Chapitre 2 : Une Mystérieuse Rencontre

-Allez, dépêchez-vous un peu, vous autre ! tonna Mrs Weasley en regardant Harry, Ron et Hermione qui traînaient derrière elle.
Harry soupira profondément puis pressa un peu le pas, poussant plus brusquement son chariot à bagage où Edwige, dans sa cage, laissa échapper un long hululement plaintif. Ses deux camarades le suivirent de près, les lèvres à présent scellées.
Ils avaient eu la moitié de l'été, passé ensemble au Terrier, pour discuter pleinement de tout ce qui les tracassait et pourtant, tant de choses restaient encore en suspens.
Voldemort avait enfin été vu au grand jour, au sein même du ministère de la magie, et plus personne ne prenait Harry pour un fou. Harry avait appris à ses dépends que le mage noir était capable de manipuler son esprit, ce qui avait fini par provoquer la mort de l'être qui comptait le plus pour lui. Même plusieurs mois après, il lui était encore douloureux de penser à Sirius. Le fait qu'aucun corps ne soit réapparu de derrière le voile n'arrangeait certainement pas les choses ! Il ne pouvait s'empêcher de se demander si Sirius était vraiment mort, si réellement il ne le reverrait jamais. Ensuite, les Mangemorts envoyés à Azkaban avaient rapidement réussi à s'échapper de leur prison mais ni eux, ni leur maître ne s'étaient fait remarquer depuis. Qu'attendaient-ils, cette fois, pour agir ? Et puis il y avait cette terrible prophétie dont Harry n'avait toujours pas eu le courage de parler ouvertement à Ron et à Hermione et à propos de laquelle il ressentait la désagréable impression que Dumbledore ne lui avait pas tout dit… Et enfin, il restait la fameuse question qu'ils se posaient à présent toujours à chaque début d'année : qui allait être leur nouveau professeur de défense contre les forces du mal ?
Le temps n'aurait pu s'accorder plus avec les sentiments moroses de Harry. Tout, autour d'eux, était perdu dans la grisaille. Une brume épaisse et humide avait envahi les rues de Londres et rendait la ville, dont les lumières brillaient encore faiblement, à la fois triste, morne et étrangement mystérieuse.
Harry fut sorti de sa torpeur par les sifflements sonores d'un train à vapeur rouge et noir.
Ils étaient arrivés à présent sur le quai 9 ¾ et Mrs Weasley aidait déjà Ginny à grimper dans le Poudlard express, lui tendant une vieille panière en osier dans laquelle un jeune chat blanc et noir poussait des miaulements indignés. Il s'agissait d'un cadeau de ses frères, Fred et Georges, à présent marchands de farces et attrapes. Ginny avait littéralement sauté de joie en découvrant, un soir, la petite boule de poil pelotonnée au bord de la cheminée et ne l'avait plus quittée depuis. Le chat dormait avec elle, mangeait avec elle et voyageait avec elle. Il avait été facilement accueilli par Pattenrond, le chat roux d'Hermione, mais s'intéressait un peu trop à Coquecigrue de l'avis de Ron, qui ne voyait pas l'arrivée d'un nouvel animal de compagnie dans sa maison comme une très bonne chose.
Harry, Ron et Hermione grimpèrent eux aussi dans le Poudlard Express et, accompagnés de Ginny, commencèrent à chercher un compartiment vide. Malheureusement, le train semblait encore plus bondé que d'habitude. Harry passa rapidement devant le compartiment où Malefoy, Crabbe et Goyle s'étaient installés. Il ne tenait pas tellement à se trouver face à Malefoy maintenant que son père avait réussi à prouver qu'il était aussi facile de sortir d'Azkaban que de rentrer dans sa propre maison.
Enfin, ils arrivèrent devant le tout dernier compartiment du couloir. Ron poussa vivement la porte embuée et resta planté sur place, dans une attitude de stupéfaction… Harry et Hermione jetèrent un coup d'œil par-dessus son épaule et comprirent immédiatement la raison de sa surprise.
-Professeur Lupin ? s'étonna Hermione. Que…que faites-vous ici ?
Remus Lupin, ses cheveux déjà grisonnants, son visage très pâle, ses vêtements rapiécés par endroit, sa vieille valise encore posée à côté de lui, leur lança un grand sourire amical.
-Ne me dites pas…Ca y est, je sais, c'est vous qui allez être notre nouveau professeur de défense contre les forces du mal ! s'exclama Ron, enthousiaste.
Lupin éclata de rire. Un rire nerveux, remarqua aussitôt Harry. Lui non plus n'avait sans doute pas encore fait le deuil de Sirius.
-Malheureusement, non ! Mais le professeur Dumbledore m'a demandé de remplir une autre fonction à Poudlard…Ne m'en demandez pas plus, vous verrez cela dans quelques heures !
-Est-ce que vous savez qui est le nouveau professeur de défense contre les forces du mal ? demanda Hermione.
-Non, désolé, aucune idée !
Alors que Lupin répondait, un brouhaha de murmures s'était répandu petit à petit dans tout le train. Ils ne comprirent pas tout de suite ce qui interpellait tant leurs camarades, puis Ginny, encore dans le couloir, poussa une exclamation terrifiée en regardant, par la fenêtre, le quai 9 ¾ qu'ils n'avaient pas encore quitté.
Une silhouette, grande et mince, enveloppée d'une cape noire qui se terminait en un capuchon replié sur sa tête, émergeait lentement de la brume.
Harry s'avança lui aussi vers la fenêtre. Ce ne pouvait être lui, c'était impossible, il l'aurait senti, sa cicatrice lui aurait fait mal. Pourtant, il émanait de la silhouette une aura de puissance digne des plus grands sorciers. Harry sentit son estomac se contracter douloureusement lorsqu'il la vit monter à l'intérieur du train, dans le wagon où ils se trouvaient eux-mêmes.
Il l'aperçut s'avancer lentement tout au long du couloir. Les murmures des élèves avaient disparu, laissant place au silence le plus pesant que Harry n'avait jamais entendu.
Hermione poussa fébrilement ses camarades dans le compartiment et s'apprêtait à fermer la porte lorsque la silhouette arriva à leur hauteur. Figée par la panique, Hermione s'arrêta brusquement et pointa sa baguette magique vers elle, prête à lui lancer un sortilège.
Alors, deux mains, fines et blanches, sortirent de sous la cape noire de la silhouette et relevèrent gracieusement son capuchon.
Harry et Ron ne purent s'empêcher de laisser échapper une exclamation de stupeur. Hermione abaissa rapidement sa baguette, Ginny resta bouche bée, tandis que Lupin, qui était encore assis dans son fauteuil, paraissait à la fois surpris et inquiet.
Le capuchon avait révélé la plus belle femme que Harry ait jamais vue. Bien que d'allure très jeune, Harry n'aurait su lui donner un âge. Son visage, d'une pâleur de lait, était tendrement arrondi et agrémenté de deux pommettes légèrement roses qui la faisait ressembler à une poupée de porcelaine. Ses yeux anormalement clairs, d'une couleur de bronze, conservaient une étrange lueur de sagesse infinie. Ses cheveux noirs, parsemés de mèches argentées, avaient été relevés et savamment retenus par une broche en forme de serpent. Une broche semblable maintenait attachée sa cape autour de son cou. Harry aperçut une mince chaîne d'argent qui pendait sur sa poitrine et se terminait en un serpent enroulé autour d'une curieuse pierre, ronde comme une bille, d'un rouge sang intense. Mais au moment même où la jeune femme l'avait vu l'observer, elle avait caché hâtivement l'anodin bijou sous sa robe de voiles verts et violets.
-Vous permettez que je m'installe avec vous ? demanda-t-elle d'une voix calme, chantante et décidée.
Lupin bondit alors de son fauteuil et s'avança vers la nouvelle venue.
-Que fais-tu ici ?
-Heu, vous vous connaissez ? interrogea inutilement Harry.
La jeune femme baissa ses yeux de bronze vers le sol et sourit pensivement.
-Oui, nous nous connaissons…Remus et moi, nous sommes de vieux amis ! N'est-ce pas Remus ?
Lupin la fixait toujours de son regard. Il semblait lutter entre deux sentiments contradictoires.
-Je m'appelle Eilane Snake…, rajouta-t-elle en observant, l'un après l'autre, Harry, Ron, Ginny et Hermione.
Au dehors, un nouveau coup de sifflet retentit et le train se mit en marche, en direction de l'école de sorcellerie.