Chapitre 1

Bienvenue à Tokyo!

10 ans plus tard…

« Bienvenue à l'aéroport de Tokyo. Tous les passagers sont priés de se rendre à la zone de débarquement, pour y récupérer leurs effets. Nous vous souhaitons un agréable séjour et nous vous remercions d'avoir voyagé avec Japan Airlines (1). Je répète, tous les passagers sont de se rendre à la zone de débarquement… »

La voix féminine et métallique se répandit dans l'immense salle trônant au centre de l'aéroport de Narita, Tokyo, pendant qu'un flot de voyageurs tendus ou épuisés par le décalage horaire se précipitait vers les douanes ou la cafétéria. Des couples s'embrassaient avec passion, des larmes au coin des yeux, des groupes d'enfants ricanaient, une vieille dame semblait plongé dans la lecture d'une revue de décoration japonaise, des bandes d'adolescentes aux cheveux d'une couleur extravagante gloussaient bruyamment et des hommes et femmes d'affaire discutaient, leur téléphone portable collé sur leur oreille, fronçant les sourcils et gesticulant des ordres à leurs employés, comme si leur vie en dépendait. La foule était immense et étouffante, ce qui créait une chaleur intense et désagréable dans l'endroit.

Et dans cette foule, il y avait Ériol, coincé entre un musicien dans la trentaine traînant son étui à guitare et une dame aux cheveux blonds platines qui se maquillait en fixant son minuscule miroir de poche.
Le jeune anglais était tout de noir vêtu et une casquette était rabattue sur ses yeux. Il tenait à ce que personne ne le remarque, personne ne doute de son identité. Du moins, jusqu'à ce qu'il arrive aux douanes. Là il n'aurait pas le choix. Mais il savait qu'il aurait à mentir un peu…il se dit avec un sourire, que de toute façon, personne ne s'en préoccuperait par la suite. Il avait un don pour ne pas attirer l'attention.

D'ailleurs, cela faisait déjà 5 ans qu'il avait quitté Tomoéda, pour retourner vivre en Angleterre. 5 ans…5 ans qu'il n'avait pas mis les pieds au Japon, essayant de se refaire une vie, en retournant dans son pays natal.
Il ricana en songeant au gosse de 12 ans qu'il était, cette époque maudite ou Clow Reed avait plein contrôle sur ses actes…
Il avait mis 5 ans à s'en débarrasser. Il avait essayé d'éloigner toute trace de magie de son être. Il avait effacé la mémoire de Nakuru, sa fidèle compagne, un peu fofolle, mais qui lui manquait cruellement. Elle vivait maintenant avec une famille, qui était loin d'être la sienne, mais elle ne s'en doutait pas… Et elle refaisait sa vie dans un lycée anglais, avec des amis, probablement un petit copains, et, songea Ériol avec un sourire amer, des notes tout à fait pourries. Et Ruby Moon avait été extraite de son corps, comme lorsqu'on cueille une fleur, que l'on jette dans le feu par la suite…
Ériol devait se l'avouer, il était aussi profondément jaloux de sa vieille amie.

Il avait si souvent rêvé d'être débarrassée du poids qu'il portait sur ses épaules…ce poids qui l'étouffait chaque jour un peu plus, qui le déchirait toujours au plus profond de lui-même. Et pourquoi lui? Pourquoi Clow Reed, ce magicien de pacotille, l'avait choisi lui pour être sa réincarnation? Il frissonna en songeant à son passé, à tous ces combats qu'il avait livré contre sa propre personne, à ce sentiment de confusion qui le hantait depuis sa naissance.

Et toujours la même question…Qui suis-je?

Mais Ériol secoua la tête. Valait mieux ne pas revenir en arrière. Peut-être oublierait-il, un jour?

En fait, il savait parfaitement que jamais, au grand jamais il n'oublierait son passé, ce passé si affreux et pénible. Mais il pouvait toujours faire semblant d'oublier. Se mentir à lui-même, il le faisait depuis l'âge de 7 ans….


La foule se fit toujours de plus en plus étouffante, les gens se poussaient et allait même jusqu'à hurler des injures. Ériol se dit qu'au moins il serait impossible que qui que se soit ne le repère dans une telle cohue, mais il ne tenait pas à mourir asphyxié. Il se faufila donc dans les minces ouvertures qu'il localisa dans cette masse de voyageurs enragés, en se faisant le plus petit possible. C'est avec un soulagement immense qu'il découvrit enfin le couloir menant aux douanes (2).

« My God, I love you! » pensa t'il, les larmes aux yeux, en s'engouffrant dans le corridor.

Il ravala sa joie lorsqu'il constata que la file devant le guichet faisait bien plus cinq mètres. La salle était bruyante et les voix enjouées ou épuisées des voyageurs bourdonnaient dans l'oreille d'Ériol qui, découragé, pris place au bout de la longue file d'attente.

Le jeune garçon croisa les bras avec un sourire exaspéré. Il détestait avoir à patienter. Il épia la salle du regard, à la recherche de quelque chose qui pourraient lui faire passer le temps…

Il savait qu'il pourrait bien s'arranger pour faire sauter la moitié de l'aéroport, mais cela entraînerait des tonnes de complications…

Soudain, il entendit des bruits de pas saccadés derrière lui. Il poussa un soupir. Encore un bonhomme nerveux, qui ne tarderait pas à tout saccager sur son passage…ou pire, peut-être était-il en colère? Tout le monde semblait sur les nerfs…Ériol songea avec un air moqueur, que Tokyo était bien différent du Tomoéda qu'il connaissait.

Soudain, une main se posa brusquement sur son épaule. Il sursauta. Une lourde angoisse se mit à torturer son esprit.

Est-ce que quelqu'un l'avait reconnu?

-Hep toi! Tu as laissé tomber ça!

Ériol se retourna et se retint pour ne pas pousser un soupir de soulagement. Un jeune homme à peine plus âgée que lui, mais qui le dépassait d'une bonne tête, aux yeux noirs, aux sourcils épais, aux cheveux bruns foncés retenue en une queue de cheval et aux traits asiatiques et mince se tenait derrière lui, lui tendant un petit carnet noir. Un parfait inconnu. Il était habillé d'un t-shirt noir serré sur sa peau et d'une longue paire de jeans amples.

Ériol s'assura tout de même que sa casquette tombait bien sur ses yeux, avant de tendre la main vers l'étranger.

-Merci beaucoup, lança t'il dans un japonais hésitant.

Le jeune garçon lui rendit le carnet avec un sourire. Ériol le fourra rapidement dans sa poche extérieure et observa le nouveau venu. Il semblait être ce genre d'adolescent bien dans sa peau et avide de liberté, n'ayant aucun compte à rendre à personne.
Il y eu un moment de silence. Ériol n'avait pas l'intention d'engager la conversation, mais le jeune homme devant lui avait l'air assez enjoué à l'idée de se faire « un nouveau pote ».

-Je m'appelle Ikiru. Egao Ikiru, lança le japonais avec un sourire. J'arrive d'un voyage en Chine, chez un ami de mon père, pendant les vacances.

Ériol releva la tête vers le jeune garçon. Ikiru aperçu dans l'ombre de sa casquette des yeux d'un bleu à la fois profond et perçant.
Des yeux puissants. Les yeux de quelqu'un qui avait bien des choses à cacher…

-Moi c'est Hiragawa Ériol, sourit le jeune anglais. J'arrive d'Angleterre. C'est mon pays natal en fait…Pardonne moi si mon japonais n'est pas très clair…

-Je dois avouer que t'as tout un accent! Enfin, ça doit être bien l'Angleterre…J'adore voyager, je ne tiens pas en place! Et au fait, t'as quoi dans ton carnet?

Ériol haussa négligemment les épaules, avec un sourire embarrassé.

-Hé bien, ce n'est qu'un carnet de croquis…Je prenais des court d'art en Angleterre, pour passer le temps et…je n'avais pas vraiment de talent. En fait, mes dessins sont affreux….

Ikiru sourit malicieusement et d'un geste particulièrement rapide et agile de la main, saisit le carnet de la poche d'Ériol. Le jeune anglais fit mine de réfléchir.

-Karaté? demanda t-il étonné par la rapidité du jeune japonais.

-Depuis cinq ans. Très perspicace, mon vieux!

Ikiru feuilleta rapidement le carnet noir, une grimace amusé sur son visage aux traits asiatiques.

-T'as raison. C'est très moche.

-Hé bien, voilà quelqu'un qui a du goût!

Ikiru parcouru rapidement les pages, étrangement froissé. Les dessins étaient assez repoussants. C'était surtout des croquis d'animaux, probablement imposé par le professeur de l'anglais, principalement des oiseaux. Le trait était hésitant et la plupart des créatures avaient une drôle de tête. Mais le jeune garçon avait une belle écriture, propre et soigné. Il n'y avait que sa signature qui était réussi dans plupart des dessins.

Mais quelque chose attira particulièrement l'attention d'Egao Ikiru, à la fin du cahier.

Deux ou trois pages entièrement noirci d'étranges gribouillis. Ces pages en anglais, étaient si mal écrites que leur sens échappait au jeune japonais, qui était déjà loin d'être anglophone. Mais une atmosphère se dégageait de cette écriture qui ne semblait pas du tout pouvoir être lié au jeune homme calme qui se tenait devant Ikiru.

Une atmosphère de folie. De désespoir.

Les mots étaient étonnamment foncé et débordait sur les pages, créant une sorte de néant d'encre noir. La seule phrase lisible était immense, et prenait l'espace de deux pages, écrite avec un trait terriblement foncé :

THAT'S GOING TO KILL ME

Ça y était. La preuve était là.

Ikiru sourit, d'un sourire étrange et ferma le cahier. Ériol ne se souvenait probablement même plus qu'il avait écrit cela…

« Il est parfait… » songea t-il , en lui tendant le carnet.

-Hé bien, lança t'il joyeusement, souhaitons que ton style évolue, parce qu'on dirait vraiment les dessins de ces orangs-outans en simulations…

-Je pense que les orangs-outans sont plus doués, marmonna Ériol en rangeant le carnet foncé.

Ikiru éclata de rire bruyamment. Le jeune anglais rabattit à nouveau sa casquette sur ses yeux, son nouveau compagnon risquant fort bien d'attirer l'attention sur lui.

-Ha ha ha! T'es un marrant toi! Et t'es pour longtemps à Tokyo?

-S'il ne pleut pas comme à Londres, probablement, reprit Ériol. Je vais m'installer à Shibuya (3) , ma famille à une maison là-bas et….

Le nouveau venu ne lui laissa pas le temps de terminer sa phrase.

-Shibuya? Tu as bien dit Shibuya?

Ériol fronça les sourcils devant l'air étrangement ahuri d'Ikiru. Le jeune japonais le fixait du regard comme si il venait de lui annoncer qu'il venait d'une autre planète.

-Oui, je vais bien à Shibuya et je ne vois pas ce qu'il y a d'extraordinaire à…

-Alors, tu n'es pas au courant pour les meurtres?

Le regard d'Ikiru devint soudainement grave et terne, et sa voix claire était devenu discrète et sèche, comme une traînée de poussières, comme s' il faisait tout son possible pour ne pas que l'on entende leur conversation.
Ériol leva les yeux vers le jeune garçon, qui fut à nouveau surprit par le regard profond du jeune anglais.

-Les meurtres? Quels meurtres? murmura à son tour Ériol, sur le bout des lèvres.

Ikiru mit une main en porte-voix aux côtés de sa bouche. Un vieil homme asiatique et particulièrement ridé, en costume gris, se retourna vers eux quelques instants, intrigués, mais se désintéressa en constatant que les deux adolescents parlait trop bas pour son ouïe qui avait trop donné et se retourna vers la vielle dame devant lui, engageant un passionnante sur les électroménagers.

-Hé bien, reprit Ikiru d'une voix bourré de suspense, à Shibuya, depuis environ un mois, deux ou trois fois par semaine…

Il s'assura à nouveau que personne n'était à portée de voix.

-… C'est devenu au sujet tabou, même les journaux n'ose plus en parler…C'est pour ça que j'essaie de la jouer discret…En tout cas, le meurtrier est un sacré malade. On a retrouvé des cadavres à qui ont à carrément fait…explosé la tête. Et le type à réussi, sur certaines victimes, à leur faire sauter les organes intérieurs… Je suppose qu'il leur à placer une bombe dans le corps…Donne froid dans le dos non?

Ériol fronça les sourcils.

-Assez oui. Mais je m'en fiche. J'ose supposer que le meurtrier ne fera pas sauter les têtes de toute la population de Shibuya. De toute façon, je n'ai nulle part ailleurs où aller…

« Hors de question de retourner à Tomoeda »…

-…Et d'ailleurs, si les meurtres ont débuté il y a seulement un mois, comment as tu fait pour être courant, si tu étais en Chine pendant les vacances?

Ériol nota une seconde d'hésitation sur le visage d'Ikiru. Une minuscule seconde où le jeune garçon semblait chercher sa réponse…

« Tiens tiens… » songea le jeune anglais. « On aurait quelque chose à cacher… »

-Mon père travaille dans la police et il a reçu une lettre expliquant les faits en Chine, voilà tout, répondit Ikiru en haussant les épaules.

-Ah bon…sourit Ériol.

Il y eu un moment de silence entre les deux jeunes hommes.

Ce garçon, Ikiru, n'était pas normal. Ériol le sentait. Il y avait quelque chose d'hors norme. Mais il ne voulait pas s'en préoccuper. Hors de question de se retrouver à nouveau prisonnier de ce qu'il essayait à tout pris d'oublier.

Il soupira et croisa les bras, essayant de contrer les souvenirs douloureux qui refaisaient, malgré lui, surface dans sa mémoire.

« Tu n'a pas pu la sauver Ériol…
C'est de ta faute si elle est morte…

C'est de ta faute, tu m'entend! TA FAUTE!
C'EST TOI QUI L'A TUÉE ÉRIOL!

C'EST TOI! »

-Egaoooooo! EGAAOOOO! Espèce d'imbécile profond! Ça va pas de laisser une belle et jeune fille innocente SEULE DANS UN AÉROPORT REMPLIE DE PERVERS!

Ériol sursauta brusquement, et Ikiru prit un air à la fois mesquin et amusée.
À quelques mètres d'eux, se tenait une jeune fille de leur âge, aux longs cheveux ondulée d'une extravagante couleur bleue électrique. D'imposantes lunettes de soleil recouvraient ses yeux et elle portait une robe d'été noir de jais, lui arrivant légèrement au dessous des genoux. Elle avait la peau laiteuse et elle était de taille moyenne. Son visage mince était crispé en une grimace rageuse et elle fusillait Ikiru du regard, ce qui semblait amusé au plus au point le jeune japonais.

Ériol se tourna vers lui, un air ahurie.

-Dis moi, c'est qui cette fille?…elle a l'air plutôt en forme…

-Aaaaaah, ça? C'est ma cousine, Sora. Elle a un look classe vu comme ça, mais il ne faut pas s'y fier…c'est une vraie bombe atomique et pas dans le bon sens du terme… On dirait qu'elle n'a pas prit son ritallin ce matin…

Ikiru ricana et mit les mains en porte-voix.

-Alors comme ça Sora-chan, y'avait des p'tits pervers dans l'aéroport? T'a vraiment de belle fréquentation…D'ailleurs, ils sont où, t'es potes qui vendent de la drogue…? Ils ont du t'en vendre pas mal pour que tu sois aussi retardée!

-Toi, prépare toi à mourir DANS D'ATROCES SOUFFRANCES! J'vais te faire BOUFFER TA PROPRE LANGUE, TIENS! hurla la jeune fille en s'avançant à grand pas vers son cousin, avec un air menaçant.

-Oh oh oh, je suis mort de trouille…naaaaan pas ma langue Sora, tout mais pas ma langue!

-Et il se croit drôle en plus! Grrrrrrr TU VA MOURIR EGAO IKIRU!

La nouvelle venue se posta devant son cousin et lui tira brusquementl'oreille.

-Oh oh oh, et tu crois que ça fait mal? Ouuuuuu je souffre, lança t'il avec un ton faussement plaintif et une grimace irionique. Franchement, je vois pas comment on pourrais trouver menaçante une fille au cheveux bleu poudres et aux lunettes affreuses…

La jeune fille se mit à lui tirer plus fort, avec un sourire légèrement machiavélique.

-Heuu…ok Sora, tu va pas me l'arracher quand même?

-Ah ah ah et donne moi une bonne raison…

-Heeeeeeeuuuuu…parce que c'est encore moi qui a ton DVD du premier film de Jackie-Chan….?

-KOUUUUUAAAAAAA? C'est toi qui me l'a piqué? Non mais je rêve, je l'ai cherché partout! C'est une antiquité, t'a aucun savoir-vivre! Ça me donne une raison de plus pour t'arracher les yeux!

-Hé bien…vous avez l'air de bien vous entendre tous les deux…lança Ériol en souriant.

Sora se retourna vers le jeune anglais, en faisant une courbette.

-Je suis vraiment désolée si mon imbécile de cousin t'a importuné…C'est vraiment le DERNIER DES RETARDÉS, quand il s'y met…

Ériol souriait toujours, passant une main sur sa nuque.

-Aucun problème…Ton cousin m'a un peu sauvé la vie. Je pense que je serais mort desséché à attendre au bout de toute celle file d'attente.

-C'est vrai que c'est fou ce qu'il y a comme monde… Ce n'est pas rare à Tokyo, sourit Sora, avant de retrouver un regard venimeux. Et il ne faut pas se séparer, parce qu'il est très facile DE PERDRE SA COUSINE, PAR EXEMPLE, n'est-ce pas, Egaonichou?

-Arrête de m'appeler comme ça, tu me dégoûtes! grimaça Ikiru. Allez Ériol, il va falloir qu'on te laisse! De toute manière, c'est bientôt à toi de passer aux douanes.

Ériol salua les deux jeunes gens qui s'éloignèrent bruyamment dans l'immensité de la foule. Il resserra son manteau noir, malgré l'étouffante chaleur qui régnait dans l'aéroport.

Ikiru et Sora était pour ainsi dire, assez étranges. Il se comportait normalement, mais ils dégageaient quelque chose…Un sorte d'aura anormal…
Mais Ériol chassa vivement ces pensées. Il avait déjà décidé qu'il ne s'en mêlerait pas. Rien ne le ferait changer d'avis.


-Heu, jeune homme? Jeune homme, c'est à vous!

Ériol se retourna brusquement, pour constater que c'était à son tour de passer aux comptoirs des douanes. Une dame japonaise entre deux âges, aux cheveux noirs tirant sur le gris, serré en chignon et aux lunettes sur le bout du nez, le fixait avec un air impatient.

-Pardonnez-moi madame, j'étais…disons perdu dans mes pensées…

-Je l'ai bien constaté. Alors, votre passeport je vous prie.

Ériol farfouilla dans sa poche extérieure et sortit un petit carnet bleu marin, qu'il tendit à la dame. Elle le saisit avec un air impatient et se mit à le feuilleter.

« Hé bien » songea le jeune garçon. « Il n'y a pas que Sora qui s'est levé du pied gauche ce matin… »

-Ériol Hiragawa, c'est exact?

-Je n'irai pas dire le contraire.

-Pourriez vous retirer votre casquette, que je puisse vous comparer avec la photo?

-Très bien…

Ériol eu tout de même un léger regard méfiant derrière lui. La malchance ne lui avait pas laisser grands répits ces dernières années et il n'aurait pas été étonné de croisé une vielle connaissance dans l'aéroport, ce qu'il voulait à tout pris éviter, puisque Tomoéda était un quartier de Tokyo.

Après s'être assuré qu'il n'y avait aucune tête connue dans les environs, il retira sa casquette.

La première chose qui frappait chez Ériol, c'était ses yeux. Des yeux d'un bleu profond, à la fois clair et sombre, à la fois rêveurs et pénétrants, qui miroitaient comme un ciel de nuit sans étoiles, sans nuages. Myope, il portait des verres de contact, ses lunettes s'étant brisées suite à un malheureux…incident.

Ses cheveux noirs encadrait son visage mince et tombaient en frange emmêlés sur son front, à cause de la casquette qu'il avait gardé sur sa tête depuis de longue heure. Sa peau était blanche et lisse, mais légèrement rougie à cause de l'atmosphère étouffante régnant dans l'aéroport. Ses lèvres étaient fines et un étrange charisme émanait de sa personne, une sorte de charme discret, timide.

-Je suis désolé, je crois que j'étais mieux coiffé sur la photo…

-Ce n'est rien. Ainsi, vous êtes anglais…demanda la dame, en parcourant les informations sur le passeport.

-En fait, j'ai un peu de sang asiatique. Ma mère était anglaise. Je n'ai jamais connu mon père, mais on m'a dit qu'il était le fils d'un européen et d'un chinoise.

La dame rehaussa ses lunettes.

-Et vous habitez chez votre mère? Je suis désolé, mais vous n'avez que 17 ans, vous êtes mineur…

« Maaamannn! Réveille toi! Maman, ne me laisse pas seul! »

-Elle…

Le regard d'Ériol s'assombrit brusquement et son visage se détourna de celui de la femme.

-Elle…est décédée.

« Maaaaaammmaaannn! Non! Je ne voulais pas que tu meures maman, je suis désolé!
JE SUIS DÉSOLÉ! REVIENS MAMAN!»

La dame prit un air confus.

-Aaah…je suis navré, je…

-Ne vous en faites pas, j'étais très jeune, sourit Ériol en haussant les épaules. Je me souviens à peine de la façon d'ont elle est décédé…

« Mais non
Bien sur que je m'en souviens…C'est de ma faute si elle est morte… »

-Et qui vous as prit en charge suite à son décès?

-Mon oncle maternel. J'ai habité chez lui jusqu'à l'âge de 15 ans. Ensuite, je suis parti et j'ai habité avec quelques amis…

« Je n'ai pas d'oncle » se dit Ériol, retenant un sourire amer. « Et encore moins d'amis… »

-Mais vous voyager seul?

-C'est exact.

-Et pour combien de temps compter vous rester au Japon?

-Deux ans. Peut-être plus.

-Et vous avez un permis de travail?

Quelques minutes passèrent, où la dame discuta de paperasserie, s'assurant que le jeune garçon n'avait aucune mitraillette dans ses poches ou qu'il n'avait pas l'intention de faire exploser la tour de Tokyo.

Puis, la fin de l'entretien arriva, au grand soulagement d'Ériol, car bien qu'étant un excellent menteur, réinventer sa vie n'était jamais facile.

-Hé bien, je crois que tout est correct, dit la dame en tendant son passeport au jeune anglais. Vos valises se trouvent sur le tourniquet, à gauche.

Pendant qu'Ériol fourrait son passeport dans sa poche, la femme lui fit un sourire, son premier depuis leur rencontre, ses lèvres rougies par du rouge à lèvre donnant enfin un peu de vie à son visage finement ridés.

-Bonne chance, jeune homme.

« Bonne chance? » s'étonna t-il, un sourire se dessinant à son tour sur ses lèvres. « Elle n'est pas si grognonne, après tout… »

-Merci, madame, lança t-il poliment en faisant une courbette gracieuse.

Il s'éloigna vers le tourniquet à valises, pendant que la dame se préoccupait du couple de voyageurs enjoué se trouvant derrière lui.

Ce bonne chance…il en aurait bien besoin...


-Alors il est comment? susurra la jeune fille au cheveux bleus, à l'oreille de son compagnon, après s'être suffisamment éloigné d'Ériol.

Le jeune japonais à la queue de cheval la pris délicatement dans ses bras.

-Pas ici.

Ils se dirigèrent vers un couloir plus sombre, en ce traçant un chemin dans la foule. Le couloir était celui réservé au personnel, composé de plusieurs portes fermées à clé. Les deux adolescents s'assurèrent une dernière fois que personne ne pourrait les entendre, avant que le jeune japonais se mette à sourire.

-Il est parfait, évidemment.

La jeune fille se mit à sourire à son tour de toutes ses dents, et enlaça doucement son compagnon.

-On vois rarement des auras pareil…elle puait la malédiction…imagine la promo que Misaru va nous faire…murmura t-elle.

-Et dans son cahier, il y avait ces mots horribles…Ce type est des nôtres, c'est évident…Ériol, son p'tit nom…il me rappelle moi, il y a 5 mois. Et puis, Shibuya est un peu notre quartier général, il sera facile de ne pas le perdre de vue.

L'adolescente aux cheveux bleus le serra contre lui et l'embrassa délicatement, en caressant son visage.

-Je nous trouve plutôt doué dans le rôle des cousins enragés…ricana t-elle lorsque leur lèvres se séparèrent.

-Hé bien, on est les rois de l'impro! sourit le jeune garçon.

-Akuma…détache tes cheveux…tu sais que t'es bien plus sexy comme ça…blagua l'aolescente.

-Ah ah, c'est dur dur le métier…tout pour passer inaperçu…si je les détache, toutes les filles vont me sauter dessus…et je t'aime trop pour te tromper! En revanche, tu sais que tes cheveux bleus, c'est pas super subtil, Tomoko.

-Tu préfèrerais vert? Au moins, je n'enlève pas mes lunettes…

-Tu ressemble à un agent Matrix quand tu les mets et c'est encore moins subtil…Il pleut dehors, en plus!

Il ricana et l'embrassa de nouveau.

-En tout cas, c'est vraiment la semaine…Parait qu'il y a même un Sôma en liberté.

La dénommé Tomoko haussa les sourcils et il était aisé de deviner que ses yeux s'étaient arrondis sous la surprise, derrière ses lunettes noires.

-Un Sôma? En liberté? Depuis le temps que Jimmy veut s'en mettre un sous la main…ce n'est pas du tout le genre d'Akito, pourtant!

- Il serait à Shibuya comme notre Ériol, d'après ce qu'on m'a dit. Vraiment le quartier est de plus en plus populaire, on dirait que la populace oublie vite les meurtres…Bof, c'est bon pour nous, de toute façon. Il a du faire une fugue. N'empêche que je compatie, ce n'est pas toujours rose bonbon chez les Sôma, d'après les rumeurs, maugréa Akuma.

-C'est vrai…alors, il ne faut pas laisser passer l'occasion…imagine la promo! s'enchanta Tomoko.

Akuma passa une main dans les longs cheveux de la jeune fille, avec un sourire amusé.

-Et puis on commençait à manquer de membres, ça va faire du bien, un peu plus de personnels…C'est toujours sympa d'avoir des p'tits nouveaux!

-Alors, la chasse au Sôma est lancée?

-Lancé! conclut le jeune garçon avec un clin d'œil.


Ériol saisit les deux énormes valises noires avec un gémissement. Il n'avait aucune idée de la façon dont il allait s'y prendre pour les amener jusqu'à son futur chez lui. Il soupira. Si seulement il n'était pas dans un endroit public…il aurait pu réduire la taille des valises, jusqu'à leur donné la proportion d'une simple allumette et les glisser tout simplement dans sa poche.

Mais non. De toute façon, il était hors de question d'utiliser la magie. Il avait peur, peur de retomber dans le même enfer qu'il l'avait éloigné du monde durant toutes ces années.

Il posa les deux valises sur le sol, avant de se saisir d'une cage d'un blanc sale, qui était situé aux côtés de ses bagages dans le tourniquet. Un miaulement rauque et puissant s'en échappa.

-Suppy, shut up! chuchota sèchement Ériol à la créature enfouie dans la petite cage.

Spinel Sun…Un de ses anciens gardiens, une ex panthère noir à la robe ténébreuse comme une nuit sans étoiles. L'on pouvait sentir gronder autour de lui une aura de puissance, de supériorité. Il avait des pouvoirs incroyables ainsi qu'une force phénoménale et impressionnante.

À l'âge de 15 ans, Ériol avait exercé sur lui son dernier sort. Il l'avait changé en un petit chat noir aux verts, grincheux et tout à fait normal, qui courait après les souris, mangeait de la pâté en conserve à l'odeur douteuse, miaulait sans absolument aucune raison à quatre heures du matin, se battait avec d'autres félins, muait tous les printemps et avait la fâcheuse tendance de faire ses besoins partout dans la maison, qu'il considérait comme son territoire et dont il était convaincu d'être le maître absolu. Malgré ses nombreux défauts, Suppy était le seul compagnon d'Ériol, le jeune anglais n'eu donc pas le cœur de s'en séparer.

Le chat, comme s'il avait compris son maître, se mit à cesser de miauler, remplaçant ses plaintes sonores par des grondements agressifs.

-You're pathetic, Suppy-chan…soupira affectueusement le jeune garçon.

Il reprit ses bagages avec une grimace, la cage du chat sous son bras et marcha lentement vers la porte vitrée, où il était écrit en caractère japonais « Sortie ». Ériol mit quelques temps à déchiffrer la signification des symboles, regrettant encore une fois ses pouvoirs, qui lui permettaient de comprendre n'importe quelle langue et de la parler comme si c'était son langage natal.

Dehors, il pleuvait à boire debout, l'eau du ciel claquant sur le sol et sur les parapluies des passants imprudents. Et même si l'aéroport était insonorisé, l'on pouvait deviner que le tonnerre grondait, à cause des éclairs bleus illuminant les nuages gris.

« Ben tiens » songea amèrement Ériol, pensant aux tempêtes pluvieuses caractérisant son pays natal. « Je ne serais pas trop dépaysé aujourd'hui on dirait… »

Fin du chapitre 1

1- Compagnie aérienne japonaise

2- Pour les gens n'ayant jamais prit l'avion (comme moi…grrrrooophmf …) les douanes sont le comptoir ou les voyageurs présentent leur passeport et subissent un interrogatoire sur le séjour qu'ils comptent effectuer au pays.

3- Véritable quartier de Tokyo.

Fiouuuu…et un premier chapitre! (essuie la sueur sur son visage et se remets de la crème solaire) J'espère que ça ne vous as pas trop déplut, même si pour l'instant, il n'y a pas d'action, ni de Yuki en vueet juste des questions sans réponses! (mais tout ça viendras, j'vous jure:-) )
En tout cas, je voudrais vous dire que n'êtes ABSO-LU-MENT pas obligé de me faire une review...mais bon ça fait de mal à personne, même si c'est pour me dire que je pu des pieds, que vous mangerez des céréales demain matin ou que ma fic est nulle! Mais, bon...j'vous oblige pas hein...
En tout cas, on se revoit au prochain chapitre! ;-)
Bizz!

Taiyou