Petit mot de l'auteure : écrit pour un atelier drabble de chez Nanthana, dix minutes et trois mots (ici Trois, Petit, Mot)


Quand Wylan était rentré au Crows Club le nez en sang, les deux yeux au beurre noir, la bouche enflée et une bonne poignée de côtes de cassées, il avait cru que Kaz allait se faire un plaisir de lui démonter celles qu'il avait encore intactes.

Le chef des corbeaux n'était en effet pas connu pour sa grande patience ; ni pour son indulgence, d'ailleurs. Il ne faisait preuve d'aucune de ces qualités quand un de ses subordonnés revenait dans un tel état. Il fallait dire que dans ces cas là, le subordonné en question avait soit trop bu – ce qui mettait en péril l'organisation – soit qu'il avait échoué dans sa mission.

Wylan n'étant ni grand buveur et ne travaillant pas ce soir-là, il supposa que ce fut pour cette raison que Kaz daigna l'écouter avant de s'énerver. Ça, et absolument pas parce qu'ils étaient amis – comme le bâtard du Barrel le répétait sans cesse, il n'avait pas d'amis.

Et, s'il sortit de ses gonds en apprenant pourquoi Wylan était si mal en point, ce n'était encore une fois absolument pas parce qu'ils étaient amis.

Le roux avait rarement vu Kaz être aussi en colère. Bien qu'il sache que sa fureur n'était pas dirigée contre lui, il en vint à avoir peur du brun, pour la première fois de sa vie.

- Laisse couler, murmura-t-il donc pour essayer de le calmer.

Evidemment, cela eut l'effet inverse.

- Que je laisse couler ? Trois monstres t'ont traités de sale PD, tabassés et laissés presque mort sur le bas-côté et tu veux que je « laisse couler » ? rugit-il. Si Buck ne t'avais pas retrouvé... un petit peu et tu n'étais plus là pour en parler !

- Je... je ne veux pas en faire toute une histoire.

Sa voix était si tremblante qu'il vit Kaz comprendre à quel point il était secoué. Le brun s'approcha donc de lui, en faisant des efforts manifestes pour tâcher de contrôler sa fureur.

- Je respecterai ta volonté. Mais tu n'as qu'un mot à dire, et je traquerai ces chiens jusqu'en Enfer pour leur arracher leurs yeux et leur faire manger.

À son ton, Wylan n'avait aucun doute que Kaz ne parlait pas métaphoriquement parlant. Paradoxalement, cette image lui procura du réconfort. Il n'appréciait certes pas les méthodes du brun, mais... il aimait cette idée qu'il était prêt à se battre pour lui. Et ceci, plus que tout le sang qu'il pourrait bien faire couler, suffit à lui rendre un semblant de sourire.