Chapitre 10 : Où Arcturus Black est vraiment cinglé

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Singulier destin que celui de Melania Black.

Saviez-vous qu'elle passa la moitié de la nuit à rire avec Arcturus ?

Qu'elle les abreuva de plaisir ?

Qu'elle se sentit enfin sereine et entière ?

Seulement lorsqu'elle s'échoua dans les bras de son époux ?

Remarquez, je n'ai pas besoin d'en dire plus pour que vous compreniez l'émotion de Melania et d'Arcturus à cet instant.

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Melania, rompue par l'effort et le plaisir, finit par somnoler dans les bras d'Arcturus Black, son époux. Il semblait enfin entièrement serein et faisait descendre et remonter sa main chaude le long de son dos dans une caresse douce et éternelle. Il avait une main tendre et lisse d'homme de bureau – ce qu'il était – et c'était absolument délicieux de recevoir autant de douceur de la part de son homme.

« Je t'aime, finit-il par souffler contre les boucles noires qui reposaient sur son torse. Je t'aime tant. »

Ceci réveilla Melania qui se mit à sourire comme une idiote. Elle savoura le baiser appuyé sur sa tête et sentit même deux larmes de bonheur glisser le long de ses joues.

« Moi aussi, je t'aime », souffla-t-elle en roulant sur lui.

Il la regarda avec panique un instant avant de lui offrir une fois de plus son sourire tremblant et instable.

« Tu ne dors pas, constata-t-il en posant craintivement ses mains dans le bas de son dos.

— Pas quand tu me dis que tu m'aimes », souffla-t-elle.

Sa voix était plus éblouie que taquine. Elle avait pensé qu'il ne lui dirait jamais ces mots-là, par pudeur, convenance ou autre. Elle avait pensé devoir se contenter de son regard protecteur et amoureux pour le reste de leur vie. Et elle s'en serait contentée l'instant d'avant. À présent, elle ne pourrait plus jamais s'en satisfaire sans qu'il ne soit accompagné de ces trois mots.

Le regard gris d'eau douce d'Arcturus était rougi par la fatigue, et ses yeux étaient soulignés de cernes mauves. Pourtant, il ne semblait pas le moins du monde désireux de dormir. Ses lèvres étaient rouges de tous les baisers qu'ils avaient échangés et ses cheveux noirs et ondulés, qui lui arrivaient au bas de sa mâchoire, n'avaient plus aucune tenue.

« Je t'ai réveillée ? demanda-t-il et elle sentit ses mains trembler sur sa peau.

— Un peu, avoua-t-elle pour le taquiner. Mais tu peux me réveiller autant que tu veux pour me dire ces mots », ajouta-t-elle.

Elle regarda son sourire tremblant avec envie et bonheur. Il était tendre, doux et paisible, et elle était paisible grâce à lui. Elle remonta un peu sur lui pour coller sa bouche à la sienne. Ils restèrent lèvres contre lèvres plusieurs secondes avant qu'Arcturus n'ose initier un frémissement de lèvres pour qu'ils continuent à se découvrir. Son ventre se transforma en essaim de papillons et elle frissonna de plaisir.

Elle se recula ensuite, croisa les mains sur son torse et posa sa joue gauche dessus. Ils se fixèrent encore, silencieusement et calmement.

« Que fait-on demain ? demanda-t-elle en se blottissant un peu mieux sur lui.

— Ce que tu veux », répondit-il aussitôt en faisant remonter ses mains pour les enfouir dans ses cheveux bruns.

Elle frémit, soupira de bienêtre, tourna un peu la tête pour que ses doigts passent plus près de son oreille puis se réinstalla bien contre lui.

« Tu ressembles à un Fléreur quand tu fais cela », commenta-t-il avec amusement.

Elle imita le ronronnement du chat avant de rire en même temps que lui. Lorsqu'il riait, son sourire restait enfin en place sur son visage plus qu'un quart de seconde et ses yeux gris prenaient des reflets de neige, brillants et bleutés.

« Tu n'as pas d'obligations demain ? souffla-t-elle en calant son menton sur ses doigts entrecroisés pour ne pas l'enfoncer dans le torse d'Arcturus.

— Je m'en suis déchargé pour être avec toi », lui assura-t-il.

Il remonta une fois de plus ses mains dans les boucles brunes de Melania, et elle fit à nouveau le Fléreur.

« Donc nous pouvons vraiment faire ce que nous voulons ? s'assura-t-elle en s'imaginant ne pas quitter leur chambre de la journée.

— C'est cela, ce que nous voulons, répéta-t-il, son sourire tremblant et instable s'étalant spasmodiquement sur sa bouche.

— Comme… rester dans notre chambre ? » proposa-t-elle en mordant ses lèvres avec envie.

Jamais un homme ne lui avait laissé autant de liberté et de prises de décision. Jamais elle n'avait eu si envie d'un homme.

« Le petit-déjeuner est à huit heures, le dîner à midi, le souper à vingt heures, répondit-il en fronçant par intermittence les sourcils. Mais je… je pense qu'on ne nous dira rien pour cette fois, accepta-t-il en glissant à nouveau ses mains dans ses cheveux. Nous sommes de jeunes mariés, non ?

— Nous sommes mariés », confirma Melania en sentant un feu de joie crépiter dans son ventre.

Elle reposa sa joue sur ses mains croisées et écouta comme une berceuse le cœur d'Arcturus battre lentement et profondément.

« Tu me caresserais encore le dos ? » demanda-t-elle en fermant les yeux.

À peine avait-elle fini sa phrase qu'elle sentit les mains d'Arcturus sur son dos se perdre en de longues caresses.

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Elle dût s'endormir puisqu'elle se réveilla en sursaut en entendant des bruits de sortilèges s'abattre contre les murs. Elle papillonna des yeux et s'agita sous les draps à la recherche de son mari. Elle ne le trouva pas. Intriguée, elle se redressa sur le lit, les yeux bien ouverts, pour voir Arcturus en train de pousser la commode devant l'entrée. Il avait seulement enfilé une robe de chambre d'un vert bouteille aux reflets noirs et s'acharnait à bloquer la porte.

« Arcturus ? » demanda-t-elle avec perplexité.

Un moment, elle pensa qu'elle faisait un rêve. Puis comme elle y songea, elle dut en conclure que ce n'était pas cela. Il tourna aussitôt la tête vers elle, et se précipita sur leur lit. Il l'y repoussa presque et remonta les draps et le duvet sur elle. Ses yeux écarquillés de panique roulèrent dans leurs orbites lorsqu'il saisit son visage en coupe.

« Tout va bien, Melania, tout va bien, je vais te protéger, ils ne te feront rien, Melania », lui assura-t-il.

Il lui embrassa le front, s'éloigna d'elle pour retourner à la porte encombrée de la commode et des deux fauteuils de la chambre.

« Arcturus, que se passe-t-il ? » demanda-t-elle en se redressant à nouveau.

Il revint aussitôt remettre les draps et le duvet sur elle avec une force contre laquelle elle ne put lutter et qui l'affola assez.

« Ils… Je sais qu'ils te veulent du mal, mais je te protège, tout va bien, je te le promets, dit-il avec une panique visible en tremblant de partout. Ne t'inquiète pas, je suis en train de renforcer les sortilèges, personne ne peut entrer dans notre chambre, personne ne viendra jamais t'ennuyer dans notre chambre. Ne t'inquiète pas, Melania, ils te veulent du mal mais…

— Mais qui me veut du mal ? » ne trouva-t-elle qu'à bafouiller.

Elle ne voyait presque plus la couleur des yeux d'Arcturus tant il clignait rapidement des paupières. Ses cheveux tombaient lourdement de chaque côté de ses tempes et ses lèvres s'agitaient pour former des mots silencieux.

« Tous ces Sangs-de-Bourbe, tous ces Moldus, tous ! Ils te veulent tous du mal ! J'ai bien vu aussi comment ils te regardaient tous ce soir ! Pollux… Pollux va te faire du mal, il ne faut pas croire Pollux. Pollux voulait te garder pour lui, c'est pour ça qu'il m'a dit que je te ferais mal si je…

— Arcturus, personne ne me veut du mal, c'est…

— Si ! s'exclama-t-il en se jetant sur elle comme pour faire barrage de son corps contre un quelconque sortilège. Ils te veulent tous du mal ! J'ai vu comment mon Grand-père te regardait ! S'il recommence, je le tue, je le…

— Arcturus, tout va bien voyons, c'était notre mariage, c'est normal que… »

Elle ne parvint plus à respirer lorsqu'Arcturus s'appuya trop lourdement sur son thorax et posa maladroitement son avant-bras sur son cou. Elle se débattit furieusement, lui donna sûrement un coup quelque part. Il se recula aussitôt et resta à quatre pattes au-dessus d'elle. Elle ne distinguait presque plus les traits de son visage dans la semi-pénombre.

« Tout va bien, je te protège, personne ne te fera du mal, personne…

— Mais enfin, dis-moi ce qu'il se passe ! » se récria-t-elle en le repoussant inutilement.

Inutilement, puisqu'il ne bougea pas d'un pouce.

« Ils sont derrière la porte, ils veulent entrer, je les entends », martela-t-il.

Elle sursauta lorsque la baguette d'Arcturus crépita à son oreille et elle ne trouva rien d'autre qu'à se jeter à son cou pour l'embrasser et le calmer. Il résista plusieurs secondes et essaya de se dégager mais Melania resta accrochée à lui.

« Ils ont dû partir, je ne les entends pas », bafouilla-t-elle contre sa bouche lorsqu'il se redressa hors du lit.

Elle était toujours fermement attachée à lui, si bien qu'il l'avait mise debout en même temps que lui. Elle n'aurait jamais pensé qu'il avait autant de force. Elle avait eu beau se faire lourde pour le garder contre elle dans leur lit, il était debout devant le lit et elle à genoux dessus.

« Regulus te guette lui-aussi, Regulus est jaloux, il…

— Pourquoi ton frère serait jaloux ? s'étonna Melania.

— Tu es magnifique, ils sont tous jaloux, elles sont toutes jalouses, tu es mon épouse, l'héritière de la Maison des Black, tu…

— C'est toi l'Héritier, Arcturus, tu…

— Ils te veulent tous du mal, les hommes en veulent à ton corps, les femmes à ta beauté, les enfants à…

— Arcturus, personne ne me veut du…

— SI, ILS TE VEULENT DU MAL ! explosa-t-il en se dégageant brusquement d'elle pour jeter contre la porte un puissant sortilège qui fit trembler tous les murs de pierre de la maison. Ils te veulent tous du mal ! Je les entends, ils sont partout, ils attendent une seconde d'inattention de ma part pour te kidnapper et t'arracher à moi et…

— Arcturus ! » s'exclama-t-elle de plus en plus perturbée.

Mais il ne l'écoutait pas et lançait sortilège sur sortilège contre la porte.

Melania pensa d'abord à l'alcool, puis à un philtre hallucinogène quelconque pour expliquer l'état d'Arcturus. Pollux était un ami, il ne lui voulait pas de mal, c'était ridicule. Et puis même s'il était peu démonstratif, il éprouvait une sincère affection et un véritable respect pour Irma. Jamais il n'aurait eu des vues malhonnêtes sur elle. C'était stupide. Quant au vieux Phineas Black, c'était normal qu'il l'ait regardée, comme tous les autres invités. C'était leur mariage, elle avait été la mariée, bien sûr que tout le monde l'avait contemplée.

« Arcturus, tout va bien », ne trouva-t-elle qu'à bafouiller en se levant du lit pour venir nouer ses bras autour de lui.

Elle colla sa joue à son dos et tout son corps au sien. Il continua à agiter sa baguette et à faire trembler d'inquiétude toute leur chambre, mais au moins il ne tremblait plus lui-même.

« Ton frère…

— Tu me protèges de mon frère, tu sais me protéger de lui, dit-elle calmement en resserrant ses bras autour de lui.

— Ton frère te veut du mal, je vais le tuer, comme ça il ne pourra plus jamais lever la main sur toi, comme ça…

— Barnabas ne peut plus rien contre moi maintenant que j'habite avec toi, Arcturus. »

Et pendant ce qui lui parut des heures, elle le rassura encore et encore et encore. Elle le ramena dans leur lit, de plus en plus inquiète. Elle croisa enfin ses pupilles complètement dilatées lorsqu'il s'enfonça dans ses bras. C'était lui qui faisait le Fléreur, cette fois-ci.

Qui avait pu lui donner une potion pareille ? Barnabas aurait-il pu vouloir se venger ?

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Elle sursauta en entendant une main frapper vigoureusement à la porte. Arcturus se redressa d'un coup, baguette à la main, la respiration sifflante et prêt à hurler à nouveau. Melania se précipita :

« Oui ? demanda-t-elle en faisant signe à Arcturus de la laisser faire.

— Melania, tout va bien ? demanda la voix de Mrs Hesper Black.

— Oui, tout… tout va bien, bafouilla-t-elle.

— Vous êtes certaine ? Arcturus dort-il encore ?

— Tout va bien nous…

— Elle te veut du mal, elle te veut… recommença Arcturus.

— Arcturus, vous…

— Allez-vous…

— Tout va bien, le coupa Melania en venant poser ses mains sur ses joues. Chut, tout va bien, Arcturus, recouche-toi, je revi…

— Tu ne sors pas de la chambre, la coupa-t-il brusquement en la serrant contre lui.

— Arcturus, personne ne vous veut du mal. »

La voix de Mrs Hesper Black était lasse et étouffée, un peu dépassée aussi.

« Vous voulez du mal à Melania, mère, je le sais, je le vois ! s'écria-t-il en portant brusquement Melania dans leur lit. Reste-là, Melania, ne bouge pas, je vais la retenir et… »

Elle ne se retrouva qu'à couiner en sentant les mains douces et tendres d'Arcturus s'imprimer brusquement sur sa peau et autour de ses membres.

« Arcturus, il est dix heures, il n'y a plus personne dans la maison à part votre père, vos grands-parents et moi-même, leur apprit patiemment Mrs Hesper Black.

— Grand-père avait ce regard lubrique et déshonorant pour Melania hier soir, je l'ai vu, il va…

— Enfin, Arcturus, vous parlez de votre Grand-père qui a soixante-dix-sept ans !

— Grand-père regardait Melania avec…

— Arcturus, calmez-vous, vous allez effrayer Melania ! » s'exclama Mrs Hesper Black en appuyant sur la poignée de la porte.

Melania regarda la poignée en métal s'agiter sur la porte sans plus rien comprendre. Mrs Hesper Black ne semblait pas surprise de l'attitude et des propos d'Arcturus. Elle semblait plus agacée qu'autre chose.

« C'est vous qui l'effrayez ! Je vous préviens, j'ai ma baguette dans la main, si vous essayez d'ouvrir la porte, je n'hésiterai pas à lancer un Avada ! »

Melania sursauta et se recroquevilla dans un coin du lit un peu plus à mesure que les menaces d'Arcturus pleuvaient contre sa mère et que celle-ci ne semblait même pas en être surprise.

Et vous, êtes-vous surpris ? Je l'avais dit, pourtant, qu'Arcturus Black était cinglé. Vraiment cinglé.

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Prochain chapitre, on commence enfin la découverte du 12, Square Grimmaurd et de ses habitants avec Où Hesper Black avance ses pions...