Chapitre 5
Les deux Malefoy se regardèrent divinement dans les yeux pendant une fraction de seconde. Ce simple laps de temps fit penser, à toute personne qui observait la scène, qu'une guerre sans merci avait éclaté, comme ça, d'un simple regard. Mais il ne faut jamais sous-estimer les regards glaciaux des Malefoy. Lucius détacha le premier le regard de son fils. Ce dernier n'y avait point vu de compassion. Son père était-il si indifférent face à son sort ? Bon, il n'allait pas mourir, mais tout de même ! Il aurait aimé avoir plus de considération : il était Drago Malefoy, bordel de merde !
Le cours de ses pensées fut alors brutalement coupé Gypsy venait de lui assener un coup de coude dans les côtes. Il lui décocha un regard à faire frémir le Seigneur des Ténèbres en personne, mais cela la fit ricaner :
" Quand t'es fâché, Dragounet, t'es encore plus mignon… Axelle a raison. " Ce dernier rougit légèrement, si peu en fait que cela ne fut remarqué que par lui-même, et détourna les yeux au plus vite. Il regretta aussitôt ce geste, car il croisa à nouveau le regard de glace de son père, qui avait l'air encore plus froid qu'à l'habitude. Il n'esquissa alors aucun autre geste pour faire bonne figure demeura obstinément immobile, emmuré dans sa façade d'indifférence comme son géniteur le lui avait si courtoisement enseigné. Il espérait peut-être se protéger ainsi. Il avait tort…
" Alors, mon fils, heureux de me voir ? " déclara pompeusement son père d'une voix radicalement sans chaleur.
" Question piège " se dit aussitôt Drago. Que répondre à cela ?
" Évidemment, Père. Comment pourrait-il en être autrement ? " répliqua Drago, laissant paraître un léger sarcasme dans sa voix, ne trouvant rien d'autre à dire et sachant pertinemment que, dans tout les cas de figure, ce qu'il dirait serait utilisé contre lui par son paternel. Drago avait conscience du fait que son père relèverait le sarcasme sans problème, il savait aussi qu'il ne lui ferait pas remarquer explicitement. Et pas tout de suite…
Ce dernier acquiesça silencieusement. Puis, d'une voix claire et acérée, il reprit, imperturbable :
" Tu ne me présentes pas tes amis ? " Le dernier mot avait été craché, plein de dédain. " J'aimerais connaître tes fréquentations, mon fils. " continua-t-il du même ton.
Drago manqua de s'étouffer. Lui présenter les Impures ? Maintenant ? Alors qu'elles étaient pendues aux bras de Weasley Le Roux et de l'Irritant-mais-pourtant-toujours-miraculeusement-survivant-mister-Potter ? D'accord, il y en avait une à son bras, mais son père se doutait-il seulement de l'identité de cette fille ? Évidemment non. Ce serait le plus difficile. Garder son air digne en avouant tout… Il avala une seconde fois sa salive, choisissant soigneusement ses mots.
" Voici Gypsy Kaosu, Axelle Red et Irys Oroïd. Et je crois que tu connais déjà Potter et Weasley. ". Il prononça la dernière phrase avec exaspération et dédain. Il reprit néanmoins :
" Père, elles sont les… " continua Drago en tentant de rester zen. Mais il ne pouvait pas
poursuivre. Dire à son père, le seul être de cette planète qui soit pire que lui dans leur genre, que ces filles avec qui il partageait l'espace ambiant, que ces filles accrochées à leurs bras (bon, Kaosu n'était pas exactement pendue à lui, comme les deux autres l'étaient pour les deux abrutis de service, mais elle était tout de même à ses cotés…) étaient son pire cauchemar!
À son grand malheur, ce fut Axelle qui termina sa phrase, l'air particulièrement triomphante.
" Oh, monsieur Malefoy… Nous sommes évidemment les Impures. " Elle roula les yeux dans une mimique ennuyée. " Mais j'imagine, monsieur, que vous le saviez déjà… " Drago sursauta. Gypsy et Axelle auraient-elles échangé leurs rôles ? La baveuse charismatique, c'était Gypsy, toute caressante et manipulatrice qu'elle était… Et voilà que Red s'y mettait aussi ! Mais où étaient passés ses airs hautains et ses sourires dégoulinants de moquerie ? La réponse à sa question ne mit pas longtemps à venir.
" Vous êtes venu pour les duels ? " demanda-t-elle sans laisser à Lucius le soin de répliquer quoi que se soit.
" Pour encourager votre fils dans ce qui risque d'être la situation la plus humiliante de sa vie, ou peut-être êtes-vous venu pour nous, les Impures ? " Elle avait terminé sa phrase avec une voix plus grave, plus rauque, mais tout en gardant ses airs innocents. Elle avait cependant une lueur moqueuse dans le regard, ce qui n'échappa nullement à Malefoy Senior.
Il allait lui ordonner de se taire quand il fut à nouveau coupé par l'une de ces trois hurluberlues, celle dénommée Gypsy, qui s'adressait à son fils.
" Oh, mais dis-moi, Drago, c'est que tu les tiens, tes promesses… Mon deux pour un ! " s'exclama-elle, moqueuse. Le jeune blond parut alors extrêmement gêné. Pourquoi Gypsy disait-elle cela devant son père ?! Elle faisait exprès, la harpie ! Cette remarque, cependant, outragea profondément Lucius, qui fut tout bonnement soufflé. Il en perdit même sa contenance.
" Qu… quoi ? Quel deux pour un, Drago ? "
Pétrifié, voilà comment Drago se sentait. Il sentit un grand frisson le parcourir de la tête aux pieds. La sensation de vouloir se fondre dans le sol pour disparaître à jamais le saisit soudainement. Une boule étrangère se forma au creux de son estomac et, à cet instant, il comprit qu'il avait peur. Encore. Cette sensation le prenait trop souvent, ces temps-ci. Il se tourna, un peu malgré lui, vers Gypsy, espérant sans doute qu'elle la tire de ce mauvais pas. C'est fou comme il la connaissait mal.
Comme elle avait eu le don, à date, de foutre sa vie dans la merde, elle n'allait quand même pas se passer de ses talents dans une situation comme celle-là ! Elle le fixa résolument dans les yeux puis afficha son sourire le plus cruel. Elle avait décelé sa peur : elle n'était pas dupe. Elle s'en servirait contre lui, c'était plus que certain. Drago Malefoy avait peur de son père ! C'était trop croustillant, comme information, trop inattendu pour qu'elle la laisse de côté. Sadique et consciente de l'être, elle lui prit la main amoureusement et se serra contre lui. Puis elle annonça explicitement ses couleurs :
" Drago, si tu as peur de ton très cher père, je peux te réconforter… " Ce dernier sentit ses jambes ramollir sous son poids: comment pourrait-il jamais survivre dans une telle honte ? Les Impures, à la limite, ne le dérangeait pas plus que ça : mais qu'elle dise devant son père qu'il avait peur de lui, et qu'elle ait raison… Argh.
La situation était si amusante! Inlassablement distrayante, cette mise en scène était réellement plaisante. Enfin, tout dépendait du point de vue. Mais, pour les Impures, elle l'était. Elles avaient fait croire à Drago qu'elles pouvaient être sympathiques. Il était juste tombé dans le panneau. Et maintenant, elles se faisaient le plus grand des plaisir à lui tourner le dos et à lui faire subir les pires tortures mentales. Mais, après tout, les tortures physiques viendraient sûrement bientôt!
Mais, une fois de plus, Drago se trompait. Comme Gypsy le voulait complet pour son duel (et celui de ses amies, par la même occasion), elle ferait en sorte, évidemment, d'éviter un éventuel infanticide patriarcal ! Ce serait trop malheureux de gaspiller son " sang-froid ", non ? Mais cela, Drago l'ignorait aussi. Et donc, il se demandait vivement où elle voulait en venir. Ce dernier ne pouvait tout simplement pas se douter qu'elle sondait le terrain pour pouvoir mieux appréhender les réactions de son père… elle voulait le piéger, comme elle avait si brillamment réussi avec lui et d'autres.
Lucius Malefoy n'avait pas l'habitude qu'on s'adresse à lui de cette manière si peu orthodoxe. Ces filles paraissaient si… inconvenantes…Et un dédain sans limites naquît alors en lui par rapport à ces… Impures, comme elles prenaient plaisir à se nommer. Il ne tolérerait pas plus longtemps leur façon de lui parler. Elles le mettaient mal à l'aise, avec leurs mises en scène. Il ne pouvait pas en placer une !
Il se racla discrètement la gorge et foudroya son fils du regard.
" J'exige des explications " affirma-t-il.
" Mais… " dit Drago d'une voix hésitante.
" C'est un ordre ! " cracha Lucius en lui coupant la parole. Ses yeux gris étaient plissés de rage contenue.
" Vous ne pourriez comprendre…" commença Gypsy d'un air las. " Il me semble bien, monsieur, que vous n'ayez pas cette chose que l'on nomme couramment " humour "… " Drago la maudit intérieurement. Un air surpris déforma les traits de son père. Une telle arrogance ne devrait même pas être permise ! Puis, n'en tenant plus et aveuglé par la colère, il sortit sa baguette et la pointa vers la jeune fille dans un geste tout à fait menaçant.
Irys regarda alternativement Drago, Lucius, Gypsy et Axelle. Le Blondinet numéro un regardait nerveusement la suite des événements. Le père de celui-ci, donc, le Blondinet numéro deux, dégageait plus de hargne et de haine que jamais. Gyspy, quant à elle, avait sorti sa propre baguette d'un geste lent qui démontrait pourtant clairement qu'elle avait tout sauf peur. Axelle n'avait pas bougé. Enfin, à part sa main droite qui s'était machinalement placée sur la poche se son uniforme contenant sa baguette, elle était restée de marbre.
Lucius eut d'abord l'air décontenancé par tant de calme et de désinvolture. Puis, le regard posé sur Gypsy, il déclara, la voix grave et autoritaire :
" Si tu tiens à ta vie, petite, je te suggère fortement de te soumettre… " Quelle ne fut pas sa surprise quand cette dernière haussa les sourcils, un air provocateur plaqué sur le visage, et lui répliqua salement la dernière chose à laquelle il s'attendait… ! Il en aurait peut-être même ri dans une autre situation… mais tel n'était pas le cas.
" Et vous, monsieur Malefoy, imaginez-vous seulement à quel point je n'ai pas peur de vous et de vos airs supérieurs ? " lança-t-elle, au summum de l'insolence, un petit sourire effronté au coin des lèvres.
Si Malefoy père n'avait justement pas été un Malefoy, il aurait eu, à cet instant, les yeux plus ronds que des pièce de monnaie moldues et la bouche plus ouverte qu'un parapluie lorsqu'il pleut averse ! Mais il gardait, comme à ses charmantes habitudes, son air initial, c'est-à-dire empli de haine. Seulement, intérieurement, il n'en revenait tout simplement pas ! Une vulgaire Sang-de-bourbe s'adressait à lui comme s'il elle avait été sa… supérieure… ?
Puis il éclata d'un rire nerveux, incontrôlable. C'était trop… ironique, inattendu. Il n'était pas habitué à ce genre de réaction… Après tout, il était un Mangemort, le plus respecté de tous, craint et respecté par tous les autres sorciers ! Cette tirade était tout bonnement inconcevable, surtout face à un homme tel que lui. Et ce qu'il pensait à ce moment même transparaissait sur son visage de telle manière que toutes les personnes présentes pouvaient lire à livre ouvert sur ses traits, malgré lui et son ascendance Malefoy.
Dire qu'on pouvait lire en lui comme dans un livre ouvert était un effroyable euphémisme, en fait. Chaque émotion transparaissait sur son visage long et pâle, parsemé, vers le front, de cheveux blonds légèrement décoiffés par l'excitation du moment. On pouvait presque voir ses pensées sur sa figure ! Mais le pire était sans doute ses magnifiques yeux d'un gris-bleu agrémentés par de fines taches argentées : on pouvait voir, dans ces yeux là, le moindre petit songe, le moindre minuscule et très rikiki sentiment. Et les Impures étaient, malheureusement pour Lucius, aux premières loges pour en profiter.
Irys, toute observatrice qu'elle était, ne fit qu'un seul commentaire, qui, au délire général, désappointa tout le monde.
"Ça devait être tellement marrant ! "
Axelle regarda son amie avec une expression terriblement perplexe.
" Scarab ou l'art de dire n'importe quoi, tome 27 " ironisa-t-elle comme à son habitude.
Irys répliqua vertement, sûre d'elle :
" Mais non, Axelle ! Tu vois pas, dans son regard ? Il pensait justement à… "
" La ferme ! " s'emporta Lucius avec véhémence. Drago ne put s'empêcher de pouffer voir son père si déconfit était un plaisir auquel il n'aurait jamais crû goûter. Gypsy, visant toujours son père de sa baguette, en garde et sur ses gardes, sourit en découvrant ses canines d'un air signifiant clairement " bravo, Irys, c'était parfait ".
À quoi son père pouvait-il bien penser pour avoir si honte qu'on en parle à haute voix ? Drago se considérait comme étant en droit de se poser des questions ! Après tout, pendant les 17 années de sa vie, il n'avait jamais vu son père exprimer une émotion autre que la colère. Et, comme ça, en quelques mots, les Impures arrivaient à le mettre littéralement mal à l'aise ! C'était tout simplement sidérant comme elle devinaient les autres d'un seul regard. Il se demanda encore vivement ce que pouvait bien penser son paternel. Il songea alors qu'il faudrait demander à l'une d'entre elles pour avoir la réponse.
Mais surtout… pas devant le principal concerné. C'était primordial, pour sa propre survie. Et il y tenait, bon sang ! Il jeta de nouveau un coup d'œil à son père. Il rebaissa aussitôt les yeux, ahuri par ce qu'il venait de voir. Lucius Malefoy, droit et fier, riche et puissant, était cramoisi. Il avait bien vu, oui : son père avait les joues rosies par ce qu'Irys avait presque dévoilé ! Ce que ça devait être intéressant ! Le voir embarrassé à un tel point était une occasion à ne pas manquer. Cela n'arrivait jamais. Mais les Impures, en moins de cinq minutes, y étaient arrivées. Mais cela avait un prix, évidemment. Tout avait un prix… Il se glaça d'horreur lorsqu'il entendit une voix masculine hurler une incantation.
" Endoloris ! "
Le sortilège atteignit Gypsy directement dans le ventre. On vit d'abord la différence dans ses yeux qui s'agrandirent sous le coup et la surprise. La première pensée qui lui traversa l'esprit fut qu'il était bien plus facile et amusant de lancer un Doloris que de le recevoir ! Ensuite, après cette pensée un peu incongrue et inutile dans la situation présente, elle ressentit une étrange chose envahir très rapidement tout ses membres. Du dessus de la tête aux bout des orteils, elle éprouva une souffrance sans égal. Sans plaisanter, elle crut que même ses cheveux souffraient !
Elle promena son regard autour d'elle, incrédule. Encore peu certaine de ce qui lui arrivait, elle eut l'air un peu perdue, la surprise prenant possession de ses traits comme jamais. Puis elle regarda Lucius, qui avait retrouvé sa pâleur mortelle et son sourire suffisant. Elle le fixa pendant un instant à peine, le temps de réaliser qui lui avait fait ça. La souffrance était comme un poison, se répandant dans ses veines et torturant la moindre parcelle de son système nerveux… La douleur engourdit ses membres à toute allure, sans pitié et de la manière la plus cruelle qui soit. Mais elle était toujours debout, les yeux grands ouverts et une autre expression sur le visage, indéfinissable cette fois-ci. De ses lèvres s'échappa alors une plainte, toute discrète, sourde, la seule réaction qu'elle réussit à manifester dans cet état de souffrance ardente. Puis elle s'écroula sur le sol.
Axelle regarda Lucius avec mépris. Comment osait-il faire ça à Gyspy ? Bon, elles aussi l'avaient fait subir… Mais jamais personne ne s'était permis de démontrer des quelconques représailles ! Elle s'attendait à tout sauf à ça ! Surtout en plein jour, dans un endroit plus que public, où ce crétin de Malefoy était sûr d'être vu et de voir sa réputation détruite à jamais ! Gypsy commençait à reprendre conscience. Axelle sourit. Lucius Malefy allait en baver. Après tout, il y avait des témoins. Et qui croirait-on ? Lui, sur qui tout le monde avait des soupçons, ou elles, trois élèves sans réel passé dans le crime, sinon embêter Potter, ce qui, heureusement, n'était pas puni par la loi ?
Elle n'eut pas le temps de réfléchir davantage car elle aperçut, du coin de l'œil, Gypsy se relever, tremblante de souffrance autant que de colère. Drago, quant à lui, n'en revenait pas. Il savait son père susceptible mais là, ce qu'il venait de faire (soit lancer u n gentil sortilège Doloris à une élève en plein couloir… !) dépassait les bornes ! C'était tout bonnement intolérable ! Il connaissait lui aussi cette souffrance et était plutôt bien placé pour savoir que ce n'était pas recommandable… Ce n'était même pas comparable à ce que lui-même avait ressenti, en fait : il avait, lui, reçu le sortilège d'une élève, non d'un Mangemort aguerri ! La puissance du sort ne pouvait qu'être exacerbée par ce fait non négligeable… et donc doublement intolérable. Il serra les dents, décidé.
Il allait le faire. Vider le contenu de son cœur, désormais trop lourd à porter. Drago Malefoy, mauviette de première, allait enfin avouer à son cher paternel tout le mal que lui avait fait le fait d'être un Malefoy. Un mal entassé à l'intérieur de Drago depuis tout de même dix-sept ans ! Ce n'était pas rien. Il sentit une vague de haine déferler en lui, une haine plus forte que toutes les autres. Il ne croyait pas pouvoir être aussi en colère. Et pourtant, en matière de colère, il s'y connaissait ! Il serra les poings, tentant désespérément de rassembler ses idées. Mais il n'y parvint pas du tout. Ainsi, la rage au cœur, il déclara à son père :
" Bordel ! Tu te rends compte ? "
Lucius se tourna vers lui lentement, la respiration régulière, tout serein et froid qu'il était, et lui demanda calmement, trop, peut-être :
" Quoi, mon fils… ? "
" T'es qu'un imbécile ! " fut la réponse acide qu'il reçut. Il ne répondit rien, trop abasourdi pour réagir.
" Je t'ai toujours détesté, tu sais pourquoi ? Parce que… parce que… " Il sentait des larmes monter, mais il ne fallait pas, non… Il les retint tant bien que mal. " T'as jamais été là pour moi ! Ou même pour Mère ! Tu l'as jamais vue se morfondre sur son sort, se plaignant d'avoir épousé un monstre tel que toi ? T'es toujours à penser à ta petite personne, ou à tes petits copains Mangemort ! Mais jamais à nous ! Et tu vois ce que je deviens ? Je commence à te ressembler, et ça me dégoûte ! "
Et Drago continua à péter la crise de sa vie, sous les yeux ébahis des Impures, du Survivant et de son rouquin de poche, d'Hermione et… surtout, sous le regard tout à fait dubitatif de son père. Il ne manquait que la musique tragique pour donner à cette scène plutôt cocasse un air superbement mélodramatique.
Le plus vieux des Malefoy arqua un sourcil, tout en reprenant un air hautain. Le petit discours de son fils était instructif. Évidemment, jamais il ne serait venu à l'idée de Lucius Malefoy d'écouter réellement son fils et de tenter, tant bien que mal, de le comprendre un tant soit peu ! Il ne voyait, dans cette scène publique, que la colère de sa progéniture. Une colère qui pourrait bien lui être un grand atout auprès du Maître. De la même manière que cette fureur pourrait lui être fatale. Lucius constata alors quelque chose. Il se rendit compte qu'il avait sous-estimé son bâtard de fils. Il avait beau avoir une mère faible, il en avait presque oublié qu'il restait d'abord et avant tout un Malefoy. La frustration accumulée de Drago pourrait bien lui être utile un jour.
Un sourire satisfait se déploya alors sur ses lèvres minces et pâles et il hocha la tête presque imperceptiblement, confiant. Puis, se désintéressant un moment de son fils, il regarda les personnes présentes. Son regard s'attarda un instant sur Potter-le-Survivant-ô-combien-exaspérant et il remarqua avec amusement que ce dernier était ravi de la tournure que prenaient les événements, sa main tenant fermement celle de l'Impure Oroïd. Cette vision le fit ricaner un peu c'était drôle de voir que malgré tous ses malheurs, ce gamin trouvait quand même du temps à investir dans ses relations amoureuses. Puis il focalisa sur le crétin de copain de Potter, le dernier fils (pour l'instant) de son encombrant collègue, Arthur Weasley. Celui-ci était moins rutilant de joie. Mais il ne sut pas exactement pourquoi. Était-ce à cause de cette scène père-fils Malefoy ou simplement parce qu'Axelle Red ne le lâchait pas qu'il tirait un telle tête d'enterrement ? Il s'en désintéressa cependant tout aussi vite et passa aux autres qui étaient présents.
Lucius en vint à observer Gypsy Kaosu qui, durant la petite crise d'adolescence de Drago, avait repris conscience. Restant à terre, elle s'était placée entre Red et Drago, et elle regardait la scène qui se déroulait sous ses yeux avec détachement. La douleur transparaissait encore énormément dans ses yeux, et elle semblait ne pas être très remise du sort qu'il lui avait lancé il y a à peine quelques minutes. Il s'agissait tout de même d'un Doloris, merde! Et lancé par Lucius Malefoy par dessus le marché! À cette pensée, ledit Lucius se sentit bien. Il y avait longtemps qu'il n'avais pas remis quelqu'un à sa place de cette manière. Il avait oublié le bien fou que lui procurait le fait de lancer un Doloris à plus faible que lui. Si son fils craignait ces Impures, il devait tenir plus que sa mère qu'il ne le croyait.
Puis, enfin, son regard revint de nouveau sur son fils, qui haletait presque, les yeux brillant d'on ne sait quelle démence. Lucius remarqua tout de suite un changement dans son port, sa manière de se tenir. En lui gueulant dessus comme il venait de le faire, Drago s'était libéré d'un fardeau qu'il gardait depuis beaucoup trop longtemps il en ressortait changé, plus, peut-être, qu'il ne l'aurait fallu… Sentant que la tempête se calmait, le jeune Malefoy soupira, un peu confus. Il venait de se foutre dans la merde. Mais, à sa grande surprise, son père lui adressa un mince sourire, l'air d'approuver ce qu'il venait de faire. Il ouvrit de grands yeux étonnés, puis les détourna. Il avait mal interprété, c'était évident.
Comment un père quelconque pouvait-il approuver lorsque son enfant lui lançait, et ce en plein couloir, ses quatre vérités ? Totalement invraisemblable. Mais Drago se souvint qu'il n'avait pas un géniteur quelconque. Il avait un Mangemort de père, un type malhonnête et cruel. Lucius Malefoy. Il avait certainement déjà trouvé une façon tordue de tourner cette situation à son avantage. Avec son esprit sinueux, Malefoy père avait sans doute élaboré un plan plus ou moins douteux pour soit tirer profit de tout ça, soit en faire baver à Drago. Avec un peu de chance, ce serait les deux.
Axelle soupira et enlaça son Weasley comme elle avait toujours rêvé de le faire, ce qui arracha un cri de surprise à ce dernier qui, pas résigné du tout, lançait des regards désespérés à Harry. Ce dernier, cependant, avait d'autres chats à fouetter. Irys, par exemple. Mais, loin de vouloir la flageller, il roucoulait avec elle comme un pigeon en lui souriant bêtement. Drago se contenta de leur jeter des regards méprisants. Quels imbéciles ! Et son père, alors ! Encore plus con, celui-là ! Il frémit de rage. Et il y avait Gypsy qui grondait, à côté, frustrée et ankylosée, qui ne faisait plus la fière, au contraire. Il se dit que rien ne valait mieux qu'un bon Doloris pour remettre quelqu'un à sa place. Lui, par exemple. Ou elle…
Drago ne put s'empêcher de penser, ne serait-ce qu'une seconde, qu'elle l'avait mérité et que son père avait eu entièrement raison de lui lancer ce sortilège interdit.
Aussitôt, il se secoua mentalement. Comment avait-il pu penser que son père ait pu être logique sur ce coup?
Sans doute son coté Malefoy qui resurgissait…
Et c'est là que Drago réalisa.
" Merde. Je pense comme si j'étais de leur côté! Comme si je n'étais plus un Malefoy. "
Après tout, il avait pensé à " un côté Malefoy " alors qu'il aurait dû penser qu'il l'était complètement! Pas de coté, pas de parties, pas de divisions, seulement un pur Malefoy.
Bordel de merde, il se faisait clairement embobiner par les Impures. Une honte.
Ce devait être ça, l'instinct de solidarité, ou, pour les primitifs, l'instinct " grégaire ". Il frissonna à l'idée de se transformer en bête pleine de compassion, d'empathie et de miséricorde. Ce serait du gaspillage, pour un Malefoy, non ? Mais il ne put pousser sa réflexion davantage car, dans un bruissement coloré (vert émeraude et rayures violettes) de très mauvais goût, Dumbledore débarqua, un sourire ravi et d'une naïveté navrante collé sur le visage. Ses lunettes en demi-lune sur le bout du nez et sa longue barbe (loooongue, très longue !) argentée lui donnaient un air de Merlin absolument pathétique, aussi démodé que les célèbres bas bruns dans des sandales... Ledit Dumbledore se mit à applaudir, apparemment de très joyeuse humeur.
Le temps sembla suspendu. Tout le monde regardait l'actuel directeur de Poudlard. Aussi bien les Impures que les Malefoy, ainsi que les autres élèves. Ils avaient tous, sans exception, un air étrange sur le visage. Même Lucius s'était laissé allé à une expression de profond désarroi. Les plus vieux élèves de l'écoles, ceux qui étaient habitués aux originalités de leur directeur, avait l'air très surpris que celui-ci interrompe la scène présente d'une façon aussi joyeuse. Les plus jeunes, eux, semblait hésiter entre la surprise et la feinte de comprendre cette réaction peu traditionnelle de leur aîné à tous.
Potter avait lâché Irys.
Mais Axelle, bien qu'aussi étonnée que les autres, ne relâchait nullement Weasley, au grand désespoir de celui-ci.
Granger avait l'air d'une truite avec la bouche grande ouverte et les yeux sortant presque de leurs orbites tant elle les avait écartés.
Gyspy en oublia même la souffrance et l'humiliation qu'on lui affligeait, tant la stupeur était grande.
" Alors, les amis, vous allez bien ? "
Ce fut ainsi que le plus grand mage de ce siècle entama la conversation.
Gypsy, on s'en doute, se contenta d'un bref hochement de tête : ce n'était certainement pas elle qui irait se plaindre, ça, non ! Irys hocha la tête un peu plus vigoureusement, à peine. Mais Axelle, elle, armée de son Weasley, se décrocha presque la tête à force de la remuer de haut en bas… Et le rouquin en question avait l'air encore plus déprimé, ses yeux bleus presque emplis de larmes. Drago, d'un air se voulant hautain (et qui, ma foi, était assez réussi), acquiesça dignement. Malefoy Senior, quant à lui, ne s'encombra pas de détails pour clarifier la situation. Il dit d'une voix froide, solennelle, somme toute assez sexy :
" Albus, comment allez-vous? "
Ledit Albus sourit poliment et répondit l'habituelle réponse, celle à laquelle tout le monde s'attend :
" Très bien, et vous? "
Les autres s'étonnèrent de l'habilité de Mr. Malefoy à reprendre si vite le contrôle d'une situation de ce genre.
Et puis, tout ce petit monde se demandait, depuis combien de temps ce cher Dumbledore était-il là? Avait-il vu ? Savait-il ?
Telle était la question, évidemment. Puis, Lucius, toujours très poli, répondit.
" Je vais très bien, merci infiniment. Puis-je savoir depuis quand vous êtes ici, très cher ? Je crains d'être assez distrait ces temps-ci je ne vous ai malheureusement pas vu arriver… "
" Mais bien sûr, Lulu ! "
Le Lulu en question frémit de répulsion à cette appellation toutes les autres personnes présentes pouffèrent, Dumby y compris. " Oui, je viens juste-juste d'arriver. Un bonbon au citron ? " demanda-t-il d'une voix hideusement enfantine en tendant sa main toute ratatinée de vieillesse. Lucius, comme si le vieillissement (et la laideur, par la même occasion) était contagieux, recula précipitamment d'un pas, un air presque apeuré crispé sur ses traits d'une beauté elfique.
Un seul son se fit entendre : Drago pouffa. Il avait toujours pensé que Dumbledore était un arriéré mental, pure et simple. Alors que tout les autres le prenaient pour un génie, lui le voyait tel qu'il était : un aliéné, bon pour l'asile la plus proche.
Cette scène valait le coup d'œil. Son père, le grand, le digne, le fier, le prétentieux, le puissant et l'indestructible Lucius Malefoy venait de se faire réduire à un amas de honte par un vieux sorcier plus sénile que Merlin en personne ? Comment ne pas s'en réjouir ? Drago avait attendu ce moment toute sa vie : l'instant où, enfin, il connaîtrait la faiblesse de son père. Et voilà, Dumby était arrivé, lui et sa folie, et avait anéanti son géniteur.
Il exultait carrément de joie, comme rarement auparavant désormais, ses Patronus seraient d'une perfection défiant l'imagination vu le point insensé de bonheur qu'il ressentait à ce moment même. Il pourrait l'utiliser comme souvenir heureux... Un sourire avide s'afficha sur son visage réjoui. Il pourrait enfin battre cet imbécile de Gryffondor binoclard et balafré et son cerf argenté de Patronus trop bien réussi pour son orgueil typiquement Serpentard! C'est tout juste s'il ne se frotta pas les mains d'un air vorace en murmurant " eeexcellent "… Gypsy, à ses côtés, toute tremblante, le remarqua et un mince sourire étira ses lèvres.
Maintenant, la question que tout le monde se posait, c'est qui allait réagir ? À part l'allégresse évidente de Malefoy, personne ne semblait décider à faire quoi que ce soit. Il y avait encore Dumbledore, tendant toujours sa main pleine de bonbons au citron. Lucius, pétrifié d'on ne sait trop quel sentiment. Drago, qui exultait de façon tout sauf discrète, se tenait face à son père, mais Dumby les séparaient. Axelle et Irys, étaient toujours debout, pas très loin de la scène, elles avaient un air entre la surprise et la satisfaction. Red n'avait toujours pas lâché son Weasley, et ce dernier semblait au bord de la crise de nerfs. Potter débodait de joie pathétiquement et avec raison : il avait une Impure. Et Granger se faisait plus petite que jamais, restant, pour une fois, dans son coin (Dieu l'en remercie).
Bref, tout le monde était heureux dans le meilleur des mondes. Ils étaient tous (métaphoriquement) sous un soleil radieux brillant dans un ciel bleu royal, tout autour d'eux se déployant une vaste prairie verdoyante sur des centaines de kilomètre à la ronde et, surtout, n'oublions pas… des oiseaux multicolores sifflant allègrement l'air de la Mélodie du Bonheur, voletant gaiement en esquissant du bout des ailes de joyeuses petites arabesques enjouées et souriantes ! Re-bref, tout le monde avait le cœur dégoulinant d'euphorie et de béatitude . Tous ? Non ! Un arrogant et perfide petit séducteur blond résiste encore et toujours à l'envahisseur ! Lucius Malefoy, du haut de sa hauteur hautainement hautaine, n'en revenait pas. Il avait la classe, habituellement, et voir tout le monde se payer sa tête devant lui était tout bonnement… intolérable ! L'ironie de la situation le dépassait : il venait de jeter un Doloris à une gamine prétentieuse et se faire passer un savon par son fils complètement désorganisé et tout le monde était aux anges ? Inconcevable !
Comment avoir à nouveau la situation en main ? Ou plutôt, comment faire croire à tout ce beau monde que c'était le cas ? Il ne pouvait pas reprendre le contrôle par la force, ou la violence, puisque le vieux fou était là. Et user de ses dons de séducteur étaient inutiles, vu sa désorganisation précédente. Alors de quelle façon ? Il avait envie d'administrer une correction en règle à son héritier, de tuer sur-le-champ les Impures et d'éliminer Potter une fois pour toute. Quant à Granger et Weasley, il se ferait un plaisir de les torturer, pour se détendre un peu après tout ça.
Mais il ne pouvait pas, ou en tout cas, ne savait pas comment.
Se drapant élégamment dans sa cape plus noire que la nuit, il dit d'une voix de Lestat enfiévré par l'odeur du sang :
" Alors, jeunes gens… Dumbledore… " Il lui adressa un furtif signe de tête.
" C'est sur cette… euh'm… plaisanterie que je vous quitte... "
L'on entendit un hurlement de joie poussé par un Potter presque en chaleur le poing en l'air, le visage triomphant, il avait tout simplement trop la gueule d'un Gryffondor. C'était pathétique, à ce point-là, même. Mais passons, ceci n'est pas le sujet de notre thèse… M'enfin… La bouche de Lucius s'arrondit en un " O " de surprise fort disgracieux et peu recommandable pour l'actuelle forme de son visage aristocratique et blême et… il blêmit davantage. (Tous ici se demandent en ce moment comment telle chose peut être possible… hélas, le teint de Monseigneur Malefoy était plus que cadavérique, il était blanc à faire peur. Mais cela faisait rigoler Harry Potter le Survivant… alors, forcément, ce ne devait pas être trop pire !) Il ne dit rien, cependant, et il se carapata comme il ne l'avait jamais fait cette rencontre foireuse avec les Impures était carrément le pire entretien qu'il avait fait, toutes catégories confondues et ce, de toute son existence !
