Un ange aux yeux cernés est entré dans le bus pour Shibuya à 17 heure 43 minutes
Kikouuuu !
Note de l'auteure: Hééé nan, je ne suis toujours pas morte…Hé hé, qu'est-ce qu'il était chiant à écrire ce chapitre ! J'ai bien du le recommencer 8 fois ! Et toujours très peu d'action (vous devez vous demander où est l'intérêt…) et toujours une tonne de question sans réponse…mais c'est essentiel pour le développement de l'histoire…En tout cas, j'ai bien hâte de me mettre au troisième, qui sera beaucoup plus intéressant, selon moi !
Et merci infiniment à Kyuen pour sa reviews ! ; ) Hé hé, je te comprend pour les céréales, moi aussi je préfère les toasts :P…Et, je suis désoler, très peu de réponses dans ce chapitre (et plutôt, toujours plus de questions…), mais tout ça viendra bientôt ! Encore merci à toi !
Et voilou, le chapitre deux, écrit à la sueur de mon front…(j'en sue encore muhuhu ! ça, c'est du sport ! XD)
Et bizz à vous :P
-Maaaamaaan ! C'est looooonnng…est-ce qu'on est bientôt arrivé, maintenant ?
-Hikaru, parle moins fort et arrête de me demander à tous les deux minutes si l'on arrive bientôt, s'il te plaît ! Maman à eu une journée très fatigante, tu comprend ? réprimanda sèchement Chidori, avec un soupir.
La petite Hikaru baissa son visage frêle légèrement parsemé de taches de sons, cadré par des cheveux noirs coupés au carrée. La gamine de six ans détestait fâcher sa mère, mais elle détestait tout autant le voyage en autobus qu'elles avaient à effectuer tous les soirs pour rentrer chez elles. Comme elles avaient déménagés très loin de leur quartier d'origine, puisque Chidori avait quitté son petit ami, le travail de la mère et l'école de la fille était située à l'autre bout de la ville et Chidori n'avait pas assez d'argent pour se permettre l'achat d'une voiture. Résultat : elles devaient prendre l'autobus matin et soir, entassé parmi des dizaines d'habitants de Tokyo, pendant plus de 45 minutes, depuis deux mois.
Et c'était une véritable torture pour Hikaru, une fillette impatiente et curieuse, remplie d'énergie, d'attendre pendant ce laps de temps, prisonnière de cet autobus qui empestait un curieux mélange de cigarettes et de produit utilisé pour lavé les vitres. Elle avait pour seule occupation d'observer les dizaines de passagers qui entraient et ressortaient du transport en commun, dans une cohue à la limite du supportable.
Mais la jeune fille était loin d'être naïve et elle lisait la tristesse et la fatigue dans les yeux de sa mère, une femme qui avait toujours été si joyeuse et compréhensive.
-Je suis désoler maman…marmonna la gamine. Ça doit être difficile pour toi, être au travail tout le temps. Surtout avec ton patron, qui est un vrai…
-Hikaru, ne termine surtout pas ta phrase! réprimanda Chidori, se mordant les lèvres pour ne pas éclater de rire.
La jeune femme de 29 ans venait de perdre son petit ami, un amour qu'elle croyait durable, pour une fois, elle qui perdait tous ses amants depuis qu'elle avait l'âge d'en avoir. Mais pour encore une fois, le destin lui avait fait un pied de nez. Son seul bonheur, son seul rayon de soleil était sa petite Hikaru, sa petite fille qu'elle aimait plus que tout au monde. Avec un sourire désolé, elle passa sa main dans les cheveux noirs de sa fillette.
-Excuse-moi Hikaru, dit-elle d'une voix douce. Je sais que ce ne doit pas être facile pour toi. Mais il faut que tu sois forte. On s'en sortiras toutes les deux, je te le promets.
Hikaru fit un grand sourire, qui rassura sa mère.
-D'accord maman! Je serais forte pour toi…promis! Mais…est-ce qu'on arrive bientôôôôt? soupira la fillette en appuyant son coude sur le bras de son banc et en posant son menton sur sa main.
Chidori se contenta de rire doucement et sortir un roman de son sac à main. Elle l'ouvrit et y plongea ses yeux foncés à la fois sévère et bienveillant.
Hikaru soupira. Ça y'est! C'était reparti! Dès que sa mère commençait à lire un livre, c'était im-po-ssible d'engager la conversation. Elle perdait absolument tous contacts avec la réalité.
La gamine jeta un coup d'œil à la montre bleu ciel qui ornait son poignet gauche. Il était 17 heure 42. Cela faisait déjà une demi-heure qu'elle était enfermé dans cet horrible autobus. Si le trajet prenait trop de temps, elle aurait de la difficulté à se trouver un moment pour faire ses devoirs ce soir. Finalement…il n'y avait pas que du mauvais dans ce retour forcé en transport en commun…
La pluie claquait avec puissance contre les fenêtres vitrés, son bruit se mêlant aux conversations bruyantes de la petite population rassemblé dans l'autobus. Elle garda son menton appuyé sur sa main, observant avec ses grands yeux d'enfants les passagers serrés les uns contre les autres. Devant elle, une homme lisait son journal, une cigarette à la main. Derrière elle, une jeune fille d'environ 10 ans, d'apparence étrangère, au longs cheveux châtains, aux immenses lunettes et à la salopette jouait avec un téléphone portable. Hikaru soupira et jeta un nouveau coup d'œil à sa montre. 17 heure 43. Comme le temps était long…
Soudain, le véhicule s'arrêta brusquement, faisant faire un saut à tous les passagers. Un autre arrêt. Hikaru aimait bien les arrêts, surtout quand un vieux monsieur échappait son café sur son pantalon et ou que les lycéennes entassés dans le fond du bus se mettait à hurler de surprise. Ça mettait un peu d'action dans le oh combien monocorde trajet. Mais elle aimait particulièrement observé les gens qui montait, leur inventer une histoire, et les voir trébucher ou jurer parce qu'il n'y avait presque aucune place de libre.
Les portes s'ouvrirent pendant qu'une dizaine de voyageurs pénétrèrent dans l'autobus, pour se mettre juste après à jouer des coudes pour se tracer un chemin entre les passagers. Tout d'abord, entra un homme d'affaire en complet cravate trempé, puis une vielle dame à la robe fleuri et au parapluie assortie, trois collégiennes grelottante de froid, une bande d'adolescent enjoué, deux jeunes garçons à lunettes discutant de leur dernier examen et finalement, l'individu le plus incroyable qu'Hikaru n'ai jamais vu.
À son entrée, l'autobus devint soudain plus silencieux. Rien qu'en le voyant, la fillette ne pu deviner si c'était un garçon ou une fille, mais en entendant sa voix profonde et tranquille lorsqu'il s'adressa au chauffeur, elle opta pour le sexe masculin. Sans parapluie, il était trempé de la tête au pied, ses cheveux d'une étrange couleur grise collé à son visage. Il avait des yeux clairs, légèrement cernés, comme s'il n'avait pas dormi depuis longtemps. Il avait la peau d'une blancheur neigeuse et tout son corps était fin et allongé. Autour de lui, une étrange aura, une aura à la fois paisible et déterminé, l'aura de quelqu'un qui veut recommencer sa vie. Il portait un chandail noir qui contrastait avec sa peau blanche et une veille pair de jean délavée, souillé et trempé. Il portait sur son dos un sac usée d'un rouge néanmoins écarlate.
Hikaru se mit à le fixer avec de grands yeux, n'arrivant pas à détacher son regard de ce jeune homme à la fois terriblement beau et pitoyable, étrange contraste que la fillette n'arrivait pas à expliquer. Pendant que le fameux garçon se mit à se faufiler tel une ombre entre les passagers, sous leurs regards admiratifs, Hikaru se mit à tirer brusquement sur la manche de sa mère, un exploit qui réussit à tirer Chidori des lignes de son roman.
-Qu'est-ce qu'il y a encore, Hikaru? soupira t-elle.
-Maman…chuchota la fillette,…est-ce que c'est un ange?
Yuki Sôma soupira et passa une main dans ses cheveux gris, en entrant dans l'autobus. Le véhicule était bondé et étouffant, mais l'atmosphère lui semblait aussi glaciale et humide qu'au dehors. Il serrait les dents pour ne pas se mettre à grelotter de froid. Son passé lui avait appris bien des choses, la première et la plus importante étant de ne démontrer aucune faiblesse, ou bien le moins possible. Parce que sinon, les choses ne faisait qu'empirer.
Mais quel imbécile il faisait! Il aurait au moins pu prendre un parapluie, avant de partir en courant de la maison des Sôma. Il savait que le temps serait loin d'être tout beau tout chaud. Mais, même s'il n'était pas du genre à foncé tête baissé, le jeune homme de 17 ans n'avait pu s'empêcher de partir en trombe, dès 5 heures du matin, sans une lettre, sans une trace même de son existence. Dans son sac, quelques vêtements, quelques livres, un peu de nourriture pour tenir deux semaines, un paquet de cartes, quelques vieux CD, un carnet, une peu de crasse et 59 000 yens. Il s'était au moins déniché un logement avant de partir, à 40 000 yens par mois. Il avait tout réglé par téléphone, en 20 minutes, sans prendre la peine de visiter son futur chez-lui. Il lui restait donc 19 000 yens pour ses dépenses personnelles. Il en avait à peine assez pour s'acheter un frigo et une petite commode. Et il fallait tout de même qu'il se nourrisse. On dirait qu'il allait faire du camping dans l'appartement pendant un bout de temps. Il était vraiment urgent qu'il se déniche un boulot.
Mais pour l'instant, il se fichait éperdument des évidentes difficultés à venir. Tout ce qui comptait, c'était qu'il était libre. Libre. Ce mot résonnait dans sa tête, un mot lointain, comme s'il n'arrivait pas à y croire encore.
Il avait toujours été Yuki Soma, le robot, le jeune garçon « parfait », mais pourri, pourri de l'intérieur. Son âme était sale et lourde et le poids de sa vie ratée, de l'enfer qu'il avait eu à supporté toute son enfance pesait sur ses épaules.
Mais à présent, il lui fallait oublier et refaire sa vie. La simple idée de pouvoir devenir quelqu'un d'autre faisait naître un mélange d'extase et d'angoisse profonde dans le creux de son estomac.
Il était libre. Toute sa vie n'avait été qu'une quête de liberté. La quête d'une vie sans cette famille qui le torturait depuis qu'il était né, sans cette impression d'être toujours prisonnier de son propre corps, sans ces cauchemars qui l'assaillait tous les soirs, sans cette malédiction…Non, bien sûr, la malédiction était toujours là, mais au moins, sa chère famille n'était pas là pour le lui rappeler.
La malédiction. Cette stupide malédiction, qui l'empêchait d'aimer, qui l'empêchait de prendre une femme dans ses bras…parce qu'il se changeait en gros rat puant dès que quelqu'un de sexe féminin pénétrait dans son espace vital. En y prenant du recul, Yuki trouvait cela tellement ridicule qu'il ne savait pas s'il avait envie d'en rire ou d'en pleurer.
En fait, il n'y avait que Thoru qui aurait pu le retenir, l'empêcher de partir ainsi à l'aventure, pour une vie bien plus différente. Thoru était la seule fille qu'il avait jamais aimé. Elle était si pure, et si innocente…tellement le contraire de lui. Mais elle avait choisi Kyo. Kyo, qui avait fini par le battre, et qui avait pris sa place en tant que membre des Douze. Pour une fois, Yuki ressentait presque de la reconnaissance envers son cousin, pour l'avoir débarrasser d'un certain poids, qui pétrissait ses épaules. N'empêche que Thoru avait choisi Kyo.
Elle avait sûrement pleuré, lorsqu'elle avait compris que Yuki était parti. Mais le jeune garçon songea, avec un sourire, que Thoru pleurait presque lorsqu'elle tuait une mouche. Alors, il ne pouvait se permettre de se vanter…
Et puis de toute façon, elle serait bien plus heureuse avec Kyo, son cousin et rival même si à cette pensée, le cœur de Yuki se serrait jusqu'à en devenir douloureux. Son cousin avait beau être une tête brûlé, doublé d'un imbécile et d'un insouciant, c'était un type bien.
Yuki se fraya un chemin entre les voyageurs, tout son corps à l'affût. Il avait appris à se promener ainsi, évitant toutes jeunes filles ou femmes qui aurait pu lui tomber dessus à l'improviste, à cause de la malédiction. Ses réflexes étaient donc particulièrement développés, et ses nombreux combats avec Kyo n'y étaient pas pour rien non plus.
Le jeune garçon constata soudainement qu'il n'y avait aucune place de libre dans le véhicule. Il aperçut alors un endroit plutôt dégagé, ou il put donc s'accrocher à une barre. Il ferma les yeux, épuisé. Il n'avait presque pas dormi cette nuit. Il rêvait d'un lit chaud et rassurant, mais il savait qu'il n'y aurait qu'un vieux sofa miteux et de vielles couvertures de laines qui l'abriterait ce soir.
Il s'était mis à songé à la possibilité de changer de nom de famille, lorsque quelqu'un se mit à tirer brusquement sur une manche de son chandail. Surpris, il tourna son regard vers le banc à ses côtés.
-Hep, monsieur l'ange! Comment tu t'appelle?
Sur le banc, il y avait une toute petite fille, qui le regardait avec de grands yeux. Elle portait un imperméable rouge et avait un sourire immense sur ses lèvres fines. À côté d'elle, une femme au long cheveux noirs et soyeux, probablement la mère de la gamine le regardait avec étonnement, puis se mit à envelopper sa fille d'un regard protecteur, prête à sauter sur n'importe quel pédophile qui osera s'approcher d'elle.
Yuki ne put s'empêcher de rire. Comme il était loin de chez lui, il pouvait au moins se permettre de socialiser un peu. Il devait devenir quelqu'un d'autre. Arracher sa vielle peau et s'en trouver une nouvelle. Mais son rire était légèrement rouillé. Il n'avait pas ri ou sourit depuis longtemps, sauf peut-être pour faire plaisir à Thoru…
-Je ne suis pas un ange, Hikaru-chan! lança t-il.
Le fillette prit un air sérieux et se mit à chuchoter.
-Alors…comment tu connais mon nom, si tu n'en ai pas un?
Yuki agrandit doucement son sourire, mi-fatigué, mi-amusé.
-Parce qu'il est écrit sur la manche de ton imperméable.
La fillette jeta un coup d'œil sur sa manche gauche. En effet, son nom était écrit en crayon noir indélébile «Hikaru Abugawa».
-Ah, ben oui! sourit-elle. Tu m'as eu. Mais tu dois me donner ton nom quand même, monsieur l'ange.
Le monsieur devant Hikaru tournait toujours machinalement les pages de son journal, un air d'ennui profond sur son visage et la fillette au cheveux châtains derrière elle tapotait toujours sur les boutons de son téléphone portable.
-Alors, plaisanta Yuki avec un clin d'œil, je m'appelle Yuki Sôma, mais ça doit rester entre nous!
Soudain, la fillette au long cheveux châtains jeta un coup d'œil discret sur le jeune garçon, puis replongea dans l'exploration des boutons de son cellulaire.
-Hikaru, murmura Chidori aux côté d'Hikaru, cesse d'embêter ce garçon.
La jeune femme semblait avoir émis son jugement sur Yuki. Un jeune homme inoffensif, mais néanmoins mystérieux. Au moins, il n'avait rien d'un agresseur. En revanche sa fille avait une langue bien pendue: il fallait lui apprendre à ne pas se mettre à parler à n'importe qui dans la rue.
Mais le physique du jeune homme était particulièrement étonnant. Il ferait un malheur en tant que star de la J-Pop.
Elle se tourna vers Yuki.
-Excusez ma fille, elle est plutôt du genre indiscrète.
-Pas de quoi. J'étais comme elle à son âge, mentit-il.
En fait, il aurait aimé être comme elle. Il aurait bien aimé avoir une enfance.
Les minutes passèrent, lentes et ennuyantes. Yuki ne prenait habituellement jamais de transport en commun, mais cela faisait environ le cinquième trajet qu'il endurait depuis ce matin. C'était très difficile pour ses nerfs, qui semblaient sur le point de craquer à tous bouts de champs. Mais il se disait que la liberté valait bien son pesant de stress.
De temps en temps, la petite Hikaru tirait à nouveau sur sa manche pour lui poser des questions, sous le regards exaspéré et protecteur de sa mère. Yuki ne pouvait s'empêcher de sourire. Il ne se savait pas doué avec les enfants, cela l'amusait.
La gamine l'occupait trop qu'il remarque que la jeune fille derrière elle ne cessait de jeter des coups d'œil discrets sur lui…
Après quinze minutes d'attente, l'autobus atteint enfin la rue qui abritait son futur appartement. La pluie battait toujours dehors. Yuki soupira et s'apprêtait à s'élancer dans le flot de passagers, lorsque Hikaru lui saisit à nouveau la manche.
-Tu t'en va? Alors, fait attention à cette rue. Elle est très laide et toute sale!
-Hikaru, soupira Chidori, on ne dit pas ça…
Yuki haussa les épaules
-Ne t'en fais pas petite, termina t-il. Ce sera toujours mieux que mon ancien chez moi.
Il fit une courbette à l'intention de Chidori, et fit un dernier sourire à Hikaru, avant de s'élança vers la sortie.
-Maman, je crois qu'on aura de la chance, maintenant, murmura la fillette. Les anges, ça portent bonheur.
Chidori sourit, et ébouriffa avec affection les cheveux courts de son enfant. Peut-être avait-elle raison…
La fillette aux longs cheveux châtains et binoclarde, qui était assise derrière Hikaru, se leva également, en rangeant son cellulaire et sortant un parapluie noir de jais, se précipitant à la suite de Yuki.
La fillette blonde à lunettes, prénommé, Molly suivait le jeune Soma depuis qu'il était sortie de l'autobus, dissimulée sous son immense parapluie noir deux fois trop grand pour elle. Le jeune homme se retourna quatre ou cinq fois, se rendant bien compte qu'il était suivit, mais en ces temps là, elle faisait toujours semblant de regarder ailleurs, se fondant dans les quelques passant qui marchait nonchalamment sur la vielle rue, protégé par des parapluies au motifs diverses. Après tout, elle n'avait l'air que d'une fillette de 10 ans, innocente et sans arrière pensée.
Lorsque Yuki s'arrêta enfin devant un immeuble sale et ancien, recouvert de graffitis, Molly courut se cacher dans une ruelle sombre. Derrière ses épaisses lunettes brillait deux yeux verts émeraude, ressemblant à ceux d'un chat. Elle jeta un dernier regard vers le jeune homme avant qu'il pénètre dans la bâtisse, puis elle sortit son téléphone portable et se mit à taper à toute vitesse. Elle porta ensuite le cellulaire à son oreille.
-Molly, c'est toi? demanda un voix masculine au bout du fil.
-Qui d'autre veux tu que ça soit? grogna la jeune fille d'une voix beaucoup plus mature que le laissais entendre son physique, tenté d'un léger accent américain.
-Bon hé bien, on dirait que ce n'est pas un canular…il n'y a que toi pour être aussi ronchonne.
-La ferme, Subaru!
Le Subaru en question soupira avant de demander avec intérêt :
-Alors…tu l'a déjà trouvé?
-Ouais. Il était dans le même bus que moi, la chance! Il habite dans un vieil immeuble, pas très loin du QG. Ça va être facile de le mettre avec nous. Jimmy va être heureux omme un pape.
-Ok. Ça nous en fait encore un autre sur la liste. C'est incroyable, je crois que c'est le cinquième cette semaine.
-Et pour le p'tit Ériol?
-Grande maison moderne, pas loin d'ici non plus.
-Bon, c'est parfait. On va se marrer. Et maintenant, tu va me foutre la paix, tu veux?
-Moi aussi, je t'aime, Mollynounette, blagua Subaru avant de raccrocher.
-GRRRRRRRR, mais tu va la fermer imbécile! hurla l'étrange fillette avant de refermer son téléphone avec rage et de s'élancer dans la rue, sous la pluie battante.
Yuki poussa la porte de son nouvel appartement en compagnie du concierge, un homme dans la cinquantaine au crâne chauve et au dents mal alignés.
-Alors, voilà mon p'tit gars, ton chez-toi, lança l'homme avec un sourire décharné.
-Hé bien…merci…, lança Yuki, son regard parcourant l'appartement
les yeux agrandis pas la surprise.
La première chose qui frappait, c'était l'odeur. Une odeur de poussière et de moisi, agrémenté d'une douce essence de cigarette, qui donnait immédiatement à Yuki et à son ogarnisme fragile l'envie de tousser jusqu'à s'en retourner les poumons.
Il n'y avait que trois pièce: le salon ,une salle de bain, et une chambre. Une minuscule cuisine était improvisé dans le coin gauche du salon, avec un vieux et horrible comptoir vert menthe. Les murs était recouvert d'une tapisserie rouge vin qui avait connu des jours meilleurs et ses uniques meubles était un vieux canapé bleu poudre, une minuscule commode où trônait un téléphone poussiéreux, quelques armoires et une vielle télévision en noir et blanc.
«Hé bien…songea Yuki. Au moins, disons que ça ne pourrait pas tellement être pire...»
-Et, en passant, lança le concierge, les gamins d'en bas sont des fêtards, alors si t'entend de la musique en plein milieu de la nuit, soit pas surpris.
-Aaaah…super! marmonna le jeune garçon d'un ton ironique.
-Et si tu veux appeler le proprio, c'est ce numéro, lui lança l'homme en lui donnant un bout de papier. Le téléphone est fonctionnel. Alors, je crois que t'a plus besoin de moi là?
-Je crois ça ira monsieur, je devrais…survivre…
-Tant mieux, lança le concierge d'une voix ennuyé, la voix de quelqu'un qui aimerait être n'importe où ailleurs que dans ce vieil immeuble puant.
Et n'empêche que Yuki compatissait profondément.
L'homme claqua la porte, laissant Yuki seul avec lui même. L'adolescent poussa un soupir en jetant son sac sur l'horrible canapé. Il détestait cet appartement. Et il s'en fichait pas mal qu'il soit sale et puant. Il savait que cet appartement représentait sa solitude, son malheur. Il avait beau s'être sauvé de son ancienne vie, s'il restait seul, il savait que ses souvenirs le hanterait, sans lui laissé une seconde de répit.
Il se jeta sur le sofa et ferma les yeux. Il voulait dormir. Dormir pour le restant de sa vie. Ne plus avoir à se réveiller et à affronter la réalité. Dormir…jusqu'à ce qu'il oublie…
Qu'il oublie…
Yuki se retrouva dans une clairière. Le soleil se couchait doucement devant lui, remplissant l'horizon de superbe couleur orangée et rose, flottant délicatement dans le crépuscule de cette tranquille journée d'été. La brise était délicieusement chaude et Yuki senti un immense bien-être envahir son âme. Tout était si beau…si calme…si merveilleux…pourquoi s'en faire?
C'est alors qu'à quelques mètres devant lui, il aperçut un cerisier, dont les magnifiques fleurs ondulait sous le caprices du vent. Et au pied de l'arbre, il vit une petite silhouette, une silhouette d'enfant, qui se tenait debout, dos à lui, regardant le crépuscule. Yuki sentit soudain une étrange angoisse grandir dans son ventre. Il voulu faire demi-tour, mais il était bizarrement attiré par l'arbre et la silhouette, comme les métaux par l'aimant. Il ne pouvait s'empêcher d'avancer, et plus il avançait, plus il avait peur. Son corps ne lui appartenait plus. Il était prisonnier.
Il finit par arriver près de l'enfant, qui ne se retourna pas. Mais il l'entendit murmurer d'une voix tranquille, qui se répercuta en écho infini autour de lui.
-Bonjour Yuki.
L'enfant portait un kimono noir et ample et ne bougeait pas d'un pouce. Yuki sentit ses genoux se poser sur le sol. Il était dans une sorte d'état second, plus rien n'avait de sens dans son esprit.
-Est-ce que tu te souviens de moi? demanda le gamin, avec le même murmure.
Son kimono et ses cheveux gris frissonnaient sous la brise d'été, comme les fleurs du cerisier. Doucement, très doucement, il tourna sa tête vers le regard de Yuki, qui sentait des larmes perlées sur son visage. Le petit garçon plongea ses yeux d'un gris clair et triste dans le regard du jeune adolescent.
L'enfant au kimono, c'était lui, à l'âge de 6 ans.
Le gamin s'avança, ses pas résonnant en écho dans l'étrange paysage, et il prit le visage de Yuki dans ses mains, puis se mit à sourire.
-C'es toi qui m'as tué, Yuki. Tu te souviens?
Les mains de l'enfant se resserrèrent, pinçant les joues de l'adolescent, ses doigts s'enfonçant dans sa peau. Le poigne du gamin ne provoquèrent aucune douleur, mais plutôt un désagréable picotement dans le visage de Yuki, ainsi qu'un horrible mal de tête. Il essaya de toute ses forces de fermer ses yeux, mais il n'y avait rien à faire.
Le regard de l'enfant changea, passant de la tristesse à la colère, la rage déformant ses traits fins, sa bouche se tordait en une grimace de fureur. Le cerisier tomba en poussière et tout devint rouge. Rouge sang. Ce rouge qui vous paralyse, qui vous transperce la tête, qui vous donne envie de vomir, de pleurer, de hurler.
-Yuki! lança l'enfant d'une voix grave, déformé terrifiante. Je suis mort à cause de toi! À cause de toi, j'ai perdu tous ceux que j'aimais! Personne ne m'aime!
Personne ne m'aime, Yuki! C'est pour ça qu'Akito me bats! C'EST POUR ÇA QUE PERSONNE N'EST VENU M'AIDER! JAMAIS!
Je suis un déchet, et c'est à cause de toi! Tu as gâché ma vie! Tu as gâché TA vie, Yuki! Si seulement tu n'avais pas été aussi lâche…Si seulement on avais pas tout foutu en l'air…
Soudain, le visage du gamin se radoucit. L'enfer rouge sang qui entourait Yuki et son alter-ego se dissipa doucement pour être remplacé par un noir profond et lourd. Yuki sentit sa crainte s'évaporé petit à petit. Un sourire apparut sur les lèvres de l'enfant au kimono noir, ses mains entourant toujours le visage de l'adolescent redevenues douces et légères.
-…Peut-être qu'on s'en serait mieux sorti, toi et moi? susurra le gamin, en s'évaporant lentement, dans une pluie de fleur de cerisiers.
Yuki réussi enfin à fermer les yeux. Sa tête le faisait souffrir. Une douleur aiguë explosait dans tout son corps.
C'est vrai. C'était de sa faute. Entièrement de sa…
DRRRRRRRRRRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINGGGGGGGGGGGGGGGG!
Yuki se leva brusquement, le cœur battant. Il était pourtant encore semi endormi, son esprit légèrement embrumé. Quel rêve horrible...Il bailla et se frotta les yeux, se questionnant sur la durée de son séjour dans les bras de Morphé.
DRRRRRRRRRRIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIIINGGGGGGGGGGGGGGGG!
Il se retourna vers le téléphone, qui sonnait avec un bruit d'enfer. Qui pouvait bien l'appeler...? Yuki, s'il avait été plus en forme, aurait normalement ignoré cet appel et se serait douté que ce coup de téléphone n'était pas normal, puisque personne n'était censé connaître son numéro. Mais lorsque Yuki était fatigué, il était dans une sorte d'état second, et faisait régulièrement des choses sans s'en rendre compte.
Alors, il saisit le combiné et marmonna d'une voix fatiguée:
-Allô. Qui est à l'appareil?
-Salut Yuki. Je te réveille, on dirait.
Yuki fronça les sourcils. Cette voix…une étrange voix androgyne. Impossible de dire si c'était un homme ou une femme. Yuki ne l'avait jamais entendu auparavant.
-Qui êtes vous? demanda le jeune adolescent, pour ensuite bailler à s'en décrocher la mâchoire.
-C'est dur…d'être seul Yuki? N'est-ce pas?
Le jeune homme soupira, encore trop endormi pour se rendre compte que l'individu connaissaient son prénom. C'était probablement une pub pour ces sociétés d'aide pour les jeunes…
-Écouter, si vous êtes un type de « C'est quoi ton problème », je suis pas intéressé et j'ai pas d'argent…
Il s'apprêtait à raccrocher, lorsque la voix murmura d'un ton doucereux :
-Izumi…tu te souviens d'elle, Yuki?
Yuki sentit son cœur faire un bond de travers. Il était à présent parfaitement réveillé.
Izumi…il n'avait plus pensé à elle depuis si longtemps…Il avait essayé de l'oublier...Et voilà que cet étrange voix faisait remonter en lui un flot d'horrible souvenir.
-Mais, comment…? Qui êtes vous?
On raccrocha. La tonalité se fit entendre dans le téléphone, laissant un Yuki bouche-bée, les yeux grands ouverts.
Angoissé, Yuki raccrocha à son tour. Apparemment, ce type n'étais pas net. Et comment il savait pour Izumi? Et pour son nom? Comment avait-il pu savoir?
Le jeune homme s'étendit sur le sofa, se mordant la lèvre. Qu'est-ce que c'était que cette histoire…?
Izumi…
Le prenant dans ses bras…Il n'a rien pu faire…Il n'a pas pu réagir…
La transformation…Il n'a rien pu faire…il se métamorphosait…
Izumi…qui criait…elle était si petite…elle devenait folle…
Akito…qui le frappait…
Yuki secoua brusquement la tête. Il se leva d'un bond, ouvrit la porte de son nouvel appartement, et sortit en trombe, en la claquant avec force. Il avait un besoin urgent de prendre l'air.
Il quitta l'immeuble et sortit dans la rue. Il était tellement secoué qu'il avait complètement oublié qu'il pleuvait à boire debout. À peine avait t'il posé un pied sur le trottoir qu'il fut violemment arrosé par une voiture qui passait dans une gigantesque flaque d'eau.
Yuki, qui venait à peine de se remettre de sa journée quasi complète passé sous la pluie, poussa un gémissement de désespoir et poussa un juron. Il en connaissait beaucoup qui aurait payé pour voir le célèbre, discret, ténébreux et très classe Yuki Soma, dans un horrible appartement, avec des fringues usées, sans argent, empestant, trempé jusqu'aux os et à deux doigts de devenir complètement dingue et de fondre en larme.
Il tourna les talons, grelottant et éternuant, se dirigeant à pas lent vers son nouveau chez lui. Sa nouvelle vie commençait terriblement mal. Lui qui avait tant espéré avoir de la chance, une fois parti. Juste un soupçon, une once de chance. Mais non.
Il ouvrit la porte de l'immeuble, et grimpa lentement les marches menant à son escalier, dégoulinant.
D'abord, ce rêve horrible, puis ce coup de téléphone, qui était probablement uniquement un produit de son esprit. Il n'arrivait pas à expliquer ses changements en lui, il se sentait si…vulnérable, si impuissant.
Il était partit de chez lui pour oublier un peu son ancienne vie. Alors pourquoi ses vieux souvenirs s'entêtaient à le suivre partout où il allait?
Nuaka ferma les yeux et sourit doucement, le téléphone toujours posé près de ses jambes repliées sous son corps, s'étira et poussa un profond soupir, qui s'évapora lentement dans l'atmosphère parfumé d'odeurs amères de la salle au couleurs sombres où Nuaka reposait, assis en tailleur, un sourire flottant toujours sur son visage.
-Monsieur Yuki Sôma…murmura sa voix androgyne…on dirait que c'est ici que tout commence…
Dehors, dans le soir parsemé de nuages, on entendait encore la pluie tomber doucement sur les rues de Tokyo.
Fin du chapitre 2