de Neville, signe qui sous-entendait un « Et vous », estimant probablement que les banalités ne méritaient pas qu'on ouvre la bouche pour y répondre.
- Très bien, répondit pour deux la rouquine, Neville n'étant toujours pas sur de l'attitude à adopter face à cette Serdaigle extravagante.
- Qu'est-ce qu'il y a dans cette boite ? Demanda soudain Harry, remarquant un paquet que serrait contre lui le jeune garçon comme s'il s'agissait de son bien le plus précieux.
- Ah, tu ne devines pas ? C'est mon cadeau d'anniversaire !
- Hmm… Une plante à tout hasard ? Tenta Harry faisant mine de réfléchir.
- Comment tu le sais ? Pas n'importe laquelle, c'est une Solcitus Virtua.
- A tes souhaits ?
- C'est une espèce quasi-unique. Déclara-t-il avec fierté. Lorsque j'ai parlé au Professeur Chourave de mon idée de reproduire mon Mimbulus Mibletonia, elle m'a expliquée que ce ne serait possible qu'avec cette plante à proximité.
- Fascinant… Commenta Luna derrière son journal.
- Et ça ressemble à quoi ? Tenta de s'intéresser Harry.
Neville expliqua alors dans un jargon quelque peu complexe ce que nous résumerons ainsi : contrairement à son espèce mâle, cette plante ne faisait pas de photosynthèse, craignant l'exposition à la lumière. Tout ceci pour dire qu'il ne pouvait la leur montrer, mais accepta néanmoins d'entrouvrir très légèrement son cache pour les laisser y jeter un œil : cette façon de faire autant de mystères avait fini par attiser la curiosité des trois adolescents malgré eux – Luna y compris – ce qui accentua leur déception en ne découvrant qu'une espèce de petit champignon bleuâtre au chapeau squameux des moins ragoûtant.
- Alors, c'est fantastique non ! S'exclama Neville d'un ton allègre.
- C'était justement le mot que je cherchais ! Répondit Ginny avec un enthousiasme discutable.
- Je ne sais pas encore exactement ce qu'elle peut faire, mais je suis bien certain qu'elle doit posséder quelques propriétés étonnantes.
- Oui, sans aucun doute… Approuva Harry d'un air incrédule, en se souvenant des « capacités » du Mimbulus.
En effet, l'année précédente, après une expérience hasardeuse du jeune Londubat, il s'était retrouvé aspergé d'une sorte de pus pestilentiel, avec un crapaud en main… Un contexte peu avantageux dans lequel il était tombé nez à nez avec une dénommée Cho Chang, jeune fille d'une beauté rare et accessoirement attrapeuse des Serdaigleà qui il cherchait à plaire par tout les moyens il y a quelques temps encore. Et d'ailleurs, comme si sa première visite était programmée à la minute près, ce fut à cet instant que la jeune asiatique, désormais en dernière année, franchit la porte de leur wagon, un sourire peu confiant aux lèvres.
- B – bonjour, Harry. Le salua-t-elle d'un ton à peine audible qui se voulait pourtant décontracté. Comment vas-tu ?
- Salut Cho. Bien, merci. Répondit-il d'un ton assez rude, l'observant avec la même passion qu'il aurait ressenti face à un chaudron vide.
- Tu sais, j'ai… j'ai lu la Gazette du Sorcier cet été. Poursuivit-elle d'une voix hésitante, alors que ses pommettes viraient au rouge vif.
- Ah, toi aussi ? Répliqua-t-il d'une voix feignant la surprise.
- Je trouve ça bien qu'ils aient fini par te croire… C'était… C'était très courageux ce que tu as fait au Ministère.
- Ils ont certainement oublié de mentionner que j'ai été aidé à ce moment-là par des amis dignes de confiance. Compléta-t-il en insistant particulièrement sur l'apodose de la phrase.
A ces mots, Cho rougit de plus belle mais ne baissa pas le regard, observant désormais le jeune homme d'un air déterminé, quoique empli de douceur.
- Est-ce que… Je pourrais te parler ?
- Vas-y. Rétorqua-t-il indifféremment, s'adossant confortablement sur son siège, les bras croisés, comme quelqu'un s'apprêtant à entendre un long discours.
Elle lança un regard embarrassé vers Ginny, Neville et Luna, avant de reprendre timidement.
- Euh… En privé si possible.
- Oh bien sur, on va… Commença Ginny.
- Non, non, vous pouvez rester. Je croyais qu'on s'était déjà tout dit l'année dernière ? Demanda-t-il d'un ton sans réplique.
- Mais... C'était différent ! A cause d'Ombrage et du resteça a rendu les choses si compliquées…
- Erreur, pour une fois que la vieille chouette n'y ait pour rien… Le véritable problème, c'est que tu as fait un transfert de Cédric sur moi, point barre.
- C'est faux !
- Ah oui ? Rappelle-moi un rendez-vous qui ne s'est pas terminé sur son nom entre deux effusions de larmes ?
- Quoi ! Comment peux-tu dire ça ? Tu es… Tu es d'une insensibilité, vraiment !
- Ah, c'est vrai, il y avait ça aussi…Parce que tu t'imagines peutêtre que je sifflotais quand j'ai ramené le corps de Cédric à ses parents ? Tu as pensé une seconde à ce qu'on peut ressentir dans ce genre de situation ? Si c'était le cas, tu aurais compris que je n'ai pas très envie qu'on me resserve ce souvenir à chaque repas !
S'en suivit un silence particulièrement lourd, durant lequel chacun campa sur ses positions. Harry soutenait le regard de Cho, le visage crispé par la colère, alors que celle-ci l'observait stupéfaite, ne sachant pas vraiment comment y répondre. Neville et Ginny s'étaient mutuellement plongés dans un livre quelconque, dont ils devaient relire la première ligne pour la vingt-septième fois environ, alors que Luna, quand à elle, baillait ouvertement d'ennuie en reportant son attention vers le paysage extérieur.
- Hé, Harry, tu vas pas le croire ! Le chariot à confiseries est en chemin, et j'ai vu qu'ils avaient ajouté certaines inventions de Fred et George dans leur stock, c'est génial ! S'écria la voix de Ron depuis le couloir, précédant d'une demi seconde son entrée en trombe dans le wagon, suivi de près d'une Hermione tout aussi réjouie.
Puis balayant d'un coup d'œil la scène qui se présentait à leurs yeux, ils échangèrent un regard interloqué avant que le jeune Weasley reprenne avec un sourire embarrassé :
- On tombe mal peutêtre ?
- Non non, on avait fini. Répondit Harry en leur adressant son plus chaleureux sourire.
Cho lui lança un regard furieux traduisant implicitement un « Certainement pas » avant de sortir d'un bon pas, bousculant 'accidentellement' Hermione sur son passage.
- Il s'est passé quelque chose ? Demanda cette dernière en se massant l'épaule.
- Encore une de ces discutions qui ne mènent nulle part… Soupira Harry.
- Tu as quand même été un peu dur avec elle… Remarqua Ginny d'une petite voix.
- Je sais, mais c'est mieux comme ça… Autant que les choses soient claires une fois pour toutes non ? Si je devais donner raison pour la première et dernière fois de ma vie à Pansy Parkinson, ce serait sur le fait qu'elle et moi n'avions rien à faire ensemble en fin de compte !
- Ne me parle pas de cette idiote ! A l'écouter jacasser ses niaiseries pendant une demi-heure, j'ai eu ma dose jusqu'à la fin de l'année ! Maugréa Hermione en s'asseyant face à lui.
- Parce que tu crois que les suggestions d'une sang-de-bourbe valent quelque chose ? Répartit une voix traînante qu'ils connaissaient – malheureusement – par cœur.
S'en suivi deux ricanements pour le moins stupides, tout aussi familiers et prévisibles. Sans prendre la peine de se retourner vers la porte, Harry se blottit un peu plus contre son siège, plaçant ses mains derrière sa nuque, les yeux fermés.
- Salut Malefoy. Est-il nécessaire de dire que tu ne m'as pas manqué pendant les vacances ?
- A moi si au contraire, tu es presque aussi distrayant que Dobby pour tuer le temps.
- Tes hobbies sont à la hauteur de tes capacités cérébrales à ce que je vois… Répondit-il d'une voix lasse.
- Tout doux mon ptit pote ! Si j'étais toi je surveillerai mes propos, car n'oublie pas que je possède quelque chose qui tu n'auras jamais ! Sourit-il, alors que son insigne reluisant était parfaitement visible.
- Un air abruti accentué d'un brushing permanant ?
Les spectateurs éclatèrent de rireà l'exception évidente de Crabbe et Goyle, plus probablement parce qu'ils n'avaient pas saisi la réplique que par soutien envers leur ami, devenu livide.
- Pathétique ! Tu tiens à réitérer l'exploit d'un compteur à 0 je suppose ? Les choses sont tout de suite moins faciles sans les faveurs des profs, hein Potter ?
- Alors je ferais bien de profiter du temps qu'il me reste avant notre arrivée pour vous rappeler tout le bien que je pense de vous, n'est-ce pas Mr. le Préfet ? Minauda-t-il dans ce qui aurait pu être une imitation particulièrement réussie du Professeur Rogue. A part ça, je peux faire quelque chose pour toi ? Parce que c'est pas que tu m'ennuies, mais presque.
- Simple curiosité en fait, je me demandais juste pourquoi tu n'étais pas accompagné de ton chien sur le quai cette année ? Expliqua-t-il d'une voix innocente, en parfait contraste avec le sourire insolent qu'il arborait.
A cette remarque, Harry se redressa brusquement sur son siège, fixant désormais le jeune homme blond sans ciller. Il avait le teint écarlate mais refoula bien vite sa fureur, sachant obstinément que c'était bien là ce qu'attendait son adversaire, et se contenta de répondre sur le même ton.
- Et toi, dis-moi, où était ton père au moment des adieux ? Retenu quelque part sans doute ?
Malefoy perdit immédiatement son sourire. On entendit ses articulations craquer alors qu'il serrait ses poings avec rage. Toujours aussi silencieux, il s'avança d'un pas lent vers Harry, se penchant alors vers lui, leur visage n'étant alors séparés que de quelques centimètres.
- Fais attention à toi, Potter, fais très attention… Recommanda-t-il d'une voix sourde, le fixant d'un œil hypnotique.
- Je tremble déjà ! Rétorqua-t-il avec un sourire amusé, soutenant son regard. Mais juste histoire d'être fair-play, je te retourne l'avertissement, Malefoy.
Quiconque serait passé par là à cet instant, auraient juré qu'ils seraient morts sur le coup si leurs yeux avaient été des armes. Inquiètes de la tournure que pourraient prendre les évènements, Ginny et Hermione se levèrent dans un même élan.
- Ca suffit Malefoy, sors d'ici ! Ordonna cette dernière en lui désignant la porte.
Il reporta vers elle un regard incrédule, puis se redressant, lui demanda avec une compassion surjouée.
- Cette brave petite Granger, toujours prête à aider les perdants. Au fait, j'espère que tu ne conserves pas trop de séquelles de ta dernière rencontre avec Dolohov ?
A la mention de ce souvenir, Hermione porta une main à ses côtes comme par réflexe : elle n'avait jamais complètement guéri de ce sortilège… Ce fut au tour des trois Gryffondor de se lever, baguettes en main cette fois-ci pour être plus convaincants.
- Vous voulez peutêtre qu'on vous escorte jusqu'à la sortie, Mr. le Préfet ? Demanda Harry avec la même politesse glaciale.
- Oops, je crois que j'ai touché un point qui fait 'mal', n'est-ce pas ?
Puis se retournant en ricanant vers ses deux acolytes, il sorti d'un pas allègre après leur avoir lancé un dernier regard suffisant. Avec une rage mal contenue, Ginny pointa sa baguette vers la porte avec un air qui n'aurait pas été moins menaçant face au Serpentard arrogant, tonnant d'une voix sonore :
- Claustrum !
A cette incantation, la porte se verrouilla violemment, avant que la rouquine ne se rasseye, assez satisfaite de cette compensation bruyante.
- Au moins, s'il lui prenait l'envie de revenir fouiner par ici… Se contenta-t-elle d'ajouter.
- Ca te fait toujours mal ? Demanda Ron à Hermione d'un air inquiet.
- Non, nonça va… Mentit-elle à moitié. C'est le métier qui rentre comme on dit, on a tous eu notre lot je crois… Ajouta-t-elle en regardant une des marques laissées par le cerveau tentaculaire sur les bras du jeune homme.
- Je suis… Commença Harry d'une voix peinée.
- Arrête de répéter que tu es désolé si tu ne veux pas qu'on te donne une bonne raison de l'être ! S'exclamèrent en chœur Hermione, Ron, Ginny, Neville et même Luna, un sourire dissimulé derrière leur voix apparemment furieuse.
Le jeune homme les observa un instant perplexe avant d'éclater de rire. Après ce qu'ils avaient vécu en acceptant de le suivre, il pouvait décidément dire qu'il avait les meilleurs amis du monde…
Le reste du trajet se déroula sans nouvelle visite impromptue (il faut dire que Ginny avait déjà pris certaines précautions le cas échéant)à l'exception peutêtre du chariot à friandises pour qui il y avait prescription ! Lorsque le soir commença à tomber et les lumières du train à scintiller, les deux jeunes préfets suggérèrent aux autres de se préparer à leur tour, sachant leur arrivée proche. Et ils avaient raison, le train commençait déjà à ralentir, brinquebalant légèrement, avant de s'arrêter complètement quelques minutes plus tard.
Comme chaque fois, les cris d'excitations des premières années raisonnèrent bruyamment, alors que Ron et Hermione tentaient de leur mieux de se faufiler parmi eux pour les guider, après avoir confié leurs affaires aux quatre adolescents. Ainsi chargés, le débarquement devint une entreprise laborieuse dans le chahut général, mais bientôt, la fraîcheur nocturne vivifiante et l'odeur familière des conifères revigorèrent Harry dès qu'il posa le pied à l'extérieur du train : il était enfin chez lui.
Et ce fut avec une joie immense qu'il perçu, parmi le brouhaha, l'appel d'une voix bourrue qui l'avait tant rassuré lors de son arrivée six ans auparavant et qui lui avait tant manqué l'année passée.
- Les Première Année, par ici, suivez-moi ! Allez, pressons !
L'apercevant à son tour, le gardien des clés adressa au jeune homme un chaleureux signe de la main par-dessus les têtes des Première Année sur le point d'embarquer – chose assez facile me direz-vous lorsque l'on sait que Hagrid faisait environ trois, voir quatre fois la taille de certains !
Harry eut à peine le temps de lui répondre, déjà entraîné par le flux des élèves toujours croissant vers les diligences. Il sentit une main agripper son bras, en l'occurrence celle de Ginny, pour l'emmener avec elle auprès d'un attelage où se trouvait déjà Ron, Hermione et les autres, restituant les bagages et animaux de chacun. Ce fut avec un certain effroi qu'il croisa le regard vide et luisant d'une des créatures harnaché entre les brancards : ces chevaux reptiliens d'aspects cadavériques portaient un nom, des sombrals, animal mythique animant les plus obscures superstitions, du fait de leur lien intime avec la mort : en effet, il était impossible de les apercevoir à moins d'avoir assisté à un décès. Pourtant, aussi inquiétante que pouvait être leur apparence sinistre, il ne pouvait nier que leur caractère docile lui avait été d'un grand secours l'année passée… Se retournant vers Neville, il s'aperçut que lui aussi devait ressentir ce même trouble chaque fois, alors que Luna en revanche, s'en été accommodée depuis fort longtemps déjà.
Dans une rumeur d'admiration provenant de ceux les contemplant pour la première fois, la multitude des diligences dont on ne percevait que le grincement des rouages se rapprocha à bonne allure des tours majestueuses de l'une des écoles de Sorcellerie les plus reconnues, dont les toits abrupts se dessinaient dans la clarté incertaine d'un ciel de demi-lune.
Quelques courtes minutes plus tard, l'attelage s'arrêta en douceur à quelques pas des larges dalles de pierre menant à la Grande Entrée du Château, dont l'immense pendule la prédominant faisait raisonner son carillon dans un vrombissement caverneux se perdant en un écho lointain. C'était un spectacle magique, il n'y avait pas d'autre mot, et Harry ne s'en lassait pas. Ce fut finalement la voix de Ron qui le détacha de sa contemplation, survolant plus qu'il ne les grimpait les dernières marches menant au Hall d'entrée, illuminé de toutes parts par des torches flottantes, dans la lumière desquelles semblaient danser les premiers fantômes des lieux venus les accueillir. Bousculé de droite et de gauche, Harry se pressa parmi la multitude pour pénétrer dans la Grande Salle, dont il sentait déjà dans son imaginaire le fumet délicieux du banquet savamment préparé par les elfes de maison – Si Hermione l'entendait ! Son imagination s'arrêta cependant là, ramené à la réalité par une voix grinçante à laquelle il n'était pas particulièrement attaché : celle du concierge des lieux, Argus Rusard.
- Suivez-moi Potter, immédiatement !
- Quoi déjà ! Je viens à peine d'arriver ! S'exclama-t-il désabusé, habitué au fait que ce dernier trouve toujours une quelconque raison pour le consigner.
- Arrêtez de pleurnicher ! Puisque le Professeur McGonagall est en train d'expliquer le règlement intérieur aux Première Année – comme si ces gamins comprenaient quelque chose – elle m'envoie vous dire de vous rendre à l'instant dans le bureau du directeur. Dépêchez-vous un peu si vous souhaitez assister à la répartition !
Stupéfait, Harry ne discuta cependant pas, se retournant vers Ron qui se contenta d'hausser les épaules en guise de réponse à son étonnement, avant d'emboîter le pas au cracmol revêche. Il eut bien du mal à dissimuler son appréhension face à une convocation si précoce, mais s'y résigna néanmoins, multipliant dans sa tête les raisons qui pourraient l'expliquer.
- Meringue poivrée ! Déclara distinctement Rusard face à la statut repoussante d'une Gargouille taillée dans la pierre, avant d'ajouter à l'intention de Harry, un sourire mauvais entaillant son visage : bon courage !
Puis il le quitta ici, alors que le jeune homme bondit sur une des premières marches, l'acheminant d'elle-même vers le sommet, comme une sorte d'escalator, dans un bourdonnement sourd. En dépit de ses craintes, Harry ne put s'empêcher d'être encore une fois saisit par cette exposition de superbes portraits somnolents et d'objets étincelants aussi hétéroclites que prodigieux, quoiqu'en nombre fort réduit – et il devait bien admettre qu'il y était pour quelque chose… Cependant, contrairement au jeune garçon de 12 ans qui était entré pour la première fois dans cette pièce circulaire, loin d'être intimidé, il affichait une expression de défi empreinte de rancœur : il n'était pas près de pardonner à Dumbledore ce qu'il considérait comme une véritable trahison et comptait bien le lui faire comprendre…
Mais la pièce demeurait vide et silencieuse, aussi sa préparation s'avérait-elle inutile. Il interpella par trois fois le nom du directeur sans plus de succès, aucune réponse ne se fit entendre… Probablement était-il en train régler un quelconque détail avant son discours d'ouverture ? Dans le doute, quoique cela put paraître impoli, il se décida à grimper sur la plateforme aménagée, où étaient disposés les plus ingénieux instruments d'astronomie jamais inventés, certainement la matière la plus fascinante aux yeux d'Albus Dumbledore. Atteignant la dernière marche, il fit un nouvel essai :
- Professeur Dum…
Il s'interrompit brusquement comme pris par surprise. Oui, il y avait bien quelqu'un, captivé par l'utilisation de ce qu'il aurait appelé un télescope, mais pas la personne attendue. Bien que la richesse des étoffes dont elle était vêtue était similaire, celle-ci était bien plus menue, la longue chevelure ondulée qui retombait en cascade sur ses hanches était d'un brun cuivré et non argenté. L'inconnu se retourna d'un mouvement vif vers Harry, au moment où celui-ci s'apprêtait à appeler Dumbledore, lui autant alors tout usage de la parole. Comme pétrifié, il déglutit difficilement pendant les secondes de silence, selon lui interminables, qui suivirent.
Le visage qu'il observait alors était empreint d'une certaine douceur, qu'accentuaient ses traits si lisses qu'ils semblaient avoir été sculptés. Comme sa silhouette fine le laissait présager, il s'agissait d'une femme, d'environ 5 ou 6 ans son aîné, jeune sans l'être pour autant vraiment : son regard d'une couleur indéfinissable révélait à la fois quelque chose de pétillant et un immense savoir : comme si ce contraste en lui-même était le reflet entier de sa personne. Si Harry n'avait pas été frappé par la familiarité que lui inspirait celle-ci, sans doute aurait-il pensé que les charmes des vélanes étaient bien fades en comparaison… Comme si elle s'était attendue à sa visite, l'inconnue lui adressa un sourire rayonnant en reprenant le plus naturellement du monde.
- Excuse-moi Harry, je ne t'avais pas entendu arriver !
Sa voix suave avait quelque chose de cassé dans le ton qui en accentuait la chaleur. D'un geste qui semblait apparemment fort simple, elle descendit de son observatoire d'un saut aisé pour se poster face à lui.
- Je suppose que tu attends le Professeur Dumbledore ? Il est allé donner certaines directives aux elfes mais ne devrait plus tarder je pense.
- Ah, je comprends… J'espère quand même pouvoir assister à la répartition.
- Oh, oui, ne t'inquiète pas, le Choixpeau est encore en train de répéter sa rengaine. Comme d'habitude, il a un trac fou !
- Qui ça ? Le Choixpeau !
- Eh oui, qui l'eut cru, même après autant d'années de métier !
Plus que par cette remarque, Harry fut surpris par le naturel de cette conversation. Alors qu'il rencontrait cette personne pour la première fois, tout ceci paraissait on ne peut plus normal à ses yeux.
- Vous vous êtes fait attendre professeur ! S'exclama la jeune femme, en souriant à l'intention d'une personne derrière Harry.
Ce dernier fit rapidement volte-face pour constater la présence d'Albus Dumbledore, n'ayant absolument pas entendu son arrivée. Pareil à l'homme qu'il avait toujours été, le directeur le plus apprécié de toute l'histoire de Poudlard arborait un sourire affable, le visage d'un calme décidément imperturbable, ses yeux azurés pétillant d'une malice insondable, expression qu'il ne quittait jamais quel que soit le contexte et pouvait se révéler inquiétante. Ses cheveux et sa barbe d'une blancheur lumineuse faisaient à eux seuls une véritable parure au vieil homme dont la splendeur des habits n'était plus qu'un simple ornement.
- J'espère ne pas t'avoir trop fait attendre Harry. Dit-il de sa voix profonde avant de se retourner vers l'inconnue avec un sourire. Comment fut le voyage ?
- Hmm… Incomplet je dirais, Kingsley et Arthur ont du être retenu au Ministère car je ne les ai pas trouvé chez eux.
Elle jeta un rapide coup d'œil à l'une des nombreuses horloges du directeur, plus curieuses les une que les autres mais raisonnant toutes dans un même tic tac parfaitement synchrone.
- Huit heures, ils devraient être rentrés ?
- Ce n'est pas grave, je suis bien certain que Molly s'occupera du reste.
- Elle a déjà tant à faire… Soupira la jeune femme.
- Les préparatifs sont bientôt prêts Pearl, tu en as déjà fait énormément, je t'en remercie. Conclue-t-il avec un « il-ne-savait-quoi » de tutélaire.
- Très bien Professeur. Répondit-elle avec un hochement de tête entendu. Dans ce cas je vous laisseà tout à l'heure ! Ajouta-t-elle avec un signe de main à l'intention d'Harry.
Confus, ce dernier l'observa sortir d'un pas léger avant de se retourner vers le directeur qui ne l'avait quitté des yeux. Il aurait souhaité lui demander à cet instant qui elle était, mais ne le fit cependant pas, restant obstinément sur la défensive, il voulait que le dialogue soit le plus succinct possible.
- Vous vouliez me voir, Professeur. Demanda-t-il froidement.
- En effet, Harry, mais je ne te retiendrai pas longtemps, comprenant bien que tu veuilles rejoindre tes amis. C'est au sujet de l'option que tu as choisi cette année.
- Si je peux me permettre, que vous avez choisi pour moi, Professeur. Continua-t-il sur le même ton.
- Ce n'est pas tout à fait exact ! Répondit-il avec un sourire. Si toi-même n'avais pas décidé d'approfondir l'Occlumentie, je ne t'y aurais jamais obligé.
- Je ne comprends pas…
- L'Animencie est une étude plus approfondi de cette matière : ne se limitant pas à la défense, je tenais à ce que tu développes également ce qu'on pourrait appeler les attaques psychiques, dont le sort legilimens fait notamment parti.
- Le sort qu'utilisait Rogue …
- Le professeur Rogue.
- Ouais, lui, dans mes « cours particuliers » ?
- Exactement. La maîtrise de la psyché est un pouvoir immense, qui peut s'avérer très dangereux si on ne sait comment l'utiliser. C'est la raison pour laquelle cette matière a été supprimée il y a quelques années déjà. Mais je suis convaincu que tu as désormais non pas les capacités, tu les as toujours eu, mais disons un état d'esprit qui te permettra de l'aborder.
Quoique cette remarque soit particulièrement flatteuse de la part d'une personne telle que Dumbledore, il dut prendre sur lui pour ne pas rétorquer « La mort de Sirius était bien commode n'est-ce pas », sachant pertinemment qu'elle était la seule raison de cette motivation soudaine. Il se contenta simplement d'ajouter :
- Et qui me l'enseignera ? Je pense que Ro – hum – Le professeur Rogue ne voudra plus entendre parler de moi pour des « rattrapages de potion ». Dit-il, non avec sarcasme, mais plutôt avec espoir.
- J'en ai parlé avec lui. Bien qu'il ne l'admette pas, je suis bien certain que Severus est conscient de l'erreur qu'il a faite le jour où il t'a dispensé de ses cours, aussi a-t-il consenti à être de nouveau ton tuteur en alternance.
- Quelle délicate intention ! Maugréa-t-il avant de s'attacher à la fin de la phrase. En alternance avec… ?
On entendit le roulement des escaliers en colimaçon, annonçant l'entrée d'un nouveau visiteur : quelques secondes plus tard apparu le Professeur McGonagall, venue annoncer au directeur qu'on attendait plus que lui pour commencer la cérémonie d'ouverture. Ce dernier l'en remercia, et invita Harry à le suivre dans la Grande Salle…
Est-il encore nécessaire de décrire les splendeurs de la Grande Salle lors du premier banquet de l'année scolaire ? Ses sculptures majestueuses, sa vaisselle d'or et pierreries miroitant sur les longues tables des quatre maisons, son plafond féerique, où scintillaient les premières étoiles du crépuscule, d'innombrables diamants parant une nuit de velours à travers les nuées lactées. Bien sur, il ne s'agissait que d'une illusion donnant l'effet d'une pièce à ciel ouvert, mais ce décor enchanteur aurait pu faire pâlir la nuit la plus sombre.
Dans l'allée centrale, une cinquantaine d'enfants avançaient en rang ordonné d'un pas timide, observant les yeux écarquillés d'émerveillement chaque détail pour la première fois. Mais plus que par l'arrivée des nouveaux venus, ce fut le retour, pourtant discret, d'un Gryffondor de sixième année qui attira les regards et relança les discussions, alors que celui-ci tentait de se faufiler silencieusement vers la place qui était la sienne.
- Où en sont-ils ? Demanda-t-il à ses voisins de table.
- Tu n'as rien manqué. Apparemment, McGonagall avait long à dire aux Première Année cette fois-ci. Répondit Ron.
- Ca se comprend… Ajouta Hermione d'une voix faible. Pourquoi Dumbledore t'a-t-il convoqué ?
- Pour m'informer que j'aurai l'honneur de reprendre des cours particuliers avec ce cher Rogueça m'avait manqué.
- Eh ben, t'en as de la chance ! Ironisa Ron avant de détourner son regard vers le fond de la salle. Tiens, quand on parle du loup… Sans vouloir offenser Lupin…
En effet, alors que le professeur de métamorphose installait le Choixpeau sur son piédestal, ses collègues entrèrent à leur tour pour prendre place à leur siège, surplombant les élèves devenus silencieux. Parmi eux, le maître en potion affichait un visage imperturbable – un mur de pierre aurait paru plus émotif en comparaison !– et n'accorda qu'un bref regard dédaigneux à ses spectateurs avant de s'asseoir à son tour dans un mouvement de cape presque solenneléchangeant quelques mots, certainement d'une politesse d'usage, avec le professeur Flitwick assis à sa droite. A sa gauche, le Professeur Chourave semblait en grande conversation avec le Professeur Sinistra et Hagrid, qui tenta en parfait gentleman de tirer vers lui leurs chaises pour les inviter à s'y asseoir, ce qui manqua de peu des les briser sous la force de sa poigne ! Ca partait pourtant d'un bon sentiment songea Harry en le voyant se confondre en excuses ! Ce fut finalement Dumbledore qui ferma la marche pour se placer au centre du corps enseignant, invitant la jeune personne le précédant à s'installer sur un siège voisin du sien :
Celui des professeurs de Défense contre les Forces du Mal.
- Alors, c'était ça… Murmura Harry en l'observant.
- Tu la connais ? Demanda Hermione en se retournant vivement vers lui.
Il se contenta de secouer négativement la tête, en se demandant pour lui-même si c'était tout à fait exact.
- Je l'ai rencontré tout à l'heure dans le bureau de Dumbledore. Expliqua-t-il simplement.
- Et tu nous l'as pas dit ! S'exclama Ron abasourdi, sans détourner son regard de la jeune femme.
Même si Harry avait répondu à sa question, il se demanda si son meilleur ami l'écouterait seulement : il était noyé dans une sorte de béatitude communicativeà croire le nombre d'élèves suivant son exemple…
- Et voilà qu'il nous remet ça. Soupira Hermione en levant les yeux au ciel.
- Tu crois qu'elle a été transférée de Beauxbâtons ? Poursuivit-il d'une voix absente sans rien écouter de ce qu'elle disait.
- Arrête de dire n'importe quoi ! C'est pas une adolescente, tu vois pas qu'elle est assise à la table des professeurs idiot ! Reprit-elle sèchement.
- Au moins on peut dire que le contraste avec Ombrage est frappant… Continua-t-il sur même ton.
- Rien ne nous dit que ce n'est pas encore une recrue chaudement recommandée par le Ministère ! Ce n'est pas sur son physique qu'on juge les compétences d'un professeur Ronald !
- Ca va bien à une groupie de Lockhart de me dire ça ! Rétorqua-t-il avec une voix soudain plus éveillée.
Hermione lui lança un regard noir pour toute réponse – en parfaite opposition avec ses joues écarlates – avant de détourner la tête, l'air indigné.
- Vous pariez pour quoi cette fois-ci ? Demanda d'une voix amusée Ginny en se joignant à la conversation : Une Mangemort, une écrivain mythomane ou une dictatrice en puissance ?
- Tu as oublié notre hybride préféré. Compléta Harry.
- Si ses cours sont aussi bons, comment pourrait-on lui en vouloir ? Répondit la rouquine en souriant.
Ils ne purent cependant pas poursuivre le sondage, le Directeur réclamant d'un geste théâtral le silence qui invita le Choixpeau rapiécé à entonner son hymne annuel :
Laissez-moi vous compter l'histoire
De la célèbre existence de notre manoir
Elle commence sur ces terres en des temps reculés
A la rencontre heureuse de quatre valeureux sorciers
Voyez-vous, j'étais encore droit et fringant alors
Lorsque je trônais à la tête du vaillant Gryffondor
Celui-là même qui proposa à ses trois compagnons
De fonder cette école dans une parfaite union
Ensemble, ils bâtirent ces tours avec cet objectif commun
Enseigner leur savoir, quel admirable dessein !
Cependant, concernant les critères de sélection
Les qualités requises différenciaient leurs opinions
Helga Poufsouffle souhaitait des élèves égaux
"Avant tout, j'exige qu'ils soient loyaux
Et sachent faire preuve de patience
Pour mériter pareille connaissance."
Mais a cela, Rowena Serdaigle renchérit
"Favorisons parmi eux les plus érudits
Notre science ne saurait être apprise
Que par ceux ayant la sagesse acquise"
"Leur bravoure seule fera la différence"
Affirma Godric Gryffondor par avance
"Qu'ils possèdent en eux d'indéniables talents
L'enseignement reviendra alors aux plus puissants"
Le plus exigeant demeurait Salazar Serpentard
"Ce privilège ne peut être accordé aux bâtards
Aux enfants de nobles familles nés
Ils nous faut l'instruction réserver"
Il fut alors décidé pour mettre fin au débat
De répartir les élèves en fonction de leurs choix
Ainsi naquirent quatre grandes maisons
L'apprentissage propre à son illustre nom
Les plus ambitieux à la recherche de pouvoirs
Se voyaient accueillis sous l'insigne de Serpentard
Ceux démontrant un désir d'apprendre insatiable
Chez Serdaigle reçurent une culture remarquable
Fussiez vous aussi audacieux que téméraires
Vous correspondiez à Gryffondor de caractère
Poufsouffle ne fit point tant de façons
Accordant à tous une équitable éducation
C'est ainsi que de nombreuses années durant
Les maisons vécurent dans un soutien mutuel
Mais comment imaginer à cet instant
Telle harmonie rompue par d'anciennes querelles?
Car bientôt, cet équilibre se révéla fragile
Plongeant notre école dans un plus grand péril
La discorde s'immisça entre les fondateurs
Chacun estimant son éducation la meilleure
Sous le poids des conflits les piliers vacillèrent
A l'exemple des maîtres, les disciples se soulevèrent
Jamais Poudlard ne parut plus proche du trépas
Qu'en ces heures malheureuses d'inutiles combats
De ce fait, il n'apparut d'autre solution
Au rusé Serpentard que la séparation
C'est une triste paix que ce départ apporta
L'école ne redevint jamais ce qu'elle était autrefois
De simples souvenirs que ses glorieuses heures
Alors que le dépit s'installait en nos cœurs
Quelle morale devrions-nous tirer de ceci ?
Pour le savoir écoutez
bien ce qui suit :
Il m'incombe la cruelle tâche de
vous séparer
Puisque c'est dans cet objectif que je fus créé
Mais ne voyez dans cette inévitable division
Qu'une nécessité d'assurer votre cohésion
En ces temps troublés, je redoute un funeste destin
Car le mal rode désormais, sans doute il n'est plus loin
Son ombre déjà s'étend comme le plus sombre augure
Menaçant notre Poudlard d'un effroyable futur
Comme au temps des quatre grands, le danger nous guète
Mais hélas, je crains que l'Histoire ne se répète
Sachez apprendre des autres, dépassez les désaccords
Face à l'ennemi, l'alliance nous rend toujours plus forts
Alors je vous pris d'écouter ces mots avec sagesse et raison
Tandis que sans plus attendre j'annonce la répartition.
Sur ces dernières paroles, le chapeau se tût. Les quelques secondes de silence qui suivirent furent vite rompues par un tonnerre d'applaudissements, alors que le niveau des conversations remonta d'un cran.
- Le Ministère va finir par accuser Dumbledore d'utiliser le Choixpeau comme instrument de propagande ! Remarqua Ron d'un ton amusé en continuant d'applaudir.
- C'est pas impossible. Approuva Harry, faisant de même. On est loin des comptines des premières années !
Il ne put s'empêcher de sourire, attendri et un peu nostalgique peutêtre, en observant les nouveaux venus (qui lui paraissaient plus petits d'années en années) s'échanger à messes basses des mots inquiets concernant le test qu'ils auraient à passer pour être répartis, comme lui-même l'avait fait lors de son arrivée, persuadé qu'un enfant ayant ignoré pendant 10 ans le mot « magie » n'avait pas sa place en ces lieux. Le Professeur McGonagall les dévisagea d'un regard à la fois autoritaire et encourageant du haut de son estrade.
- Silence, s'il vous plait, reprit-elle en faisant tinter une coupe de cristal à l'aide d'une cuillère, c'est valable pour vous aussi Patil ! Bien ! Sans plus attendre, nous allons procéder à votre répartition. Poursuivit-elle à l'intention des petites têtes émues. A la mention de votre nom, vous me rejoindrez sur cette estrade pour que je vous coiffe du Choixpeau. C'est lui qui choisira en fonction de vos personnalités la maison qui vous est appropriée.
Elle déroula le parchemin, rehaussant ses lunettes.
- Andersen, Abigail.
Une jeune fille aux cheveux roux se détacha du groupe. Elle sembla observer ses camarades d'un œil implorant, espérant sans doute qu'un autre élève porte le même nom et commence à sa place. Mais résignée face au silence, elle s'avança d'un pas chancelant sous les yeux curieux de ses aînés attablés, lançant déjà les premiers paris. La réponse ne tarda pas à venir :
- SERDAIGLE !
Comme d'accoutumée, la maison concernée éclata en applaudissements à cette annonce, accueillant de leurs félicitations une Abigail intimidée, mais soulagée. C'est ainsi qu'avec une attitude variable, les minois tracassés se succédaient sur le tabouret surélevé où le chapeau trônait, certains se précipitant surexcités, d'autres plus timorés devaient être poussés par leurs camarades pour se présenter. C'était dans cette catégorie que se trouvait…
- Ashford, Matthew.
Le premier à être envoyé à…
- GRYFFONDOR !
D'un même élan, Harry, Ron et Hermione se levèrent en applaudissant, de même que la table entière, s'appliquant à faire le plus de bruit possible comme si la compétition entre les maisons était déjà lancée. Comme tous préfets se devaient de le faire, ces deux derniers l'invitèrent à prendre place près d'eux pour lui expliquer les règles de bases de la bannière rouge et or. Lorsque Harry lui serra la main en lui adressant les habituels mots de bienvenue, le jeune garçon se figea dans une expression d'ébahissement, qu'imiteraient sans doutes les Première Année qui se joindraient à eux par la suite. Quelque peu blasé, il se contenta de penser avec rancœur au pouvoir de la presse sur la popularité des personnes dites célèbres, alors que dans les mêmes circonstances, d'autres yeux d'enfants l'avaient regardé comme un fou à lier l'année précédente.
- Le fan-club Crivey va avoir de nouveaux adhérents on dirait ! Plaisanta Hermione.
- Avery, Coppelia.
- Très amusant ! Bouda Harry. Malefoy et ses macaques vont s'en donner à cœur joie !
- SERPENTARD !
- Je ne vois pas de quoi il se plaindrait, depuis le procès de Juillet, son nom de famille a fait la une de plusieurs journaux déjà ! Rétorqua Ron d'un ton sarcastique.
- Beckett, Kalvin.
- Pitié, qu'ils se dépêchent, j'ai l'estomac dans les talons ! Gémit Seamus Finningan suffisamment bruyamment pour être entendu dans un rayon de 10 mètres.
- POUFSOUFFLE !
- Et moi donc, je me demande ce qu'ils nous ont préparé cette année ! Répondit Ron en sentant son estomac perdre patience également.
- Caroll, Emily.
- Tu ne penses qu'avec ton ventre, mais oublie que ce sont des créatures réduites à l'esclavage qui se tuent à la tache pour le remplir ! Répliqua Hermione, paressant offusquée.
- GRYFFONDOR !
- Parce qu'elles le veulent bien. T'en as pas encore fini avec cette association ridicule ? A part toi, qui a été assez idiot pour adhérer à la sale ?
- Caldwell, Ewan.
- Déjà, ce n'est pas sale, mais S.A.L.E., ensuite, détrompe-toi, parce qu'excepté vous… Commença-t-elle en s'adressant à Ron et Harry.
- POUFSOUFFLE !
- On s'est inscrit nous ? Demanda-t-il à l'intention de ce dernier.
- Sous la menace, il a bien fallu. Soupira-t-il avec un début de sourire.
- Dimmesdale, Bridget
- … Elle compte d'autres membres motivés, compléta-t-elle, comme Luna Lovegood et Viktor Krum !
- SERPENTARD !
- Ouah ! C'est super prometteur ! S'esclaffa Ron. Une illuminée et un amoureux transi qui n'a sûrement rien compris à ce que tu lui faisais signer !
Après une vague tentative pour les mettre d'accord, Harry les abandonna à leur dispute, lassé, retournant son attention vers le groupe de première année dont la masse diminuait progressivement. Enfin, lorsque Michael Wallace fut envoyé à Serdaigle, Dumbledore se leva à nouveau, signe qui annonçait l'arrivée des plus succulents mets lorsqu'il prononcerait les deux mots magiques :
- Bienvenue pour une nouvelle année à Poudlard ! Déclara-t-il avec un geste de bras accueillant, le visage illuminé du plus chaleureux sourire. A nos Première Année dont nous avons le plaisir de faire la connaissance, aussi bien qu'aux anciens que j'ai toujours autant de joie à retrouver parmi nous. Mais je pense que l'heure n'est pas encore aux discours…
Un gargouillement sonore en provenance de la table des Poufsouffle vint attester cette idée.
- … Comme me le fait gentiment remarquer Mr.Flinch-Flechley, j'attendrais donc que nos ventres soient pleins et nos esprits disposés pour vous assommer avec mes redondances de vieil homme ! Pour être plus explicite : bon appétit !
Des sourires reconnaissants apparurent sur de nombreux visages, accompagnés d'applaudissements enthousiastes, alors que l'argenterie se remplissait dans un « oooh » admiratif des plats les plus exquis. Ce fut à l'instant où Lavande Brown leva son assiette pour se servir que Sir Nicholas de Mimsy-Porpington, plus connu sous le nom de Nick-quasi-sans-tête, fit son apparition à sa place sans crier gare, alors que la jeune fille lâchait son plat sous l'effet de la surprise.
- Veuillez excuser mon irruption intempestive ! S'excusa le fantôme de Gryffondor alors que cette dernière nettoyait sa robe en ruminant.
- Bonsoir Sir Nicholas ! L'accueillit Hermione avec un sourire. Comment se fait-il que vous nous rejoigniez maintenant seulement ?
- Il a été décidé que ce serait moi cette année qui serait chargé de surveiller Peeves durant la répartition. Il est absolument intenable !
- Vous vous reléguez chaque année ?
- En effet. L'année dernière, ce cher Baron Sanglant s'en était occupé, et pour des d'obscures raisons, il semble qu'il sache se montrer bien plus persuasif que moi !
- Il n'a aucun mérite vous savez. En digne Serpentard qu'il est, il fait peur à tout le monde, même aux élèves ! Le rassura Ron dans ce qu'il pensait être un bon argument.
- Comment ? Sous-entendez vous, jeune homme, que Sir Nicholas de Mimsy-Porpington ne serait pas assez effrayant !
- Oh… si, si, vous êtes terrifiant mais… Tenta de se rattraper Ron en s'apercevant de sa maladresse.
- Que je ne suis pas le plus impressionnant fantôme quinquacentenaire de cette école ?
- Ca va sans dire mais…
- Et ce serait sans doute pour cela, selon vous, que l'on ne m'aurait pas admis au Club des Chasseurs sans tête je suppose !
- Euh… oui, enfin, non, je n'en sais rien mais…
Mais il ne put jamais terminer son développement, l'ancien Seigneur s'éloignait déjà en direction des Première Année pour leur souhaiter la bienvenue, en ressassant des mots dont on pouvait saisir« jamais entendu ça », ou « c'est un comble »…
- Ben quoi ! J'y suis pour rien cette fois ! Plaida Ron à l'intention d'Hermione qui l'observait en secouant la tête, incrédule.
Trop occupés à dévorer des pâtés savoureux, rôtis fumants et tartes fruitées, la rumeur des conversations avait diminué de plusieurs octaves, les élèves n'échangeant que quelques mots pour demander à son voisin le sel ou de lui resservir une part de ce délicieux pudding ! Enfin, lorsque les étudiants commencèrent à sentir leur uniforme devenir trop étriqué et leurs paupières s'alourdir, promettant une nuit confortable dans les draps de velours de leurs chambres respectives, Albus Dumbledore se leva une nouvelle fois, n'ayant pas à amorcer le moindre geste pour s'attirer une attention totale et soutenue de ses spectateurs.
- Eh bien, maintenant que nous voilà repus de ce festin, que, je suppose, vous avez su apprécier à sa juste valeur à en croire vos visages somnolents, je vous demanderai encore quelques minutes d'attention avant de vous laisser regagner vos dortoirs. Dans un premier temps, pour présenter aux nouveaux et rappeler à d'autres quelques points essentiels du Règlement intérieur de notre école, comme me l'a chaudement recommandé notre aimable concierge Argus Rusard, ici présent…
Ceux qui s'étaient donné la peine de tourner la tête vers l'intéressé à cet instant pouvaient aisément conclure que l'utilisation de l'adjectif aimable était tout à fait inopportune ici !
- …Tels que l'interdiction d'avoir recours à la magie dans les couloirs entre les heures de cours, de sortir de la tour de vos Maisons après l'heure fixée, graduelle en fonction de votre classe, de pénétrer dans la forêt interdite – d'où son nom – ou encore de jeter certaines substances dont Argus a établit une liste exhaustive que vous pourrez vous procurer dans son bureau, au première étage de l'aile est.
- Comme si quelqu'un allait y aller sans y être obligé ! Marmonna Ron d'un ton sarcastique.
- Enfin, comme la plupart d'entre vous l'auront sans doute deviné, suite au départ regrettable (il ponctua se mot d'une ironie des plus subtile) du Professeur Ombrage, j'ai l'immense plaisir d'accueillir le Professeur Raynes, qui dispensera les cours de Défense contre les Forces du mal.
Des applaudissements nourris suivirent cette nouvelle, face auxquels le Professeur concerné inclina la tête d'un geste courtois, quoique légèrement intimidée sans doute. Comme par réflexe, Harry reporta immanquablement son attention sur Rogue : lui qui, depuis une quinzaine d'années, postulait pour le poste maudit, devait écumer de rage de s'être une nouvelle fois heurté à un refus. Cependant, l'expression qu'il pouvait lire sur son visage à cet instant ne ressemblait ni à du dégoût, ni à de la colère. Il paraissait presque résigné et même, si cela était possible, faisait preuve d'un certain respect.
- Enfin, pour conclure, reprit Dumbledore une fois le silence revenu, je vous annonce que la reconstitution des équipes de Quidditch auront lieu en fin de semaine sous la surveillance de Mme Bibine, qui vous fera parvenir les horaires des essais en temps voulu. Pour l'heure, je vous souhaite à tous et à toutes une bonne nuit !
Il ne fallut pas le répéter deux fois : dans un vacarme grinçant, les élèves se levèrent de leur chaise pour se diriger vers les sorties, dans une masse désordonnée que tentèrent de gérer les préfets en interpellant à tue-tête leur Maison.
- Au pied les gosses ! Lança Ron d'une voix sonore en poursuivant un Premier Année qui voulait absolument rejoindre sa grande sœurélève chez Poufsouffle.
- Comment veux-tu qu'ils t'obéissent si tu leur parles de cette façon Ron ! S'indigna Hermione, alors qu'elle-même ressemblait à une mère poule au sens littéral, suivi d'une dizaine de jeunes filles de la nouvelle promotion qu'elle avait fait mettre en rang derrière elle.
Mais à sa grande surprise, ils rappliquèrent à son appel sans se faire prier.
- Ils m'ont vu parler avec Harry tout à l'heureça dispense de toute autorité Hermignonne ! Chuchota-t-il d'un ton badin, apparemment satisfait de sa mine stupéfaite.
- Content que ça profite à quelqu'un au moins. Soupira ce dernier, alors que les nouveaux spécimens Crivey le suivait toujours des yeux en murmurant entre eux. On se retrouve dans la salle commune tout à l'heure ?
Les deux jeunes préfets acquiescèrent d'un signe de tête, avant de retourner à leur refrain « Les Première Année, suivez-moi ». A mi-chemin, il rattrapa Neville, coincé entre deux étages par un escalier particulièrement capricieux.
- Il refuse de s'immobiliser sur la troisième tour ! Expliqua-t-il d'une voix ennuyée, attendant simplement que ça passe. Hermione et Ron t'ont donné le nouveau mot de passe ?
- Oui, c'est…
- Sarabande ! Répondit pour lui Dean Thomas d'une voix précipitée, profitant d'un instant où l'escalier avait enfin choisi de s'arrêter face au portrait de la Grosse Dame.
Celle-ci pivota sur elle-même pour permettre aux Gryffondors de pénétrer dans la chaleureuse pièce circulaire. Comme d'habitude, les elfes n'avaient pas fait les choses à moitié : un feu ardant crépitait déjà dans l'âtre de la cheminée marbrée, dégageant une douce chaleur particulièrement appréciable, les tables étaient garnies de paniers de fruits de toutes espèces, (au cas bien improbable où un élève aurait encore faim après un pareil festin), et chaque fauteuil de bois verni, quoique usé par le tempsétait décoré de nouveaux coussinets molletonnés des plus accueillants – qui devraient d'ailleurs s'estimer heureux s'ils étaient encore dans le même état le lendemain après la bataille de polochon annuelle, devenue une sorte de rituel pour les retrouvailles des élèves. Après que Ginny lui ait souhaité une bonne nuit entre deux bâillements en montant vers le dortoir des filles, Harry se dirigea d'un pas traînant auprès du foyer embrasé pour se laisser tomber dans son sofa préféré, rapidement imité par Seamus, Dean et Neville n'ayant apparemment pas plus envie de dormir que lui pour l'instant.
- Alors, qu'est-ce que vous pensez de la nouvelle prof ? Demanda Dean.
En guise de réponse, Seamus lui adressa un sourire malicieux en levant le pouce avant d'ajouter.
- Mais il faut reconnaître qu'en comparaison d'Ombrage, même ce bon vieux Gilderoy passait pour un professeur qualifié !
- Mais nous ne parlions pas de ses compétences d'enseignante… Rétorqua Dean d'un ton conspirateur.
- Bien entendu ! Approuva Seamus alors que son sourire s'élargissait.
- Et comme toujours vous vous limitez à des considérations masculines. Railla Hermione, qui venait de les rejoindre dans la salle commune, suivie de Ron.
- Etant des hommes, c'est un peu normal chère préfète. Rétorqua Seamus, en se décalant pour leur laisser de la place.
- Je me comprends !
- Comme on aborde la DCFM, est-ce que tu t'occuperas toujours de la D.A. cette année Harry ? Demanda Neville.
- Voilà quelqu'un de sérieux au moins, merci ! Ponctua Hermione avant de laisser Harry répondre.
- Je ne sais pas… Ca dépendra des emplois du temps. Il faut aussi que Dumbledore nous en donne la permission, se serait beaucoup plus simple si cette association devenait officielle.
- Dommage, c'était marrant de faire ça sous le nez de Rusard ! Commenta Ron en s'étirant.
- Oui, mais à la fin de l'année, ce n'était plus un secret pour personne ! Répondit avec raison Neville.
- Mais au moins, avec la prise de risques, seuls les élèves vraiment motivés venaient. Répartit Hermione.
- Oui, certains risquent de venir en touristes, par curiosité, pour tuer le temps ou voir le 'Grand Harry Potter ' à l'œuvre, c'est certain. Ajouta Seamus en adressant un clin d'oeil à ce dernier.
Il était difficile de croire qu'au même instant, l'année précédente, Harry avait brandi dans un excès de colère sa baguette contre lui. Il y avait quelque chose de rassurant dans le fait d'avoir réussit à regagner la confiance de ceux avec qui il partageait, pour ainsi dire, sa vie, bien que pour cela, le prix à payer ait été excessivement élevé…
- En parlant d'autorisation, reprit Ron, j'ose espérer que les 20 milles décrets de la Grande Inquisitrice ont été annulé avec le retour de Dumbledore ! Tu refais parti de l'équipe de Quidditch Harry ?
- Etant donné que le directeur m'a rendu mon Eclair de Feu en fin d'année, je prends ça pour un oui ! Répondit Harry avec un sourire rayonnant. Mais d'un autre côtéça m'ennuie pour Gin', elle avait vraiment assurée en tant que remplaçante.
- Elle a toujours dit qu'elle préférait le poste de poursuiveuse, elle devrait l'obtenir sans problème durant les prochaines sélections avec le départ d'Angelina et d'Alicia.
- On peut lui faire confiance de ce côté-là. Acquiesça Harry.
- Et toi Hermy, tu ne veux pas rejoindre l'équipe ? Tu serais pas mal en batteuse, j't'assure ! Plaisanta Ron en se tournant vers l'intéressée.
- Aussi tentante ta proposition soit-elle, répondit-elle avec sarcasme, elle n'aurait d'intérêt que dans les matchs contre les maillots verts !
Ce fut sur cette remarque qu'elle se leva en s'étirant longuement.
- Bon, moi je vais me coucher. Vous devriez en faire autant, il est presque minuit.
- Ouais, je crois qu'on va y aller aussi. J'entends mon oreiller m'appeler d'ici, je sens que je vais bien dormir cette nuit ! Ajouta Ron.
- Tu viens Harry ? Demanda Neville, se levant à son tour
- Hmm ? Commencez à y aller, je vous rejoins tout de suite. Répondit-il d'une voix absente.
- Comme tu veux… A demain alors !
Hermione d'un côté, Ron, Dean, Seamus et Neville de l'autre montèrent dans leurs dortoirs respectifs en se faisant bailler mutuellement. Comme hypnotisé par les flammes dansant dans le foyer, Harry n'en détachait son regard, vide d'expression. Il devait continuer à s'exercer pour l'occlumentie – ou était-ce l'animencie ? Bref, pour cette matière, mais ce soir là, le courage lui en manquait. Ces derniers temps, il avait rarement eu l'occasion de se retrouver seul, pourtant, comme tout un chacun, sinon plus en raisons des circonstances récentes, il avait besoin de ces instants de calme pour faire le point, pour se retrouver face à lui-même. Une façon comme une autre de relativiser en quelque sorte. Mais plus il s'y efforçait, plus le manque devenait pesantà travers les plus simples détails du quotidien. Combien de fois le visage souriant de son parrain lui était-il apparu dans ce feu crépitant pour lui apporter des paroles réconfortantes, le sermonner, ou lui proposer des escapades interdites à Pré-au-lard ? Et à ce moment encore, il espérait qu'il pouvait surgir à tout instant chaque fois que les brindilles calcinées s'affaissaient.
« La vie continue », Ron lui répétait suffisamment plus ou moins maladroitement, et c'était vrai, mais pas pour lui, ou du moins pas encore. Il attendait d'autres explications, il lui serait impossible de faire son deuil sans avoir certaines réponses : Qu'était-ce que ce voile ? A qui appartenaient ces voixà la fois terrifiantes et envoûtantes ? Qu'est-ce qui justifiait la présence d'une telle salle au département des mystères ? Il devait le savoir, on lui devait au moins ça. Méditant sur cela, le cadeau de Mrs. Figg lui revint à l'esprit. Comme d'habitude, personne ne lui répondrait clairement, mais il avait besoin de parler. De quoi ? Il n'en savait rien. Juste de parler à un adulteà quelqu'un qui savait, qui avait vraiment conscience de ce qui se passait. Peutêtre ne trouverait il personne, mais au moins il aurait essayé.
En un bref aller-retour, il se rendit dans la chambre commune où des ronflements sonores se faisaient déjà entendre, pour y prendre dans le moins de bruit possible la poudre cendrée. Il lança un dernier regard suspect aux alentours avant de se reposter face à la cheminée, y jetant une poignée généreuse avant de s'y agenouiller, murmurant l'adresse : 12, Square Grimmaurd…
Il tenta de faire abstraction du tourbillon de couleurs et d'images que se succédaient alors sous ses yeux dans une chaleur étouffante particulièrement lourde lui inspirant un début de migraine, alors que déjà, ses genoux tremblant légèrement sur les dalles froides lui annonçaient des crampes naissantes. Lorsqu'il se sentit à nouveau immobile, Harry ouvrit un œil, rapidement suivit du deuxième, embrassant d'un regard la cuisine familière plongée dans la pénombre. Attablés, deux hommes discutaient d'une voix étouffée, néanmoins éveillée en dépit de l'heure avancé, tous deux penchés sur un même parchemin que le plus âgé griffonnait en commentant, comme s'il expliquait son contenu à son voisin. Bien que le volume sonore de la conversation s'apparentait à un murmure, Harry parvint néanmoins à saisir quelques bribes de phrases échangées.
- Nous pouvons déjà supposer que ces deux là sont en sa possession. De par son statut, le premier est évident, quant au second…
- Il l'aurait pris aux Meadowes ? Comment a-t-il pu savoir qu'il était sous la protection de Dorcas ?
- Elle n'avait plus aucun parent, ou plutôt, il s'est assuré qu'elle n'en ait plus aucun quelques semaines auparavant…
Le second homme, qui s'avérait être Chris Prewett ne répondit rien. Il avait enfouit son visage dans ses mains, mais Harry n'aurait su dire si c'était dans un mouvement de fatigue ou d'affliction. Un peu des deux peutêtre… Sans relever son visage vers son interlocuteur, il reprit d'un ton grave.
- Si je me souviens bien, elle était de ton année, n'est-ce pas ?
- Oui, mais je ne l'ai réellement connue qu'après la fin de nos études. Avant qu'elle ne rejoigne l'Ordre, nous nous apercevions de temps à autre parce qu'elle était amie avec Lily, mais nous ne partagions aucun cours avec les Serdaigle autrement…
En entendant le prénom de sa mère, Harry étouffa une exclamation qui ne passa cependant pas inaperçue : les deux hommes se retournèrent vers lui dans un sursaut, s'apercevant de sa présence à cet instant seulement.
- Harry ! Tu… Tu es là depuis longtemps ? S'exclama le premier homme, Remus en l'occurrence, en s'approchant de l'âtre.
- Euh… non, je viens d'arriver. Mentit-il, sans réellement savoir pourquoi il répondait cela.
Lupin l'observa un instant d'un œil incrédule, puis se laissant convaincre par l'œil innocent (longuement travaillé) du jeune Gryffondor, reprit d'une mine inquiète.
- Qu'est-ce qui t'arrive ? Tout va bien au moins ?
- Oui oui, ne t'inquiète pas… Je, euh, passais juste comme ça pour euh…
Pourquoi au fait ? Il n'en savait rien. Il ne pouvait pas répondre « j'avais juste envie de te parler, comme ça », dans le contexte actuel, après la conversation qu'il avait interrompueça aurait pu paraître des plus déplacé.
- Tu veux que j'aille chercher quelqu'un ? Reprit Chris. Molly et Alastor sont à l'étage.
- Non, non, c'était juste pour vous dire que le trajet s'était bien passéà l'exception d'une visite de Malefoy, aucune mauvaise surprise.
L'excuse était bancale, mais tant pis, il s'en contenterait. Et puis, connaissant Mrs. Weasley et ses appréhensions maladives, sans doute jugerait-elle cette intention des plus louables.
- Malefoy ? Répéta Chris. Ce cher Lucius a eu un fils ? Quel genre de femme a bien pu épouser cet énergumène ?
- Narcissa. Répondit Lupin, en s'efforçant apparemment de ne pas sourire.
- Ah oui, suis-je bête ! Entre elle et Bella, y en a pas une pour rattraper la frangine. Heureusement que Belle Maman était là pour sauver la mise.
- Tu es conscient que si Tonks t'entend, tu signes ton arrêt de mort évidemment ?
- Elle est déjà sous le charme, il faut juste qu'elle s'en rende compte, c'est tout !
- Oui, bien sur… Lui accorda Lupin avec une conviction relative, avant de se retourner vers
Harry, arborant un sourire malicieux. Dis-moi, tu t'y prends de plus en plus tôt pour tes premières infractions au règlement !
- Mais je suis bien sagement dans ma Tour après le couvre-feu, Dumbledore ne pourra rien en redire ! Rétorqua le concerné en lui rendant son sourire.
- Je pensais surtout à Maugrey et sa suspicion obsessionnelle des cheminées !
- Je ferais d'ailleurs bien de m'assurer qu'il ne lui prenne pas l'envie de venir inspecter ici. Reprit Chris en jetant un œil vers l'escalier. Bonne soirée Harry, porte-toi bien et n'oublie pas de saluer mes neveux préférés et la petite Hermione de ma part… c'est bien son prénom n'est-ce pas ?
- Quelle mémoire infaillible, dommage qu'elle soit si sélective…
- Le nom d'une belle demoiselle ne s'oublie pas ! A plus les jeunes ! Lança-t-il avant de disparaître du champ de vision restreint d'Harry.
- Il est pas croyable… Soupira Lupin, quoique amusé.
- Un digne élève de maraudeur, on voit tout de suite la parenté avec Fred et George ! Sans eux, le banquet était vraiment calme cette année. Rien de notable, sinon les notes personnelles de l'hymne du Choixpeau…
- Je m'en doutais, il le faisait aussi durant nos dernières années lorsque Voldemort commençait à se faire connaître. Et concernant votre professeur de DCFM ? Je sais que Dumbledore n'a fait passé aucun entretien cette année... J'ose espérer que le Ministère y est étranger.
- Pas d'ombrage à l'horizon je te rassure – Sirius m'a parlé de tes « affinités » avec elle. On a bien une nouvelle prof.
- Une ? C'est donc une femme.
- Le Professeur Raynes, oui. Tu aurais du voir la tête de Ron quand…
- Quoi ! Raynes ? Pearl Raynes ! L'interrompit Lupin, l'observant désormais avec des yeux ronds.
- P.A. Raynes… oui, je suppose mais… Commença Harry, stupéfait.
Abandonnant son air ébahi, Remus éclata d'un rire franc à sa réponse, qui le tint bien une minute entière hors d'haleine. Harry ne se souvenait pas l'avoir jamais vu rire d'aussi bon cœur depuis bien longtemps, et commençait à s'inquiéter sur ce que pouvait bien trouver son ancien professeur d'aussi désopilant dans cette nouvelle.
- Euh… Remus ? Reprit-t-il timidement. Qu'est-ce qui est si drôle ?
- Ce qui est si drôle ? Répéta Lupin en reprenant son souffle. Ce qui est si drôle, c'est de penser à quel point on s'est inquiétés pour rien. Mais on aurait du le deviner… Non pas que se soit vraiment rassurant, mais si Dumbledore a sollicité Ray pour ce posteça signifie que les affaires deviennent vraiment sérieuses…
- Comment ça ? Tu la connais ?
- Si je la connais ! Répondit-il d'un ton badin, comme s'il s'agissait d'une évidence.
- Hein ! Alors l'Arthur dont elle parlait avec Dumbledore s'était… Ca voudrait dire…
- Que c'est également une membre de l'Ordre, oui.
